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Critiques de David Vann (1617)
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L'obscure clarté de l'air

J'aime beaucoup les romans de David Vann, leur univers tourmenté, douloureux, parfois violent. Il s'en détache souvent une lumière souterraine, une voix, cette violence n'est jamais gratuite, elle offre des cheminements singuliers.

Tout d'abord, j'ai été surpris de découvrir ce nouveau registre dans lequel l'auteur faisait irruption. Mais au fond, pourquoi s'étonner de cela ? Bien sûr, un écrivain peut aussi s'autoriser à visiter d'autres territoires auxquels il nous a habitué. Mais ici, au final, et après avoir refermé la dernière page du livre, je me suis dit que ce récit restait fidèle quelque part à l'itinéraire torturé de David Vann.

Nous voici plongés de plein pied dans la mythologie grecque, qui met en scène le personnage principal de Médée, lors d'un épisode précis qui dépeint son combat et son désir de pouvoir, son désir de parvenir à ses fins au prix d'attenter à la vie de ses proches., à toutes les fins. Nous sommes ici dans le récit de Jason et les Argonautes, mais David Vann nous en propose une nouvelle lecture.

Peut-être que la mythologie antique nous est peu proche. Peut-être que nous y sommes désormais peu sensibles. Pourtant, elle est riche. On y trouve des reflets de nos vies...

Le personnage de Médée est fort. Je ne sais pas si tout le monde le connaît. L'évocation de ce nom évoque déjà l'image d'un personnage extraordinaire, même si on ne connaît pas précisément le détail de son histoire, du mythe qui va avec, Médée c'est loin d'être une femme tranquille, posée au coin d'une cheminée, tricotant, lisant disant des poèmes, Médée est une femme de pouvoir, mais bien plus encore, son nom inspire la violence, le combat, le sang, la cruauté... C'est une femme meurtrière...

David Vann a ce talent de nous décrire cette femme dans tous ces multiples aspects. Il pose une description solide d'un personnage féminin qui prend sa place dans un univers d'hommes. À ma connaissance, elle incarne dans la mythologie antique un des personnages féminins les plus forts.

Elle est trahie à maintes reprises et se relève, se venge. Oui, mais elle est entière, elle aime aussi entièrement. Elle est simplement irrévérencieuse, révoltée, insoumise, se situant au-dessus des hommes et des dieux. J'adore cette posture antique ! Bon, parfois, elle n'y met pas les formes, mais c'est une question d'époque...

J'ai aimé la force de la narration, cette puissance qu'a eu l'auteur de nous partager sa fascination pour ce personnage totalement ambigu.

Brusquement, David Vann en fait aussi un personnage attachant, n'effaçant pour autant rien de sa cruauté, mais disant aussi son humanité. C'est une relecture féministe du personnage.

Le récit est magnifique, très exigeant, nous emporte dans cette tragédie antique.

J'aime l'écriture de David Vann pour dire les méandres d'un chemin tortueux happé par le pouvoir. J'aime ce récit qui nous pose plein d'interrogations sur cette femme, Médée.
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Sukkwan Island

Dix ans que ce roman a été écrit, lu et critiqué, beaucoup d'encre a donc coulé pour en parler. Je le découvre pour ma part seulement maintenant et je suis conquise. Avec un style épuré et descriptif David Vann amène le lecteur à suivre la descente aux enfers d'un père et son fils de 13 ans. Jim décide de vendre son cabinet dentaire et sa maison pour partir vivre un an sur une île isolée d'Alaska en plein cœur de la nature. Son fils Roy accepte de l'accompagner dans cette aventure. Dés les premières pages on sait et on sent que rien ne pourra se passer normalement. Jim est inconsistant, irresponsable, égocentré et c'est Roy qui se retrouve finalement responsable de son père. Dans une nature hostile, le huis clos devient de plus en plus oppressant. On attend que le drame se produise car, aucun doute, on n'y échappera pas. Lorsqu'il arrive c'est le choc. Le cauchemar qui se poursuit nous conduit à la lisière de la folie.

Très belle découverte qui me donne très envie de lire d'autres ouvrages de cet auteur.
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Aquarium

Je lis parfois que David Vann, on adore ou on déteste. J'ai un avis bien plus nuancé, la preuve : je suis bien embêtée pour dire si j'ai aimé ou pas Aquarium. Disons que j'ai beaucoup apprécié certains passages et que d'autres m'ont mise mal à l'aise. Voilà, c'est finalement aussi simple que cela : une expérience contrastée et quelque peu douloureuse.

Ce roman est une plongée dans la vie d'une adolescente de douze ans, Caitlin, qui vit seule avec sa mère. Son quotidien morne et solitaire s'éclaire chaque fin d'après-midi lorsqu'elle se rend au grand aquarium de Seattle. Elle y admire toutes sortes de poissons dont elle connaît les particularités sur le bout des doigts et elle partage sa passion avec un vieil homme qui, comme elle, vient régulièrement coller son nez contre les parois vitrées. Ce qu'elle ignore, c'est que cette amitié pourrait bien mettre à mal l'équilibre familial.

