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Critiques de W. G. Sebald (110)
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Austerlitz

Austerlitz ....

Grande victoire napoléonienne .....combien de personnes peuvent se vanter d'avoir ce patronyme pas banal ?

Des personnes au destin hors du commun sans doute...on comprendrait mal que de tels personnes restent dans l'ombre...

Jacques Austerlitz, personnage principal de ce livre de W.G Sebald est l'un de ceux-là, un érudit, un passionné, un philosophe, un homme à la recherche de son passé, de celui de sa famille...Quelle a été sa vie avant l'âge de 4 ans 1/2? ....S'est-il toujours appelé Austerlitz? A t-il toujours vécu au Pays de Galles, dans une famille de pasteur?.

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Un homme qui page après page reconstruit sa mémoire, cherche à comprendre son passé et celui de ses parents, depuis le Pays de Galles, jusqu'à la Tchécoslovaquie, en passant par l'Allemagne, Paris, Londres....et d'autres encore...une mémoire qui se construit par la visite de lieux, de bibliothèques, de villes, de fortifications, par des rencontres avec d'autres passionnés, par des croisements entre L Histoire et l'actualité du moment, entre ses connaissance et celles de ses interlocuteurs, par des lectures, par un travail d'enquête.

Le narrateur qui eu Jacques Austerlitz comme instituteur, s'entretient avec lui. Jacques est maintenant chargé de cours dans un institut d'histoire de l'art londonien....mais il a eu tant d'autres centres d'intérêts, tant d'autres passions, tant d'autres vies, tant d'autres métiers

Un livre passionnant, qui "se mérite", pas facile à lire et à suivre...déstabilisant parfois..les narrateurs se croisent, leurs propos se suivent,...les connaissances de Jacques, se mêlent à celles du narrateur, ou de personnes rencontrées.

Aucune des personnes que rencontrera Jacques n'est banale. Toutes ont une foule de connaissances, sont passionnées, par un lieu, une ville, une fortification ...elles ont une histoire, une vie à raconter...elles sont presque obsédées chacune dans leur coin par des insectes ou des papillons, des perroquets, l'histoire de villes, des gare, de cimetières, d'immeubles tranquilles aujourd'hui mais qui ont été des lieux de torture, de déportation...

Austerlitz nous force à réfléchir quant à la vanité de l'homme et de certaines constructions humaines, des forteresses obsolètes et dépassées par le progrès quand elles sont achevées, construites pour défendre et utilisées finalement pour tuer des innocents, des bibliothèques modernes construites pour promouvoir la culture...et laisser la trace dans l'histoire de leur initiateur, et finalement inadaptées pour la promotion de la culture...un livre fait pour rappeler un passé qu'on cherche à laisser de côté, l'importance des traces du passé à ne pas oublier...message d'un auteur allemand anti-nazi

Chaque mot est pesé, chaque description de lieu, chaque référence historique ou culturelle est un plaisir...Que de connaissances accumulées, mises à la disposition du lecteur ...peut-être un peu trop complexes, parfois semblant inutilement accumulées.

Une construction du livre pas banale et qui peut être rebutante, certains refermeront ce livre après 20 pages...l'auteur l'a construit sans aucun chapitre, sans paragraphe, sans guillemet..mais on ne lit pas la poésie, la mélancolie, les références culturelles et historiques, les réflexions philosophiques ou sociologiques, la construction de la mémoire "en diagonale".... Non ! on s'accroche!.

J'en sort un peu groggy, mais heureux.
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Les Émigrants

Il s’agit de quatre nouvelles dont on comprend bien ce qui en fait l’unité sur le fond (en quelques mots: le destin tragique des rescapés de l’entreprise d’extermination systématique des Juifs par l’Allemagne nazie) mais qui m’ont paru inégales dans leur forme. Alors que la première m’a laissé une forte impression par sa concision et ses sous-entendus et allusions indirectes, les dernières nous font revivre le quotidien d’avant la Shoah. Bien que je comprenne l’intention qui est celle de nous rapprocher de la vie ordinaire de Juifs européens dans les années qui ont précédé « la solution finale », j’ai fini par éprouver de l’ennui, en particulier à la lecture d’un journal intime de la toute dernière nouvelle (est-ce une allusion à celui d’Anne Franck?), et avoir le goût de passer par dessus des descriptions qui m’ont paru autant de longueurs inutiles… J’ai eu cette curieuse impression que jamais je n’arriverai au bout tout de cette lecture en ayant hâte d’en finir et de passer à autre chose.

Ce recueil m’a donc laissé un sentiment assez mitigé; mais j’ai admiré le procédé qui tient à la fois de la fiction et du documentaire et l’écriture émouvante de cet auteur auquel je reviendrai volontiers pour me faire une opinion plus approfondie.
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Les Anneaux de Saturne

Je ne conseillerai certainement pas à un lecteur curieux d'approcher l'oeuvre de Sebald de commencer par la lecture de ce livre. Personnellement, si je n'avais pas lu d'abord « Austerlitz », que je considère par ailleurs un chef d'oeuvre absolu, j'aurais sûrement moins apprécié « Les Anneaux de Saturne ».

