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Critiques de Jean-Marc Parisis (71)
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Les inoubliables

C'est un livre conçu à partir d'un silence. Pour remplir ce silence, Jean-Marc Parisis aurait pu choisir l'option du roman ; il a préféré la réalité de faits établis, notifiés noir sur blanc dans des dossiers épais, bien rangés sur les rayonnages des Archives. Une façon de rendre justice à ceux dont on ne parle plus et avec lesquels il partage une même unité de lieu : le village de La Bachellerie, niché au fin fond de la Dordogne, que l'on aurait pu croire, à tort, à l'abri des tourmentes de l'histoire.



Lorsqu'il était enfant, dans les années 60-70, qu'il passait tous ses étés dans la maison de ses grands-parents dans ce petit coin de paradis, il n'a jamais entendu parler de la façon dont La Bachellerie avait traversé les années de guerre. Un silence plutôt répandu dans les familles à cette époque. C'est par hasard, en faisant des recherches sur un autre événement que Jean-Marc Parisis tombe sur la photo qui orne à présent la couverture de son livre : cinq enfants d'une même famille juive, victimes de la rafle du 30 mars 1944 à La Bachellerie. Il prend alors conscience de tout ce qu'il a partagé avec ces enfants, lui dont la propre enfance s'est déroulée au contact des mêmes pierres, des mêmes champs baignés de soleil, des mêmes chemins où cueillir des mûres. Il part à leur recherche à travers les nombreux écrits et témoignages disponibles, rencontre l'un des rares survivants ayant échappé à la rafle, Benjamin, âgé de 14 ans à l'époque des faits.



Sous sa plume, surgit alors la réalité d'une époque. Celle d'un village qui, jusqu'en 1940 ignorait ce qu'était un juif. Une région qui voit soudain affluer les populations de l'Est de la France, contraintes à l'exil au moment de l'armistice. Parmi elles, de nombreuses familles juives qui vont trouver asile et travail dans la campagne, auprès d'une population accueillante et solidaire où le bon sens paysan semble prévaloir. On s'entraide, chacun à son niveau, les fermiers en offrant du travail, les gendarmes en trafiquant des rapports, aidés en cela par la bienveillance du préfet. La vie s'organise, certes précaire. Mais la gangrène gagne, sous la forme de la milice qui s'infiltre jusqu'aux endroits les plus reculés. Et les habitants qui pensaient qu'un coin aussi perdu passerait peut-être entre les mailles du filet vont être vite détrompés lorsque la division Brehmer qui remonte vers Paris avec pour mission de nettoyer les maquis sur son chemin fait étape à La Bachellerie.



C'est un véritable objet littéraire que nous offre Jean-Marc Parisis, bien au-delà du simple récit. A travers le parallèle entre les enfances vécues à différentes époques, il met à jour des correspondances entre des individus qui ne se sont jamais connus et qui pourtant sont liés pour toujours. Et l'on se dit que les murs ne devraient pas être les seuls à se souvenir.



Très émouvant le moment où il s'aperçoit face aux quelques survivants des camps que sa quête ne peut aller au-delà des faits vécus au village car ensuite, cela dépasse son propre entendement et cela n'est plus son propos : "Si les mots ont manqué à ceux qui ont vécu l'enfer, il n'y a rien à ajouter".



Tout simplement magnifique. Belle ambition, belle réalisation. Indispensable.
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Avant, pendant, après

