AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Viet Thanh Nguyen (149)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Le Sympathisant

1975. Saïgon vient de tomber et le narrateur, capitaine d’un général sud-vietnamien, va fuir sa terre natale et découvrir celle de l’Oncle Sam, ses supermarchés et ses autoroutes. Mais sous les habits du soldat pro-américain se cache une taupe Vietcong. Ce narrateur, dont on ne connaîtra jamais le nom, est un espion communiste prêt à tout pour ne pas se faire démasquer, prêt à tuer pour prouver sa fidélité au général.



J’ai eu peur d’un banal roman d’espionnage aux considérations politico-stratégiques barbantes mais cette histoire d’espion n’est pas au cœur du récit, elle sert juste à alimenter une réflexion autour du déracinement, de l’impossibilité de trouver sa place dans une Amérique accueillant les rescapés de la première grande défaite militaire de son histoire. Et les vietnamiens qui l’ont soutenue sur place ne sont pas les bienvenus : « La plupart des américains nous regardaient avec dégoût, car nous étions le rappel vivant de leur défaite cuisante. Nous menacions la sacro-sainte symétrie d’une Amérique noir et blanc, dont la politique raciale du yin et du yang ne laissait place à aucune autre couleur, notamment ces petits jaunes pathétiques qui venaient piquer dans la caisse ».



Le roman dit l’exil et la déchéance d’une diaspora ayant tout perdu en fuyant la guerre dans l’urgence. A ce titre la scène du départ de Saïgon sous les bombes est d’un réalisme sidérant. Se sentant inutile et humiliée, cette diaspora devient une communauté perdue, pathétique, s’accrochant sans illusion à d’hypothétiques rêves de retour.



La partie se déroulant aux États-Unis est passionnante, la parenthèse cinématographique expliquant en détail le tournage d’un film hollywoodien sur la guerre du Vietnam ne m’a pas enthousiasmé et le retour final dans la jungle m’a ennuyé à mourir, à tel point que j’ai traîné près de trois semaines pour lire les cent dernières pages. Une lecture inégale, donc. Même s’il se dégage de ce prix Pulitzer 2016 une grande puissance narrative et une indéniable force d’écriture (la traduction est vraiment impeccable), je dois reconnaître que je n’ai pas été totalement emporté par la confession de cet agent double en quête d’identité.
Lien : http://litterature-a-blog.bl..
Commenter  J’apprécie          60
Le Sympathisant

Ce roman est la confession d’un homme à un commandant non identifié. L’homme est gardé dans une cellule d’isolement et le commandant n’intervient jamais, sauf dans la dernière partie du récit. On apprend au bout d’un moment qu’il s’agit d’une confession écrite. Le narrateur, dont on ne saura jamais le nom, se définit comme une taupe, un espion. En effet, pendant 5 ans, il a été aide de camp infiltré auprès d’un général, chef de la police secrète à Saïgon alors qu’il soutient les révolutionnaires du Nord Vietnam.



Le narrateur est un jeune homme célibataire né en 1945, qui subit ce qu’il considère comme une double peine car il est à la fois né hors mariage et né d’un père étranger. Il a souvent été traité de bâtard et de métis (Amérasien). A 14 ans, il s’est choisi lors d’un pacte de sang, deux frères de sang, Bon et Man, qui ont chacun pris des chemins politiques différents. Man est révolutionnaire et Bon n’a pour seul objectif que de tuer des communistes suite aux drames qu’il a vécus.



Le récit de l’agent double commence en avril 75 quand il doit évacuer Saïgon lors de la chute (ou de la libération suivant le camp dans lequel on se trouve) de la ville et le départ des Américains. Le départ du Vietnam se déroule dans des conditions dramatiques, l’auteur retranscrit parfaitement l’atmosphère de panique et de pagaille le jour de la débâcle. Les évacués survivants se retrouvent réfugiés aux États-Unis, dispersés aux quatre coins du pays.

Réfugié quant à lui à Los Angeles, l’agent double accepte également une mission de consultant technique sur un film tourné aux Philippines car il veut faire évoluer l’image des Asiatiques dans le cinéma.



L’auteur glisse tout au long de son récit de multiples exemples qui définissent la psychologie et la culture orientales : la corruption qui sévit partout, le goût du complot, la pratique du marchandage, la perception des femmes par leur mari comme de charmants lotus, l’importance des poètes, la pratique des châtiments corporels à l’école et en famille… Il se pose comme ethnologue des Asiatiques mais aussi des Américains avec un regard plein de mordant sur le rêve américain, et relève les différentes façons qu’ont les Américains d’exprimer leur mépris culturel envers les Asiatiques. Il interroge la question de la culture au travers des propos de son amie japonaise rencontrée en Californie "Est-ce qu’on demandait à Kennedy s’il parlait le gaélique, s’il avait visité Dublin ? Alors pourquoi sommes-nous censés ne pas oublier notre culture ? Est-ce que ma culture n’est pas ici, puisque je suis née ici ?" Le narrateur est très sensible à la condescendance qu’il perçoit chez les Américains, il sent qu’ils lui renvoient son infériorité à cause de ses origines, sa sensibilité ethnique est touchée.



L’auteur explore également de nombreux types de dualités dans ce récit sur un agent double, c’est une sorte de fil rouge de ce roman. Il s’agit de la double identité, du double langage, de l’ambivalence des sentiments car l’agent double éprouve de l’affection pour le général qu’il trahit. Le narrateur se définit comme un homme à deux cerveaux, qui a la capacité de voir n’importe quel problème des deux côtés « Rappelle-toi, tu n’es pas une moitié de quoi que ce soit, tu as tout en double ! » lui disait sa mère.