Objet littéraire non-identifié, hybride pour ce qui est de la forme, ni roman, ni essai, on a ici d'emblée l'impression de parcourir, sans pouvoir en saisir forcément un fil conducteur, un sorte de recueil de notes personnelles de l'auteur, composées essentiellement de certaines de ses recherches documentaires, de souvenirs de ses amis, de souvenirs de voyage et de quelques rencontres fortuites restées en mémoire.

Les Anneaux de Saturne n'est à mon sens ni un roman, ni un essai, mais plutôt le récit d'une expérience vécue. Issu des déambulations à pied de l'auteur dans la côte est de l'Angleterre au mois d'août 1992, Sebald se laisse aller, à la faveur de ce périple, à un va et vient incessant dans l'espace et dans le temps, à partir des lieux et monuments visités eux-mêmes, le circuit réalisé devenant ici la source même du matériau littéraire et du développement de sa narration. Ainsi, parce qu'il croise sur son chemin le pont de Blyth - construit au XIXèmè siècle pour la circulation d'une ligne ferroviaire dont les wagons étaient à l'époque marqués d'un étrange « dragon enveloppé des vapeurs produites par son haleine » et identique en tous points à l'image de l'animal héraldique de la Chine Impériale -, Sebald nous emmène faire un détour en Chine et, par le récit de la lente dissolution de l'Empire du Milieu initiée au dix-neuvième siècle, nous apprend que les wagons qui traversaient jadis la Blyth qu'il contemple là en ce moment, étaient en fait au départ destinées à la Cité Interdite !

Empreint de poésie délicate, mélancolique et tout en filigrane, cet ouvrage, malgré un aspect en surface décousu et anecdotique, est avant tout un miroir reflétant l'âme de son auteur, même si celui-ci n'y livre guère d'éléments véritablement autobiographiques et que tout reste en fin de compte extrêmement factuel... Parmi les nombreuses références que l'on retrouve au fil de ce voyage très personnel de Sebald dans les anneaux du temps, il y en a une (issue d'Orbis Tertuis), qui pourrait à mon sens, illustrer bien le travail de mémoire qui parcourt toute son oeuvre: «..le futur n'a d'autre réalité que notre peur ou notre espérance présente, tandis que le passé n'est que ce qu'il y a dans notre mémoire».

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Les Anneaux de Saturne

Voyage dans l’espace et le temps d’un chasseur de fantômes.



«Fin août 1992, comme les journées caniculaires approchaient de leur terme, je me mis en route pour un voyage à pied dans l’est de l’Angleterre, à travers le comté de Suffolk, espérant parvenir ainsi à me soustraire au vide qui grandissait en moi à l’issue d’un travail assez absorbant. Cet espoir devait d’ailleurs se concrétiser jusqu’à un certain point, le fait étant que je me suis rarement senti aussi libre que durant ces heures et ces jours passés à arpenter les terres partiellement inhabitées qui s’étendent là, en retrait du bord de mer. D’un autre côté, pourtant, l’antique superstition selon laquelle certaines maladies de l’esprit ou du corps s’enracineraient en nous de préférence sous le signe de la Canicule m’apparaît aujourd’hui plus que justifiée. Par la suite, en effet, je ne fus pas seulement aux prises avec le souvenir d’une belle liberté de mouvement mais aussi avec celui de l’horreur paralysante qui m’avait saisi à plusieurs reprises en constatant qu’ici également, dans cette contrée reculée, les traces de la destruction remontaient jusqu’au plus lointain passé. Et c’est peut-être pour cette raison qu’une année jour après jour après le début de mon voyage, je me trouvai dans l’incapacité totale de me mouvoir, si bien qu’il fallut me transporter à l’hôpital de la capitale régionale, Norwich, où j’entrepris, du moins en pensée, de rédiger les pages qui suivent.»



Ayant entrepris d’arpenter à pied les côtes du comté de Suffolk dans la chaleur et le silence de l’été, traversant des villages dépeuplés et des propriétés en déshérence, au bord de la dissolution et de la ruine silencieuse, le narrateur des «Anneaux de Saturne» relève au cours de ce voyage les traces du passé, qui lui renvoient l’image de l’Histoire comme une succession tragique de destructions, de génocides et d’abus de pouvoir. Ces drames irrésolus, en écho à la paralysie émotionnelle et au mutisme du peuple allemand après la seconde guerre mondiale évoqué dans «De la destruction comme élément de l’histoire naturelle» viennent hanter le présent et la mémoire de Sebald, narrateur de la constellation de récits qui composent ce chef d’œuvre.



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Les Émigrants

Est-ce-que l’acte de résilience est toujours possible ou encore désirable ? Comment le juger, notamment face aux forces en présence ? Et si l’adversité vous pousse sur les chemins de l’exil, dans la fuite d’un pays ou d’une population, vous éloigne à tout jamais de vos proches, de vos origines, de votre famille, de votre histoire ? Aucun état d’âme à noter avant de recevoir l’estampille sur votre passeport ?

L’encre risque de tourner au rouge si l’on songe à tous ceux qui ont su et du s’enfuir d’Europe orientale face aux pogroms, laissant tout derrière eux, et au final beaucoup plus d’eux-mêmes qu’ils n’en auraient volontairement consenti …

Dans quatre récits, Sebald se penche sur des destins éparpillés qui au soir de leur vie lâchent la bride pour rejoindre ceux qu’ils ont quittés, abandonnés

Dans une narration empreinte de mélancolie, illustrée de nombreuses photos, Sebald laisse un dernier témoignage de ces émigrants, qui ne cherchent pas à témoigner, n’ont plus la force du combat, plus d’illusion et recherchent cette dernière brise qui éteindra enfin cette dernière petite flamme.

