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Critiques de Elif Shafak (779)
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Soufi, mon amour

Un beau moment de lecture que ce Soufi, mon amour d’Elif SHAFAK et cette plongée dans la rencontre initiatique entre Rûmî, fameux poète persan du 13e siècle et Shams de Tabriz, derviche tourneur, adepte du soufisme. Ce mysticisme islamique présent aussi bien chez les sunnites que les chiites, le pendant de la gnose chrétienne ou de la kabbale judaïque pour guider sur le chemin de l’épanouissement personnel, de la révélation intérieure et de la relation avec Dieu, le Créateur, l’Un… Ou l’un des 99 noms qu’on lui donne sur Terre.

Tandis que le Proche-Orient connaît un nouvel accès de fièvre, que les tambours de guerre se mettent à jouer leurs airs funèbres, parcourir ce texte qui encensent l’amour, la force universelle qui nous lie tous, pour peu que l’on sache s’y ouvrir, a été une oasis réconfortante au milieu de la fureur de l’actualité. Mièvrerie d’un rêveur occidental sentimental ? Peut-être ! Mais, l’escalade israélo-iranienne fait tellement écho au scénario de mon troisième roman que j’en viens parfois à me demander s’il ne provient pas d’ailleurs que de mon imagination ?

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L'architecte du sultan

C'est le coeur plein d'appréhension que Jahan accoste à Istanbul un jour de 1546. Il a laissé sa pauvre mère entre les mains d'un époux violent mais la tentation était trop forte de suivre Chota, l'éléphanteau blanc dans son voyage vers Topkapi et la ménagerie du sultan Souleymane. Après un voyage mouvementé auquel le cornac officiel n'a pas survécu, Jahan et Chota rejoignent donc le palais où le garçon se fait passer pour un cornac et affirme venir d'Hindoustan.

Topkapi est un panier de crabes, parcouru de rumeurs, de trahisons, de crimes de sang et Jahan est un garçon gentil et naïf. Pourtant, il s'adapte, sait se faire apprécier et attire même l'attention de la princesse Mihrimah, fille unique du sultan. Sous prétexte de venir voir Chota, elle multiplie leurs rencontres et charme Jahan qui tombe irrémédiablement amoureux. Souleymane, lui, ignore l'éléphant et il faudra une campagne militaire dans les Balkans et l'aide de Chota pour construire un pont pour que Jahan et son animal soient remarqués, à la fois par leur maître et par Sinan, le chef des travaux. Promu architecte impérial, Sinan prend Jahan sous son aile et il devient son apprenti. Il restera auprès de lui jusqu'à sa mort, participant à la construction des plus belles mosquées d'Istanbul mais aussi aux travaux de rénovation et d'assainissement de la ville.



Quel magnifique roman ! Elif Shafak y convoque une Istanbul de légende où se côtoient les pauvres et les puissants. Elle décrit Topkapi et ses secrets d'alcôve, son luxe, son harem, le zoo personnel du sultan.

Au fil des années, les sultans passent et trépassent, Souleymane, Selim, Mourad, les caractères changent, les méthodes de gouverner aussi, et l'indéboulonnable Sinan continue de faire émerger ponts, mausolées et mosquées. Avec lui, Jahan grandit, prend de l'assurance, connait les tourments de l'amour et reste fidèle à son maître et à son éléphant blanc.

L'architecte du sultan est un roman d'apprentissage, une histoire d'amour, un conte oriental, une magnifique fresque historique où personnages réels et inventés s'associent pour faire revivre les beaux jours de l'Empire byzantin. On y croise aussi des gitans, des favorites, des religieux, et bien sûr, Chota, l'éléphant blanc, le meilleur ami de Jahan, le compagnon des joies et des peines.

Un roman à l'image d'Istanbul, bouillonnant de vie, d'intrigues, de mystères, de magie. Un livre qui se dévore.

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L'Île aux arbres disparus

« Les humains croient savoir avec certitude où s'arrête leur être et où commence celui de l'autre. […] Les arbres ne se nourrissent pas de telles illusions. Pour nous, tout est relié. »



D'une certaine façon, ce sont ces ramifications qu'Elif Shafak déploie par « segments brisés » à travers plusieurs histoires qui cohabitent et alternent. L'une d'elles se déroule à Londres en 2010 avec les préoccupations d'une jeune adolescente dont la maman vient de décéder et qui a grandi dans une sorte d'omerta autour de cette autre île, Chypre, dont ses parents sont originaires. Une autre se déroule à Chypre et commence en 1974, en pleine guerre civile, avec l'amour interdit de ses parents. Une autre encore, dévoile les observations d'un figuier sur son environnement et les agissements des hommes.