Il y a de l'amour dans ce roman, mais il est souvent si maladroit qu'il s'exprime à travers une violence insoutenable. C'est le style David Vann, cela ne m'a donc pas surprise mais profondément dérangée. Les liens familiaux sont interrogés et disséqués, les relations mises à mal sous les yeux du lecteur. Sartre aurait pu écrire à ce sujet : « L'Enfer, c'est la famille. » De l'amour fusionnel à l'abandon, de la compréhension au rejet, il n'y a qu'un pas. C'est d'une grande intensité psychologique. Toutefois, il me semble que, contrairement aux autres romans de David Vann, il y a dans Aquarium une note d'espoir au milieu de toute cette noirceur : il apparaît dans les dernières lignes et il est surtout porté par le personnage de Caitlin, lumineuse, sensible et intelligente.

Je peine à retrouver l'émotion ressentie à la lecture de Sukkwan Island il y a quelques années, mais je poursuivrai tout de même avec l'auteur, il ne me reste plus que Goat Mountain à découvrir.


Lien : http://aperto.libro.over-blo..
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Sukkwan Island

Quel uppercut ! Quelle violence tant psychologique que physique ! Ames sensibles s'abstenir absolument.



Lecture réjouissante quant au style et à la maîtrise narrative mais lecture noire de chez noir pour le récit en lui-même. Jim et son fils Roy partent vivre seuls en mode survival sur une île déserte d'Alaska avec pour objectif de tenir un an. Les enjeux de ce projet sont assez flous ; pour Jim, "mauvais père", le besoin de marcher vers sa rédemption, de réparer ses torts ; pour Roy, treize ans, le besoin de ne pas laisser tomber son père "loser" même s'il est évident qu'il donnerait n'importe quoi pour ne pas se retrouver piégé dans ce qui va vite se transformer en cul-de-sac.



Vivre totalement isolés de la société dans une cabane sans eau ni électricité, ravitaillés tous les trois mois par un hydravion, songer sans relâche à sa survie : bois de chauffage, eau potable, réserve de nourriture, chasse, pêche, cueillette, le tout dans un milieu naturel sauvage clairement hostile, tout cela serait encore jouable si Jim n'avait pas apporté avec lui dans son paquetage ses fantômes, ses regrets et ses actes manqués... sans compter que la communication ne figure pas parmi ses qualités.



Le roman est court mais d'une intensité digne des meilleurs thrillers. La lecture est anxiogène et coiffe son lecteur au poteau plus d'une fois dans des retournements de situation qu'il n'a pas anticipés. Lecture dérangeante, lecture qui hante longtemps une fois le livre refermé. Roman glaçant.





Challenge ATOUT PRIX 2022

Challenge TOTEM

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Sukkwan Island

On était partis pour une histoire de Robinson Crusoé au monde de la neige et du froid, avec ce premier roman de David Vann traduit en français,

On termine dans un drame... qui n'est pas forcément celui qu'on pouvait imaginer…



Ce roman fut muri par l'auteur pendant dix ans, sous différentes versions, puis écrit en 17 jours (Le Monde). Puis, demeura impossible à publier pendant des années, avant de remporter le Prix Médicis en 2010.



Un homme et son fils de 13 ans s'enferment volontairement sur une île au large de l'Alaska pour un an, c'est le projet (du père).

Huis clos dans une nature sauvage qui peut être aussi belle qu'hostile.



Le livre se scinde en deux parties très distinctes dans leur style, et dans leur genre.

Entre les deux, une phrase-charnière, une seule : la dernière de la première partie.

Le drame nous percute alors de plein fouet.

Et retourne le roman.



La première partie est donc celle à laquelle je m'attendais : le récit des astuces et ruses -façon « Castor Junior »- des deux hommes pour se protéger des ours ou du froid par exemple, et pour profiter de la beauté et des ressources alimentaires de la nature. Pas toujours très au point, d'ailleurs.

Comme dans Komodo lu précédemment, Vann excelle dans la description de la Mère Nature qui est vue à travers le prisme des hommes à son contact (grandiose). Aussi bien la mer de Komodo que l'ile de Sukkwann.



La seconde partie est plus surprenante : on pourra trouver qu'il y a « surenchère » dans le drame et dans le sordide...

Mais il me semble qu'on la lit très différemment lorsqu'on sait que l'auteur s'est «plus qu'inspiré» de sa propre histoire, il l'a en fait réécrite : du coup, il s'agit là d'une oeuvre de transformation du réel...

Une oeuvre de « sublimation » en quelque sorte, donc, sûrement à la fois thérapeutique et en tout cas artistique...



Et l'on pourrait se pencher sur les interprétations à donner aux différents événements qui transforment successivement les personnages, psychologiquement et physiquement, en regard à ce qu'a vécu le jeune David Vann dans la réalité.



Impossible d'en dire plus sans spoiler le roman...



Ce roman, facile à lire au début et qui se complexifie au fur et à mesure, virant à la tragédie, peut être difficile à terminer sauf si, comme je le dis plus haut, on y voit une forme de symbolique.



NB : Pour les fans et futurs fans de David Vann, plusieurs petites interviews que je viens de savourer sont disponibles sur le web.

L'auteur y parle par exemple du ressort de la Tragédie grecque qui anime son écriture.

Il dit aussi l'importance pour lui d'exister par l'écriture.



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Un poisson sur la lune

Chaque roman de David Vann est une forme de violence, quelque chose qui me dérange, une façon d'ouvrir une fenêtre et de laisser entrer la vie comme elle vient, ne rien filtrer, la laisser venir de très loin avec ce qu'elle a parfois de plus sombre... Pourtant, chaque roman de David Vann est envoûtant, m'envoûte aussi. Un poisson sur la Lune n'échappe pas à la règle...