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Austerlitz

Difficile de pas être attiré par la photographie de couverture qui représente un garçonnet blond déguisé en page. Qui est cet enfant fixant l’objectif avec confiance ? D’autres photographies en noir et blanc ponctuent ce récit étrange qui mélange astucieusement réalité et fiction, souvenirs et rêves, à la recherche d’un passé enterré, occulté, extirpé par fragments à travers des correspondances parfois déconcertantes pour le lecteur. Ce jeu de piste à travers la mémoire a quelque chose de fascinant.

Le narrateur rencontre Austerlitz dans la salle des pas perdus de la gare d’Anvers en 1967. Celui-ci, professeur d’histoire et spécialiste d’architecture, engage la conversation et la discussion se poursuit au buffet sur la genèse de la gare d’Anvers. D’autres rencontres ont lieu, disséminées dans le temps, jusqu’à celle décisive au bar du Great Eastern Hotel en 1996. Jacques Austerlitz raconte à son ami la quête douloureuse de ses origines, lui l’orphelin, recueilli en 1942 à l’âge de quatre ans par un couple de gallois sans enfant et qui ne prit connaissance de son vrai nom que dans sa quinzième année. Commence alors l’étonnant récit de Jacques Austerlitz, au nom si peu commun.

Ce roman d’une densité inouïe, ultime roman de W.G. Sebald, résonne avec une acuité particulière en ces temps de migrations forcées et de déracinements. Avec Austerlitz, la douleur de l’exil et la perte de ses racines prennent une dimension universelle.

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Les Émigrants

Pas de lecture depuis un bout de temps ... ou plutôt si, je me suis embourbée depuis un mois dans Waltenberg dont j'aurais bientôt l'occasion de parler - un pavé donc, que j'ai malencontreusement sorti de mon sac en début de semaine pour caler le vidéoprojecteur, et qui est donc malencontreusement resté au lycée le soir.



Impossible pour moi de rester sans lecture le soir ... je me lance donc dans un nouveau bouquin : Les émigrants de Sebald, un auteur que pour l'occasion je découvre.





C'est à mon sens un très beau livre, que j'ai dévoré d'une traite, qui n'est ni vraiment un roman, ni vraiment une autobiographie, ni vraiment une fiction, mais plutôt une sorte d'enquête, de quête, même, agrémentée de photographies, un peu comme les magnifiques Disparus de Mendelsohn, ou, dans un tout autre genre Istanbul de Pamuk. J’aime assez ce procédé, qui ajoute une dimension sensible très touchante à l’œuvre - qui correspond d’ailleurs, dans les trois cas, à un véritable parcours personnel.



Bref, pour en revenir aux Emigrants, il s’agit de quatre « récits » de vie, qui redonnent leur dignité à ces migrants ou ces déracinés, marqués par le destin chacun à leur manière (j’ai bien aimé l’instituteur et ses méthodes pédagogiques … particulières … ou le très beau texte sur Manchester qui clôt le livre). En filigrane se dessine la tragédie du génocide juif, mais toujours effleurée sans être réellement évoquée. La pensée vagabonde, c'est fin, et c'est sensible. Beau récit sur les êtres brisés par les départs et les retours toujours recommencés.



« Je vois les pièces vidées. Je me vois assis tout au sommet de la carriole, je vois la croupe du cheval, la vaste étendue de terre brune, les oies dans la gadoue des basses-cours et leurs cous tendus, et aussi la salle d'attente de la gare de Grodno avec, au beau milieu, le poêle surchauffé entouré d'une grille et les familles d'émigrants regroupées tout autour. Je vois les fils du télégraphe montant et descendant devant les fenêtres du train, je vois les alignements des maisons de Riga, le bateau dans le port et le recoin sombre du pont où, autant que l'entassement le permettait, nous avions installé notre campement familial. »
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Austerlitz

Je suis tombé sur les écrits de WG Sebald pour la première fois par accident. J'étais dans ma bibliothèque habituelle lorsque je suis tombé sur un livre, Les Anneaux de Saturne, dont la typographie et la qualité de production m'ont tellement intrigué que, même s'il ne pouvait en aucun cas être décrit comme un guide conventionnel, je l'ai emporté avec moi.

J'ai été immédiatement hypnotisé par le curieux style de prose, si plat et ostensiblement sans conséquence, qui décrit une sorte de monologue intérieur méditatif, pas du tout le monde tel qu'il est vu et décrit par une personne ordinaire, mais une vision du monde vue à travers un verre sombre et réfracté à travers l'imagination étrange et parfois inconfortable d'un professeur de littérature allemande dyspeptique et exceptionnellement bien informé, d'âge moyen, dont on présume qu'il n'a jamais été marié et qui décide de faire une longue promenade sans but sur les rives d'une rivière du Norfolk méditant sur des aspects de son histoire et sur ce qu'il voit en chemin.

Austerlitz est, à bien des égards, un autre tour de force littéraire, utilisant le même langage de mélancolie prolongée et ostensiblement sans conséquence pour décrire la vie de quelqu'un qu'il rencontre pour la première fois à la gare d'Anvers en étudiant l'architecture de sa salle d'attente.

