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Citations de Jacques Chessex (173)


Tu entras dans mon rêve

Tu entras dans mon rêve et me rejoignis
L'air était brillant de fleurs autour de ta tête
Maintenant tu rejoins l'inivisible dont tu es venue
Le cours peu imaginable du non-vivant

Quand je t'ai vue au milieu des vives couleurs
J'étais inquiet de ta clarté trop certaine
A la portée de tous

Aujourd'hui
Je souhaite que ta voix gagne mon sommeil
Que la nuit s'ouvre à tout ce qui n'est plus toi
Pour le repos de mon corps et la paix de mon âme
Allant sans toi
Comme avant ton apparition dans la splendeur
Où je n'ai pas su te garder
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Il est sept heures trente
La cloche de la chapelle sonne
Et déjà se dissout dans l'air

Ah ni ce bruit ni mon être
Longtemps ne résonnent
Des bruits du monde
Ainsi j'apprends
A être rien
A l'heure matinale où commencent à jaillir
Des cris d'oiseaux
Qui seront rien quelques secondes plus tard
Dans ce temps et cet espace
Où j'écris rien


(D'ailleurs plus tard n'a pas de sens
L'éblouissement est dans l'Instant
Hors de cette simplicité il n'y a rien)
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La littérature, c'est la guerre. Mon armée, ce sont mes livres.
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..... Ancestralement tout est maléfique et dangereux dans ces campagnes perdues, l'orage qui gonfle les rivières, la foudre qui met le feu aux toits, la sécheresse qui tue les champs, grille l'herbe, rapetisse et racornit les fruits, la pluie qui pourrit la récolte et ravine les cultures .
.... On se méfie des vagabonds, des mendiants, des prédicateurs ambulants chapardeurs comme des romanichels. On chasse les gens du voyage, bohémiens, tsiganes, on fait fuir les colporteurs à coup de fourche.

.... Mais voilà le 20 février, voilà le règne du vampire qui résume toutes les craintes, les violences, la folie rentrée, et resserre sur l'insaisissable l'horrible secret du monde mauvais.
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23 février1903
La feuille de Lausanne

Cette triste affaire, écrit le journal, aura dans notre pays un douloureux retentissement. Jamais encore la chronique du crime n'avait eu à enregistrer en Suisse un acte aussi abominable. Il est vivement à désirer, pour la tranquillité de la conscience publique, que le coupable tombe entre les mains de la justice et reçoive le châtiment exemplaire qu'il mérite. Les hyènes ont l'excuse de la faim pour déterrer les cadavres. Pour lui, pour cet ignoble vampire, nous n'en trouvons pas.
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C'en était trop. Jean Calmet, furieux, froissa la double feuille craquante, en fit une boule et la jeta vivement dans un coin de la véranda, derrière une colonie de plantes vertes.
- Qu'est-ce qui te prend? dit timidement Mme Calmet. Il y a quelque chose qui t'a blessé?
A quoi bon répondre? Il était humilié de son geste. Il regardait la vieille femme courbée avec colère, il souffrait qu'elle fût sa mère, qu'elle dût mourir, qu'elle fût réduite en cendres elle aussi avant qu'il pût lui dire au moins une partie de ce qui l'écrasait depuis des années. S'était-elle doutée de quelque chose? Avait-elle deviné, dans le fond de son coeur, l'angoisse de son benjamin, ses terreurs, son besoin de tendresse, cette faim qui lui martyrisait l'âme et la fibre? Alors Jean Calmet fit un geste qu'il n'avait jamais accompli, qu'il n'avait même jamais imaginé qu'il ferait : il se leva, il marcha vers sa mère, il la souleva de son fauteuil et il l'étreignit, la pressa contre lui, fluette, osseuse, il serra dans ses bras ce petit être dérisoire qui ne se débattait pas, qui ne réagissait pas, simplement elle se laissait enlacer jusqu'à l'oppression, elle soufflait plus fort, Jean Calmet pensa au halètement de Thérèse sous le couvre-lit d'or. Toi aussi tu a été Ophélie, songeait-il en enlaçant le corps décharné, toi aussi tu as enchanté, bercé, choyé, tu étais Circé, Mélusine, tu étais Morgane, tu étais toutes les fées des contes et maintenant tes os saillent et les rides lacèrent ton visage!
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Faire-part

Je vous envoie mon faire-part
Sans cri sans regret ou larmes
Maintenant j'ai la paix pour penser
A mon peu de vertu ou d'armes

