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Citations de Jacques Chessex (173)


HODIE MIHI, CRAS TIBI
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III. LE TEMPS SANS TEMPS

BELLES DAMES

Belles dames vous étiez les colonnes
D'un monde qui se fût affaissé sans vous
Et les boyaux souterrains où ramper vers le divin
Ainsi vous teniez haut dans l'air
Et vous ouvriez dans la glu le champ céleste

Quel animal
Emprunte à la fois l'air et le couloir ?
Belles dames aérées vous fûtes maîtresses
Des naseaux et des rampements
Ainsi le Passage
Donnant à gloire par matière

p.29
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Debout dans son pré. immobile, les pointes du fichu bougeant au vent chaud, le tronc sans cou, le tablier, les petites bottes vissées aux jambes, Marie Blanc a une silhouette russe d'extrême Est, elle vit à la fin du quinzième siècle, se gardant des pillards et des collecteurs d'impôts; et elle vit il y a trente mille ans à l'entrée de sa grotte, le poing crispé sur son caillou ou sa cueillette.
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Ai-je rêvé un sort parallèle au mien, qui fût à la fois le mien et celui de la personne que j'aurais dû être.
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Les semaines qui suivent, ou les mois, sont consacrés à mes dernières volontés dans ce monde d’ombres. Mais les ombres, les apparences, leurs parfums ne me trompent pas.
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Bien vieillir ne consiste pas à faire le catalogue de mes mauvaises rencontres.
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On se réveille un matin avec moins d’appétit pour la journée, on laisse aller quelques besognes comme une fille laissait filer un bas quand j’étais jeune, signe visible de négligence. On entame moins tôt ses repas, on les termine avec peine. On dort peu, on se couche en craignant l’insomnie. La fatigue est de la partie. Reste le désir de répandre une bonne odeur, comme tel modèle révéré. Et plus loin que lui, comme les élus... Et l’odeur vient. O seule odeur souhaitable ! Ce n’est plus l’odeur seule des invitées, sexes ensalivés, hydromel de l’ombre ! Ce n’est plus l’odeur des hôtesses ou des annonceuses au musc lent à fuir ma peau ! Cela provient de plus profond, d’avant, de plus constitutif de celui qui est moi, minuscule rumeur encore, relent à la surface de la terre.
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Et elle rit comme on dit que le diable rit. Elle rit dans son odeur qui soûle, dans ses bouffées, sa touffeur. Quoi qu’elle me propose pour la suite, je sais que je n’aurai ni la force ni l’envie de lui résister.
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Cette nudité rend les corps humains plus visibles, plus présents, « plus nus », dit Monsieur Vailland. Il pourrait dire aussi : « plus livrés ». Elle a encore d’autres effets. Ainsi révèle-t-elle l’austérité, la rigueur, la « maigreur » du maître de maison. Et par l’effet du contraste, l’extrême générosité du même maître, l’ampleur de son cœur, la qualité de sa volonté.
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Dans une époque comme la nôtre, sans courage, sans audace, sans défi, l’auto, la vitesse, la course, c’est la survivance du duel.
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Les morts sont morts, nous sommes d’accord, je ne vais pas les charger de drôles d’histoires maintenant qu’ils travaillent sous terre à s’alléger de ce qu’ils faisaient dessus !
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Je ne l’aurai pas vu vieillir. Quelquefois je l’imagine, âgé, ce visage imaginaire m’obsède. Cheveux blanchis (à sa mort, déjà, le gris gagnait…), les rides du front mobile, creusé, les plis, les marques au cou, la cicatrice un peu creusée entre les omoplates (…) Que serais-tu devenu ? Aurais-tu laissé, vieillard saccadé, s’accuser la part de ton démon, ou te serais-tu simplifié, comme fait l’âge de quelques-uns, les polissant, les usant et les triant en eux, séparant le provisoire, le cassant, l’aigu, gardant le fond, la première forme, l’élémentaire, comme nous faisons de nos souvenirs ?