Il est impossible de dire dans quelle mesure ce récit, le cas échéant, est vrai, bien qu'il soit illustré avec des photographies floues et grises de personnes et de lieux, ce qui lui confère de la véracité, surtout l'image du narrateur lui-même, avec ses cheveux ondulés distinctifs, regardant curieusement le photographe et habillé comme pour une soirée déguisée à Prague juste avant la guerre.

Le récit, s'il est vrai, est remarquable. Le héros du livre, ou plus exactement l'anti-héros puisqu'il ne fait essentiellement rien de particulièrement utile de sa vie, est né à Prague, fils d'un chanteur d'opéra au succès modéré et directeur d'une petite usine de fabrication de pantoufles qui était également actif dans la politique de gauche.

La montée du parti nazi en Allemagne et l'invasion allemande de la Tchécoslovaquie qui a suivi ont obligé son père à fuir à Paris, pour ne plus jamais être revu ni entendu, ses lettres à sa famille étant confisquées par les autorités allemandes. Sa mère a réussi à faire en sorte que son fils soit envoyé à Londres. Il a été adopté par un prédicateur non-conformiste et sa femme, près de Bala dans le nord du Pays de Galles.

Le garçon, intelligent, est allé dans une petite école publique qu'il n'aimait pas du tout, et a été encouragé par son professeur d'histoire à aller à Oxford. Après avoir étudié la classification de l'architecture officielle du XIXe siècle à l'Institut Courtauld, il obtient un poste d'enseignant dans un établissement dont le nom n'est jamais tout à fait clair, tout en vivant dans une petite maison mitoyenne dans l'East End de Londres.

La base de la fiction, s'il s'agit d'une fiction, est que l'auteur et le narrateur se rencontrent périodiquement, non seulement à Anvers, mais aussi au bar de l'ancien Great Eastern Hotel à Liverpool Street Station, à Londres, et dans un café à Paris. .

Par de longs récits sombres et délabrés de sa vie qui ont parfois le caractère d'histoires de chiens hirsutes, le narrateur construit un sens de sa personnalité qui est essentiellement profondément mélancolique, dépourvu de toute amitié, sauf celle d'une fille de la bibliothèque qui l'a pris en pitié et part en vacances avec lui à Marienbad.

Qu'allons-nous faire de cela ? À certains égards, le récit est emblématique de nombreuses vies ostensiblement inefficaces, d'une intelligence académique gaspillée dans un projet intellectuel grandiose qui nécessite des années de prise de notes mais ne débouche jamais sur le grand livre qui aurait dû en résulter, jusqu'à ce que le narrateur décide de brûler toute l'accumulation de matériel dans un petit feu de joie dans le jardin de sa maison mitoyenne. Mais, en même temps et d'une manière très particulière, le livre donne un sens étrangement transcendant et hypnotique de la puissance de l'histoire et de la relation entre un individu et les accidents de sa vie.

Je n'ai jamais lu un livre qui offre un récit aussi puissant de la dévastation provoquée par la dispersion des Juifs de Prague et de leur traitement par les nazis. Austerlitz ne parvient pas à donner un sens à sa jeune vie brutalisée alors qu'il erre dans le camp de concentration de Terezen, où sa mère était enfermée, ce qui le fait s'effondrer lorsqu'il se souvient plus tard de ce qui s'est passé.

Et j'ai lu peu de livres qui offrent un sens aussi intense du lieu et de la relation des bâtiments à leur histoire, y compris, par exemple, une description hypnotique de la façon dont Austerlitz découvre les rues où il est né, ainsi que des lieux particuliers, de Gare d'Anvers jusqu'au cimetière d'un quartier de Londres.

Sebald décrit un univers particulier mais reconnaissable, la façon dont l'expérience du monde peut être façonnée par une intelligence fortement académique et historique.

Son style de prose est distinctif dans la longueur de ses phrases et le léger archaïsme de la manière, la monotonie de ses cadences . Mais je recommanderais fortement à quiconque n'a pas expérimenté son écriture de le faire, car il réussit à communiquer des questions d'une grande importance concernant le temps, la mémoire et l'expérience humaine.

L'inhumanité ne cesse pas.

Ce que Sebald écrit est-il vrai ?

Ce n'est pas important.

C'est la fiction qui est la puissance.


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Séjours à la campagne

Avec ce recueil, je retrouve une fois encore l'univers de mon cher Sebald. Les premières fois seront de plus en plus rares. J'aurai bientôt tout lu. Avec lui, je suis en pays de connaissance, même si je ne connaissais pas la plupart des auteurs qu'il évoque (à part Rousseau): Johann Peter Hebel, Eduard Friedrich Mörike, Gottfried Keller, Robert Walser (dont j'avais entendu parler), et le peintre Jan Peter Tripp, tous liés d'une façon ou d'une autre à la Suisse alémanique. Son érudition est étourdissante et légère. Mais l'intérêt de Sebald n'est pas anecdotique. Son art est de saisir avec délicatesse l'humanité d'hommes anachroniques, en décalage avec leur époque, vivant en marge voire se sentant persécutés (à tort ou à raison). Sebald s'empare d'eux, nous les révèle et avec eux nous révèle une part de notre humanité, que nous occultons pour continuer à faire partie de la société. Quelques-uns ont suivi un chemin différent.
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Austerlitz

C’était toujours comme si toutes les traces se perdaient dans le sable



« Au cours de l’une de ces excursions belges, qui toujours me donnaient l’impression de voyager très loin en terre étrangère, je me retrouvai, par un jour radieux de l’été commençant, dans une ville qui jusqu’alors ne m’était connue que de nom, Anvers ».