Jim Vann a trente-neuf ans, habite désormais seul en Alaska. Il a divorcé deux fois, a deux enfants, Cheryl huit ans et David treize ans. Tiens ! me direz-vous, un certain David Vann... Cela ne vous dit rien ? Autobiographie, roman, autobiographie romanesque ? Comment faire la part des choses dans ces pas qui remontent à l'enfance. Qu'importe, c'est une oeuvre romanesque avant tout et il faut aussi la prendre comme cela, dans son vertige et son enchantement...

Jim n'en peut plus du poids de sa vie. Il ne trouve plus le chemin du retour dans ce labyrinthe où il s'est perdu un jour. Il veut en finir.

Il décide de revenir dans la Californie de son enfance, vers les siens, ceux qui lui sont proches, sa famille, ses deux enfants, ses deux anciennes épouses, Lorraine et Jeannette, son frère Doug, son père, sa mère. Cela fait beaucoup de monde pour dire un dernier adieu. Car c'est un peu la tournure que prend ce retour aux sources.

C'est un voyage, c'est une odyssée, un chemin chaotique. Pourquoi Jim est-il revenu ? Doug son frère cadet y croit encore, croit qu'il est possible de l'aider, lui fait rencontrer un psychiatre, tout est peut-être encore possible dans cette lumière ténue du soir.

Comment peut-on décider un jour de mourir ? Comment les choses peuvent-elles s'inverser brusquement ? Les pensées qui deviennent les plus sombres, qui empêchent de dormir ? Les gestes qui s'emparent d'un magnum, l'embarquent dans ses bagages, prennent soin cependant de séparer l'arme de ses munitions dans un sac séparé...

Quel est ce déclic où l'on perd pied brusquement dans son existence ? Est-ce que les choses sont écrites à l'avance ? Est-ce qu'il y a des portes qui s'ouvrent sur les chemins incompris ?

Est-ce que les fondations sur lesquelles la vie de Jim s'est construite étaient suffisamment solides ?

Il voudrait savoir d'où vient son malheur. De son père ? De sa mère ? De cette religion luthérienne ?

Pourtant Jim a fait ses propres choix. Tromper sa femme. Divorcer. Vivre seul. S'endetter stupidement. S'éloigner de sa famille. Bousiller sa vie.

Ici la douleur est au rendez-vous, une douleur au cordeau qui nous laisse à peine le temps de reprendre notre souffle entre deux chapitres.

C'est comme si la terre devenait lourde sous les pas de Jim. La mort qui approche, celle qu'il choisit lui devient presque grisante et en même temps il a peur. On le voit hésiter. C'est une peur panique comme celle d'être enseveli et en même temps c'est une sensation comme celle d'être sur le point de s'envoler, comme un oiseau au bord d'une falaise.

Ne plus être retenu à la terre, s'envoler dans le ciel si lourd, parmi les geais buissonniers, les écureuils gris et la lumière fugitive de ce coin de Californie...

Le voyage de Jim est cruel pour lui et pour les siens. La sensation de ne plus avoir aucun contrôle sur lui. Faire subir aux enfants ce départ programmé, cet ultime adieu... Il égrène des conseils aux siens, à ses enfants comme s'ils ne devaient plus jamais les revoir.

Ici comme à d'autres moments, David Vann a cette cruauté terrifiante et lucide de mêler les enfants aux jeux des adultes. Sans doute cette frayeur est-elle quelque chose venue de la nuit de son enfance ?

C'est un voyage, c'est une déchirure. C'est une descente dans les abimes d'une existence. Jim ne cache rien à ses proches de son dessein. Chacun tente de l'en dissuader à sa manière. Jim tente de survivre, encore un peu à certains moments. Il suffirait de peu. À quoi tient la vie...?

Bien sûr, on connaît la fin de l'histoire dès le début. David Vann ne s'en cache jamais. Pourtant la force du récit nous tient en haleine, on voudrait y croire à chaque instant comme lorsqu'on sait qu'un proche va mourir, on s'accroche à chaque rayon de lumière pris au piège dans les ramures des arbres... Nous y croyons encore, nous y croyons à chaque fois que Jim se retient à la vie qui s'engouffre dans un fou rire, un pan de ciel qui traîne par-là, un coin de forêt qui ramène au bonheur d'avant, tandis que son doigt continue de presser sur la détente...

Tout était pourtant offert à Jim, le bonheur, l'amour la réussite, l'argent. Cela n'a pas suffi. Cela ne suffit jamais...

Par moments, le bonheur surgit et ressemble à la nature. Des collines boisées, d'étroits canyons qui serpentent au travers, un lac immense de l'autre côté du versant. Des pins immenses à perte de vue. de petits torrents qu'on enjambe d'un seul bond. Tout paraît idyllique dans ce coin sauvage de Californie, dans l'eau de ce lac où Jim vient se baigner une dernière fois... Pourquoi cela ne permet pas, ne permet plus à Jim de s'accrocher à la vie. Pourtant Jim célèbre cette nature avec force et ivresse, c'est comme une communion qui l'amène à se perdre dans le paysage, ces pages sont magnifiques.

