On dira ce qu'on voudra sur PPDA, lorsque j'ai lu ce roman, j'avais treize ans et il a été une véritable claque de ma jeunesse. Je trouvais cela bien écrit, l'histoire larmoyante et déchirabte et surtout l'amour des deux personnages si fort, dans les têtes comme dans les corps. Je ne sais pas si aujourd'hui je le lirai avec la même passion. Il a les défauts et les atouts d'un premier roman. Il surprend, il attire, mais il s'adresse à une catégorie de lecteurs. Si vous aimez les belles histoires d'amour, les chagrins et les introspections, si vous êtes resté adolescent, rêveur et idéaliste, ce roman est fait pour vous.
A noter qu'une pâle adaptaption télévisée a été faite récemment, enlevant toute la subversion de l'écriture à la première personne.
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Il m'est difficile d'avoir un avis tranché sur ce livre. Lorsque je l'ai lu, j'ai été déçu. J'attendais certainement trop de PPDA que je voulais découvrir en temps qu'auteur et que je lisais donc pour la première fois. C'est assez bien écrit et parfois émouvant, mais ce livre a les défauts d'un premier roman rédigé par un adolescent, il peut donc tout à fait plaire ou au contraire laisser totalement indifférent. Avec du recul, je suis plus indulgent, l'histoire peut intéresser les lecteurs aimant les belles histoires d'amour entre adolescents.
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Superbe livre ! Magnifique ! A lire et à re-lire sans modération. C'est de la littérature comme on aimerait en lire plus souvent. Merci Mr. PPDA !
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Tu m’as décroché mes étoiles. Tu as donné de grands coups de hache dans notre amour. Tu m’as cassé mon rêve. Tu m’as sonné comme un boxeur. Je ne marche pas encore sur les genoux, mais j’ai les chevilles en coton. Tout se dérobe. Je ne sais plus où aller. Je me cogne. La seule porte de sortie, c’est toi, et c’est fermé. J’ai voulu cent fois courir parce que je te voyais, mais, comme dans les aéroports, les baies étaient en verre épais. Ca fait mal quand on croit décoller et qu’on se les prend de plein fouet. On tombe comme les chevaux dans les abattoirs sous le coup bien placé d’un maillet. Tout s’écroule à cette seconde, tu meurs debout, le décor s’effondre ; les jambes rentrent dans la tête, la tête s’enfonce dans le sol. Et si, par hasard, tu en réchappes, c’est pour mourir quelques mètres plus loin, devant une autre porte vitrée.
De l’autre côté, il y avait ces avions qui partaient, ces bonheurs qui s’agitaient, ces amours qui se bécotaient au grand jour. Tout cela, je le vois encore. Le regard est vitreux et l’esprit est déjà épais, mais je devine confusément ces vies, ces silhouettes, la tienne bien sûr parmi elles. Tu vas sans doute passer devant la porte. Tu vas dire « oh ». Et presque en même temps tu me reprocheras le trouble que cette fin misérable va t’apporter. Tu vas m’en vouloir parce que tu ne pourras pas t’agenouiller. Il y a trop de monde autour de toi, trop de badauds pour regarder ce corps recroquevillé. Tu ne voudras pas donner notre fin en spectacle. Et puis tu diras « Mais je lui avais dit de ne pas venir. Il est fou. Il me fait mal autant qu’à lui. Nous aurions parlé chez moi, loin des autres. J’aurais fait le ménage dans cette vie que je viens de vivre et dont il se faisait une montagne. Beaucoup de choses seraient parties d’elles-même. Et puis qu’est-ce qu’il est allé s’imaginer… »
Beaucoup trop, c’est sûr. Mais, quand tu vivais cette vie-là, tu la vivais sans moi. Il t’en restera des morceaux qui ne m’appartiendront jamais. Moi, j’attendais ton retour. Tu l’as cent fois différé. Peut-être as-tu réussi à te construire une indépendance, mais pendant ce temps-là, moi, je fabriquais ma dépendance. Et ma dépendance me minait. Elle s’en prenait à mon amour. D’heure en heure, elle devenait suicidaire. Il y a déjà deux nuits que je suis en dessous du degré zéro, de la joie de vivre. Deux nuits pendant lesquelles des millions de trains sont passés sur les rails qui cisaillent ma poitrine. Des trains cons, pleins de clichés et de fausses idées sur toi, plein de reproches injustifiés et d’accusations sans fondements. Mais aussi des beaux trains, des trains bleu ciel, purs comme mon absolu, des trains qui passent sans faire de bruit mais qui découpent la nuit avec de longs couteaux affilés. Les chairs repoussent ensuite, les cicatrices sont propres, mais elles restent là, à jamais, pour témoigner.