Maintenant je tiens peu de place
Juste un invisible espace
Entre mon ancienne vie et moi
Je n'habite même plus un corps
Où voulez-vous que ma voix parle
Si je n'ai plus de tête ou de langue
Et ma cendre est déjà poussière
Dans l'enclos où viendrait l'accord

Maintenant l'air se ferme
Ni aucune chair ni même
la lumière où j'attendais
Le sens d'avant et d'après
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Assis dans un fauteuil d'osier au milieu de sa petite boutique, M. Liechti lisait un magazine italien. Il s'épanouit, se leva et Jean Calmet éprouva un rassurant sentiment de tranquillité à revoir les longues dents écartées, les joues creuses et le haut front dégarni du vieux coiffeur. Un peigne blanchâtre sortait de la pochette de sa blouse bleue. D'un geste théâtral il invita Jean Calmet à prendre place dans l'un de ses deux fauteuils de cuir usé. Jean s'assit, se renversa légèrement, sa nuque rencontra la fraîcheur de l'appuie-tête. Aussitôt l'envahit un plaisir annonciateur d'une félicité plus complète. Mais il ne fallait rien presser. M. Liechti avait des gestes lents, méticuleux, et Jean Calmet s'enchanta de ces préparatifs dans la boutique silencieuse où flottaient les effluves acides des eaux de Cologne.
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Qu'est-ce que l'horreur ? Quand Jankélévitch déclare imprescriptible tout le crime de la Shoah, il m'interdit d'en parler hors de cet arrêt. L'imprescriptible. Ce qui ne se pardonne pas. Ce qui ne sera jamais payé. Ni oublié. Ni prescrit. Aucun rachat d'aucune espèce. Le mal absolu, à jamais sans transaction.
Je raconte une histoire immonde et j'ai honte d'en écrire le moindre mot. J'ai honte de rapporter un discours, des mots, un ton, des actes qui ne sont pas les miens mais qui le deviennent sans que je le veuille par l'écriture. Car Vladimir Jankélévitch dit aussi que la complicité est rusée, et que rapporter le moindre propos d'antisémitisme, ou d'en tirer le rire, la caricature ou quelque exploitation esthétique est déjà, en soi, un entreprise intolérable.
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- [...] Premièrement, j'interdis que mon corps soit autopsié. Je sais trop que c'est l'usage ici, on pratique l'autopsie de façon systématique, dans les heures qui suivent la mort. Pour moi, pour mon propre corps, je l'interdis absolument. AB-SO-LU-MENT, vous m'entendez ! Doucet approuve d'un hochement de tête. Mais il est demeuré silencieux. - Jurez, docteur Doucet ! Jurez-moi qu'il n'y aura pas d'autopsie ! Au besoin que vous vous y opposerez par la force. ou par la désobéissance ! Doucet jure. Il est livide. - Deuxièmement, poursuit M. de Sade d'une voix forte - il crie presque - j'interdis qu'aucune croix, ni aucun signe religieux, soient dressés sur ma dépouille. Aucune saloperie de croix, ni aucun signe religieux ! Vous m'entendez, docteur Doucet, aucune croix ! Aucune cochonnerie de croix !
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En rêve

Cette nuit-là sans inquiétude et sans blâme
Tu me verras venir comme à l'ordinaire
Et tu me détesteras d'être mort
Tu n'auras pas la force de t'éveiller
Ni de pleurer ni de me repousser ô complice
Dans ce songe sans herbe
Tu ne pourras appeler ni fuir mon image trop éprise de toi
Ni ma bouche encore plus inutile
Qu'au temps sans épaisseur maintenant de ma vie
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De récentes recherches ont laissé supposer que les restes du soldat inconnu, interprétés par l'analyse de leur ADN, appartiendraient au citoyen vaudois Charles-Augustin Favez, engagé volontaire dans l'armée française en guerre en février 1915. Tué devant la ferme Navarin le 18 septembre de la même année. Et que le soldat inconnu, héroïquement honoré par le chef d'Etat, la sonnerie aux morts et le salut au drapeau chaque 14 juillet que Dieu fait, ne serait autre qu'un fou et un effrayant repris de justice d'origine suisse.
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Il n'y a pas d'unité

Il n'y a pas d'unité Dans les choses vues ce matin
La diversité est sable Pire farine au vent
Il n'y a pas de lien A la fin dans la structure
Jeu d'osselets dans mon crâne L'idée fuit la raison
Furet qui s'absente