Même la chambre d'un motel minable, où tenter de jeter quelques derniers gestes d'amour, a quelque chose de brusquement beau dans cette dérive crépusculaire.

Toute la douleur est là. Ses enfants lui manquent, l'amour d'avec une femme, mais quelque chose de plus fort encore lui manque : la vie avant cette douleur.

Son frère Doug veut l'aider à toutes forces. Il est toujours là, bienveillant, vigilant, toujours là à chaque instant pour l'écouter, lui parler, intervenir, pour le plaquer au sol, lui dire de se taire. Cette relation m'a fortement touché. Celle avec le père aussi, chargée de tous les non-dits, tout ce qui n'est pas palpable, tout ce qui est invisible entre eux, les sépare avec effroi, dans l'ultime tentative de s'aimer et se l'avouer.

J'ai trouvé que la manière qu'a David Vann d'aborder le récit, de nous y entraîner est d'une acuité bouleversante.

C'est terrible, le naufrage d'une personne que l'on aime, c'est terrible cette chose qui nous rend impuissant pour la sauver. Ce geste que l'on ne peut retenir.

C'est une vie qui n'est plus désirable.

Ne plus pouvoir aimer.

David Vann nous rend cette douleur palpable, la fait revenir à lui, nous la restitue avec une émotion poignante.
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Aquarium

Je savais à quoi m’attendre avec une histoire de David Vann. Et puis après avoir lu un livre sur la transmission des haines et secrets dans une famille, c’était bien de passer à la pratique… Ouais....J’ai parfois des idées bizarres et je ne suis pas prête d’oublier cette lecture.



Caitlin attend sa mère, après le collège, dans un aquarium. Elle est passionnée et intriguée par les poissons qu’elle contemple inlassablement. Et puis, c’est la seule dépense que pouvait envisager sa mère, une sorte de garderie où sa fille est à l’abri.



Elles n’ont pas une très belle vie, l’appartement est sommaire, le travail de Sheri est éprouvant et les journées sont interminables pour mère et fille. Elles vivent toutes les deux avec parfois, un homme de passage dans la vie de Sheri, mais sans aucune famille.



Caitlin arrive à un âge où elle pose des questions auxquelles Sheri refuse de répondre.



Caitlin va faire la connaissance d’un vieil homme à l’aquarium. Elle le voit tous les soirs en attendant sa mère. Rien de folichon, ils contemplent ensemble les poissons. L’endroit est calme et silencieux.



Cette partie de l’histoire est tranquille, puis tout s’emballe quand la mère apprend que sa fille a rendez-vous avec un vieil homme à l’aquarium.



Sheri est une femme brisée qui vit dans la haine du passé, de sa famille. Elle n’est pas très maternelle non plus et n’hésite pas à ramener des hommes dans le tout petit appartement en confinant sa fille dans la chambre.



Mais je ne peux rien vous raconter de plus, car le choc est grand, comme d’habitude avec l’auteur, et la descente aux enfers parfaite !



Caitlin est une adolescente qui a du cran et du caractère et il lui en faudra pour continuer sa vie.



Un livre passionnant même s’il faut avoir le coeur bien accroché. Une mère a t-elle tous les droits envers son enfant ?
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Impurs

Une vieille bâtisse isolée dans le désert californien par un été caniculaire plante le décors.

Galen, un jeune homme de 22 ans, oisif, adepte du courant spirituel New Age, essaye désespérément de maitriser ses pulsions sexuelles grâce à des théories spirituelles plus que fumeuses.

Il est coincé là dans une famille de femmes : sa grand-mère qui perd la tête et qu’on a reléguée dans une maison de retraite mais qui a l'argent, sa tante Helen rongée de jalousie et de convoitise, sa cousine Jennifer sexy mais d’un cynisme absolu et sa mère Susie Q…Sa mère qui veut le garder pour elle, comme elle garde la fortune de sa mère, et le traite à la fois comme un enfant et comme un compagnon de substitution. Jusqu’au jour où elle est obligée d’admettre qu’il est devenu un homme et qu’il risque de lui échapper…Et là tout va basculer.

L’horreur naît des relations humaines, familiales plus précisément, qui charrient les secrets, les rancœurs et les haines de génération en génération, et empoisonnent tous les rapports humains. L'argent est l'instrument du pouvoir : celle qui le détient s'octroie le droit de vie ou de mort sur les autres, ou du moins droit de construire son avenir ou de rester là à végéter dans cet enfer californien. Les relations mère-fils sont très bien analysées : le roman permet d’aller jusqu’au bout de la logique d’un lien amour-haine assez fréquent malheureusement. Une mère abusive, castratrice, déçue par les hommes, qui reporte sur son fils une domination dévastatrice. Le fils est pris entre la soumission à celle qui lui a donné la vie et la révolte que la folie de cette dernière va raviver.

La violence est exacerbée par l’isolement dans lequel vivent les personnages et les conditions climatiques arides, deux caractéristiques que l’on retrouve dans les autres romans de David Vann.

C'est sans issue : les deux acteurs sont prisonniers de leurs rôles, c'est une véritable tragédie, à la résonnance universelle.

Un voyage au cœur de la folie humaine, plus proche de nous que nous voulons bien l'admettre. Noir, puissant et impitoyable.

Jusqu'au bout on retient son souffle, et la fin est là, cruelle, sordide et inévitable.