Cher Jean Marc,



J’ai lu un livre que je relirai ou du moins que je feuilletterai encore et encore et j’en ai la certitude, toujours avec le même plaisir invariable de la première lecture parce que ce livre est un roman d’époque : la mienne. « Avant, pendant, après » est un court roman de 114 pages qui m’a scotché de bout en bout, trois heures de lectures non stop, une histoire moderne dans une époque furieuse et contemporaine, des personnages touchant parce que fondamentalement tristes, seuls et désemparés. Jean marc, je me suis laissé prendre quand tu m’as embarqué dans la vie amoureuse et échevelé de ce quarantenaire, parolier prolifique pour un chanteur de variété célèbre dans le Paris des années deux milles, ce Paris sûr de lui-même, exubérant, souriant, incandescent, ce Paris que j’empresse d’aimer comme tes personnages. Dans une prose soignée, ciselée, caustique et parfois minimaliste : « …Seul comptait le bonheur des mots, on ne l’entendrait jamais, je beurrais de volupté ce monde de merde, je mariais les mots, et je les envoyais se faire foutre à la musique dans la fraicheur climatisée des studios …», tu dépeins un milieu, que sans doute tu dois bien connaitre même si parfois tu sombre ( heureusement pas trop) dans des clichés trop souvent entendu - celui du show business - dans un cynisme et une lucidité effrayante. Ton huitième roman parle d’amour, le vrai, celui qui fait mal, celui qui nous saigne le cœur avec douceur et excite notre curiosité de lecteur de bon roman léger. Jean Marc, tu scrutes, tu cisailles, tu dépouilles, tu arranges avec une précision d’horloger helvète les modalités exquises de la rencontre, les rituels bien sentis de la séduction, l’évidente impossibilité d’une vraie vie à deux, la brutalité de toute forme de séparation. Le roman est bien construit, rien n’est forcé, tout s’écoule dans une limpide fluidité, les articulations de l’intrigue sont d’une grande justesse, tu maitrises avec brio des thèmes à la mode chez la nouvelle génération d’écrivains contemporains comme la sournoise solitude, la certitude fragile, le désarroi subtile, la désillusion lancinante, l’effet des sentiments vertigineux, la folie amoureuse, les affres perfides de l’ennui, cette façon absurde chez certains de voir des destins nichés dans chaque rencontre bref la condition effroyable de l’homo sapiens moderne. Enfin et non des moindre tu nous sers des aphorismes bourrés de grâces avec beaucoup de générosités, ca doit sûrement être une des raisons pour laquelle j’ai aimé ton roman, les aphorismes c’est un peu comme le visage frappant d’une ravissante jeune fille que l’on essaye de chercher dans un grand casting pour top-modèles en herbe où on a l’impression qu’il n’y a que de jolies visages évidents, tu sais cette sensation inouï quand on trouve ce retrouver nez à nez face à ce visage frappant, on s’y attarde presque béatement, on la photographie mentalement, on ne veut plus la quitter des yeux, je crois que tes aphorismes produisent le même effet. Voici quelque unes de ces pépites que j’ai égrené au passage et qui m’on un arraché un sourire de délectation: « j’écrivais trois cent mots qu’un autre écrivait en trois minutes », « la première que je l’ai vue, je ne l’ai pas vue, je l’ai aimée de dos », « les blondes, on dirait toujours qu’elles pleurent des cheveux. Avec les brunes c’est plus grave, plus tragique, on est au vif du sujet, dans le noir évident de la sexualité ». Mon ami, je crois que tu as écrit un livre touchant, lucide, réfléchi, trempé dans l’argile de la grâce. Je sais pourquoi j’aime vraiment ce roman, c’est parce que j’aurai aimé l’écrire.



Ton ami.



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Un problème avec la beauté, Delon dans les yeux

Ne tournons pas autour du pot, le "roman" est dispensable, Jean-Marc Parisis, auteur notamment d'un livre aussi étrange que superbe ("Physique") ne semble pas trop savoir où il va. Le livre oscille entre une biographie pudique tentant sans convaincre d'éclairer une des faces sombres de Delon (ses liens avec le milieu) et un essai sur la "beauté" dans lequel l'auteur ne convainc que par fulgurances, ne creusant pas son sujet.



Bref, un livre déconcertant, très bien écrit (comme tous les Parisis), qui se lit sans déplaisir, quelques vrais moments de poésie aussi, un livre sans doute destiné aux cinéphiles amateurs d'une époque révolue, celle de Jean-Pierre Melville, Deray, Visconti, qui peuvent apprécier à leur juste valeur les longs passages sur "le Samouraï' ou "le Guépard" (ce n'est pas mon cas).



Enfin, on sent que l'auteur a une vraie tendresse pour Delon (un type qui parle de lui à la troisième personne, quand même) et pourtant il ne parvient que par instants à le rendre aimable, et ne traite pas du sujet exposé dans le titre : quel est le problème avec la beauté irradiante du Delon des années 60 ? Je me le demande encore ...

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Les aimants

Les aimants. Un titre, deux interprétations: des aimants qui s’attirent les uns les autres et attirent à eux toutes sortes de matériaux mais aussi les a(i)mants comme personnes capables d’aimer – ceux qui aiment, ceux qui s’aiment.