Et pendant ces deux nuits, pendant cette troisième qui s’achève, toi, tu vivais, tu ne comprenais rien. Toi qui d’habitude sens si bien les choses, tu me laissais dépérir sur pied. Sans doute pensais-tu ne pas vraiment nous abîmer. Tu ne pensais pas à mal puisque tu n’en faisais pas. Et peut-être te disais-tu que cette séparation nous tonifierait, que tu serais moins fragile et que ce temps passé loin de moi te donnerait la force d’exister, entière face à mes exigences . Exigences démesurées… Qu’est-ce que je donne en échange ?
Et bien, je te donne ça, cette lettre, le gouffre de mes sentiments, ma mort qui calmera mes tourments absurdes. Je te jure que j’aurais préféré te donner ma raison, ma vie, tous mes espoirs. Car tout ce que tu as à me dire est sûrement plein de beautés, de sincérité. Tu vas me dire que tu m’aimes. Mais tu n’as pas besoin de moi. Ou si peu. Tu sais te suffire de toi-même. Notre amour t’a semblé doux. Pas plus. C’était peut-être nouveau pour toi. Mais je ne t’ai pas manqué. Ou si peu…
Croire ou bien douter de toi ? Qui vient de me quitter ? Qui a menti ? Une heure d’extase et déjà le doute qui me ronge. N’était-ce pas de l’aumône, petit saint-bernard ? Tu as débouché le petit tonnelet de cognac, tu m’as fait une piquouse de petit bonheur, une intraveineuse de ta voix. Tu dois te dire que ça soulage. Que ça prolonge le malade. Et puis tu repars, tu vis. Moi je crève. Je souffle comme un phoque. Quand je pense à toi, il faut que j’inspire un grand coup. Quand je veux te rejeter, il faut que j’expulse… Ca doit bien m’arriver trois-quatre fois par minute… Le crabe que tu m’as mis aux tripes, retire-le. Il me bouffe le foie. Il me rappelle mes angoisses de gosse, cette image de mon bouquin de mythologie grecque, Prométhée enchaîné, dévoré par un vautour.
Mais le vautour, au moins, était à l’extérieur. Cela saignait à l’air libre. C’était de la blessure propre. Mon crabe me mange de l’intérieur. Délivre-moi de mon doute.
Mon amour,
Tu n’as presque jamais répondu à mes lettres. Pour celle-ci tu auras une excuse. Ce n’est pas la première fois que tu me fais mal, mais en partant tu me fusilles. Tu me laisses ce bébé que je vais avoir du mal à aimer tout de suite parce qu’il est le prix d’un échange. Lui contre toi. C’est toi que je voulais. C’est toi qui n’es plus là. J’en crève de douleur. Tu m’aimerais en cet instant parce que je n’ai plus rien d’un romantique à quatre sous. J’ai les yeux secs. Il n’y a plus rien à pleurer en moi. Je t’ai tout donné.
Fallait pas me quitter maintenant.
Lettre-miroir de Camille à Tristan :
Un mot sur la compromission, Tristan.
De compromettre, tu as gardé ce qu'il y a de plus con : promettre. Ah ! ça, pour promettre, il promet.. Et, comme petit poisson veut devenir grand, il s'arme et en même temps il s'affadit. Pour ne pas être mangé, pour ne pas être montré du doigt, pour ne pas être péché parce que trop gros ou trop brillant, il se fond dans la masse, il louvoie, il évite les extérieurs. Petit poisson-mouton. Moyen poisson-mouton. Gros poisson-mouton. ça y est, mon gros, t'as bien négocié. t'es compromis jusqu'à l'arête.