Il n’est absolument pas difficile de s’y retrouver entre les différents personnages du récit car si le nom du narrateur n’est jamais donné, il en est de même pour la plupart des autres personnages qui sont nommés selon leurs caractéristiques physiques ou comportementales « le capitaine grisonnant », « le mitrailleur costaud », « le lieutenant insensible », « le gardien sans visage » ce qui nous évite de nous perdre parmi de multiples noms à consonances étrangères. Le récit est chronologique mais truffé de digressions toujours habilement introduites et jamais lassantes. Il nous parle d’identité, d’amitié, de trahison, de culpabilité, de nostalgie du pays et des difficultés de l’exil. « Pour un être humain, la plus grande souffrance est de perdre son pays. »



J’ai trouvé que l’auteur nous faisait parfaitement rentrer dans la peau d’un agent double qui doit toujours porter un masque, qui doit toujours jouer un personnage et rester indéchiffrable. J’ai été captivée de suite par l’histoire, les personnages, le contexte historique et j’ai trouvé la dernière partie qui met en scène la rééducation par la torture absolument magistrale. J’ai trouvé le personnage principal très attachant, il m’a touchée dans son besoin d’être aimé, de vouloir parfois ôter son masque. J’ai été émue par les visions des fantômes qui le hantent.

C’est un texte fort, engagé et réaliste. Même si j’ai, à certains moments, trouvé cette lecture assez exigeante, elle est restée passionnante du début à la fin. Ce roman, premier roman de Viet Thanh Nguyen, a reçu le prix Pulitzer 2016.
Lien : https://leslivresdejoelle.bl..
Commenter  J’apprécie          60
Le Sympathisant

Je suis un espion, une taupe, un agent secret, un homme au visage double. Sans surprise, peut-être, je suis aussi un homme à l’esprit double.



Avec ces mots, Viet Thanh Nguyen commence son roman. Deux phrases qui jettent les bases de ce qui se révélera être l’un des principaux thèmes de celui-ci, le conflit intérieur du narrateur.



Le Sympathisant nous parle de la guerre du Vietnam et de ses conséquences, de loyauté, d’identité, et de difficulté à s’adapter à une nouvelle culture et à une réalité.

Né au Vietnam en 1971, l’auteur fuit le pays avec toute sa famille après la chute de Saigon, et rejoint les États-Unis en cargo, comme des milliers de boat people.

Il est très intéressant d’avoir cette vision, ce témoignage du point de vue des Vietnamiens, et bien comprendre les intentions innocentes et idéalisées avec lesquelles les Américains sont entrés dans cette guerre, de même que leurs difficultés à admettre leurs erreurs, leur mauvaise gestion du conflit.



La première partie du roman, concernant la chute de Saigon et la fuite des Américains et des futurs expatriés, est assez prenante. On plonge sans peine dans ce chaos si bien décrit par l’auteur. Ajoutez à cela quelques séquences d’archives visionnées sur YouTube, et vous pouvez imaginer facilement le chaos, le sauve-qui-peut général où chacun, du général à la prostituée, essaie de faire valoir son ayant-droit, son laissez-passer pour fuir le pays.



La seconde partie, plus lente, manque cruellement de suspense et d’action pour réussir à maintenir toute mon attention. On y retrouve les principaux personnages, à Los Angeles, leur terre d’accueil.

Les exilés découvrent leur vie américaine, une vie où la plupart ont perdu tous leurs acquis sociaux et la reconnaissance dont il jouissait chez eux. Quant au personnage principal, il vit sa vie d’agent double, se fondant dans la masse pour passer inaperçu, et rendant compte à son supérieur au Vietnam de tout mouvement suspect ou idéologie de la part des réfugiés pouvant constituer un danger vis-à-vis du pouvoir communiste en place.

Mon manque d’intérêt atteint des sommets avec la réalisation d’un film en Thaïlande dans lequel notre espion est engagé comme consultant par le réalisateur.

Bien qu’étant à deux doigts d’arrêter cette lecture, l’écriture intelligente de l’auteur et cette envie de connaître la suite et la fin des aventures du narrateur me donnent le courage de continuer. Les derniers 20 % du livre sont franchement aussi bons que le début, mais constituent certainement la partie la plus perturbante de l’ouvrage.



La guerre du Vietnam constitue un événement marquant et sensible de l’histoire des États-Unis.

Quarante années ou deux générations plus tard, Viet Than Nguyen apporte une nouvelle approche de celle-ci et avec le recul actuel pose la question du sens de la révolution et de la guerre.

L’attribution du Prix Pulitzer 2016 à ce livre a suscité maints débats, principalement au sein de la société américaine. Le Sympathisant n’en reste pas moins une œuvre complexe, pas toujours facile à lire, mais avec des qualités littéraires indéniables.
Commenter  J’apprécie          60
Le Sympathisant

1975. En pleine guerre du Vietnam, la ville de Saïgon est en proie aux assauts répétés des communistes. Dans ce chaos, un général et son capitaine doivent décider quels sont les personnes qui pourront accéder aux places limités dans les avions qui les mèneront vers les Etats-Unis, terre de paix. Ce que le général ignore, c’est que son capitaine est en réalité un agent double au service des communistes. Alors que leur vie tente de se reconstruire en Californie, le capitaine ne cesse de faire des rapports à son ami resté au Vietnam, tout en essayant de garder son identité secrète …



J’ai pu lire ce roman grâce au comité de lecture Cultura qui nous a permis (à un petit groupe de lecteur et moi-même) de découvrir certains romans de la rentrée littéraire afin de donner notre avis à leur sujet. Nous avions le choix sur une liste et pouvions choisir ceux que l’on voulait. J’ai donc jeté mon dévolu sur ce roman qui a reçu le prix Pullitzer 2016. L’idée d’un agent double métissé en pleine guerre du Vietnam m’a de suite interpellé et j’avais hâte de connaitre son histoire.