Dans l'ensemble, il s'agit d'une lecture plaisante mais en ce qui me concerne, inégale. Les passages relatifs à Ada en 2010, par exemple, n'ont pas véritablement réussi à capter mon attention. J'en attendais plus, étant donné le contexte.

De plus, les personnages, quoiqu'attachants et remplis d'humanité, m'ont également paru manquer d'épaisseur. A l'exception toutefois du figuier. Cet arbre apporte un souffle un brin holistique aux évènements. C'est le maillon fort de la chaine. Il observe son environnement avec distance, tendresse, mélancolie aussi, et véhicule un message dont les hommes devraient un peu plus s'inspirer en arrêtant de se croire « supérieurs à toutes les formes de vie passées ou présentes. » Evidemment, il faut accepter le principe qu'un arbre puisse penser, raisonner, comprendre le langage des hommes, et même lire, ce qui peut être déroutant au début.



L'île aux arbres disparus aborde en toile de fond la fracture entre Chypriotes grecs et turcs, loin d'être cicatrisée, mais il s'agit avant tout, selon moi, d'un livre sur le poids et la force des racines : celles que l'on transporte avec soi quand on est contraint à l'exil, celles, intergénérationnelles, que l'on transmet ou refuse de transmettre à ses enfants, celles qui restent enterrées, celles qui unissent ou désunissent, celles qui, d'une manière ou d'une autre, qu'on le veuille ou non, nous relient…

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La Bâtarde d'Istanbul

Autant j'avais beaucoup aimé le livre de Elif Shafak, Soufi, mon amour ; autant celui-ci m'a laissé complètement indifférente.

Histoires de familles, histoires passées et d'aujourd'hui, relations familiales compliquées, Histoire tout court.

Livre vite lu, que j'oublierai sans doute très vite aussi.
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Soufi, mon amour

« Soufi, mon amour » raconte la magie irrésistible de deux rencontres, deux parcours initiatiques hors du commun. Elif Safak, avec son habituel talent de conteuse, nous entraîne sur les traces du soufisme, un courant mystique de l’islam.



Aziz Z. Zahara, un auteur inconnu, vient d’écrire un livre sur un poète, Rumi et sur le plus célèbre derviche du monde musulman, Shams de Trabiz.. La rencontre entre ces deux personnalités solaires donnera naissance à une amitié plus forte que tout et loin de tout extrémisme religieux, au soufisme…



C’est Ella Rubinstein une quadragénaire américaine, mariée et mère de trois enfants qui est chargée par un agent littéraire de rédiger une note sur le manuscrit.



Elle rentre en contact par mail avec l’auteur et petit à petit, leurs échanges deviennent plus intimes. Ella se remet en question, se vie est bouleversée petit à petit. Jusqu’où ira-t-elle ?



L’auteur alterne les deux récits ce qui donne beaucoup de rythme à la lecture du livre et tout son relief au récit historique.



Le soufisme, est une quête spirituelle qui laisse une grande part aux sens, à la nature, une forme d’abandon total à l’amour de Dieu qui passe aussi par la fameuse danse des derviches tourneurs.



Croyant ou pas, ce livre interroge et sa lecture laisse un souvenir agréable.

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L'Île aux arbres disparus

Bon, soyons clair tout de suite, je suis définitivement sous le charme de la plume de l’autrice turque, Elif Shafak. Je l’ai découverte lors de ma participation au jury du Grand Prix des Lectrices Elle, en 2020, où son précédent titre « 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange » était en lice. Véritable révélation pour moi, ce titre m’a marqué encore longtemps, même s’il n’a, hélas, pas été lauréat.



Cela a donc été un pur plaisir que de retrouver Elif Shafak et son dernier livre, « L’île aux arbres disparus ». Encore une fois, elle a su me séduire tant par sa plume élégante que par son histoire captivante. Chacune des pages (ou presque) compte de belles citations. Par son talent de conteuse hors pair, même les drames sont empreints d’une touche de poésie.



