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EAN : 9791031205304
122 pages
Editions Ateliers Henry Dougier (06/10/2022)
4.15/5   10 notes
Résumé :
Ève a croqué le fruit que Dieu lui avait interdit, entraînant dans sa chute Adam et l’humanité à venir. Et si l’on relisait le mythe, si on le débarrassait de cette culpabilité qu’a endossée l’Homme et tout particulièrement la Femme au long des siècles ? Ève, mère de tous les vivants, curieuse, gourmande et courageuse. Ève, heureuse de faire un choix, celui d’accéder à la connaissance. Ainsi en transgressant l’ordre divin découvre-t-elle l’altérité, le doute et bien... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Le fruit comme désir de connaissance…

Les personnages mythiques ont beaucoup inspiré la peinture, et les arts en général. Ils habitent inlassablement notre imaginaire et notre culture. La collection « Autobiographie d'un mythe » des Ateliers Henry Dougier propose de donner la parole à un ou une auteur.e pour revisiter un mythe en se mettant dans la tête d'un personnage, le « je » permettant au lecteur de se le réapproprier de façon originale et en y associant une certaine sensorialité. de la connaissance raisonnée et froide nous passons en effet à une approche plus affective, les sens et les sentiments du personnage étant mis à l'honneur. de plus le recueil se fait beau livre, de nombreuses peintures très connues ponctuent le récit, les pages cartonnées de couverture sont affublée de rabats à déplier pour découvrir une oeuvre à taille plus appréciable, permettant d'en déceler les moindres détails.

J'avais découvert cette collection avec « Moi, Oedipe… » d'Alain le Ninèze ; ce fut un vrai bonheur de me replonger dans les détails de cette histoire, dans sa genèse, et dans le message qui se profilait en filigrane au-delà du fameux complexe si galvaudé.
Avec « moi, Eve… » de Christine Sagnier, nous sommes en présence d'une histoire sans doute encore plus connue, une fable funeste tout aussi épique, une histoire tellement renommée qu'elle imprègne encore notre société.
Depuis la présence idyllique d'Adam et Eve dans le jardin d'Éden, la tentation provoquée par le serpent à l'encontre d'Eve pour croquer au fruit défendu, Eve qui succombe entrainant Adam également dans la faute, la punition divine excluant le couple du jardin d'Éden, l'obligation désormais d'enfanter dans la douleur, la honte de leur nudité, la satisfaction des besoins par la force et la sueur de leur travail, la domination de l'homme sur la femme, la séparation des hommes du monde animal, puis l'arrivée des deux enfants Abel et Caïn, et enfin la tragédie finale, les grandes étapes de ce mythe sont très connus. Ses conséquences et influences aussi, tant l'interprétation qui en est faite est malheureuse pour les femmes.

La force de ce livre réside dans la beauté du texte, sa poésie et surtout la découverte des événements à travers les yeux d'Eve, la fameuse pécheresse. Nous voyons le jardin à travers son regard, en sentons les odeurs par son nez, sentons la tiédeur de l'air par sa peau, sensualité qui montrent à quel point il faisait bon vivre dans le jardin d'Eden. Un bien-être fondé sur l'oisiveté et la mise à disposition à volonté d'eau et de nourriture, le temps s'écoulant « entre vendanges miraculeuses, siestes sous les efflorescences rosées d'un tamaris… »

« Mes cheveux, telles de longues herbes sauvages, glissaient sur mes flancs et battaient mes mollets. Je frissonnais. L'homme m'avait guidée à l'abri du vent jusqu'à une sorte de grotte de verdure tapissée de pétales et de feuilles où nous étions allongés, peau contre peau pour nous réchauffer. C'était un véritable nid, à l'image de ceux des oiseaux, une tanière délicieusement parfumée ; nous nous étions endormis après un long baiser ».

Puis nous sentons ses interrogations vis-à-vis de l'arbre de la connaissance, pressentons ses doutes, ses questionnements, ses incompréhension et comprenons peut-être un peu plus comment elle a pu prendre la pomme et croquer au fruit défendu.

« Quant à cet arbre, si beau, si majestueux, pourquoi Dieu l'avait-il planté, là, exactement au milieu du jardin ? Voulait-il nous tenter ? Mais alors dans quel but ? […] Pourquoi cet interdit ? Pourquoi une telle oppression ? Pourquoi acceptions-nous si facilement la soumission ?».