Un grand roman qui poursuit sa route bien après que la dernière page soit tournée.
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Aquarium

L'an dernier, j'ai découvert l'écriture et l'univers de David Vann avec "Sukkwan Island" ; j'avais alors pris une sacrée claque. "Sukkwan Island" est en effet le genre de récit qui vous hante durablement.



En plongeant dans "Aquarium", je m'attendais à retrouver une crudité proche de la cruauté, une violence ordinaire extraordinaire à mes yeux et un style concis et frontal comme un crochet du droit ; mon attente n'a pas été déçue.



Caitlin a douze ans et elle vit avec Sheri, sa maman solo docker qui semble en avoir bien bavé dans l'existence. Caitlin attend après l'école que Sheri vienne la chercher et elle patiente à l'Aquarium de Seattle, ayant la passion des poissons et rêvant de devenir ichtyologue. C'est là qu'elle fait un jour la connaissance d'un homme âgé qui devient rapidement son ami. Mais aux Etats-Unis, nineties, un vieil homme qui colle d'un peu trop près une fillette, ça fait tiquer. D'autant qu'à son contact, Caitlin semble percevoir une sorte de secret dont seule sa mère possède la clé.



L'entrée dans le récit est assez lent, c'est une plongée en eaux profondes où il est beaucoup question d'analogies entre le monde aquatique - dont je suis peu familière et peu friande - et le monde terrestre. David Vann se plaît dans ses passerelles stylistiques et prend son temps - un peu trop à mon goût - avant de donner du rythme à son action. Mais c'est connu, la patience est toujours récompensée et la narration prend un brusque virage qui fait basculer "Aquarium" dans le thriller psychologique avec une belle dose de suspense, de violence tour à tour contenue ou déchaînée, et de noirceur à peine zébrée de quelques fulgurances lumineuses.



Je ne ressors pas essorée d'"Aquarium" comme ce fut le cas avec "Sukkwan Island" et je sais que je serai moins marquée par ce récit dans la durée, mais avec cette seconde lecture, je distingue désormais l'importance pour l'auteur de traiter des rapports parents-enfants et de leur lourde charge de paradoxes, entre sauvagerie, abnégation, tendresse et rancune. Un sujet qui fait généralement très mal, des bleus à l'âme, comme nuancés par les néons d'un aquarium.



J'achève mon billet en précisant que le roman est illustré par plusieurs espèces de poissons, ce qui le rend original et suscite la curiosité. Enfin, côté stylistique, j'ai particulièrement apprécié les "effets de lumière" au propre comme au figuré qui donne vraiment au lecteur la sensation d'un monde clos, abyssal, inconnu et mystérieux.





Challenge ENTRE DEUX 2023

Challenge USA

Challenge TOTEM
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Un poisson sur la lune

« Un poisson sur la lune » est un roman-témoignage (baptême pour moi dans ce type de roman) par lequel l’auteur, David Vann, revient sur la dépression de son père quelque temps avant son suicide à 40 ans. David Vann ne laisse rien de côté: les moments de folies passagères de ce père, James, la peur et le désarroi occasionnés à ses enfants encore très jeunes, le désespoir de ses proches de le voir sombrer, l’impuissance quant à ce parent qui s’ensevelit seul dans la maladie.



Écrit avec beaucoup de descriptions quant aux sentiments mais aussi quant aux décors, comme tous ses autres livres, David Vann en livre une oeuvre parfois dure. Surtout lorsqu’on se projette à la place des membres de sa famille (et je pense en particulier à son oncle et frère cadet de James, Doug) qui auront tout tenté afin d’éviter qu’il ne commette cet acte irréparable. On se rend compte que James lui-même ne pouvait être sauvé d’une quelconque façon au vu des démons qui l’accaparaient jour et nuit.


Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Sukkwan Island

L'Alaska et ses paysages grandioses loin du monde vous font rêver ?

C'était mon cas aussi avant...

avant la lecture de ce roman cauchemardesque.



Le postulat de départ est pour le moins improbable : un père divorcé, notoirement instable, et son fils adolescent, qui ne partage aucune complicité avec son géniteur, vont passer une année ensemble sur une petite île sauvage, inhabitée et isolée.



«Sukkwan Island» est composé de deux parties bien distinctes, séparées par la survenance d'un événement tragique, qui s'abat d'un coup, comme la lame d'une guillotine, et laisse le lecteur pantois d'incrédulité.



Dans la première partie, on a fait la connaissance d'un père dépressif, égocentrique et peu fiable, auquel son fils, pas vraiment emballé par l'aventure, accorde peu de confiance. Les protagonistes, enfermés chacun dans sa propre solitude, tentent de s'organiser au coeur d'une nature d'une beauté glaciale et hostile. Ce huis clos, écrasant et malsain, suinte l'inquiétude. L'ambiance devient pesante, teintée de rancune sourde et de désespoir. Et la tension laisse clairement présager que la catastrophe est imminente, qui va transformer le mauvais rêve en cauchemar.



La seconde partie, est une fuite infernale et irrationnelle qui plonge le lecteur dans la folie. Une folie pathétique, sordide jusqu'à la nausée.

Le malaise est ici aussi intense qu'il était insidieux dans la première partie.



La fin est un peu faiblarde à mon avis.



Dans ce roman plus noir que noir, tout est à prendre au premier degré. Il n'y a aucune échappatoire.