La lecture de ce très court roman nous conforte dans l’une et l’autre des interprétations. Ava et l’homme du récit, le narrateur, font de leur vie une vie à deux. Qu’ils soient ensemble physiquement, qu’ils soient amants ou frère et soeur, ils sont toujours deux. Depuis leur rencontre sur les bancs de la Sorbonne et pendant les trente années qui suivront, ils resteront ensemble, liés, reliés par l’essentiel.

Ces deux-là sont pourtant très différents. Mais ils se complètent parfaitement. Ils se retrouvent dans l’amour des livres, de la poésie et surtout, dans l’amour de la vie. Ava est entière, exclusive. Elle vit entièrement ou pas du tout. Elle aime passionnément ou pas du tout. Le narrateur, quant à lui, est plus nuancé mais son amour et son admiration pour Ava le transcende.

Ces deux-là savent se retrouver. Les silences, les mois sans se voir ne sont pas un obstacle à leur amour.



Ce petit livre est une déclaration d’amour en même temps qu’il se fait le récit d’une vie à deux. Le narrateur ne peut vivre bien sans Ava. Ils sont deux ou bien ils ne sont plus.



C’est un roman que j’ai dévoré. La poésie qui se dégage des mots de l’auteur, l’esquisse faite d’Ava et de sa philosophie, de son tempérament et de sa singularité font toute la délicatesse et la violence de ce récit. A l’image de la femme adorée, l’écriture n’accepte aucun compromis. Les mots sont ciselés, souvent beaux et parfois durs.



C’est l’histoire d’une passion, d’un amour qui commande tout et qui absorbe jusqu’à la lumière du jour, jusqu’au monde.

Il ne s’agit en rien d’une histoire à l’eau de rose. Celle-ci est entière et belle.
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Les inoubliables

Coulé dans un style éclatant qui ne se voit jamais, porté par une colère sourde, «les Inoubliables» n'est pas un livre d'histoire, c'est un récit engagé, écrit à la première personne, où l'adulte Parisis semble sans cesse s'effacer derrière l'enfant Jean-Marc.
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Les inoubliables

Pour ne pas oublier maintenant que les témoins directs de la Shoah ont à peu près tous disparus . Un récit émouvant bâti autour d'une photo , celle d'une fratrie de cinq enfants découverte par Jean-Marc Parisis lors d'une recherche de documents concernant la rafle du Vel d’Hiv. Cinq frères et sœurs raflés et déportés en 1944. Le cliché précise qu’ils ont été arrêtés à la Bachellerie village où l'auteur a passé en partie son enfance .Il va alors essayer de comprendre ce qu'il s'est passé et le silence de ses grand-parents sur ces événements.

Un récit d’une authentique sensibilité, empli de pudeur et de respect .

Un témoignage à lire sans modération alors que la peste brune refait surface dans nos sociétés .
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Une bibliothèque d'écrivains

Sur les 108 auteurs 3 seulement m'étaient familiers : Philippe Le Guillou, Maxence Fermine & Georges-Olivier Chateaureynaud. Les goûts et les couleurs...
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Les inoubliables

"Je les regarde.

Mais ils me regardent aussi."



J'ai découvert Jean -Marc Parisis lors de la présentations de son livre "Les inoubliables" lors de l'émission "La Grande Librairie" : j'avais été conquise par la fougue de cet écrivain à nous expliquer le pourquoi de sa quête et l'aboutissement de celle-ci. Il vivait son sujet...



Je viens juste d'avoir la possibilité de lire le livre et j'en suis habitée : ces enfants - ceux de la photo point de départ à la recherche et tous les autres évoqués - ne quitteront pas mes pensées de sitôt.



Quel Beau livre sous forme de récit - et c'est ,à mes yeux, ce qui fait sa force - que ce cheminement auprès de ces personnes déplacées. et de leur vie dans ce petit village.



Jean-Marc Parisis établit un parallèle entre son enfance heureuse à La Bachellerie et celle de ces enfants réfugiés : comment un même lieu peut-il générer tant d'émotions et de sentiments opposés?





A lire absolument.





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Avant, pendant, après

Un livre plein de sensibilite, un vrai plaisir de lecture...a recommander...
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L'histoire de Sam ou l'avenir d'une émotion

Ce roman est un joli roman d'amour, mais pas que, il y parle aussi de souvenirs,de nostalgie et surtout la nostalgie du premier amour.