Moment d'égarement cher payé, les douleurs de l'enfantement se font nôtres, la tragédie maternelle entre les deux frères si différents est vécue de l'intérieur de son coeur de mère.

« Rien ne permet d'expliquer la raison pour laquelle Caïn entraina son cadet dans son champ et le tua. Rien. Ma gorge se serre à la seule évocation de cette effroyable journée où Abel mourut et Caïn disparut. Dieu m'avait fait enfanter, il m'avait donné deux garçons beaux et forts et, le même jour, il me les enlevait, l'un et l'autre. Ce soir-là, le soleil flamboya du sang qui avait coulé, et la terre se gorgea de mes larmes ».

Au final, c'est un magnifique portrait de femme, une femme audacieuse, forte, curieuse, libre, avide de connaissances, une femme aimante et maternelle, sensuelle et pleine de désirs assumés, qui nous apparait alors que ce mythe met souvent en valeur la terrible responsabilité de la femme dans cette chute de l'humanité, faute première qui expliquerait ensuite tant de choses, depuis la domination masculine qu'elle subit, la misogynie dont elle est l'objet, jusqu'aux douleurs de l'enfantement qu'elle doit affronter.
Sans doute comme le souligne Claude Cohen-Boulakia à la fin du recueil,entouré d'autres auteurs également qui viennent apporter une analyse critique et une prise de recul sur le mythe, "ni faute, ni chute, l'expulsion du jardin d'Éden n'est pas le désastre si souvent annoncée. le jardin figure l'état de nature ; ainsi, manger le fruit, c'est accéder à la culture, celle-là qui est signifiée par les pelisses que Dieu taille à l'attention d'Adam et Eve. Un Dieu bienveillant donc et dénué de colère qui encourage le premier couple à s'engager dans le monde en prenant en main son destin".

Voilà une façon vivifiante de revisiter ce mythe, fable si célèbre et si funeste, qui permet de développer une certaine empathie en donnant la parole à Eve, en la rendant vivante, de faire un pas de côté, et d'avoir cette prise de recul autorisant à porter un regard différent sur cette femme et sa soi-disant faute originelle. Découverte magnifiée par la présence des tableaux, tous sublimes. Ma préférence va à celui de Gustave Courtois intitulé sobrement « Adam et Eve ».
Je remercie chaleureusement Babélio pour l'envoi de ce livre dans le cadre de la Masse critique de janvier. Ce fut un magnifique cadeau.
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Cette collection revisite les mythes de l'intérieur, sous forme "d'autobiographie" romancée du personnage principal de chacun d'eux.
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« Moi, Eve » est un texte court, émaillé de reproductions de tableaux sur le commencement du monde tel que nous le connaissons. L'harmonie est belle entre le récit et le pinceau, qui se mettent parfaitement en lumière. Dans ce texte j'ai aimé la plénitude du début, où la plume se faisait charnelle et emplissait nos sens. J'ai aussi apprécié le passage du questionnement, où Eve doit choisir entre garder son innocence, ce qui l'ampute d'une partie de sa liberté, ou bien prendre la liberté de croquer le fruit défendu mais devoir gérer les conséquences de cette liberté.
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On peut en effet décliner cette question inhérente à toute société sous divers angles, comme une parabole de l'humanité transposable à toutes choses et qui se résume par la fameuse interrogation : La curiosité est-elle un vilain défaut ? Sous l'angle de la science notamment, le savoir va-t-il nous élever, nous délivrer, ou au contraire nous mener à notre perte ? Par exemple, notre volonté d'explorer le monde des intelligences artificielles alors même que l'on craint, comme dans tout bon scenario catastrophe qui se respecte, qu'elles prennent le contrôle, nous anéantissent ou volent notre liberté. Sous un angle purement sociétal et idéologique, les interdits doivent-ils être respectés dans une société, ou transgressés ?
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La question de la liberté, de ses limites et du libre arbitre nous est consubstantielle, en tant qu'être de pensée. Au-delà de l'aspect moralisateur qui semble émerger de l'histoire originelle, on peut donc effectivement aussi imaginer qu'Eve n'a pas vécu la sentence comme une punition mais bien, finalement, comme une (belle ?) aventure : celle qui lui manquait dans sa vie d'avant, où elle n'était peut-être pas si comblée puisqu'elle a eu envie d'autre chose. Plutôt qu'une transgression dont on doit passivement accepter la punition, l'acte peut alors devenir un choix souhaité dont on assume pleinement et activement les conséquences, sans regrets inutiles.
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"Aujourd'hui, je vais rejoindre Abel. Adam m'a devancée. Bientôt, je ne serai plus que poussière parmi la poussière, mais je vous le dis à vous tous, innombrables enfants d'Adam, aimez la vie, malgré la violence et les souffrances qu'elle sous-tend, chérissez-la jusqu'à votre dernier souffle, car si la douleur s'émousse, le bonheur, lui, demeure toujours aussi ardent.", conclura magnifiquement Eve.
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L'idée est intéressante et, sur le principe, cette réécriture offre donc de belles pistes de réflexion. Sur le fond, j'ai pourtant été moins convaincue et séduite par la suite du texte, où la sensualité s'effrite pour laisser place à la dure réalité d'une vie de travail et de souffrance pour de menues satisfactions. J'ai eu une furieuse envie de retourner au Paradis calme et tranquille malgré les conseils avisés d'Eve et la sensation inconfortable qu'il était insuffisant malgré tout. Donc oui j'ai vécu son dilemme, mais peut-être à cause de mon humeur du moment, j'ai finalement trouvé peu d'intérêt à cette réécriture sauf à profiter de la plume du début, se remémorer l'histoire, la vivre de l'intérieur pour tenter de ressentir les questionnements - mais au détriment des personnages autour qui semblent transparents, inconsistants, ce qui finit par déteindre sur l'entièreté du texte. Bref, je suis hélas passée complètement à côté de ce livre. Une déception pour moi, malgré un début prometteur.
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Adam et Ève symbolisent le pouvoir étrange et durable de l'art de la narration.