Nous suivons donc le héros, un jeune homme dont nous ne connaitrons jamais le nom. Agent double, il fuit le Vietnam avec ses compatriotes avec l’aide des américains avant de tenter de reconstruire sa vie sur ce continent. J’ai aimé l’idée de ce roman avec ce personnage qui, en plus d’être un espion au service de la révolution, est également un métis mi vietnamien, mi américain. Au fil de la lecture on se rend alors compte que la quête identitaire est un thème important du roman. En effet le héros ne cesse de décrire sa situation, son vécu pas toujours évident, sa difficulté à trouver sa place dans un monde où tout est compartimenté et dans lequel tout ce qui ne peut pas être mis dans une case est mis de côté. Ces épreuves et questionnements du personnage principal le rendent vraiment attachant, on compati à sa situation. Bien sûr le fait qu’il soit agent double complexifie encore sa personnalité et j’ai trouvé intéressant de découvrir toutes ses réflexions à propos de ce qu’il est, ce qu’il souhaite et sa façon de voir le monde.



L’histoire met également en avant la difficulté des expatriés vietnamiens à refaire leur vie aux Etats-Unis. Ces derniers se présentent comme des héros, des sauveurs qui, par le fait, garde une sorte de supériorité vis-à-vis des exilés. J’ai aimé ces passages qui nous font prendre conscience du comportement qu’ont pu avoir les occidentaux envers un peuple différent d’eux. Cette volonté de se montrer accueillant mais en gardant une certaine distance, ne voulant pas se mélanger à cette nouvelle population. Même si les vietnamiens sont reconnaissants et heureux d’avoir pu échapper aux communistes, ils ne se retrouvent pas dans cette nouvelle vie si éloignée de la leur en terme de vécu, métier, nourriture, bref de culture et ne souhaitent que retourner au pays. On ressent donc vraiment les différences entre les deux peuples.



Même si l’histoire est intéressante, ma lecture a été un peu laborieuse du fait de la structure du roman. Les paragraphes sont en effet assez conséquents et souvent les dialogues sont directement intégrés à la narration (pas de présence de tirets ou de guillemets). De ce fait, je ne savais pas toujours s’il s’agissait d’une discussion ou de réflexions des personnages. Je pense que ma lecture aurait été un peu plus agréable si le roman avait été un peu plus épuré.



Malgré cet aspect négatif, ce fut une belle lecture. Le talent d’écriture de l’auteur est indéniable avec beaucoup de phrases « critiques », pleines de bon sens et de réalité. Le genre de citations qui fait réfléchir et qu’on aime garder dans un petit carnet.
Lien : https://dreamingwithboooks.w..
Commenter  J’apprécie          60
Les réfugiés

Des nouvelles qui laissent les émotions suspendues. Que l'auteur choisit de laisser suspendues. Comme ce recueil qui n'est lui aussi que points de suspension. D'un sujet que je n'avais jamais eu l'occasion de lire (ni de voir au cinéma ou autre, d'ailleurs). Celui des réfugiés ou exilés Vietnamiens. Leurs petites histoires, leurs décalages, des pépites de vécus.

La littérature abonde de livres dans ce genre pour les exilés Juifs aux Etats-Unis, par exemple, comme Bashevis Singer. Mais rien pour les Vietnamiens, alors que la guerre du Vietnam a tellement vu de productions diverses. Cet angle-ci je ne le connaissais pas. C'est donc intéressant, pour moi.

Et le style y est aussi. C'est amusant, décalé, original sans être perturbant non plus, sans être culturellement inaccessible (pas besoin d'une connaissance approfondie, et le texte n'est pas du tout un amas d'éléments culurels.) C'est une finesse du quotidien, de petites touches. Qui montrent une différence.

Commenter  J’apprécie          50
Le Dévoué

VIOLENT

C'est sans doute le livre le plus violent que j'ai lu dans ma vie. Scènes de tortures, de meurtres, d'orgie, de beuveries, de folie ...

Ce roman est le deuxième tome du « Sympathisant », qui racontait la vie pendant et après la guerre du Viêt Nam d'un agent double vietnamien. J'avais beaucoup aimé ce livre, dur, mais d'un humour féroce. Et quel style magnifique ! Il y avait une fin et ça ne demandait pas de suite.

Mais apparemment, Viêt Thanh Nguyen voulait écrire un second opus plus politique pour dénoncer le colonialisme français en Indochine. Son mépris des Français en est gênant.

Le livre se passe à Paris dans les années quatre-vingt, où on a l'impression que la capitale n'est peuplée que de gangs de dealers algériens et asiatiques qui se battent pour des histoires de territoires... Quelle tristesse !

Chaque page ou presque est matière à démontrer toutes les horreurs que les Français ont infligés aux peuples qu'ils ont colonisés. Le répéter pendant quatre cents pages devient carrément indigeste.

Je me demande si le message que veut à l'évidence faire passer l'auteur atteint son objectif. Est-ce que les Français dans leur grande majorité sont honteux de leur passé colonial ou ne voient-ils dans ce passé que des faits historiques ?

Tous les peuples à travers les siècles ont été tour à tour colonisateurs ou colonisés. Il faut en avoir conscience et passer à autre chose.