Je n'y ai trouvé ni morale, ni enseignement, ni même de signification. Mais il faut avouer que la construction est en béton, et que le développement diffuse de l'adrénaline à gogo.
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Un poisson sur la lune

David Vann fait visiblement le point sur le drame de sa vie. Son père dentiste, se tire une balle dans la tête, alors que David a 13 ans et a refusé, il y a peu, de le rejoindre en Alaska. L’écrivain se met dans la peau de Jim Vann et retrace les derniers jours de sa vie, la visite chez son frère et ses amis, chez son psy. Récit poignant et dérangeant qui relate ce mal de vivre dont Barbara l’a décrit si bien :



Ça ne prévient pas quand ça arrive

Ça vient de loin

Ça c'est promené de rive en rive

La gueule en coin

Et puis un matin, au réveil

C'est presque rien

Mais c'est là, ça vous ensommeille

Au creux des reins

Le mal de vivre

Le mal de vivre



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Aquarium

Mon Dieu ! Quel livre percutant, bouleversant, effrayant même, parfois... J 'en suis encore toute tourneboulée.

Quelle quête désespérée de l'amour pour tous ces personnages !

Une quête qui passe par la violence et le pardon.

L'attitude de Sheri est un hurlement de détresse absolument insoutenable, abject.

J'ai lu certaines scènes avec une énorme boule au creux de l'estomac et des larmes plein les yeux.



Pauvre Caitlin qui, tel un poisson, voudrait se réfugier au fond de l'eau pour ne pas voir sa vie se déliter et qui tente cependant de rester émergée en s'accrochant aux rochers qui sont ses repaires, ses securités.

Steve, l'amant de sa mère, remarquablement fidèle et solide, qui essaye d'alléger l'atmosphère en y mettant fantaisie et imagination; Shalini, la douce et tendre amie dans laquelle elle aime se fondre pour se sentir vivante, importante; Bob, ce vieux monsieur rencontré à l'aquarium et dont l'irruption va déclencher à la fois la plus terrible et la plus belle des métamorphoses familiales.



David Vann semble avoir un talent phénoménal pour traduire les émotions dans ce qu'elles ont de plus brutal, de plus dur mais aussi de plus doux, de plus profond.

Je suis incapable d'en dire plus tant je suis encore toute retournée par cette belle et dramatique lecture qui laisse la porte ouverte au pardon dans ce qu'il a de plus difficile.
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Dernier jour sur terre

Les Bretons connaissent bien Vannes et sa femme.

En voici une déclinaison intéressante avec Vann et son père.

Enfin feu son père serait plus approprié, ce dernier ayant décidé de mettre fin à ses jours en se prenant pour cible avec une arme à feu à une distance remarquable de...bout portant. Ce qu'il réussit parfaitement.



Par le truchement d'un énième crime de masse américain, celui de Steve Kazmierczak qui tua cinq personnes, en blessant dix-huit autres, le 14 février 2008, et là je vous entends déjà vous insurger en décriant l'outrecuidance du gougnafier ne respectant rien et surtout pas la St Valentin, David Vann met en opposition son propre passé de gamin trop rapidement confronté aux armes avec celui du tueur en devenir tout en tentant d'appréhender ce qui fait d'un jeune, mal dans sa peau, un possible tueur de masse alors qu'un autre, présentant les mêmes potentialités, choisira une autre voie.



J'aime l'écrivain.

Le personnage semble des plus sympathiques itou malgré un passé salement contrarié.

Il retrace ici le parcours chaotique d'un futur pote de la NRA tout en s'interrogeant sur ses propres démons d'antan.

Le mec a tué, il est une ordure de la pire espèce, c'est entendu.

Mais bien avant le drame, penchons-nous sur la personnalité complexe d'un type aux doutes multiples malgré une réelle intelligence avérée.

Vann n'est pas dans le jugement.

En observateur attentif et conteur factuel, l'écrivain remonte aux sources de l'enfance, terreau par trop souvent fertile d'un no future tragique.



Passionnant et instructif, ce Dernier Jour sur Terre évoque tout autant le roman qu'un remarquable travail journalistique. Une plongée en eaux troubles dans lesquelles l'auteur aurait pu se noyer, lui préférant le métier d'écrivain pour le plus grand plaisir de ses admirateurs dont je me targue de faire partie.



Un très grand Vann !
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Sukkwan Island

Curieux comme les avis sont mitigés sur ce roman : autant de très bonnes critiques que des critiques qui ne donnent que 1 ou 2 étoiles à ce livre. Je serai de ceux et celles qui ont beaucoup aimé... Peut-être est-ce parce que c'est le premier Vann que je lis... ou bien parce que j'en savais que très peu sur le roman, sinon qu'il m'a été recommandé par quelques personnes... Mais peu importe, je me suis plongée dans l'histoire et je me suis complétement laissé immergé dans ce huis-clos glacial... Faut dire que le décor est juste magnifique... Un coin perdu de l'Alaska, dans une cabane, laissé seul à soi-même, bordé par l'eau, les montagnes, les glaciers... Chaque page me donnait encore plus de m'y trouver... Et puis, l'histoire.. celle de ce père et ce fils, qui tentent de communiquer, de se retrouver, face à leurs solitudes respectives et de leurs nuits baignées de larmes et de mal-d'être... Et puis, cette fameuse page, où tout bascule... Et l'histoire qui s'ensuit... Franchement, j'ai été prise de court, mon coeur s'est arrêté de battre, je n'en revenais pas... Vann m'a frappé en plein coeur... Une très belle découverte que cet auteur... et je vais vraiment m'intéresser de près à sa bibliographie, parce que la plume m'a vraiment parlée...
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Sukkwan Island

Sukkwan Island est un roman qui me faisait peur, jusqu'à ce que je le lise. Il semblerait que David Vann n'est pas un auteur léger, de compromis.