Pour des raisons à la fois captivantes et insaisissables, ces quelques versets d'un vieux livre sont un miroir où nous semblons apercevoir la longue histoire de nos peurs et de nos désirs. Ce récit, simultanément destructeur et libérateur, est un hymne à la responsabilité de l'homme et une fable funeste sur la misère humaine, une célébration de l'audace et une incitation à la mysoginie la plus violente.

Pourtant ce ne sont que quelques lignes environ une soixantaine (les voici)
" Yahvé Dieu dit : « Il n'est pas bon que l'homme soit seul. Il faut que je lui fasse une aide qui lui soit assortie. » Yahvé Dieu modela encore du sol toutes les bêtes sauvages sages et tous les oiseaux du ciel, et il les amena à l'homme pour voir comment celui-ci les appellerait : chacun devait porter le nom que l'homme lui aurait donné. L'homme donna des noms à tous les bestiaux, aux oiseaux du ciel et à toutes les bêtes sauvages, mais pour un homme, il ne trouva pas l'aide qui lui fit assortie. Alors Yahvé Dieu fit tomber une torpeur sur l'homme qui s'endormit. Il prit une de ses côtes et referma la chair à sa place.

Puis, de la côte qu'Il avait tirée de l'homme, Yahvé Dieu façonna une femme et l'amena à l'homme et l'amena à l'homme.
Alors celui-ci s'écria :

« Pour le coup, c'est l'os de mes os
et la chair de ma chair !
Celle-ci sera appelée "femme",
car elle fut tirée de l'homme, celle-ci ! »

C'est pourquoi l'homme quitte son père et sa mère et s'attache à sa femme, et ils deviennent une seule chair.
Or tous deux étaient nus, l'homme et sa femme, et ils n'avaient pas honte l'un devant l'autre.

Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que Yahvé Dieu avait faits. Il dit à la femme : « Alors, Dieu a dit : Vous ne mangerez pas tous les arbres du jardin ? » La femme répondit au serpent : « Nous pouvons manger du fruit des arbres du jardin. Mais du fruit de l'arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : Vous n'en mangerez pas, vous n'y toucherez pas, sous peine de mort. » le serpent répliqua à la femme : « Pas du tout ! Vous ne mourrez pas ! Mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s'ouvriront et vous serez comme des dieux, qui connaissent le bien et le mal. » La femme vit que l'arbre était bon à manger et séduisant à voir, et qu'il était, cet arbre, désirable pour acquérir le discernement. Elle prit de son fruit et mangea. Elle en donna aussi à son mari, qui était avec elle, et il mangea. Alors leurs yeux à tous deux s'ouvrirent et ils connurent qu'ils étaient nus ; ils cousirent des feuilles de figuier et se firent des pagnes.

Ils entendirent le pas de Yahvé Dieu qui se promenait dans le jardin à la brise du jour, et l'homme et sa femme se cachèrent devant Yahvé Dieu parmi les arbres du jardin. Yahvé Dieu appela l'homme : « Où es-tu ? » dit-il, « J'ai entendu ton pas dans le jardin, répondit l'homme ; j'ai eu peur parce que je suis nu et je me suis caché. » Il reprit : « Et qui t'a appris que tu étais nu ? Tu as donc mangé de l'arbre dont je t'avais défendu de manger ! » L'homme répondit : « C'est la femme que tu as mise auprès de moi qui m'a donné de et j'ai mangé ! » Yahvé Dieu dit à la femme : « Qu'as-tu fait là ? » Et la femme répondit : « C'est le serpent qui m'a séduite et j'ai mangé ! »

Alors Yahvé Dieu dit au serpent : « Parce que tu as fait cela, maudit sois-tu entre tous les bestiaux
et toutes les bêtes sauvages.
Tu marcheras sur ton ventre et tu mangeras de la terre tous les jours de ta vie.
Je mettrai une hostilité entre toi et la femme,
entre ton lignage et le sien.
Il t'écrasera la tête et tu l'atteindras au talon. »

À la femme, il dit :
« Je multiplierai les peines de tes grossesses,
dans la peine tu enfanteras des fils.
Ta convoitise te poussera vers ton mari
et lui dominera sur toi. »
À l'homme, il dit : « Parce que tu as écouté la voix de ta femme et que tu as mangé de l'arbre dont je t'avais interdit de manger, maudit soit le sol à cause de toi !
À force de peines tu en tireras subsistance tous les jours de ta vie.
Il produira pour toi épines et chardons et tu mangeras l'herbe des champs.
À la sueur de ton visage
tu mangeras ton pain,
jusqu'à ce que tu retournes au sol,
puisque tu en fus tiré.
Car tu es glaise
et tu retourneras à la glaise. »
L'homme appela sa femme « Ève », parce qu'elle fut la mère de tous les vivants. Yahvé Dieu fit à l'homme et à sa femme des tuniques de peau et les en vêtit. Puis Yahvé Dieu dit : « Voilà que l'homme est devenu comme l'un de nous, pour connaître le bien et le mal ! Qu'il n'étende pas maintenant la main, ne cueille aussi de l'arbre de vie, n'en mange et ne vive pour toujours » Et Yahvé Dieu le renvoya du jardin d'Éden pour cultiver le sol d'où il avait été tiré. Il bannit l'homme et il posta devant le jardin d'Éden les chérubins et la flamme du glaive fulgurant pour garder le chemin de l'arbre de vie."

Et voilà que dans ces quelques lignes, au final figurent très peu de choses de ce qui est rentré dans l'imaginaire collectif : la pomme, la faute, et ensuite "la réalisation" des menaces
Peu de récits dans l'histoire de l'humanité ont connu une telle longévité et une si large renommée. Peu ont acquis une réalité aussi prégnante et ensorcelante.
Pendant des siècles, des croyants, hommes et femmes, ont lutté pour honorer une proposition théologique et tenter de traiter ce récit de l'homme et de la femme nus et du serpent doué de parole comme le compte rendu exact des événements qui ont initié la vie telle que nous la connaissons. Des philosophes, des théologiens, des prêtres, des moines et des visionnaires ainsi que des poètes et des artistes, tous ont contribué à ce gigantesque effort collectif. Mais ce n'est qu'à la Renaissance – à l'époque de Dürer, de Michel-Ange et de Milton – que de nouvelles techniques de représentation sont finalement parvenues à conférer aux premiers êtres humains un sentiment de réalité convaincant et à rendre leur histoire vivante.
Les oeuvres d'art, magnifiquement reproduites comme dans chaque volume de cette collection, en sont les témoignages.