Commenter  J’apprécie          52
Le Dévoué

Merci à Netgalley et aux éditions Belfond pour cette lecture. J'avais eu la chance de lire le Sympathisant, aussi j'ai eu envie de découvrir la suite des aventures de ce héros si particulier. Car de lui, on ne connait toujours pas son nom, mais seulement son surnom Vo dahn soit"Le bâtard." Tout juste sorti du camp de rééducation communiste dans lequel on l'avait laissé, il se retrouve à Paris, chez une femme baptisé la "tante". Celle-ci très implantée dans les milieux intellectuels parisiens va entraîner notre héros dans les nuits parisiennes. Et il va se découvrir un talent certain à revendre de la drogue, à ses risques et périls....



Dans cette suite directe, on retrouve la plume clinique de l'auteur. Très instruit sur les sujets qu'il aborde, et voulant à travers son héros, raconter un pan de son passé, il a toutefois ajouté de l'humour et des situations cocasses à des propos graves. Ainsi sous couvert de legéreté, il aborde l'évolution de la société parisienne des années 80. on parle immigration, communisme, espionnage, intégration et traffic de drogue... Il a gagné en fluidité, en lyrisme, ce qui rend ce deuxième roman encore plus facile à lire que le premier.



Les personnages, certains nouveaux, d'autres que l'on connaît déjà sont toujours aussi bien écrits. Gagnants en truculence, et en profondeur, ils sont faciles à apprécier. On en apprend plus sur leur passé, ce qui a motivé leurs choix, et les a conduits dans ces rues sombres...



Une histoire brillante mélange parfait d'humour et de noirceur, qui fait mouche une fois de plus.




Lien : https://livresforfun.overblo..
Commenter  J’apprécie          50
Le Sympathisant

Ce livre est une confession. Une longue confession d’un agent communiste infiltré dans l’armée Sud Vietnamienne. Une lecture exigeante qui m’a pris des semaines. Heureusement, ça en valait la chandelle !



Faisant de la chute de Saigon en 1975 la toile de fond de son histoire, le narrateur, un homme à double visage, livre les détails de son départ avec le « général » de l’armée du Sud ainsi que plusieurs familles qui pouvaient se payer en dollars américains la fuite par voie aérienne ; leur installation au Los Angelos ; les tentatives des réfugiés à se créer sous le soleil des Etats unis un bout de leur pays perdu, jusqu’en 1980, où il y retourne dans le cadre d’une opération militaire de libération et sa prise dans un camp de rééducation.

Jusqu’ici, je n’avais pas lu de livre sur la guerre du Viet Nam, une guerre voulue par les américains, mais au-delà du livre de guerre ou d’espionnage, Le Sympathisant, premier roman de Viet Thanh Nguyen – lui-même faisant partie des milliers de boat people qui ont rejoint l’Amérique en cargo- est une œuvre magistrale à la fois historique, politique et psychologique qui s’est imposée dès sa sortie tel un immense succès critique et littéraire.

C’est une réflexion saisissante sur les moyens de représentation des opprimés, qui ont pour seul destin la guerre, ainsi que la confrontation idéologique entre les occidentaux et les orientaux ou comment gagner médiatiquement quand on perd sur le terrain, via son rôle de conseiller « de l’authenticité » sur les plateaux de tournage d’un film Hollywoodien à l’image d’Apocalypse Now de Francis Ford Coppola.



Dans une grande partie du roman, la question tourne autour de la condition humaine et ses ambiguïtés, à travers sa propre histoire de fils naturel d’un prêtre français et d’une bonne vietnamienne. Le puzzle de sa double identité, depuis la naissance, se constitue lentement tout au long des chapitres. « Tu n’es pas une moitié de quoi que ce soit, tu as tout en double ! » lui rappelait sa mère. Il voyait en toute chose, non une seule face, mais son double aussi, jusqu’à réussir, loin des soupçons, le défi de devenir une taupe, un agent secret au service des communistes, non sans décisions aux conséquences dramatiques !

Grâce à la satire, la richesse métaphorique ainsi que la maîtrise du suspense du récit, le lecteur est bien embarqué dans ce qui est réellement une exceptionnelle reconstitution historique faite par un oriental, qui a été récompensée par le Prix Pulitzer de la fiction en 2016, du Translation Prize 2018 de la French-American Foundation et du Prix Edgar du Meilleur Premier Roman 2016.
Lien : https://myworldtoyou.com/wp/..
Commenter  J’apprécie          50
Le Sympathisant

D'emblée, le narrateur nous fait savoir qu'il est un agent double : un "sympathisant" communiste infiltré dans la police de Saïgon, capitale de ce qui fut le Sud-Vietnam entre 1955 et 1975. C'est d'ailleurs à cette date, 1975, que débute l'histoire qu'il nous rapporte, sa propre histoire, une confession adressée à un mystérieux commandant sur qui on n'en saura davantage que dans la dernière partie du roman. En 1975, les Nord-Vietnamiens se rendent maîtres de la république du sud, sœur ennemie, défendue de plus en plus mollement par les Américains. Le narrateur, pour préserver sa couverture, suit son supérieur qui réussit, avec quelques dizaines d'autres officiers accompagnés de femme et enfants, à embarquer sur un avion militaire à destination des États-Unis. Un pays que le narrateur connaît bien : il y a effectué ses études supérieures avant de revenir au pays (au Nord-Vietnam, donc) et d'embrasser la carrière d'espion qu'il va poursuivre au sein de la communauté sud-vietnamienne de Californie.

Agent double mais aussi personnalité duale : fruit des "amours" entre une Indochinoise et un Français (prêtre, de surcroît), lui qui n'était, enfant, qu'un "bâtard" aux yeux de ses compatriotes écoliers ou collégiens, se mue en immigré aux États-Unis, puis en individu contaminé par le capitalisme décadent qu'il convient de rééduquer quand il retournera dans son pays pour une mission quasi suicide.