Ici, c’est le destin de l’île de Chypre qui est mis en avant, en particulier depuis les années 1970 où une ligne verte marque la démarcation entre la partie grecque et la partie turque, dès 1974. Ne connaissant que très peu l’histoire de ce pays, j’ai appris au travers de ce livre énormément de choses. Quel plaisir ! Cela m’a vraiment donné envie d’en apprendre plus après ce livre.



Elif Shafak mêle à la fois une fiction avec Ada, lycéenne de 16 ans à Londres et sa famille, avec l’Histoire, avec un H majuscule qui est contée au travers d’un figuier. Oui, vous avez bien lu, par un figuier ! Cette originalité se marie extrêmement bien au contexte et en produit un personnage à part entière.



Petite pépite de la littérature selon moi, ce livre comptera indubitablement parmi mes coups de cœur de 2023 ! Je peux que très vivement vous le conseiller. A vos risques et périls d’éprouver, comme moi, une profonde mélancolie une fois les dernières pages tournées….
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Bonbon palace

Bonbon Palace me fait beaucoup penser à un autre roman choral, L’immeuble Yacoubian. Et cela à plusieurs égards. Ici, ce n’est pas un Arménien qui a contruit un édifice en Égypte mais un Russe en Turquie. Les destins des différents habitants de l’édifice, de classe sociale plutôt pauvre, finissent par s’entremêler. Un ou deux me semblaient superflus, peu en lien avec les autres, mais c’est aussi ça la vie. Il y a les coiffeurs Djemal et Djelal, au rez-de-chaussée, qui s’occupe de la tête de quelques unes des locataires, de là on assiste aux scènes des autres.



Avec eux, on découvre le quotidien des Turcs. Hadji Hadji, la femme au foyer Nadia, l’entreprenante Meryem et son fils qui ne veut plus aller à l’école, la vieille Maîtresse bleue, etc. Et ce narrateur, jeune homme récemment séparé, qui cherche sa place dans le monde. D’abord distant des autres habitants de l’immeuble et, ensuite, tranquillement mêlé à leurs histoires parfois cocasses, d’autres fois désespérantes… Comme l’indique le résumé en quatrième de couverture : «Elif Shafak nous fait découvrir dans ce roman choral pimenté les petits secrets, les menus drames et les grandes espérances de chacun.» Rien n’est plus vrai. Bonbon Palace est comme un microcosme de la société turque.



Le roman avait aussi de ces éléments ont retenu mon attention. Par exemple, une histoire, avec ces émigrés russes qui ont débarqué à Istanbul (deux fois plutôt qu’une) au début du siècle précédent et qui ont fait leur ce Bonbon Palace. Je partageais leurs impressions de la ville, ses couleurs, ses odeurs. Il y avait également ce brin de mysticisme avec la découverte sous terre d’un sarcophage mystérieux d’un saint tout aussi mystérieux datant de la conquête de la ville par les Turcs. Ces éléments, qui ne me semblaient pas si important à l’intrigue, donnaient de la profondeur.



Passé le deux tiers du roman, je me demandais où l’auteure Elif Shafak voulait nous amener. Ça semblait s’essoufler. Plusieurs personnages sont haut en couleur (d’autres moins, mais c’est la vie) et, conséquemment, intéressants. Toutefois, comme il ne se passe presque rien, après un moment, il s’en dégage une impression de longueur et d’ennui. Mais la finale inattendue a réussi à tout ramasser et, si les histoires de chacun des locataires de Bonbon Palace ne trouvent pas leur dénouement, c’est pour le mieux. On peut laisser aller notre imagination.
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Crime d'honneur

Jolie construction de petits bouts de vie autour du couple formé de l'Istanbuliote Adem fils d'ivrogne et de la jumelle Kurde Pembe dont la mère est morte en accouchant sa neuvième fille, leur émigration à Londres, leurs trois enfants, la destruction d'Adem addict aux jeux et aux femmes, le faux pas de Pembe et l'honneur que leur fils Iskender se doit de laver, la prison.



Avec Elif Shafak on voyage, Londres, Istanbul, mais on voyage surtout dans la tête de ses personnages, qu'ils soient homme, femme, enfant, vieillard, généreux, vulnérable... tel le mystique Zeeshan, compagnon de cellule, la guérisseuse Jamila ou l'amour tendre et platonique du jeune Yunus pour la punk Tobiko. Ainsi le livre serait beau même sans le crime et son incroyable dénouement.