Portait d’un homme, d’un émigrant dans le siècle. Une recherche traduite en un texte dense et lumineux. Le temps non-paisible des quotidiens effrités. Connaissez-vous Terezin, Prague, le ghetto de Theresienstadt… ?



Derrière ce portrait, la mémoire de celles et ceux, vaincu-e-s ou oublié-e-s de l’« Histoire », celles et ceux qui furent pourchassé-e-s, déplacé-e-s, déporté-e-s, concentré-e-s ou exécuté-e-s.



« Vera se rappelait aussi la petite fille de douze ans au bandonéon à qui elle m’avaient confié, l’album de Charlot acheté au dernier moment, les mouchoirs blancs claquant au vent, comme l’envol d’une nuée de colombes, avec lesquels les parents restés à quai avaient fait signe à leurs enfants, et l’impression étrange qu’elle avait eue de voir le train, après qu’il se fut mis en branle avec une infinie lenteur, non pour s’éloigner mais sortir de la verrière et là, à peine à mi-distance, se volatiliser ».



Un récit d’un très grande beauté.
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Austerlitz

D'abord la photo de la page couverture : un garçonnet déguisé en petit prince, sa blondeur auréole son visage un peu triste. Et Austerlitz, le nom d'une ville. Tout pour m'intriguer car je ne lis jamais le résumé d'un roman. Donc, j'ouvre ce livre et commence une lecture d'un seul souffle, celui de Jacques Austerlitz, enfant pragois envoyé par sa mère en Angleterre au début de la Seconde guerre mondiale, confié aux soins d'un prédicateur et de sa femme. À cinq ans, Austerlitz perdra sa langue, ses repères et sa vie d'adolescent et d'adulte en sera irrémédiablement transformée. L'écriture est magnifique, l'évocation des souvenirs, prenante, empruntant parfois des accents austeriens. On sent aussi l'ombre de Dora Bruder et Patrick Modiano derrière le récit de cet homme angoissé, à la recherche de ses origines, longtemps refoulées à l'arrière-plan de ses pensées. « (...) cette résistance que j'entretenais depuis tant d'années contre la montée du souvenir ». Émouvante lecture...
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Austerlitz

Exhumer le passé à partir de ses traces. Le roman vertigineux et admirable d’après la catastrophe.



Dans cet ultime roman de W.G. Sebald publié en 2001, traduit en 2002 par Patrick Charbonneau pour les éditions Actes Sud, le narrateur part en voyage comme dans «Les anneaux de Saturne», pour échapper à un malaise diffus, mû par une impulsion incompréhensible. En Belgique, après la visite du jardin zoologique d’Anvers et en particulier de son Nocturama, où des animaux «vivent leur vie crépusculaire à la lueur d’une lune blafarde», ses pas le conduisent dans la gare d’Anvers – lieu qui se confond dans son esprit avec le Nocturama – car les êtres humains y semblent rétrécis sous la hauteur extraordinaire de la verrière et portent sur leurs visages la même expression d’accablement que les bêtes du zoo.



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De la destruction comme élément de l'histoire..

Ce livre rend compte d’une série de conférences, intitulées "Guerre aérienne et littérature", et prononcées par W.G. Sebald en 1997 à Zurich, et des vives polémiques qu’elles ont ensuite suscitées.



Sebald y rend compte des séquelles psychologiques des bombardements des villes allemandes à partir de 1942, et de l’apathie de la population (si bien décrite par Stig Dagerman dans Automne Allemand) et des écrivains, incapables de rendre compte de ce désastre au-delà du supportable et de l'inscrire dans la mémoire, ses conséquences étant refoulées avec le rejet de la défaite du Troisième Reich.



Un exemple frappant de cet aveuglement affectif est Irma Schrader, gérante d’un cinéma bombardé le 8 avril 1945 à Halberstadt, et qui, sans réfléchir, se lance à corps perdu dans une tentative absurde de déblaiement du cinéma, afin que la séance de 14h puisse tout de même avoir lieu. Jean-Yves Jouannais consacre à Mme Schrader un chapitre superbe, dans son essai "L’usage des ruines".



«Alfred Döblin, qui était alors dans le sud-ouest de l’Allemagne, consigne dans une note datée de la fin de 1945 : … Les hommes circulaient dans les rues, parmi les ruines effrayantes, comme s’il ne s’était rien passé de spécial, comme si la ville avait toujours été dans cet état.»



«Les récits des rescapés se caractérisent en règle générale par leur discontinuité, leur caractère singulièrement erratique, en telle rupture avec les souvenirs nés d’une confrontation normale avec les faits qu’ils donnent facilement l’impression de n’être qu’invention pure ou affabulation sortie d’un mauvais roman. Mais si ces relations de témoins oculaires paraissent mensongères, c’est aussi à cause de leurs nombreuses formules stéréotypées. La réalité de la destruction totale, qui échappe à la compréhension tant elle parait hors norme, s’estompe derrière des formules toutes faites comme «la proie des flammes», «la nuit fatidique», «le feu embrasait le ciel», «les puissances infernales s’étaient déchainées», «c’était une vision d’enfer», «le terrible destin réservé aux villes allemandes», etc. Leur fonction est de masquer et de neutraliser les souvenirs vécus qui dépassent le concevable.»