Cette bipolarité permanente et les actes qui en découlent forment le substrat d'un roman très documenté où s'entremêlent deux cultures et où la tragédie n'exclut pas totalement la légèreté, la distanciation orientale et, quelquefois, le sourire.
Commenter  J’apprécie          50
Les réfugiés

Très beau recueil de nouvelles sur le déracinement, la fuite, l'exil, la résilience, la confrontation entre deux cultures. Une belle réflexion sur ces personnes qui vivent entre deux mondes et qui doivent s'adapter à la réalité d'une société en perte de repères, de valeurs et de sens pour beaucoup d'entre elles, comme pour beaucoup d'entre nous. A travers ces nouvelles, l'auteur nous invite à découvrir des parcours, des vies, des personnalités différentes mais qui toutes se retrouvent sur la difficulté de faire face à cette double culture, à ce grand écart entre deux mondes. Un monde où ils peinent à trouver leur place et leur identité et un monde qui devient un souvenir idéalisé d'une vie d'avant avec ses codes, ses valeurs, ses propres références culturelles et familiales.



Une belle écriture, une ambiance empreinte de nostalgie et de mélancolie et des caractères travaillés et attachants qui nous donnent envie de nous plonger dans ce monde en suspension, ces vies entre parenthèses et dans ces histoires où les fantômes retrouvent les vivants pour les aider à avancer sur le chemin de la rédemption et de la résilience. Un recueil sur la perception des souvenirs, ce qu'il en reste une fois que le deuil, la perte, le chagrin a tracé sa route dans les mémoires et dans les cœurs… A travers ces vies brisées, ces histoires de famille, ces personnages à demi effacés qui hantent les pages de ce livre, on découvre le droit à l'oubli, le droit à la renaissance, le droit à la vie tout simplement. A travers toutes les histoires de ces hommes et de ces femmes, l'auteur parle d'une guerre, d'un pays, d'un drame humain, sans jamais vraiment le nommer. A aucun moment on tombe dans le pathos, dans le sordide, dans la surenchère de détails… et pourtant tout est écrit, en filigrane, comme ces morceaux de vies esquissés, cette vie d'avant, ailleurs, sur une terre qui n'est plus qu'un vague souvenir.



Chaque nouvelle retrace la vie d'une famille, d'un personnage… Si certains essaient de s'en sortir en acceptant les codes et les usages d'une société qui n'est pas la leur et en essayant de faire table rase du passé, d'autres essaient tant bien que mal de conserver au fond d'eux cette petite part de leur histoire, voire d'aller à la rencontre de ce pays si souvent rêvé, de ces parents restés là-bas, de cette culture qui n'est plus vraiment la leur. Certains ont décidé d'oublier et d'autres au contraire vivent encore et encore leur histoire, à travers leurs souvenirs et leurs fantomes. Mais sauront-ils un jour trouver la paix ?



Un grand merci au traducteur qui a su recréer cette atmosphère douce-amère et partager avec les lecteurs ces esquisses de vie.



A lire sur le blog :
Lien : http://bidules16.canalblog.c..
Commenter  J’apprécie          50
Les réfugiés

Repéré au titre, parce qu'il s'agissait en y regardant de près des réfugiés de la guerre du Vietnam, et que tout ce qui touche à cette période m'intéresse au plus haut point. L'auteur, Vietnamien né en 1971 et réfugié aux Etats-Unis après la chute de Saïgon, s'est fait remarquer avec 𝐿𝑒 𝑆𝑦𝑚𝑝𝑎𝑡ℎ𝑖𝑠𝑎𝑛𝑡 (traduit chez Belfond en 2017), prix Pullitzer 2016 entre autres, et comparer à John Le Carré et Saul Below. Dans ce roman que je n'ai pas lu, on lui prête une reconstitution minutieuse, ambitieuse, des années 75-80 du Vietnam jusqu'en Californie, une fresque politique et palpitante.



Je me penchai alors sur ces huit nouvelles avec gourmandise, et fus largement rassasiée.



D'abord, parce que ce que la presse française rapide et monomaniaque s'empressera de faire, comme l'ont fait les américains immédiatement si j'en juge la revue de presse imprimée en rabat, à savoir alarmer et pleurer, militer et trépigner, Viet Thanh Nguyen ne le fait pas. Jamais. Pas une ligne qui ne soit détournée de son patient travail de précision, de détail, de subtiles touches de vie animant une communauté que l'on ne regarde pas : la diaspora vietnamienne.



Ensuite, parce qu'on se trouve en présence de personnages de tous genres, têtus, fiévreux, pénibles, à côté de la plaque, sensibles, très loin de tout manichéisme, construits, tissés solidement dans une économie de pages, sous des termes pesés et sans esbroufe, j'allais dire, liquides entre les mains, dont on peinera à citer quelque passage que ce soit, la soustraction d'un extrait le rendant immédiatement insipide et privé d'âme, la magie tenant dans chaque ensemble composé.



Enfin parce qu'à l'instar d'un Coetzee dans ses nouvelles contenues dans 𝐿'𝐴𝑏𝑎𝑡𝑡𝑜𝑖𝑟 𝑑𝑒 𝑣𝑒𝑟𝑟𝑒, paru exactement l'année dernière - dans un style fort différent -, la préoccupation centrale de notre auteur est de nous faire emprunter nos tunnels familiaux les plus enfouis, de déblayer nos empêchements et nos frustrations, de nous prendre délicatement par la main pour nous embarquer sur un cargo bien loin de tout sensationnalisme, vers les terres chargées de sang fier, frappé de malheur, qui nous attendent. Quel que soit le temps que cela nous prendra.