Et pour moi, sa créativité, généreuse, qui semble sans effort est un véritable cadeau!

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Soufi, mon amour

Ce livre est une aventure spirituelle mirobolante dans le monde du soufisme. En substance, il raconte l’amitié de deux grands hommes soufis du XII-XIII ème. Il y a Shams de Tabriz, derviche errant indiscipliné, rebelle, qui choque tous ceux qu’il rencontre par sa sincérité, son rejet de la « charia ». Les juges qui la pratiquent le haïssent par conséquent, ainsi que bien des gens qu'il croise. Sahms ne veut pourtant que du bien. Il a établi les 40 règles de l’amour, il est proche de la nature et il aime se déplacer pour délivrer son message. Et de l’autre côté, il y a Rumi, poète et chef spirituel, suivi par beaucoup de disciples. Ces deux grands penseurs partageront une amitié placée au niveau spirituel, d’une profondeur extrême, qui les réunira autour du Coran.



On apprend des tas de choses sur la lecture du Coran, qui est de grande actualité. C'est assez enrichissant aussi sur le plan personnel. Ce Shams qui se distinguait par sa différence était un révélateur, un homme hors du commun. Ce livre ne s’attache pas uniquement à ces deux hommes mais il parle aussi du destin d’une femme du monde actuel qui au travers du manuscrit écrit par un soufi d'aujourd'hui, racontant l’histoire de l’amitié de Shams et de Rumi, sentira elle aussi son monde lentement changer.



Pour en connaître davantage sur le soufisme, cette pensée spirituelle basée sur l’Islam, et réfléchir à qui sont les soufis, il « soufi » de lire ce livre.

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L'architecte du sultan

J'avais apprécié Soufi mon amour et La Bâtarde d'Istanbul, et j'étais impatiente de me plonger dans le dernier roman d'Elif Shafak. J'ignorais tout de Sinan, architecte impérial du XVI siècle, infatigable bâtisseur de l'architecture ottomane avant de lire L'architecte du sultan.

J'ai retrouvé les talents de conteuse d'Elif Shafak qui entraîne le lecteur sur les traces d'un jeune indien orphelin, Jahan, venu offrir un éléphant blanc au sultan Suleiman le Magnifique. le jeune cornac, entré clandestinement sur le bateau qui transportait l'animal, va vivre d'incessantes aventures, tombé amoureux de la belle Mihrimah, subir les intrigues de cour mais surtout il va devenir l'apprenti de Sinan…

De manière assez classique, l'auteure introduit un jeune personnage imaginaire au long parcours initiatique auprès de personnalités historiques. Mais l'intrigue s'essouffle un peu, manque de relief et surtout, Elif Shafak a modifié les faits et les dates, ce qui m'a déçue et frustrée car j'apprécie les romans historiques qui permettent de se plonger agréablement dans une période et de s'instruire de manière distrayante. Mais après des recherches sur internet, j'ai pu contempler les œuvres du génial architecte et approfondir mes connaissances sur cette période, dommage qu'Elif Shafak n'ait pas réussi le même tour de force que Ken Follet avec son magnifique roman Les Piliers de la terre.

L'architecte du sultan permet néanmoins de passer un agréable moment de lecture et je remercie les éditions Flammarion et Babelio pour cette découverte. Laissez-vous conduire par Jahan, perché sur son éléphant blanc et vous allez bientôt apercevoir Istambul, au XVIème siècle, avec ses odeurs, ses coutumes et ses constructions.









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10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange

Un véritable hommage à l'amitié et à la différence.

Leila croupit au fond d'une benne, assassinée et, pendant 10 minutes et 38 secondes, se remémore sa vie.

Il est questions de secrets de familles, de blessures d'enfance, de préjugés, du poids des traditions mais aussi de bienveillance et de solidarité.

Elif Shafak nous conte Istanbul avec ses couleurs, ses odeurs, son vacarme, ses bas-fond, sa culture et son énergie.

En toile de fond sont abordés la corruption, l'autoritarisme d'Etat, le patriarcat, le condition de la femme et le manque de liberté.

La plume est élégante et poétique.

Un roman délicat et émouvant.

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Soufi, mon amour

Ce livre est une merveille, de par sa structure : un livre dans un autre livre avec des narrateurs différents, et, un message d'amour universel véhiculé à chaque page.