Un texte mélancolique et poétique.

L'histoire, c'est Sam, 14 ans ,il joue au foot avec ses amis quand son regard croise celui de Deirdre une jeune galloise,ils vont se revoir le soir, ils n'ont en tout que trois petites heures, il va garder ce souvenir en lui.

Sam doit partir le lendemain,mais ils se promettent de s'écrire et de rester en contact,malheursement rien ne se passe comme il le souhaitait, si au départ, ils s'écrivent,au fils des mois,cela se tasse et il se lasse.

Nous le suivons tout le long d'une partie de sa vie.

Ce roman est court et se lit d'une traitre et il nous conte

la nostalgie,l'enfance, le souvenir du premier amour, que l'on n'oublie pas.

Mais il y a aussi les regrets,les rencontre du hasard que l'on n'oublie pas non plus.

Un roman doux et poétique.

Un roman à lire entre deux lectures




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On va bouger ce putain de pays

- Salut JM tu nous dois un livre et t'es en retard...

- Oui je sais mais j'ai pas d'inspiration!

- Je sais pas prends des exemples dans l'actu, écologie? Immigration...

- Quinquennat de Macron?

- Oui si tu veux mais attention à pas se retrouver en justice.

- T’inquiètes pas je changerai les noms.

- 300 pages?

- Euh non 180 ce sera déjà bien !

- Ok je te laisse 2 semaines et on envoie à l'impression!





Nous ne voyons pas d'autre explication...

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La mort de Jean-Marc Roberts

Jean-Marc Parisis a écrit un hommage à son éditeur et ami Jean-Marc Roberts. L'homme, également écrivain, était insaisissable et n'était pas sans défauts mais il attirait l'affection.



Au delà de l'hommage et des conventions d'usage en ces circonstances, le livre a surtout pour intérêt d'apporter au travers des anecdotes racontées par Parisis, un témoignage sur le fonctionnement d'un éditeur, sur le monde littéraire français des dernières décennies et sur les moeurs de l'univers éditorial parisien.



On y croise ainsi les chemins de Christine Angot, Marcelle Iacub au moment de la parution de son livre sur sa relation avec Strauss-Kahn, François Marie Banier, Aragon... Jean-Marc Parisis décrit avec ironie le rituel de la rentrée littéraire et le système des prix littéraires.

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Les inoubliables

Alors que je ne gardais aucun souvenir du précédent roman de Jean-Marc PARISIS ("Les aimants", cent pages dont je crois n'être pas venue à bout !), j'ai eu envie de lire ce récit qui retrace le destin de cinq enfants juifs, réfugiés en Dordogne et qui finiront comme tant d'autres, gazés au ZyklonB à Auschwitz.

Jean-Marc PARISIS déroule la chronologie de ce coin de France, retrouve des témoignages que le temps a parfois flouté, rencontre un survivant de la rafle, enquête minutieusement.

Le tout est extrêmement bien documenté, à la manière d'un archiviste méticuleux, sans jugements sur les comportements des uns ou des autres et pourtant le récit, pudique, est riche en émotion et rend hommage à ces enfants oubliés. L'auteur réussit à mettre en parallèle son enfance dans ce village et celle des Alsaciens qui y ont vécus, pas tout à fait cachés, dans une relative tranquillité jusqu'au 31 mars 1944, jour de Pessa'h...Ils prendront le même convoi 71 que trente-quatre enfants de la colonie d'Izieu raflés sur ordre de Klaus Barbie...

J'ai apprécié de ne pas deviner entre les lignes d'apitoiement ou de culpabilité latente qu'on trouve parfois dans certains ouvrages traitant du sujet, j'ai au contraire aimé que l'auteur glisse en filigrane les souvenirs heureux de sa propre enfance se demandant si les enfants Schenkel avaient emporté avec eux un peu de ces paysages où ils avaient eux-aussi vécu.