Une lecture douce, discrète, sans effet de manche, qui vous tient bien le corps, bellement traduite par Clément Baude (les épreuves non corrigées n'ont presque aucune faute, d'ailleurs)



Parution le 5 septembre.



En parallèle paraît, du même auteur chez le même éditeur, à la même date, 𝐽𝑎𝑚𝑎𝑖𝑠 𝑟𝑖𝑒𝑛 𝑛𝑒 𝑚𝑒𝑢𝑟𝑡. 𝑉𝑖𝑒𝑡𝑛𝑎𝑚, 𝑚𝑒́𝑚𝑜𝑖𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑔𝑢𝑒𝑟𝑟𝑒, essai finaliste du National Book Award, for those who care 'bout that. Je le lirai sans doute.
Commenter  J’apprécie          50
Le Sympathisant

Viet Thanh Ngyen nous livre ici un roman dense, plutôt atypique et il faut le dire assez savoureux.



Ce livre prend la forme d'une confession rédigée par un agent communiste infiltré auprès d'un général du sud pendant la guerre du viêtnam. Obligé de s'expatrier aux États-Unis, le général tente d'organiser une sorte de reconquête face aux communistes du nord sans savoir qu'il y a une taupe auprès de lui.



Un livre assez complexe, cette confession est rédigée un peu sur le mode "j'écris comme je pense", il y a donc des tours, des détours, des retours, bref, pas toujours simple de recoller les morceaux.



Malgré ce style un peu "lourd", et quelques longueurs, c'est bien écrit et on est vraiment immergé dans les pensées du protagoniste principal qui est particulièrement bien travaillé. On est dans sa tête et on partage ses états d'âme.



Ce roman offre un point de vue très intéressant. Il nécessite très clairement un effort de la part du lecteur pour "rentrer dedans" mais pour moi, cet effort est mérité. J'ai vraiment apprécié cette lecture qui mélange un peu les genres. J'ai par ailleurs trouvé la fin assez magistrale et elle m'a vraiment tenu en haleine.



Je recommande cette lecture surprise en conseillant toutefois de se renseigner un peu sur le contexte historique, c'est assez essentiel pour comprendre certaines choses.
Commenter  J’apprécie          50
Le Sympathisant

C'est au moment où je m'attelle à la rédaction de ce billet que je réalise ne pas connaître le nom du narrateur du roman de Viet Thanh Nguyen. Il en ressort une drôle de sensation, car si cet anonymat colle bien avec son statut d'espion, il détonne en revanche avec cette impression d'avoir pénétré, au cours de la lecture, son intimité profonde.



C'est sous l'identité du Capitaine que nous est désigné ce héros, espion mais pas James Bond, le terme de "taupe" me semble d'ailleurs mieux convenir à sa mission comme à sa personnalité. Bras droit d'un Général du Sud-Vietnam dans les années 1970, ce Capitaine est en réalité au service des communistes. C'est un homme cultivé, qui parle un anglais parfait, sans accent (il a étudié plusieurs années aux Etats-Unis), reconnu pour sa discrétion et son efficacité.



"Le sympathisant" débute en 1975, à Saigon et en plein chaos : débordées par l'armée Viet Cong, qui est sur le point de prendre le contrôle du pays, les troupes américaines se retirent. Le héros fuit aux Etats-Unis avec une partie de l'état-major du Général. Parmi eux son ami d'enfance Bon, avec lequel il forme un trio complété par Man, surnommé "Les Trois Mousquetaires", scellé par un serment de fidélité éternelle... C'est Man qui a initié le narrateur à la doctrine communiste, et qui lui sert de contact au sein de l'organisation pour laquelle il oeuvre, dans l'ombre. Bon est quant à lui un fervent nationaliste.



Depuis l'exil, la rébellion s'organise, le Général constitue une escouade d'avant-garde entraînée pour rejoindre le Vietnam via la Thaïlande. Bon veut en découdre avec les Vietcong, alors il en est. Le Capitaine suit, pour veiller sur son ami...



C'est la voix dudit Capitaine qui porte le récit, écrit depuis un lieu d'incarcération à l'intention d'un commandant dont nous ne découvrirons l'identité qu'à la fin du roman. Avant cela, nous découvrons la personnalité complexe du narrateur, comme prédestiné à cette vie d'ombre et de duplicité. Il a en effet toujours été "double", fils d'une Vietnamienne et d'un prêtre français qui ne l'a bien sûr pas reconnu... Depuis toujours traité de "bâtard", rejeté par ses camarades, tiraillé entre Orient et Occident, sa mère, aimante et valorisante, a été le pilier de son enfance.



Sans doute est-ce sa particularité et la tolérance maternelle qui ont fait de lui cet homme empathique, capable, au-delà de ses convictions, de compréhension et de compassion y compris pour ceux censés être ses ennemis. De même, il montre beaucoup de finesse, de clairvoyance, dans son analyse des autres, de ce qui les motive comme de ce qui les limite. Et c'est pourquoi, déchiré entre son engagement et son humanité, contraint d'agir en dépit de ses affinités, il est hanté par les fantômes de ceux qu'il a vu mourir, parfois de sa main...