Nous suivons Ella, femme au foyer de quarante ans, blasée de tout. Elle obtiens un petit poste dans une maison d'éditions où on lui confie la lecture d'un livre "Doux Blasphèmes". A partir de cet instant, sa vie, ses conceptions vont radicalement changées… bref, elle va se mettre à vivre et non plus à survivre.



Le récit est d'une beauté saisissante avec un message d'amour, de tolérance asséné à chaque page... mais de manière simple, évidente et toute en douceur. Les personnages sont attachants par leur complexité alors qu'ils cherchent tous un idéal allant vers la simplicité.

Bref, comme dit plus haut... j'ai fait traîné ce roman juste pour le plaisir de savourer les règles de Shamz, la pureté des sentiments... Un vrai bonheur et un véritable message de paix entre les peuples.
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10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange

Avant de vous parler de ce livre, je dois vous faire un aveu : je ne m’étais jamais plongée dans la littérature turque. Je n’étais même pas capable de vous citer un auteur en particulier, je n’avais jamais parcouru de bouquins quel que soit son genre : policier, roman,… Honte sur moi!



C’est l’une des raisons qui fait que j’aime tant participer à des jurys littéraires. Oui, les lectures nous sont imposées. Et parfois, c’est vrai que cela semble rude, du fait que les livres peuvent être si éloignés de ceux qu’on lit habituellement. Par contre, parfois, c’est la surprise et encore mieux la très bonne surprise ! Et voilà c’est le cas pour moi avec ce livre « 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange ».



Quel bonheur de faire une si belle découverte avec ce roman si sensible, touchant et poignant. Il sera définitivement l’un de mes coups de coeur de l’aventure du Grand Prix des Lectrices Elle. Même une fois terminé, il me hantera encore longtemps !



Plusieurs de mes copines collègues du jury du mois de mars connaissaient déjà l’auteure, Elif Shafak et étaient ravies d’avoir dans notre sélection « Roman » sa nouvelle oeuvre. Pour ma part, je n’ai pas osé le leur dire mais je ne la connaissais absolument pas. Par contre, une fois parcouru la quatrième de couverture de ce livre, elle a su titiller ma curiosité par son côté assez énigmatique mais aussi distiller l’envie de le lire.



Leila, prostituée à Istanbul, est tuée et son corps est balancé dans une benne à ordures. Alors que son coeur s’est arrêté, son esprit et son âme vivront encore durant 10 minutes et 38 secondes. Cela sera le temps mais aussi la dernière occasion de revenir sur quelques moments qui ont émaillé la vie de Leila, de comprendre ce qui l’a amenée là et finalement, de faire un petit bout de chemin en sa compagnie.



Selon moi, c’est un livre qui peut plaire à de nombreux lecteurs du fait qu’il s’apparente à divers genres littéraires. Pour les amateurs de polars, il peut se lire comme une enquête menée pour découvrir qui est l’assassin de Leila. Pour les fans de voyages, c’est l’occasion de se rendre en Turquie et surtout à Istanbul, ville à cheval sur l’Occident et l’Orient. Pour les historiens, ils ne seront pas laissés pour compte puisqu’il fera découvrir ou redécouvrir des événements réels et forts du 20ème siècle.



Ode aux femmes, à l’amitié mais aussi aux personnes laissées pour compte, le style d’écriture de l’auteure est élégant et le travail de traduction a été merveilleusement accompli rendant la lecture aisée et attrayante.



Il est très difficile de ne pas s’attacher au personnage de Leila, souvent maltraitée par la vie mais pourtant dotée d’une très grande force d’esprit et d’une obstination à toute épreuve. Il en est de même pour sa bande d’amis, personnages secondaires et pourtant, ô combien importants.



Vous l’aurez compris, c’est mon petit coup de coeur du mois. Je n’ai pas trouvé de points négatifs à relever, son héroïne Leila restant gravée longtemps en moi.



Lu dans le cadre du Grand Prix des Lectrices Elle 2020, sélection « Roman », pour le jury du mois de mars.
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La Bâtarde d'Istanbul

Vous avez peut-être remarqué que j'ai un faible pour Istanbul et qu'il suffit que le nom de cette perle de l'Orient figure sur la première page de couverture pour que je craque...

Je précise toutefois que je n'ai jamais eu jusqu'ici l'occasion de la visiter, mais que cela reste un des projets que j'espère concrétiser un jour.