J'ai mon Littré sur la table. Le vieux me dit que compromettre c'est d'abord mettre un terme de droit : "S'engager par acte à s'en rapporter au jugement d'un arbitre sur un objet de litige." C'est clean, rien à dire. Une autorité qui tranche, des moutons qui suivent...
Mais c'est après que ça dérape.
"Compromettre.2. v.a.fig. Mettre en compromis, c'est-à-dire remettre à la décision d'autrui et par conséquent exposer à quelque atteinte. Compromettre sa dignité. Compromettre les intérêts de quelqu'un." Ouille, ouille, ouille, démasqué, les petits moutons. On était bien peinards, on s'en rapportait au jugement d'au arbitre et tout d'un coup on s'en remet à la décision d'autrui. On a cédé du terrain. La volonté et la dignité en prennent pour leur compte.
Mais ce n'est pas fini. Il faut aller jusqu'au bout de l'infamie :
"Compromettre.3. Mêler quelqu'un dans une affaire de manière à l'exposer à des embarras ou à des préjugés."
ça y est, le tournant est pris. Jusqu'alors on se laissait mener par le bout du nez, ou du cœur, ou de la lâcheté. Maintenant on fait du mal, exprès. Le ver est dans le fruit. Il n'y a plus qu'à retourner le canon du revolver contre soi :
"Se compromettre, v. refl.S'exposer à des embarras, à des périls."
Oui Tristan, c'est comme ça. Littré dit qu'une femme se compromet lorsqu'elle expose sa réputation. Ou qu'un homme se compromet lorsqu'il engage une lutte avec un adversaire indigne de lui...
N'oublie pas.
Moi, maintenant, je suis au-dessus de cela.
Camille
Tu m'as décroché mes étoiles. Tu as donné de grands coups de hache dans notre amour. Tu m'as cassé mon rêve. Tu m'as sonné comme un boxeur. Je ne marche pas encore sur les genoux, mais j'ai les chevilles en coton. Tout se dérobe. Je ne sais plus où aller. Je me cogne. La seule porte de sortie, c'est toi, et c'est fermé. J'ai voulu cent fois courir parce que je te voyais, mais, comme dans les aéroports, les baies étaient en verre épais. Ça fait mal quand on croit décoller et qu'on se les prend de plein fouet. On tombe comme les chevaux dans les abattoirs sous le coup bien placé d'un maillet. Tout s'écroule à cette seconde, tu meurs debout, le décor s'effondre ; les jambes rentrent dans la tête, la tête s'enfonce dans le sol. Et si, par hasard, tu en réchappes, c'est pour mourir quelques mètres plus loin, devant une autre porte vitrée.
Mon amour,
Tu n’as presque jamais répondu à mes lettres. Pour celle-ci tu auras une excuse. Ce n’est pas la première fois que tu me fais mal, mais en partant tu me fusilles. Tu me laisses ce bébé que je vais avoir du mal à aimer tout de suite parce qu’il est le prix d’un échange. Lui contre toi. C’est toi que je voulais. C’est toi qui n’es plus là. J’en crève de douleur. Tu m’aimerais en cet instant parce que je n’ai plus rien d’un romantique à quatre sous. J’ai les yeux secs. Il n’y a plus rien à pleurer en moi. Je t’ai tout donné.
Fallait pas me quitter maintenant.
« Le matin du troisième jour, nous avons commencé à comprendre que ce voyage avait un sens et que nous allions beaucoup plus loin que le simple bonheur d’être ensemble. » (p. 94)
Dans La Grande Librairie François Busnel reçoit :
Delphine de Vigan, Les Heures souterraines (JC Lattès)
Véronique Ovaldé pour Ce que je sais de Vera Candida (L'Olivier)
Patrick Poivre d'Arvor pour Fragments d'une femme perdue (Grasset)
Justine Lévy pour Mauvaise Fille (Stock)