Sebald dénonce d’un côté la stratégie britannique, la soumission à une logique de production d’armes et la fascination pour la destruction de masse, mais aussi et surtout, dans un réquisitoire contre les écrivains allemands au sortir de la guerre, le refoulement de ces événements et de leurs conséquences psychiques en Allemagne. Cet oubli du passé fut un mécanisme efficace pour la reconstruction, mais ne permit pas de comprendre ou de tirer tous les enseignements des valeurs (telles que cette éthique du travail sans aucun état d’âme) sur lesquelles le nazisme a pu se développer. Selon les mots de Hans Magnus Enzensberger, «l’inconscience était la condition de leur succès».
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Nul encore n'a dit

En face des « regards » gravés par Jan Peter Tripp peintre, graveur et ami d’enfance, trente-trois poèmes de Sebald que l’écrivain allemand a laissés, après sa disparition accidentelle.



Leur vie cessa

Leur vie cessera

Les images nous parlent-elles de la mort avec une tendresse que les mots n’atteindront jamais ?

Images et mots entrelacés, chacun ayant sa vie (voie) propre et qui nous disent les mystères devant les yeux.

Images et mots entrelacés qui nous disent les mystères, très loin, derrière les yeux

Images et mots entrelacés qui nous disent le mystère au profond des yeux.

Énigmes et mystères qu’il convient de sauvegarder.

Alors, pourquoi, devant les yeux de Maurice, le chien ; ai-je pensé : il regarde son maitre et le mystère, un instant, s’est effacé.



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De la destruction comme élément de l'histoire..

Né en 1944 dans un village des Alpes de l'Algäu, je suis au nombre de ceux que la catastrophe s'accomplissant alors dans le Reich allemand a presque complètement épargnés...Cette humiliation nationale sans précédent, n'a jamais réellement été mise en mots et ceux qui étaient directement concernés ne l'ont ni partagée ni transmise aux générations suivantes." Telles sont les premières lignes de ce petit livre de 150 pages confiées par ce grand écrivain et qui nous invitent à nous arrêter un instant sur ce dont on n'a peu parlé et quasiment jamais écrit : les bombardements massifs qu'ont connus l'Allemagne, restés tabou par un peuple entier. Sébald nous donne les fruits de sa réflexion sur les raisons de ce mutisme et les stratégies des Alliés. Jamais il ne discrédite son peuple, ni accable les Alliés. La finesse de son analyse rend troublant le récit d'une guerre, dont il faut connaître tous les visages.





La Royal Air Force, à elle seule, a largué 1 million de tonnes de bombes au cours de 400 000 vols. Pays détruit, villes rasées et pourtant jamais cet anéantissement n'est devenu objet de consensus pour ce peuple, ni n'a fait partie des débats au sujet de la réorganisation du pays. Une inconscience comme si cette destruction totale devenait la première étape d'une reconstruction collective, en témoignent ces cartes postales montrant Francfort détruit en 1947 à gauche, et Francfort reconstruit à droite. Etonnant, comme s'ils voulaient "créer une nouvelle réalité sans visage, barrant d'emblée la voie à tout souvenir"." la destruction a contraint la population à tourner son regard vers l'avenir et à se taire sur tout ce qu'elle avait vécu". Sébald essaie de comprendre l'étonnante insensibilité dont les allemands ont été capables : "L'inconscience était la condition de leur succès", avec aussi l'éthique du travail dont ils venaient d'hériter, le miracle économique a eu lieu, s'accompagnant aussi d'une liquidation par étapes de l'histoire allemande qui avait précédé.



L'establishment militaire alliée était divisée quant à la stratégie de riposte. Cette volonté de détruire la population civile, morte non sur le chemin d'un objectif à atteindre, mais comme étant un objectif en soi, s'illustre entre autre dans le fait que les nœuds de communication, les raffineries de carburant ou les usines de roulement à billes n'étaient clairement pas visées, alors qu'elles auraient suffi à paralyser un pays. Sébald évoque la position marginale de l'Angleterre qui cherchait "à détruire le moral de la population civile ennemie, en particulier des travailleurs dans l'industrie". Ce projet de bombardement systématique, s'il n'était stratégiquement et moralement justifié, ne pouvait non plus devenir une raison aux allemands de demander aux puissances victorieuses qu'elles rendent des comptes. On sait qu'Hitler, si Goering en avait eu les moyens aurait volontiers brulé la ville de Londres, en lâchant multitude de bombes incendiaires.



La complexité de l'objet amène Sébald à apporter par sa plume un éclairage différent qui tente de faire oublier pourquoi aucun écrivain allemand n'a voulu décrire cette guerre. Le souci de la précision des renseignements, dont l'auteur fait preuve dans ce petit livre, éloigne naturellement toute odeur de revanche, de haine, de regret, ou de rancœur. J'irai même jusqu'à dire qu'il est d'une parfaite objectivité, chaque mot ayant sa place, chaque exemple son rôle de témoin de souffrance. C'est brillant. Pour avoir vécu et aimé vivre en Allemagne, il m'a aussi aidé à encore mieux comprendre d'où ils ont puisé une telle énergie pour reconstruire leur pays.