Un beau récit qui, au-delà de la peur et de l'horreur, par sa douceur redonne vie à ces cinq enfants.
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Les inoubliables

A la fois factuel et incarné, le beau livre de Parisis parle de douleur et de mémoire. Il fait revivre des hommes et des femmes pris dans la tourmente, dans la peur. Certains ne sont jamais revenus. D'autres n'ont jamais oublié


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Les aimants

Vu que le roman d'amour français doit certainement être le genre littéraire que j'ai le plus lu au cours des 15 dernières années, les récents romans que j'ai lu dessus me semblent plus forcément être très originaux. C'est notamment le cas de ce très court roman, encensé par la critique presse lors de sa sortie, mais qui en dépit d'une incontestable belle plume m'a semblé trop bref et trop anecdotique pour sortir du lot.

La relation amoureuse entre le narrateur et cette Ava a beau être condamnée d'avance et romanesque, on reste un peu extérieur à cette histoire, à cause du ton un peu détaché et un peu supérieur de l'auteur, et surtout à cause de la trop grande brievété de l'ensemble qui empeche un vrai attachement pour les personnages...dommage!!!
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La recherche de la couleur

La recherche de la couleur , Jean-Marc Parisis, Stock, 184 pages, 2012



Cet écrivain a un style qui vous saisit l’esprit dès les premières lignes. Le milieu Germanopratin où se déroule le roman peut paraître restreint et sans grand intérêt. Que l’on fasse alors l’autodafé de Proust à cause de sa peinture des salons de Saint-Germain… Chez Jean-Marc Parisis, tout tient au style qui transmet un regard sur les êtres et notre temps. Comédie de caractères et pointe acérée qui dévoile l’époque. Au-delà de la transcription des torts et des travers contemporains, on y boit une simplicité pleine d’espérance, celle du héros qui sait quoi et qui aimer, et va jusqu’au bout de ses goûts.



Et puisque les citations sont des invitations à lire, en voici quelques-unes :

«(...) mort de la littérature, du politique, de l’histoire, de l’esprit, de la musique, du football, mort de tout. On spéculait aussi spécieusement sur la vogue d’un « sentiment apocalyptique ». On en bouffait, de l’Apocalypse. Beaucoup s’en gavaient en attendant le Déluge. L’épilogue du Nouveau Testament profitait aux Philistins, aux marchands d’épouvante, aux romanciers engagés. Un bon produit financier, l’Apocalypse, à valeur d’obligation à la bourse des foutaises et des tartufferies. En vérité l’Apocalypse avait déjà eu lieu. L’horreur avait déjà eu lieu. L’horreur du vingtième siècle n’était pas rachetable.», La recherche de la couleur , Jean-Marc Parisis, Stock, 184 pages, pages 73-74.



A propos des Champs-Elysées, « (…) Baudelaire répétait avec violence « Je vous dis que ça sent la destruction .(…) Ni la mort, ni l’Apocalypse, la destruction. Quoi qu’il en coûtât, j’aimais vivre à cette époque de destruction. La destruction était passionnante. C’est elle qui changeait la vie.» La recherche de la couleur , Jean-Marc Parisis, Stock, 184 pages, page 74



« Les sentimentaux n’avaient pas l’intelligence des sentiments. Ils compensaient par le lyrisme, le baroque, l’outrance. Ils exaltaient ou il offensaient. Gadeux m’avaient offensé en croyant que je ne verrais pas clair dans un jeu où il se défaussait de son incurie. Il m’avait fait un drame, et c’était le sien. Enfermé dans un rapport pictural à la langue, il la contemplait mieux qu’il ne la comprenait, la reproduisait plus qu’il ne l’écrivait, l’autopsiait au lieu de l’animer. Soumis à la langue, il l’imitait, l’idolâtrait. Gadeux réclamait des maîtres, des autorités. D’où son culte des Classiques et le mimétisme à l’œuvre dans ses catalogues. » La recherche de la couleur , Jean-Marc Parisis, Stock, 184 pages, page 84



« Qu’avait fait Gadeux de toutes ces années ? Il avait écrit sans doute, à sa façon toute judiciaire, minutant comme un huissier, montant des dossiers, archivant les pages comme les photos qui lui servaient à barbouiller son impuissance. Ecrit en indic, en voyeur, contre la vie et pour la mort, la postérité. En planque dans le posthume, comme le modèle Saint-Simon, mais sans avoir vu le roi, ni fréquenté la cour.

