De bronze et de souffle, nos coeurs

Depuis quelques jours, je mène une double vie.
Tout remonte à mercredi dernier. En poussant la porte de la collection Passages des arts, j'ai découvert que " dans ma poitrine bat sourdement un autre lieu. Il m'habite depuis longtemps. Au fond de moi une autre ville. Une ville où chaque pas compte. La Ville. " Un lieu de vie onirique où se répondent voluptueusement poésies et gravures, force et fragilité, sensations et corps en apesanteur.

Je me suis finalement résolue à en parler au cas où, éventuellement, je ne reviendrai pas, happée définitivement par un ensorcelant désir d'évasion. Là-bas s'animent comme par magie des êtres de bronze aériens sculptés par Rémi Polack qui soufflent et chantent la poésie épurée et sensuelle de Jeanne Benameur.
Ainsi, " L'homme avec un livre sur la tête " m'a murmuré au coeur qu'il était préférable de garder le silence, vous comprenez " Jamais assez c'est trop " et un " Corps à la limite " effraie plus qu'il ne rassure, surtout s'il est doté d'un imaginaire puissant.
Même " La Femme Peuplier " qui d'ordinaire n'apparaît dans aucun rêve est venue vers moi pour m'indiquer " le Passage " afin de naviguer à mon gré entre cette Ville et ma vie, histoire de conserver un semblant de réalité rassurant pour mon entourage, c'est important, vous comprenez.

Depuis, je chevauche le temps, dialogue avec " le Maître dérisoire ", croise le regard de " La Vulcane ". Je ne lutte plus. L'oeuvre, pardon le lieu est trop beau ; je m'envole parfois comme tous les personnages qui hantent ce lieu ; je me laisse simplement porter par la palpitation offerte par les mots, la puissance d'évocation des formes, " le paradoxe de la légèreté au coeur du bronze ".

Comme rien ne remplace l'expérience et le partage, je vous indique le chemin sur les traces de la rencontre : remi.polack.free.fr puis cliquer sur Gravures.
Beau voyage poétique !

COUP DE COeUR.

Bienvenue pour un voyage onirique avec Jeanne Benameur aux mots et Rémi Pollack aux traits.

On embarque avec l'Homme au livre sur la tête, qui « vide de tout s'emplira ligne après ligne de ce que chacun écrira » jusqu'au Passage où nous amène la Femme-Peuplier « qui porte la joie dans chaque frisson sur sa peau », mais pour cela il faut « être celui qui chemine et que la chance aide ».

Voyage peuplé d'êtres étranges, tantôt effrayants tantôt rassurants, esquissés par le crayon de Rémi Pollack, êtres qui hantent nos rêves et nos souvenirs. de tous ces êtres mi-hommes mi-chimères, ma préférée est sans nul doute la Vulcane « celle qui prend celle qui offre corps ouvert mains à la caresse elle donne sans compter l'énergie de la jouissance ».

Voyage à faire et à refaire à l'infini, en marche avant ou en marche arrière. Ou en mélangeant les étapes. En brouillant les pistes. A chaque lecture on découvre un détail ignoré, on perçoit une nouvelle émotion, on attribue une autre signification aux mots, aux gravures. Expérience à chaque fois renouvelée, à chaque fois enrichie.

Aller-et-retour entre deux artistes qui dialoguent, partagent leurs silences, s'interrogent, se répondent, se réinventent, se nourrissent, se fécondent. Pour dire l'indicible. Pour dessiner sans figer. Pour susciter le rêve. Et dérober un instant au Temps.

Un titre attirant.

Certains poèmes m'ont beaucoup touchée : "L'homme au livre sur la tête", "Le lieu exact du combat", "Dans les traces" et encore "L'esquive" ou "Le passage". Évocation d'un univers échappant à toute pesanteur où l'horizon est vagabond. Imaginaire et fantasmagorique. Coeurs arrachés ou monstres marins renvoient à la chute, la lutte, à l'abandon, à l'énergie de la jouissance. Jeanne Benameur révèle dans un récit initial la genèse du livre qui est le fruit de sa rencontre avec l'oeuvre sculpté de Rémi Polack et ses créatures oniriques aux contours tremblés entre lesquelles se lisent les poèmes calligraphiés. Les bronzes sculptés, transmués, pour la circonstance en monotypes gravés, font frémir et vibrer sur la page blanche les mots de Jeanne Benameur. Ce travail conjoint fait l'objet d'une exposition à La Rochelle.

De Bronze et de souffle, nos coeurs

c'est un ouvrage de petit format de par la taille (15x20 cm) et de par son nombre de page (73)

Jeanne Benameur explique sa rencontre avec les bronzes de Rémi Polack lors d'une exposition, puis sa rencontre avec l'artiste et comment elle en est venue à écrire pour ses bronzes.
Ensuite il y a un récit qui met en scène les bronzes, enfin le sculpteur a fait des gravures à partir de ses bronzes et les 15 poèmes ont été écrit à partir des gravures.

Je n'ai pas trop aimé les gravures mais les poèmes sont sublimes et j'ai trouvé qu'ils se mariaient bien avec les gravures. Ce n'est pas facile d'écrire sur de la poésie parce que cela affecte intimement et certains des poèmes m'ont profondément émus.

Le mieux c'est de les lire - vous ne serez pas déçu

Challenge poésie 2014/2015