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Les Émigrants

Roman, biographies, enquêtes…un peu de tout sans doute. Quatre récits illustrés de photos anciennes « collant » au texte, une construction – texte-photos – comparable à celle d’Austerlitz, avec lequel j’avais découvert cet auteur..une découverte que je souhaitais poursuivre avec ce livre encensé par la critique lors de sa parution en 1992.

Quatre personnages tous différents qui ont fuit, enfant avec leurs parents ou adultes, l’Allemagne ou la Lituanie, leurs pays de naissance. Quatre personnages d’origine juive menacés par les nazis. Quatre hommes qui apprendront plus tard la disparition des leurs.

Peu à peu ces quatre hommes, sans aucun lien entre eux, réussissent leur vie sociale dans leur pays d’accueil, ils seront chirurgien, pédagogue, majordome, peintre de renom. Certains modifieront leur nom, pour mieux s’intégrer à leur pays d’accueil. Ils auront tous de beaux métiers mais seront des hommes assez seuls, l’auteur ne nous parle que très peu de leurs familles, de leurs amies féminines.



Ils auront quelques amis, qui tour à tour raconteront leur vie, comment il les ont connus, aimés. Tous quatre seront dans leur nouveau pays et malgré leur réussite professionnelle d’éternels tourmentés. L’émigration laisse parfois des traces indélébiles, un vide.

Aucun n’oubliera son départ : « Je vois les pièces vidées. Je me vois assis tout au sommet de la carriole, je vois la croupe du cheval, la vaste étendue de terre brune, les oies dans la gadoue des basses-cours et leurs cous tendus, et aussi la salle d’attente de la gare de Grodno avec, au beau milieu, le poêle surchauffé entouré d’une grille et les familles d’émigrants regroupées tout autour. Je vois les fils du télégraphe montant et descendant devant les fenêtres du train, je vois les alignements des maisons de Riga, le bateau dans le port et le recoin sombre du pont où, autant que l’entassement le permettait, nous avions installé notre campement familial. »

L’écriture de Sebald qui a lui même choisit d’émigrer, s’appuie sur des photos d’époque, laissant à penser qu’il s’agit d’enquêtes minutieuses, auprès des familles, ou auprès de personnes qui ont côtoyé et aimé ces quatre personnages; quatre puzzles qu’il essaie de reconstituer. Ont-ils existé? Quelle est la part de roman?

En tout cas, Sebald sait décrire les tourments de ces âmes, tracer l’histoire et la mélancolie de ces hommes calmes et nous faire ressentir leur fragilité intérieure. Dans chaque vie alternent le rose et le gris. La vie rose avant l’arrivée des nazis, vie sans soucis, devint grise et le resta dans leur pays d’accueil, non pas du fait de leurs conditions de vie, mais du fait de ce manque au fond du cœur.

Une grisaille qui les confrontera, soit dans leur chair ou dans celle de proches, à la folie et à l’internement psychiatrique ou au suicide violent.

« Dans le silence général, les beaux rêves qu’il avait échafaudés tout au long de l’été, s’effondrent comme un château de cartes. L’avenir se brouille devant ses yeux et il éprouve, il éprouve alors pour la première fois cet implacable sentiment de défaite qui plus tard devait si souvent l’envahir et auquel il allait finir par succomber ».

« Émigrés » un mot qu’on entend de plus en plus…j’ai voulu en savoir plus grâce à Sebald, et je n’ai pas regretté mon émotion.
Lien : http://mesbelleslectures.com..
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Austerlitz

Austerlitz.

Avec un titre tel que celui-ci, nous pouvions nous attendre à un contenu assez "banal", au du moins, puisque cette période funeste ne peut être banale, similaire à beaucoup d'autres oeuvres sur cette même époque.

Lourde erreur. Austerlitz est avant tout un roman humain, sur un homme prêt à tout, dans ce déni omniprésent, à tout d'abord oublier ses origines. Puis, peu à peu, longuement il s'ouvre et cette censure psychologique s'efface. C'est une oeuvre sans aucun doute touchante, mais peut-être un peu difficile à suivre, avec l'enchevêtrement de de narrateurs, et d'histoires.

Austerlitz reste un homme mystérieux, avec une intelligence sans faille.

Un roman qui donne une autre vision de la guerre, loin des combats, mais tellement proche des survivants, et du désarroi qui les accompagne.
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Les Émigrants

Daniel Mendelsohn, dans Trois Anneaux, un conte d'exil,  m'a donné envie de  lire Les émigrants.



Les Emigrants, composé de quatre récits autour d' un personnage en exil ayant quitté l'Allemagne. Leurs destins, tragique,s se terminent par la mort, suicide ou la folie. Le narrateur(Sebald lui-même?) vit aussi en errance, exilé en Angleterre. Il suit ses personnages à travers l'Europe, en France, en Suisse, les Etats Unis , et parfois beaucoup plus loin. 



Je ne suis pas entrée tout de suite dans le livre.