Apre, violent, cruel, émouvant, oui. Effrayant, finalement, non.

L'île où ce père à bout, pas si loin de la folie, décide de vivre pour un an, tel un Robinson, porte en son creux cette histoire qui lui ressemble. Sauvage, soumise aux tempêtes hivernales, déserte, offrant un minimum de ressources. On n'en voudrait pas à Jim de trouver là lieu de se ressourcer et de se remettre des multiples échecs de sa vie. On comprendrait également qu'il se laisse aller à sa folie, qu'il finisse par vouloir mettre fin à sa vie. Mais dans sa perversité inconsciente et égocentrique, Jim force la main à son fils Roy, 13 ans, en lui demandant de le suivre dans ce périple. Pour Roy, refuser serait comme livrer son père à la solitude et au suicide. Il se sacrifie. Jusqu'au bout.

Sukkwan Island est une histoire tragique qui se prolonge après l'"événement" dont je ne parlerai pas. Pas grand chose nous est épargné des tourments qui suivent ni des visions. Mais autant les descriptions de cette nature que ce que ressentent père et fils tour-à-tour sont riches d'authenticité.

Sukkwan Island fait partie de cette mini-vague littéraire consistant à aller au bout du pire par le biais d'un père et son enfant: La Route, En Mer, Traité sur le Zen et l'Entretien de la Motocyclette, tous ces romans relatent cette relation au père faite de confiance et d'étrangeté.

Ceci est ma première lecture de David Vann, mais je souhaite en découvrir d'autres maintenant. Je suis curieuse également de lire l'adaptation BD qui vient de sortir.
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Désolations

L'enfermement des grands espaces.... La lucidité jusqu'à la folie... L'enfer de l'Autre... sont les termes qui me viennent à l'esprit en refermant ce livre.

Ce livre est vraiment une ode à la Désolation.

Définitions Larousse de désolation : état d'un lieu inhabité, désert, dépourvu de verdure - (Pays de désolation). Peine extrême, affliction extrême ; consternation - (Être plongé dans la désolation). Ce qui est cause d'une grande contrariété ; ennui - (Cet enfant est la désolation de ses parents).

Ces définitions donnent une idée de ce qui se passe dans la tête des protagonistes, ou devrais-je plutôt dire, des antagonistes...

Irene et Gary sont mariés depuis bien longtemps. Ils vivent en Alaska, au bord d'un lac de glacier.

Leur fille, Rhoda (que l'on retrouve dans Sukkwen Island), 30 ans, vit en ville avec Jim (le père dans Sukkwen Island... cela donne une dimension supérieure au récit, encore plus glaçante, si on l'a lu juste avant...) et attend que celui-ci la demande en mariage. Mais Jim est un pauvre type qui ne pense pas plus loin que le bout de sa queue, et Rhoda sent que quelque chose cloche chez lui.

Elle sent aussi que ses parents ne vont pas bien, surtout sa mère, depuis qu'ils ont décidé, ou plutôt, depuis que Gary a décidé, de construire et de passer l'hiver dans une cabane sur un ilot du lac, Caribou island.

Depuis la première journée de travail sur cette cabane, Irene a attrapé froid, et souffre dorénavant d'incessants et terribles maux de tête. Gary pense qu'Irene n'est malade que pour le punir... Irene pense que Gary ne l'aime pas, et qu'il va profiter de la mauvaise volonté d'Irene pour la quitter...

Irene, Gary, Rhoda, Jim, Mark, Carl, Monique, autant de personnages, d'âges différents, qui voient avec lucidité se profiler leur avenir, proche ou lointain...

Les grands espaces hostiles, qu'ils soient de l'Alaska ou d'ailleurs, font office de loupe. Ils forcent à regarder au plus profond de soi.

Et de la lucidité la plus extrême, nait la folie... ou bien est-ce l'inverse ?

Ce livre est puissant. De par son analyse poussée de la psyché humaine, de ce décorticage de la pensée d'Irene, dans ses moindres cheminements, et de celui de Gary, plus brut et évident, et celles de Rhoda et Jim, en parallèle, imbriquées et à des années lumières cependant.

De plus, avec la lecture de Sukkwan Island auparavant, on est d'autant plus lucides nous aussi sur le futur de ces personnages, et c'est terrible. C'est fort. Très fort.

Et oui, la fin est peut-être prévisible, mais ça n'enlève rien à l'acuité et la perspicacité du propos. Au contraire, cela ajoute de la force, c'est une fatalité, et c'est un destin en marche, inéluctable.

Bravo David Vann. Encore !!!
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Sukkwan Island

Jim, un homme désespéré, se retire de la vie en s'isolant sur une île déserte et sauvage de l'Alaska . Il aurait pu le faire seul, profiter de cet isolement pour se remettre en question ,savoir s'il doit donner une nouvelle direction à sa vie ou au contraire l'écourter, en finir définitivement.