Imprégnée par la culture ottomane et féministe engagée, Elif Shafak écrit des romans qui mêlent les traditions romanesques occidentales et orientales.

À propos d'Istanbul, elle écrit : "Orient et Occident ne sont pas comme l'eau et l'huile. Ils se mélangent. Et dans une ville comme Istanbul, ils se mélangent de façon intense, incessante, et époustouflante."



Dans La bâtarde d'Istanbul, son deuxième roman, qui fut best-seller en Turquie, elle nous raconte l'histoire de deux familles, l'une turque et l'autre arménienne émigrée aux Etats-Unis, à travers le regard des femmes.

L'ombre du génocide arménien plane sur tout le récit provoquant incompréhension et tiraillements entre les deux communautés.

L'auteure a d'ailleurs été poursuivie en justice pour humiliation faite à la République turque et, heureusement, l'affaire s'est soldée par un non-lieu.

Deux communautés qui s'avèrent très proches l'une de l'autre en ce qui concerne culture et traditions.

Dans le récit, les Kazanci et les Tchakhmakhchian cachent chacun des secrets qui pourraient bien se révéler troublants pour les deux familles.



C'est un roman dépaysant à souhaît qui fait la part belle à l'art culinaire et ses senteurs orientales. J'ai pris soin de noter les noms turcs de toutes les préparations, bien décidée à en tester quelques-unes !

Les yalanci sarma, les tourshi, le patlijan, le topik ou les enginar n'auront plus de secrets pour moi..



Armanoush et Asya, la jeune génération, vont nouer une amitié désireuse de modernité, d'apaisement et de respect de chacun.



Un roman passionnant, plein de vie, bavard et gourmand comme les Orientales, avec des secrets déroutants et des allusions historiques indispenables.

Inoubliable !!

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L'architecte du sultan

Je me sens moralement poussé à présenter des excuses à Françoise Houdart pour lui avoir fait perdre deux heures au fin d'une interview un peu exceptionelle sur son dernier livre Eclipse alors que naïvement j'imaginais pouvoir intéresser un maximum de passionnés de littérature. J'avais développé le secret espoir d'ainsi apporter la visibilité que mériterait son talent. Hélas, cette chronique est un flop et le constat amer que nombre de Babéliotes préfèrent les autoroutes d'auteurs déjà bien établis à s'aventurer sur les chemins de traverse qui mènent pourtant régulièrement à la découverte de petits bijoux comme l'est sans contestation Eclipse. C'est donc le coeur lourd que j'ai commencé la lecture de L'architecte du Sultan...



J'avais adoré mon premier Elif Shafak et m'étais promis alors que ce ne serait pas le dernier. Musardant dans une petite librairie de Perros Guirec L'Architecte du Sultan me tendit les bras, je n'hésitai pas une seconde. Quelle bonne inspiration ! Il me permet de m'évader de la banalité routinière de l'hôpital où je suis de retour pour traiter par intraveineuse une méchante infection urinaire multirésistante. Comme dans ce très beau roman d'Elif Shafak toute vie est faite de hauts et de bas, n'est-ce pas ? Me voici donc ébloui dans cet Istambul fantasmé au temps du Sultan Salomon le Magnifique, grand commandeur des croyants, sur les pas de Jahan tout droit venu d'Hindustan avec son éléphant blanc Chota, cadeau du Shah pour honorer le Sultan tout en affichant la puissance de l'Inde. Petits cadeaux entre grands de ce XVIe siècle où l'empire ottoman étale sa puissance.



Elif Shafak est une conteuse remarquable, une des toutes meilleures de notre époque. Sa prose hypnotique m'emporte totalement et je me retrouve enfant à qui l'on raconte une belle hisoire qui pourrait durer indéfiniment et se prolonger par les rêves les plus doux, alors que je dis encore, raconte encore... Et comme chez les véritables conteuses aucun des très nombreux personnages n'est manichéen, tous ont leur propre personalité riche, complexe,attachante avec leurs failles et contradictions.



Une ode à l'architecture, aux oeuvres laissées par l'architecte impérial Sinan, trésors de l'humanité, tout comme à Rome, à la même époque travaillait, lui aussi sans relâche, un certain Michel Ange ... Une lecture qui fait tout oublier, rien ne me fera bouder l'immense plaisir que j'ai pris pendant ces longues heures entrecoupées de rêverie.
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10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange

Je ne connais pas l'auteure. En fait je n'ai jamais lu, à ma connaissance, d'auteur turc. Partons à la découverte !