Et grâce à l'écriture de l'auteure on découvre une Ève vivante qui a la parole, qui se raconte, se livre.
C'est découvrir :
Une femme curieuse, capable de faire ses choix, et de les assumer.
Une femme qui ose désobéir à la loi parce qu'elle a soif de connaissances.
Une femme pleine de vie qui brave l'autorité pour mieux s'épanouir .
Une femme qui se veut libre.
Une femme qui se veut femme auprès d'Adam.
Une femme mère.
Une femme qui affronte les souffrances.

L'histoire d'Adam et Ève finalement parle à chacun d'entre nous. Elle traite de qui nous sommes, d'où nous venons, de pourquoi nous aimons et de pourquoi nous souffrons. Son immense portée semble inscrite dans sa structure même. Même si ce texte est l'une des pierres fondatrices de trois grandes religions du monde, il précède, ou affirme précéder, toute religion singulière. Il saisit l'étrange façon dont notre espèce considère le travail, la sexualité et la mort – des caractéristiques de l'existence que nous partageons avec tous les autres animaux – et en fait des objets de réflexion, comme si ces caractéristiques dépendaient de quelque chose que nous aurions fait, comme si tout aurait pu être différent.

Il existe dans la langue française une expression, certes surannée, qui nous dit " remettre l'église au centre du village"...
Alors merci à Christine Sagnier d'avoir remis l'arbre de la connaissance au centre du jardin d'Eden....
Et d'avoir écrit cette "autobiographie" qui se termine dans des mots aussi magnifiques que ceux par lesquels elle débute :
"Aujourd'hui, je vais rejoindre Abel. Adam m'a devancée. Bientôt, je ne serai plus que poussière parmi la poussière, mais je vous le dis à vous tous, innombrables enfants d'Adam, aimez la Vie, malgré la violence et les souffrances qu'elle sous-tend, chérissez-la jusqu'à votre dernier souffle, car si la douleur s'émousse, le bonheur, lui, demeure toujours aussi ardent."
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Quand j'étais à l'université, on a eu un cours sur la Bible. Alors qu'au départ j'étais assez dubitative et y voyait là une forme d'endoctrinement qui m'agaçait prodigieusement, j'ai rapidement revu mes standards lorsque j'ai pris la mesure de l'influence de ce livre sacré dans la littérature d'hier et d'aujourd'hui … et dans les arts en général. Alors, ni une ni deux, j'ai ouvert la Bible et ai lu La Genèse. Et je pense sincèrement que ce fut l'une de mes lectures les plus instructives pour comprendre. Comprendre une partie du monde dans lequel je vis, une partie de l'Europe, de ses racines et de sa culture.

En ouvrant "Moi, Ève…", j'avais donc une certaine idée du mythe que j'allais lire et des tenants et aboutissants de l'histoire et j'ai donc pu d'autant plus apprécier ma lecture qui relate les débuts d'Adam et Ève dans le jardin d'Eden, du point de vue d'Ève.

Le récit - fidèle à l'histoire que nous connaissons tous - entremêlé de reproductions d'oeuvres d'art, fait la part belle aux femmes et propose une nouvelle approche du mythe et de la fameuse tentation d'Ève !

Ève, l'insoumise, l'humaniste, est sublimée par quelques extraits et réflexions d'auteurs, d'historiens, de chercheurs… autant de points de vue qui viennent alimenter le mythe, lui donner corps, épaisseur et coffre.

C'est à nouveau une belle découverte des parutions des @ateliershenrydougier pour moi avec ce livre issu de leur belle collection "autobiographie d'un mythe".
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Ève, lève toi…

Maintenant que vous avez le titre en tête ( ne me remerciez pas), laissez-moi vous présenter un des nouveaux opus de la collection Autobiographie d'un mythe aux éditions Ateliers Henry Dougier.

Eve, c'est la tentatrice, la femme née d'une côte d'Adam, responsable d'avoir croqué le fruit défendu, d'avoir incité l'homme à le faire. La responsable de l'éviction des hommes du jardin d'Eden.