"Le sympathisant" est un récit dense, souvent lent, confession mêlant relation de faits et considérations du narrateur sur son environnement, sur lequel il porte un regard dénué de tout manichéisme, interpénétrations entre ce qu'il montre et ce qu'il est, révélant une structure psychologique bien plus complexe, bien plus périlleuse qu'une simple dualité, et la souffrance induite par la nécessité d'une dissimulation et d'un mensonge permanents. Une posture d'autant plus douloureuse qu'il est un homme de la nuance, de l'entre-deux. Bien qu'attaché à son pays, pour le meilleur et le pire, car c'est le monde qu'il contient en lui, auquel il se sent intimement appartenir, avec ses odeurs, ses couleurs, sa nature, ses goûts, son grouillement, mais aussi avec son destin tragique, ses famines, ses guerres, il ne rejette pas pour autant certains aspects du monde occidental qui le séduisent et qu'il a facilement adoptés. Tel est le dilemme de cet exilé à la fois de son pays et de lui-même, nostalgique avec une acuité douloureuse mais sans angélisme, aussi critique envers son pays d'origine qu'envers sa nation d'accueil, dont il fustige par exemple la représentation égocentrique et restreinte du monde...



Il est comme pris entre ces deux univers qui ne se comprennent pas malgré leurs points communs, notamment cette barbarie liée au refus de la différence. Victime, en quelque sorte, du fonctionnement d'un monde où l'on choisit, plutôt que de bâtir des passerelles, d'édifier des murs...



J'ai eu le plaisir de faire cette lecture en commun avec Miss Sunalee, qui l'a malheureusement abandonnée en cours de route, ainsi qu'elle nous l'explique ICI. J'ai pour ma part aimé le rythme lent de ce récit, mis au service de la richesse de ses personnages, et des thématiques auxquelles l'intrigue donne prétexte.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
Commenter  J’apprécie          52
Le Sympathisant

Un grand merci à Babelio et aux éditions Belfond pour ce fascinant voyage que je n'aurais probablement jamais attaqué de moi-même. Au-delà de son intérêt documentaire, le roman n'est pas un prétexte à étalage historico-politique mais une véritable aventure littéraire, et offre une intense réflexion sur la vie elle-même, ce qui fait -ou devrait faire, la vie. L'amitié, l'amour? Le bonheur, ou sa poursuite, garantie par la constitution américaine et si chère à l'Occident? Et quel bonheur? Des notions plus grandes, la fameuse liberté, la fameuse indépendance? L'intégrité? Mais aucune de ces notions peut-elle être définie universellement? Car c'est bien cette interrogation sur le caractère irréconciliable de toute grande notion suivant le point de vue qui l'évoque - oriental ou occidental, vainqueur ou vaincu, communiste ou capitaliste - qui habite ce roman. Le tout habillé d'une plume à l'image de son narrateur, divisée, déchirée entre la poétique orientale et le cynisme occidental, entre l'intellect et l'affect, entre sincérité et artificialité narrative... Une véritable fresque humaine qui n'a pas volé son Pullitzer.
Commenter  J’apprécie          50
Le Sympathisant

La chute de Saigon en 1975, la fuite de certains privilégiés à bord d'avions bondés vers les Etats-Unis, la vie des Vietnamiens aux USA, le retour au Vietnam et les boat people. Vastes sujets couverts dans ce roman au travers d'un agent à la solde des communistes infiltré dans les rangs de l'armée sud vietnamienne. Autant l’histoire m’a paru intéressante, autant la lecture m’a pesé après les quelque 150 premières pages. Le style d’écriture ne m’a pas trop réussi et je me suis perdue dans cette interminable histoire d’espion.
Commenter  J’apprécie          41
Le Sympathisant

Le film va bientôt sortir, je fais donc une petite critique

de ce chouette livre.



Les tribulations d'un espion communiste infiltré dans l'armée sud-vietnamienne au moment où Saïgon tombe et que tout le monde se précipite vers les derniers hélicoptères pour fuir les hordes rouges qui déferlent. C'est le point de départ peu banal de cet excellent bouquin, Prix Pulitzer 2016 pour la fiction.



Écrit à la première personne, le récit est une confession (au sens stalinien du terme!), par laquelle ce capitaine évoque son évasion du Vietnam, sa vie de réfugié, et les basses œuvres qu'il est obligé d'accomplir pour le compte de militaires revanchards, réfugiés comme lui à Los Angeles, et bien décidés à continuer cette guerre perdue. Notre héros, fidèle à la cause communiste, va se retrouver à jouer un double jeu parfois amusant, souvent sinistre.

Réfugié apparemment modèle, il analyse l'Amérique des années 70 avec ses travers, ses films et son épouvantable optimisme , et se retrouvera à jouer un rôle dans une super-production hollywoodienne qui ressemble beaucoup à un "Apocalypse Now" . Le tournage du film, un morceau de bravoure du livre, n'est pas sans rappeler aussi le rôle de Hollywood dans la schizophrénie galopante et orchestrée de l' Amérique vaincue.



Le mélange des genres, entre espionnage, analyse sociologique, et satyre de l'Amérique post-Vietnam fonctionne à fond. Entre meurtres peu glorieux , politiciens véreux, mercenaires en attente de retour au combat et CIA aux manettes, la partie politique du livre est intéressante. Mais ce qui frappe le plus c'est le parcours personnel de notre héros, un être qui attribue à sa naissance ambiguë (mère vietnamienne, père français) sa propre inclination à la sympathie, cette capacité de comprendre l'autre, son ami comme son ennemi, et qui fait de la dualité duplicité/ fidélité le rythme même de sa vie.

Ce livre se lirait presque comme une comédie, mais dans les derniers chapitres, la résolution du conflit interne chez ce sympathisant infiltré / exfiltré, vire à l'horreur, et la lecture devient alors beaucoup moins légère... .

La prose de ce bouquin est tout simplement superbe, un niveau de langue soutenu très au-dessus de beaucoup de livres US que j'ai lus récemment. Cet auteur a clairement avalé un thésaurus et son sens de la formule est étonnant (j'ai rempli un carnet à vouloir noter certaines d'entres elles) . J'espère que la version française lui est fidèle. Que le héros soit cultivé et presque raffiné ne gâche rien .