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"10 minutes et 38 secondes" : l'auteure imagine que pendant cette durée, même si notre corps est mort, notre esprit tourne encore et se remémore certains souvenirs.

L'auteure va égrener minute après minute, des épisodes de la vie de son héroïne, Leila, femme turque, dont le corps va être retrouvé dans une poubelle suite à son assassinat.

C'est original, mais un peu décousu. Je ne sais pas si c'est ça qui a fait que j'ai eu quelque mal à m'attacher à cette héroïne, bringuebalée par la vie, par le patriarcat, par un monde arriéré mais très actuel de domination. Il m'a manqué un je ne sais quoi pour être touchée.

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Au final j'ai trouvé la 2e partie (les amis de Leila se liguent pour lui offrir une cérémonie mortuaire comme elle aurait aimé ou comme ils voudraient pour elle) plus relevée par ses personnages atypiques. En fait je serais bien restée avec ce groupe bancal mais attachant.

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Donc une lecture en demie teinte pour moi, mais un roman intéressant.
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La Bâtarde d'Istanbul

Je ne pensais pas qu'une romancière turque parviendrait à évoquer le génocide commis contre les Arméniens avec autant de justesse et de précision.

Et pourtant.. Elif Shafak, que je découvre avec ce livre, parvient à évoquer des événements historiques graves tout en nous entraînant dans une saga familiale très attachante et passionnante.

L'héroïne du livre, Amy, est une jeune Américaine qui a un parcours peu ordinaire: son père biologique, séparé de sa mère, est arménien et vit à San Francisco. Son beau-père est turc et vit en Arizona avec la mère d'Amy.

Amy va partir en Turquie à la recherche de ses racines.

Elle va être accueillie par la famille de son beau-père à qui elle ne va pas cacher ses origines arméniennes.

Là-bas, un terrible secret de famille l'attend.

C'est un roman féministe puisque quatre générations de femmes sont évoquées, des femmes fortes qui savent se sortir de situations difficiles.

Un roman haletant qui nous permet d'approfondir nos connaissances sur l'histoire du peuple arménien....
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Trois filles d'Ève

Recherche philosophique et religieuse d’une femme turque qu’on dit « déboussolée »…



Prise dans les embouteillages d’Istanbul en 2016, Peri fait face à un incident qui la bouleverse et lui rappelle l’enfant qu’elle a été et lui amène une remise en question de ce qu’elle est devenue.



Une alternance de chapitres montre cette femme, puis la petite fille des années 80, coincée entre un père qui tend vers le modernisme athée et une mère musulmane intégriste, et qui se réfugie dans les livres et l’étude. Grâce à ses succès scolaires, on la suivra à Oxford en 2001 où elle rencontrera deux autres filles d’Ève, Shirin une Iranienne libérée et Mona, une musulmane qui porte le voile. Dans ses cours avec le professeur Azur elle poursuivra sa quête de sens, de Dieu et d’une troisième voie entre la foi et la science.



Un roman qui donne beaucoup de place aux réflexions sur la société et la religion, tout en campant les dilemmes des femmes dont les valeurs s’opposent. Un excellent livre si ce n’était de la fin qui arrive abruptement et sans un véritable dénouement.

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L'Île aux arbres disparus

Un coup de coeur , une pépite !. Les mots ne viennent pas pour dire le bonheur de lecture que procure L'île aux arbres disparus d"Elif Shafak.

Reprendre la quatrième de couverture et s'approprier la phrase de Colum McCann :" Les mots d'Elif Shafak créent un nouveau monde, à notre intention. "

A partir de son roman Elif Shafak nous entraîne avec les exilés, les déracinés dans un monde du vivant tel que peut en parler Baptiste Morizot dans : Manières d'être vivant.



Ada, seize ans est lycéenne à Londres. Elle vit avec son père , Kostas, chypriote grec éxilé. Celui-ci est spécialiste de l'écologie et de la botanique évolutives.

La mère d'Ada, Defne, chypriote turque est décédé.

Dans le jardin de la maison de Kostas et Ada se tient un figuier.

Ada, se tient debout, dans la classe de Mrs Walcott et laisse sortir de son corps un long cri de rage. Pendant ce cri elle se remémore le passage d'un sermon entendu jadis, peut être dans une église ou une mosquée : "Quand l'âme quitte le corps, elle monte vers le firmament et sur son parcours elle s'arrête pour regarder tout ce qui s'étend sous elle, impassible, indifférente, insensible à la douleur ".