Mais non, il va entrainer son fils Roy de treize ans dans cette aventure. Roy va être pris au piège, il ne pourra pas refuser de l'accompagner pour cette retraite d'une année, car il sait que son père va mal, il ne peut pas le laisser seul.







J'ai eu du mal à comprendre aussi le comportement de sa mère, qui le laisse partir. Elle le laisse affronter une responsabilité qu'on ne peut pas avoir à son âge. Ses deux parents l'abandonnent finalement. Ils ne l'autorisent pas à être un enfant, à être celui qu'on protège.



J'ai aimé l'écriture de l'auteur. On ressent l’oppression subie par les personnages dans ce paysage beau et majestueux, mais aussi sauvage et hostile. On se sent pris dans la tourmente de ce père et de ce fils, dans ce cauchemar qui n'en finit pas.
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Sukkwan Island

Voilà un roman qui m'a bousculée, à la fois par l'histoire qu'il raconte et par l'ambiance angoissante qu'il distille au fil des pages...



Assurément, l'auteur a su m'emmener avec ses héros, Jim et son fils Roy, sur cette île perdue d'Alaska où le père voudrait donner un nouveau souffle à sa relation avec son jeune adolescent: j'ai eu froid, faim et peur!

Dès la première page, le malaise s'installe et m'a déstabilisée. D'initiatives manquées en défaillances avérées, Jim n'a suscité aucune sympathie de ma part et le rapport bancal qu'il entretient avec son fils m'a agacée...

L'événement brutal qui nous fait basculer de la première à la deuxième partie du roman m'a surprise et les descriptions souvent crues qui suivent m'ont un peu écoeurée!



Et donc, même si les émotions suscitées par cette histoire se déclinent plus dans le registre du malaise et de l'incompréhension, j'avoue avoir été bluffée par l'auteur qui sait imposer une ambiance, qui m'a baladée à son gré malgré mon manque d'empathie pour ses personnages et qui donne matière à réflexions une fois le livre refermé!
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Komodo

Elle n’est vraiment pas sympathique, cette narratrice de Komodo.

Elle s’appelle Tracy, est dotée de deux jumeaux de 5 ans qu’elle a lâchement abandonné à son mari aux Etats-Unis pour un voyage en Indonésie, près de l’île de Komodo. Elle a été invitée par son frère Roy, apprenti accompagnateur de plongée, et accompagnée de leur mère.



Dès son arrivée sur l’île où les attend Roy, alors qu’il faut aux deux femmes descendre du bateau et patauger un peu dans l’eau parce que le quai est trop haut, elle s’agace et constate avec plaisir que son frère a pris du ventre. Pour le saluer, ces premiers mots sont affables :

- « Tu as l’air en forme, évidemment, dis-je. En vacances toute l’année, sans jamais rien à faire. »

Le ton est donné.



Tracy et sa mère vont découvrir la hutte où elles vont séjourner, les repas faits de « bœuf baignant dans une sauce au piment rouge », du « chou bouilli mélangé à quelques rondelles de carottes » et un « immense plateau de tempeh servi nature. » Et Roy, en tant que stagiaire apprenti accompagnateur de Scuba Junkies, n’est pas autorisé à manger tant que les invités n’ont pas terminé leur repas.



Entre le frère et la sœur, le ton est amène. Il faut dire que Roy a divorcé d’une femme que Tracy juge charmante, sans raison apparente si ce n’est reprendre sa liberté.

Et Tracy lui en veut. En fait, elle en veut à la terre entière.

A sa mère, qui, après s’être beaucoup disputée avec son fils, semble chercher la réconciliation. A son père, qui s’est suicidé alors qu’elle était plus jeune. A son mari argentin qui semble la laisser se débrouiller avec des jumeaux insupportables. Bref, à tout le monde.



Et pourtant Tracy est censée venir à Komodo pour se détendre. Il y a un programme de plongée magnifique en perspective.

Et c’est vrai que la description des fonds sous-marins indonésiens est superbe. Mais on comprend vite qu’un drame ne va pas tarder à se nouer. On ne sait juste pas de quel côté il va surgir.

« Chaque plongée est la plus belle chose que j’aie jamais vue de ma vie. Si étrange. On comprend pourquoi les instructeurs sont prêts à gâcher leur vie, loin de tout, notamment des réussites sociales. Peut-être que les poissons leur suffisent » dit Tracy.

Dans ce cadre paradisiaque, la tension familiale est à son comble. Tracy, rongée par la colère, a des envies de meurtre, et on se demande quel monstre va surgir des profondeurs.



« Komodo » est un livre très agaçant. Jusqu’à la dernière partie, où Tracy se retrouve du jour au lendemain rapatriée aux Etats-Unis, et où elle retrouve une situation des plus irritantes avec deux petits monstres de cinq ans tyrannisant leur Maman : très déplaisant.

Une pirouette finale va sortir Tracy d’une situation insupportable. Mais personnellement je n’y ai pas cru une minute.

Bref, un livre qui m’a laissé un profond sentiment de malaise. « Portrait trouble d’une femme en apnée » dit la dernière de couverture. Trouble, sans aucun doute.



Personnellement je préfère nettement les petits poissons colorés de Komodo à la vase dans laquelle Tracy s’est envasée – dommage.

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