Mais c'est aussi et surtout, celle qui choisit la connaissance, le libre arbitre face à l'arbitraire religieux. 

Un symbole fort, je trouve. Celui du choix de la liberté face aux conforts de la vie.

Christine Sagnier romance l'épisode de la chute du Paradis et de ses conséquences dans ce très court roman.

Un récit fluide, entrecoupé de magnifiques illustrations qui font de cet ouvrage, encore, un livre magnifique à contempler.

J'aime aussi beaucoup les extraits de différents auteurs venant clôturer le livre. Ils permettent de mettre en avant des idées et des auteurs en lien avec le sujet de ce roman, Ève. 

Si vous aimez les publications des ateliers Henry Dougier, celui-ci vous plaira à coup sûr également et si vous ne les connaissez pas, voilà une bonne occasion de le faire ! 
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Je me souviens, c'était à la mi-temps du jour, à ce moment précis où le soleil commence à décliner. L'air du jardin était une gourmandise et embaumait la rose, et le bleuet et les feuilles de figuiers. Partout, les oiseaux pépiaient et les insectes butinaient.
Le vent s'enroulait autour de moi et charriait un parfum de fleur d'oranger qui m'invita à rebrousser chemin.
(Incipit)
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JE ME SOUVIENS, c'était à la mi-temps du jour, à ce moment précis où Ie soleil commence à décliner. L'air du jardin était une gourmandise et embaumait la rose, et le bleuet et Ies feuilles de figuiers. Partout, les oiseaux pépiaient et les insectes butinaient.
Le vent s'enroulait autour de moi et charriait un parfum de fleur d'oranger qui m'invita à rebrousser chemin. Là, ce fut une explosion de senteurs enivrantes. Je m'accroupis sous un arbre au milieu de l'herbe grasse et j'observai. Au loin, un singe voyageait à dos d'éléphant tandis qu'une laie traversait la prairie avec ses marcassins sans s'attarder devant le tigre qui marchait à cloche-pied. Tous convergeaient vers le fleuve où s'abreuvaient déjà une licorne - à moins que cela fût un mouflon - et quelques chèvres qui allaient bientôt être rejointes par une girafe.
(INCIPIT)
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Pour la première fois, j'examinai attentivement le fameux fruit interdit. Un fruit magnifique, d'un rouge éclatant, gorgé de soleil, sur un arbre tout aussi splendide. Je ne pus m'empêcher de le toucher, la pulpe de mes doigts effleura cette peau duveteuse. Rien n'advint. Aucune pluie diluvienne ne fendit les nues, aucun vent ne balaya les plantes, ne souleva la terre. Les Cieux semblaient imperturbables.
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Pour la première fois, j'examinai attentivement le fameux fruit interdit. Un fruit magnifique, d'un rouge éclatant, gorgé de soleil, sur un arbre tout aussi splendide. Je ne pus m'empêcher de le toucher, la pulpe de mes doigts effleura cette peau duveteuse. Rien n'advint. Aucune pluie diluvienne ne fendit les nues, aucun vent ne balaya les plantes, ne souleva la terre. Les Cieux semblaient imperturbables.
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Comme si toutes les beautés du jardin s’étaient évanouies d’un seul coup : il n’y avait que lui. Je jetai un coup d’œil au serpent qui me dévisageait avec la même acuité ; je tentai de percer ce qui se cachait derrière ces pupilles sombres. En vain. Brusquement, sans plus réfléchir, je saisis le fruit, et d’un mouvement preste du poignet, je le cueille.
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Christine Sagnier présente son livre "Mado, 13 ans, oublie l'exil" : le processus d'écriture, les personnages... vous saurez tout (sauf la fin).
Mado a fui son pays, avec sa mère, son frère et sa soeur. Elle relate son parcours, le chaos, les passeurs, l'arrivée en France, les hôtels minables, le centre d'accueil pour demandeurs d'asile, l'attente du statut de réfugié, la dépression de la mère. Et l'amitié dans ce centre, la solidarité, la vie au collège, le ravissement face à la tour Eiffel, la magie d'un sapin de Noël, celle de la neige, les souvenirs de cette vie radieuse d'avant la guerre…
Pour en savoir plus : http://ateliershenrydougier.com/mado_oublie_exil.html
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