Le narrateur, à la recherche d'un appartement dans le nord de l'Angleterre, fait la connaissance du Dr Selwyn,  un homme tout à fait étrange. Juif originaire de Grodno en Lituanie, Selwyn quitte Grodno avec des émigrants en partance vers l'Amérique qu'il  laisse à Londres ; étudie la médecine à Cambridge.  Le récit  se promène aussi bien dans l'espace que dans le temps, effectue des boucles ( comme les anneaux de Mendelsohn) qui égarent la lectrice. Je ne sais plus qui suivre, le narrateur?  les propriétaires de l'appartement, ou Selwyn ? Un nouvel arrivant nous entraîne en Crête pour mon plus grand plaisir mais aussi pour ma grande confusion. Je ne sais plus à qui m'attacher, je m'égare..   Je  prends un autre livre plus facile, pensant abandonner Sebald.



Bien m'en a pris de reprendre la lecture des Emigrants. 



Je me suis attachée au personnage de Paul Beryter, l'instituteur qui emmène sa classe dans la montagne , siffle en marchant et joue de la clarinette...Quelles belles leçons de choses! Beryter n'est aryen qu'au trois quart,  ce quart de juif lui interdit l'enseignement , mais pas l'incorporation dans la Wehrmacht! Nous retrouvons Beryter en France, dans le Jura et en Suisse. Exilé mais toujours fidèle à son village en Allemagne. Sentiments d'allers et retours, puis sans retour. 



Ambros Adelwarth est plus énigmatique, il a quitté l'auberge de son père en Allemagne pour devenir garçon d'étage dans un hôtel prestigieux de Montreux, être initié à "tous les secrets de la vie hôtelière", et aux langues étrangères. Majordome stylé, il a accompagné un ambassadeur jusqu'au Japon en passant par Copenhague, Riga, Moscou et la Sibérie. Majordome d'un magnat américain, il hante les casinos de Deauville, visite Constantinople et Jérusalem. Nous suivons donc ce personnage dans ses périples et dans ses châteaux aux Etats Unis. Mais comme Sebald n'écrit pas un récit linéaire, il s'attarde à nous raconter les histoires de famille. Je me laisse porter, ayant accepté le principe des digressions (écriture circulaire de Mendelsohn). Je profite des descriptions des lieux, des rencontres fortuites. Ne pas être pressé par l'action, prendre son temps, profiter de tous les détails. 



Selon ce principe énoncé ci-dessus, je profite de la découverte d' un Manchester singulier où se déroule une partie de l'histoire du peintre Max Ferber, fils d'un collectionneur d'art juif bavarois venu à Manchester en 1943. Peintre casanier d'une oeuvre obscure, malgré sa répugnance au voyage, nous offre une excursion à Colmar voir les tableaux de Grünewald puis en Suisse. Mais tout serait trop simple, une histoire allemande se greffe....



Un très beau moment de lecture, nostalgique, pittoresque, auquel il faut s'abandonner sans chercher trop d'action ou de cohérence. 
Lien : https://netsdevoyages.car.blog
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Les Anneaux de Saturne

Ce livre est acclamé, c'est un chef-d'oeuvre...

Je suis complètement passée à côté.



L'auteur écrit très bien, il rend les faits historiques dont il parle vivants et passionnants. Mais c'est juste que je m'attendais à lire une "histoire" et là j'ai plus l'impression d'avoir lu un livre d'histoire voire un essai.



Au fil de ses pensées, de ses pérégrinations et de ses rencontres, il évoque la vie de tel auteur, tel navigateur, les guerres, la nature... Il a un réel don de conteur.



Mais je n'ai pas accroché....Les faits historiques s'enchaînaient et je restais insensible...


Lien : https://www.labullederealita..
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La Description du malheur : A propos de la ..

Comme l'indique lui-même Sebald dans son introduction, ce livre n'a pas pour objectif de dresser un panorama exhaustif de la littérature autrichienne ni d'en analyser quelques spécimens selon une grille d'interprétation unique. A travers l'étude de 9 auteurs, il essaie de faire ressortir quelques caractéristiques jugées spécifiques à la littérature de ce pays. Pour Sebald, celle-ci a par exemple développé un savoir-faire dans la description, l'analyse et la compréhension d'états relevant habituellement de la psychiatrie ou de la psychanalyse qui rappelons le est née à Vienne. Pour Sebald, la littérature autrichienne a également développé un intérêt particulier pour la transgression des limites, la difficulté à définir la culture d'un pays résidu d'un patchwork impérial, la mélancolie et le malheur.



En une dizaine de chapitres, Sebald nous présente ici 9 écrivains qu'il juge représentatifs de la littérature autrichienne, celle-ci comprenant la production en langue allemande de l'époque impériale, autrement dit Kafka. Outre Kafka : Stifter, Schnitzler, Hofmannsthal, Canetti, Bernhard, Handke, Herbeck et Gerhard Roth.



Les analyses de Sebald ne sont pas toujours faciles à suivre. D'autres sont très réussies et apportent un éclairage lumineux sur les écrivains dont il est question, notamment celle consacrées à Schnitzler et à La nouvelle rêvée ou à Peter Handke et à l'angoisse du gardien de but. J'ai découvert l'existence d'Ernest Herbeck, un poète représentatif de l'art brut qui a passé l'essentiel de sa vie interné dans un hôpital psychiatrique.
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