De ce cri de rage, Elif Shafak fait le détonateur de ce roman pour nous dire la rencontre de Kostas et Defne en 1974 dans Chypre déchiré par la guerre civile.

Des personnages d'une folle humanité, puissants débordant de générosité mais aussi de failles et de contradictions.

Pour nous raconter cette histoire , nous naviguons entre Chypre et Londres, entre 1974 et 2020.

Mais cette histoire d'amour, d'exil, de déchirement ne serait être complète sans le point de vue du figuier. Régulièrement celui-ci devient narrateur et confident de Kostas et Defne.

Celui-ci nous rapporte son point de vue sur la situation. Un figuier, c'est vivant. Il perçoit, il entend, il a une mémoire.

Et c'est dans ce personnage du figuier que le roman d'Elif Shafak prend une tournure universelle. Ce figuier nous interroge sur la bêtise humaine mais aussi sur notre temps présent : le dérèglement climatique, la place du vivant et de la nature, la mémoire transgénérationnelle ( racines végétales - racines humaines ) les migrations ( humaines et animales).

L'île aux arbres disparus est un mélange de merveilleux, de rêves ( L'Orient n'est pas loin ) de chagrin et d'imagination.

Plusieurs niveaux de lecture se superposent reliant hommes et arbres autour de l'exil, de la mémoire. Les arbres sont des gardiens de la mémoire de la terre natale et ravivent les souvenirs de nos racines. Peut on être déraciné?

Les arbres gardent une mémoire du temps. Tout comme les humains possèdent une mémoire intergénérationnelle et les traumatismes qui en découlent.

Quelle interdépendance entre les hommes et le monde du vivant.

Je terminerais par l'extrait de l'interview d'Elif Shafak donné à un journaliste pour la Fête du livre de Bron :



« Nous les arbres, nous ne pouvons qu'observer, attendre et témoigner. » Etant un écrivain turque, de quoi vous sentez-vous le témoin ?



Votre question me touche car nous nous trouvons au carrefour de l'humanité. Il n'y aura pas de « retour à la normale » : l'ancien monde est en train de disparaître et le nouveau n'est pas encore né. Ces temps incertains étant effrayants, on voit apparaître des démagogues proposant des solutions faciles. Alors qu'en ces temps de Covid, on a besoin de solidarité, on assiste à une montée des nationalismes. le déclin des droits féminins pointe que rien n'est acté, alors que les femmes et les minorités seront au premier rang des changements sociaux. C'est pourquoi, j'aspire à la sororité. J'aime les arbres au point de les enlacer, il me paraît donc urgent de se reconnecter à la nature. L'éco-féminisme incarne bien ces valeurs car on tend à détruire l'écologie et les femmes. Actuellement, 80% des gens migrent à cause de la crise climatique. Les femmes et les enfants en subissent la plus grande violence.



"Les mots d"Elif Shafak créent un nouveau monde, à notre intention " Colum McCann.

Il est urgent de lire L'île aux arbres disparus "
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Trois filles d'Ève

Peri, mère, épouse et femme turque accomplie, invitée dans un soirée bourgeoise à Istanbul avec son mari, se rappelle son enfance, son adolescence, les choix qu'elle a fait pour arriver là. Au travers de son récit, on a également une vision de la volonté et des difficultés de ce pays à faire coïncider religion et modernité.

Peri supporte les conflits apparemment totalement incompatibles qui opposent ses parents. Sa mère, très portée sur la religion et les traditions et son père bien plus modéré, plus intéressé par l'instruction et la science. Chacun de ses frères a pris un parti et l'a poussé à l'extrême. Peri, petite dernière et arrivée tardivement, attirée par les sciences et l'ouverture sur le monde, a aussi beaucoup de respect pour sa mère et ses croyances, même si elle a parfois des difficultés à la comprendre. Elle grandit avec comme défit tacite de faire entrer ces deux visions dans la même vie.

J'ai aimé ce roman car il donne un aperçu de la société turque, et il fait aussi réfléchir à ce phénomène de société qui est la cohabitation de la connaissance et de la religion. Néanmoins, j'ai vu un petit flop pour la fin que j'ai trouvé particulièrement bizarre.
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