Quoiqu'il en soit, malgré un scénario un peu alambiqué, et un ascenseur émotionnel inattendu, ce bouquin est tout fait passionnant. Une belle réussite, que je vous recommande, guys et guyzettes!
Commenter  J’apprécie          40
Le Sympathisant

Difficile "d'attribuer une note" à ce roman, presque récit, chronique d'une défaite annoncée.

Cette lecture a été pour moi une charge, un poids qui m'est resté sur le cœur : L'histoire, avec ou sans H, m'a agrippée jusqu'au bout, ce que le style de l'écriture a tenté de défaire du début à la fin.

J'ai apprécié la critique sur les occidentaux de cette période (notamment les Français), le déchirement de ces populations. La tristesse de cette existence, la cruauté de certaine réalité politique... tout cela me touche profondément et me donne le sentiment d'inexorabilité de la courte vue humaine.

Car aujourd'hui, qu'en est-il ?



Commenter  J’apprécie          40
Jamais rien ne meurt

Après avoir découvert l’autrice Kim Thuy à l’automne dernier, j’ai eu envie d’en savoir plus sur cette guerre qui a forcé sa famille à fuir le Vietnam.



Cette guerre, appelée en France (comme aux Etats-Unis) « la guerre du Vietnam » et désignée au Vietnam comme « la guerre Américaine », se confond pour moi avec des références cinématographiques (américaines) telles que Forest Gump, Apocalypse Now, Good Morning Vietnam… Un imaginaire fait de « Napalm et de tropiques », peuplé de vétérans rongés par les cauchemars et les flash-backs et par les manifestations pacifistes de quelques hippies idéalistes.



« Jamais rien ne meurt » est un essai exigeant qui interroge cette guerre à travers le prisme de la construction de la mémoire collective. Né au Vietnam puis réfugié aux Etats-Unis, Viet Thanh Nguyen en fait également une quête d’identité qui ne peut se satisfaire d’une approche duale de la guerre et de son souvenir qui opposeraient les « bons » et les « méchants ».

Tout au long de cet ouvrage, dense mais passionnant, il analyse le processus industriel de création mémorielle en examinant par exemple des photos devenues célèbres, des cimetières militaires ou encore des monuments aux morts. Il étudie également le rôle de l’industrie du cinéma, laquelle représente un frein à la construction d’une mémoire éthique qui demanderait de se souvenir de la même façon de nos semblables et des autres comme autant d’humanités, mais surtout d’inhumanités mêlées.

A la lecture de cet essai, j’ai pris conscience que certaines constructions des « industries de la mémoire » pouvaient être très problématiques voire dangereuses.



Un grand merci à Babelio et aux Editions 10/18 pour cette découverte qui m’a donnée envie d’aller lire les autres œuvres de cet auteur, notamment son premier roman « Le Sympathisant », pour lequel il a reçu le prix Pullitzer en 2016.
Commenter  J’apprécie          40
Jamais rien ne meurt

Nous ne la connaissons que de loin car elle n’a pas concerné notre patrie. Du moins, à part quelques brèves mentions, je n’ai pas souvenir de l’avoir étudié en Histoire. J’étais donc étonnée et très curieuse lorsque nos chemins se sont croisés lors de la masse critique Babelio. Et ne parlons pas de ma joie en apprenant quelques jours après que j’allais le recevoir...



Il m’intriguait, je peux maintenant le dire, avec raison. Ceci n’est pas un roman. Ceci n’est pas une nouvelle. Ceci est un essai. Mais pas n’importe quel essai. Il s’agit d’un essai assez exhaustif (selon moi) qui tente de nous exposer le points de vue des deux parties : les États Unis et le Vietnam.



Les faits sont relatés avec simplicité et partialité par l’auteur, qui n’hésite pas à documenter ses propos, à les illustrer par de nombreux exemples. Derrière cet essai se cache un travail de recherche et de réflexion remarquable qui nous pousse à réfléchir sur le devoir de mémoire.



Des questions, il s’en pose tout le long. De la guerre du Vietnam, oui il en parle. Et pourtant au delà de cette guerre, il nous amène à nous questionner. Car le devoir de mémoire : oui. Mais de quelle mémoire parle-t-on? Que choisissons-nous de retenir, et surtout, comment le transmettons-nous aux nouvelles générations?
Commenter  J’apprécie          40
Les réfugiés

J'ai emprunté ce recueil de nouvelles à la bibliothèque un peu à l'aveugle, sans préjugés, je ne me doutais pas de ce qui allait m'arriver.

Dès la première nouvelle, particulièrement poignante sans être larmoyante, j'ai été prise aux tripes et ai reposé le livre en laissant un peu d'espace, de souffle, avant d'aborder chaque texte.

Comme tout bon recueil, elles sont inégales dans leur intensité, mais quoi qu'il en soit, elles sont nettement remarquables parce que sans pathos, elles nous font partager différents sentiments qui, somme toute, sont humains et internationaux - c'était le but du jeu, non ? C'est complètement réussi.
Commenter  J’apprécie          40




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Viet Thanh Nguyen (687)Voir plus

Quiz Voir plus

Mémoire et souvenirs dans les titres

Complétez le titre du roman d'Edmonde Charles-Roux qui a obtenu le Prix Goncourt en 1966 : Oublier ...

Florence
Palerme
Venise
Naples

10 questions
216 lecteurs ont répondu
Thèmes : mémoire , souvenirs , oubliCréer un quiz sur cet auteur

{* *}