L’extraordinaire chroniqueur de la cour de Louis XIV retrouvait d’ailleurs la cote dans les cénacles conservatoires de la mélancolie française. Symptôme du refoulé courtisan national, Saint-Simon fascinait d’avoir côtoyé les puissantes et clinquants, les people du Grand siècle. Toute cette vie d’étiquettes, de grenouillages, de reptations, revanchée, rédimée par le pouvoir absolutoire de la langue dédouanait, rassurait, faisait rêver – de Saint-Simon à Céline, l’axe d’un certain génie français passait par manifestement par une forme d’allégeance, de collaboration, de dénonciation sociale ou raciale, comme si les révolutions langagières devaient toujours se payer d’un tribut de veulerie. Au dix-septième siècle, on trouvait pourtant plus fort que le petit duc. Dans le même registre de langue, mais en plus nuancé, plus riche, plus profond, plus inquiétant. De l’homme libre, sachant rire de lui comme des autres, du frondeur définitif qui avait projeté d’assassiner Richelieu et connu les prisons de Mazarin, du cardinal de Retz, on parlait moins, évidemment. »La recherche de la couleur , Jean-Marc Parisis, Stock, 184 pages, page 85-86



« Et toutes les femmes décisives, impératives, catégoriques étaient gentilles. La gentillesse n’était pas toujours la douceur, et jamais la faiblesse. C’était un alliage rare de sensibilité, de distinction et d’intelligence, qui pouvait se révéler dangereux, fatal, comme dan le cas de Marilyn Monroe. Antonio Tabucchi l’avait bien compris : ‘Les personnes trop sensibles et trop intelligentes ont tendance à se faire du mal à elles-mêmes. Parce que ceux qui sont trop sensibles et intelligents connaissent les risques que comporte la complexité de ce que la vie choisit pour nous ou nous permet de choisir, il sont conscients de la pluralité dont nous sommes faits non seulement selon une nature double , mais triple, quadruple, avec les mille hypothèses de l’existence. Voilà le problème de ceux qui sentent trop et qui comprennent trop : que nous pourrions être tant de choses, mais qu’il n’y a qu’une vie et elle nous oblige à être une seule chose : cela que les autres pensent que nous sommes.’ La conclusion de Tabucchi me paraissait trop dramatique, contredire son subtil développement. Si les personnes trop sensibles et intelligentes étaient plus que les autres conscientes de la pluralité de leur nature et des mille hypothèses de l’existence, en quoi ce savoir devait-il forcément plier devant l’unicité de la vie et les enfermer dans l’opinion des autres ? Ce savoir permettait au contraire de se libérer des autres, de s’en échapper, en volant sur les ailes d’un moi multiple sur les mille figures sans y obliger. Ce savoir étant une donnée, l’espérance était à prendre ou à laisser. » La recherche de la couleur , Jean-Marc Parisis, Stock, 184 pages, page 138-139



Patricia JARNIER -Tous droits réservés - 2012

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L'histoire de Sam ou l'avenir d'une émotion

L'été de ses 14 ans, Sam rencontre Deirdre, une jeune galloise. Leur rencontre va le bouleverser, faire naître en lui des sentiments jusqu'ici insoupçonnés. Mais au bout de trois heures, il faut se dire au revoir avec la promesse de s'écrire et de ne pas s'oublier.

Les années passent et ce souvenir s'estompe. La vie reprend son cours. La collège, le lycée, les amis, les petites amies et puis le départ de sa petite ville direction Paris. Sam n'y pense plus mais des années plus tard, après une rupture amoureuse quelque chose se passe. Sam va comprendre que de simples sentiments d'adolescents peuvent influencer une vie.



Ce roman se lit d'une traite. Nous tournons les pages pour découvrir la vie de Sam, de ses certitudes et de sa vie qui prennent l'eau. Mais aussi de son réveil et du constat sur sa vie à cause ou grâce à sa rencontre avec Deirdre. Une lecture plaisante.
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Les inoubliables

Une photo de cinq enfants juifs réfugiés à La Bachellerie en Dordogne pendant la deuxième guerre mondiale permet à l’auteur, connaissant bien ce village, de commencer cette enquête le menant vers d’autres personnes ayant eux aussi connu la tragédie, la déportation ou la mort.

Un récit très bien documenté qui m’a permis de découvrir l’histoire de cette région, la Dordogne, qui au début de cette guerre a recueilli des réfugiés juifs et non juifs venant de l’Alsace. Malgré un intérêt pour cette histoire, je trouve que le récit est un peu confus avec des aller/retours vers le passé de ses réfugiés, vers son passé à lui, jeune vacancier en Dordogne et également à cause d’un nombre important de noms où je m’y suis un peu perdue.