Puis je me souviens de l’Être Qui demeure dans la place
Parole par feu et glace Si le temps retrouve son flux
L'étonnement sa nécessité La mort a perdu ses dés
Dans l'argument superflu
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" Ropraz, dans le Haut-Jorat vaudois, 1903. C'est un pays de loups et d'abandon au début du vingtième siècle, mal desservi par les transports publics à deux heures de Lausanne, perché sur une haute côte au-dessus de la route de Berne bordée d'opaques forêts de sapin. Habitations souvent disséminées dans des déserts cernés d'arbres sombres, villages étroits aux maisons basses. Les idées ne circulent pas, la tradition pèse, l'hygiène moderne est inconnue. Avarice, cruauté, superstition, on est pas loin de la frontière de Fribourg où foisonne la sorcellerie. On se pend beaucoup, dans les fermes du Haut-Jorat. A la grange. "
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PLUIE


La pluie gifle un carré de bouleaux frissonnants
Sur un coteau jauni balayé par le vent…
L'automne est une demeure d'or et de pluie,
Dans ses étages transparents des corbeaux crient.
Déjà derrière les troncs gorgés d'eau, la neige
Emplit l'air d'une odeur légère de feux d'herbe.
Des vallons montent des fumées dans la pluie.

Un homme marche dans la lumière assourdie,
Voyant baisser les feux, les lueurs de l'automne :
— L'air ne portera bientôt ce vent jaune
Ni ces derniers oiseaux, ni ces feuilles qui brillent…

Il pleut. La pluie efface ses paroles
Comme les lueurs basses de la terre.
Quel passage trouvera-t-il, cet inquiet,
Quand l'or couvre sa lampe dans l'ombre froide ?
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Chant d'été

J'aime le rouge des coquelicots
Et le sang luisant des martyrs
J'aime le charbon rouge
Et le disque japonais du soleil à l'aube
J'aime la bouche bien-aimée
Et le caillot de la langue renégate
J'aime la paix des haies aux fraises rouges
Et la crête tremblante des coqs criant la fin de la nuit

J'aime tes lèvres ô Sœur
Saignant sous le soc des affamés
J'aime la poitrine du rouge-gorge
Becquetant la prairie au passage des errants
J'aime les gouttes figées en larmes rouges
Nouvelle résine du siècle au bois des chevalets
J'aime la couleur éclairante dans le lointain
Tous les colliers de perles roses des bûchers
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Tu dors tête claire,
Ton rêve est la fraîche rivière entre les feuilles,
Ô miroir matinal, buée verte,
Tu viens sous le lierre et le vent
Comme une maison douce pour vivre ...

Le matin penche comme une fougère ,
J'écoute au loin les cascades tomber.
Ton souvenir est une voix légère ,
L'air se partage avec l'éternité. (...)
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" Qu'ils continuent, qu'ils persévèrent, qu'ils cassent la barraque,qu'ils détruisent ces saletés de familles et ces patriarches et ces tyrans et les gros imbéciles qui nous paralysent depuis des siècles."
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Il disait qu’il ne ferait pas de vieux os. Qu’on aurait son corps, pas sa tête. C’était confus. A la fois très compréhensible et très obscur. A la fin j’ai saisi quelques mots, qu’il a répété plusieurs fois : "Mon dernier crâne! Mon dernier crâne!" Ce qui montre bien l’incohérence où peut sombrer cet impie. p.22
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Tout se détruit

Avril et le grésil si fin fulgure
Nous sommes entrés dans le printemps
Je m'appuie à la claie du vent
Je regarde les dons, les grâces
Toute présence alors s'efface
Don maudit, piège quand la trace
Du diable est seule à me narguer
L'air s'emplit d'ailes, d'appels fastes
Même l'oubli paraît un zèle
A ma mémoire coupable

Forêt, torrent, ravin, colline
Qu'ai-je fait pour hériter vos ruines
Qu'ai-je outrepassé dans l'infâme
Pour assister à votre fuite
Chemin, rocher, ruisseau, vallée
Pour vous perdre jour après jour comme Tantale
Sans cesse volé de l'eau limpide et du fruit
Volé moi-même de vos magnificences
Dans la poudre haineuse d'avril

L'air noircit
Le cerisier tombe en cendres
Je vois la lumière descendre
Et se coucher parmi les os des siècles inutiles
Que dois-je expier dans avril
A tout instant dépossédé de mes regards, pauvres songes

Le vent porte un épervier déjà mort
La neige des vergers s'éteint
La forêt flotte comme une troupe de fantômes
Dans la phosphorescence d'un plat d'étain

[.................................................................]
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