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Tu t’appelais Pierre, aujourd’hui la pierre t’appelle. Tu étais nommé Pierre, tu es la molasse des contreforts de la Broye, le calcaire du Mormont, le grès de la Molière, les moellons de l’Abbatiale et l’humble tuf des petites tours, des oratoires, des fortifications se défaisant entre grange et jardin à framboisiers. La pierre te nomme. Mutuelle reconnaissance. « Tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon église." Mais qu’est-ce que cette église sans toi ? Non, je mens. J’ai dû apprendre à la construire, à la reconstruire sans toi. Cette église, ma pauvre vie… Construction et dérision.
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Mémoire de l'aîné et du fils
Tissu des manques et des aveux jamais osés
Ah que cette plaie que je cache
Ne me gorge plus de son perpétuel poison âcre.
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J'aurais voulu revoir, ce jour de Pâques, "La Passion" de Pasolini, le film passait régulièrement toutes les dernières années à cette date, j'ai dû trouver en moi, comme Augustin, l'Image qui me manquait à l'écran. Ce n'est pas plus mal. J'en tire, conclusion heureuse, qu'on est plus riche qu'on ne croit au-dedans. Dénuement ? Table vide ? La réponse : il faut plonger en moi, revoir, trouver, et le monde s'ouvre, se dilate. C'est ce que je souhaite aujourd'hui à ceux que j'aime.
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Revenances, retours, rappels, mon père, insistance comme d'un oiseau évident et effacé derrière la vitre, mémoire, obscurcissement et à la fois disparition de la mémoire, brusques éclaircies, trouées, éloignement et rapprochement de son visage au fond des heures, au fond des milliers de jours passés sans lui, avec lui, avec son regard qui reprenait pouvoir sur le vivant et s'éteignait tout aussitôt dans la certitude de son néant.C'est la blessure.
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Ce que ma naissance charrie de la cruauté, de la violence, de la souche. La folie suisse. C'est elle qui essaie de se dissimuler, cette folie, sous la polissure et le neutre. Les mœurs neutres. L'argent neutre. La Suisse qui cache ses gouffres. Qui s'arrange, elle, pour charmer et manipuler ceux qui s'approchent de sa face lisse. Mon histoire à moi vient d'une terre souvent démente, mais occultée, préservée par huit siècles de prudente ruse, et secouée en profondeur par l'attrait et la tradition du sang.
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"Certa bonum certamen", devise des Messieurs de Port-Royal, combats le juste combat, pour voir en toi et te dire, te révéler, t'expurger, dans des lieux où on ne ment pas. Dans la prière, le journal de soi, la conversation à bonne hauteur, l'assistance à une âme en peine, l'aveu de soi à un compagnon d retraite. Mon protestantisme originel est proche du jansénisme de Messieurs Arnauld et de Sacy.
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Pour moi de même il y a des moments où le vide se peuple, a contrario, et dans le gratuit, ou l'absurde, du divin, ou de la voix de Dieu.

- Pouvez-vous citer un lieu où ce "peuplement" est tangible ?

Dans la chapelle du Sépulcre, à la Cathédrale de Fribourg, une mise au tombeau médiévale. Larmes des femmes, corps vaincu du Christ, et là-dessus, dans l'ombre crue, la lumière violente et orangée de deux vitraux de Manessier. Eclairage désespéré, échec du Christ, puissance de la mort - on n'imagine même pas l'espoir de la résurrection.
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Jamais je ne me lève, vendredi saint ou pas, sans me rappeler la mort du Christ.
Jamais je ne vis le vendredi saint sans tenter d'éprouver, à l'heure même de la mort du Christ, l'effroyable douleur de son supplice.
Mais fait nouveau depuis dix ans je ne SOUFFRE plus de cette mort, elle est clarté, elle est ouverture, et dans cette ouverture j'entre.
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