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Un problème avec la beauté, Delon dans les yeux

"Quels effets la beauté produit-elle sur l'âme et les organes ? On voudrait bien le savoir à défaut de l'avoir (...) Tout homme est un mystère à lui-même et aux autres, beau ou laid, il s'y débat, s'y cogne constamment, mais la beauté scelle ironiquement cette énigme aux yeux du monde".

Si Jean-Marc Parisis choisit de sous-titrer ce récit Delon dans les yeux, ce n'est bien évidemment pas innocent. Ce fameux regard bleu est associé autant à la beauté de l'acteur qu'à son mystère. Je n'ai pas d'admiration particulière pour Delon, comme tout le monde je le trouvais beau à trente ans, comme beaucoup je ne me lasse pas de revoir le couple Alain Delon / Romy Schneider dans La Piscine. Jean-Marc Parisis, en retraçant les grandes étapes de la vie de l'acteur ne cherche pas non plus à en percer les mystères ou à lever le voile sur des épisodes sulfureux qui ont contribué à épaissir cette aura de beauté vénéneuse qui l'accompagnait. On n'apprendra rien de nouveau sur l'affaire Markovic, pas de scoop, le propos n'est pas là. Non, l'auteur cherche à comprendre comment la beauté de Delon a non seulement influencé sa trajectoire mais a contribué à forger le personnage Delon. Celui dont l'acteur parle à la troisième personne du singulier.

Car c'est bien cette beauté qui le fait remarquer, par les femmes mais également les hommes, une beauté sauvage, magnétique, accentuée par une volonté affichée de mordre la vie à pleines dents. C'est cette beauté qui électrise la caméra à ses débuts, bien plus que son jeu. Il se revendique acteur, et non comédien, "une personnalité, forte, qu'on prend et qu'on met au service du cinéma". Une beauté qui est aussi une barrière et influe forcément sur les relations sociales, encore plus lorsqu'elle est progressivement liée à la célébrité.



"La solitude et l'amitié ne s'excluaient pas, au contraire, elles se bordaient, se renforçaient. La solitude, cette amitié de soi-même, invitait à l'amitié de l'autre. Un homme sans ami ne pouvait goûter les plaisirs de la solitude, trop occupé à s'en chercher un ou à en rêver, il ne prenait pas le temps de s'aimer lui-même. Seul le solitaire pouvait à la fois éprouver l'amitié de l'autre et le goût de soi. Mais dans son cas, il était difficile de démêler si l'amitié que l'on vous vouait était sincère, désintéressée, car tout le monde voulait être l'ami de Delon, d'une star, de la beauté".

Comme le fait remarquer très justement Jean-Marc Parisis, en France, Delon était le seul acteur à posséder ce niveau de beauté - dont on apprend également qu'elle est due aux proportions parfaites des différents éléments qui composent son visage - alors qu'à Hollywood les Paul Newman, Robert Redford, Warren Beatty ou Marlon Brando, chacun dans son genre permettaient en étant plusieurs de dédramatiser la beauté. L'analyse de l'auteur mêle habilement les rôles, les personnages incarnés par Delon et l'homme, si étroitement d'ailleurs qu'il devient difficile de distinguer la part des uns et des autres dans la construction du personnage que chacun de nous a en tête. Sont-ce les rôles qui font l'homme ou l'acteur qui créé ses personnages ? Vaste et passionnant débat.

"Si tout homme est un mystère à lui-même dans l'énigme du temps, l'oeil de la caméra aggrave et le mystère, et l'énigme. Dans l'ordre naturel, animal, nul n'est censé se regarder marcher, parler, sourire, courir, étreindre quarante ou cinquante ans plus tôt - et plus tard. Le cinéma dérègle, perturbe, inverse la marche du temps, sans l'arrêter. D'où l'ironie, la fiction : ce qu'on a été rend irréel ce qu'on est devenu, et inversement".




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Les aimants

Tous les versants de l'amour, le sentiment fou et insouciant de leurs vingt ans, la présence toujours en suspend malgré la distance, l'étonnant amour-amitié de ces aimants inséparables, et puis la douleur de l'absence. Beau texte.
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