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EAN : 9782246123132
238 pages
Grasset (06/11/2002)
3.88/5   79 notes
Résumé :
En fait d'odyssée, il semble que le retour d'Ulysse à Ithaque tienne da¬vantage de l'école buissonnière et qu'il soit plutôt hâté par l'annonce de l'infidé¬lité de Pénélope. Mais que dire lorsque l'on vous somme de justifier une absence de dix ans ? Peu de' chose, suggère Giono, un mensonge... Ainsi naît . l'Odyssée. Dans ces pages merveilleuses de poésie, Giono célèbre un monde où, à travers les dieux, l'homme et la nature entrent en communion profonde.

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La naissance de L'Odyssée est le premier récit achevé de Giono. C'est l'abbé Lombardi, ami de la famille, qui avait offert au jeune manosquin une série de livres, parmi lesquels figurait l'Odyssée. Ainsi débute sa connaissance d'Homère et sa passion pour l'Antiquité , ses auteurs, qu'il approfondit plus tard grâce aux « classiques Garnier ». Il entreprend ce récit en 1920 alors qu'il est employé de banque à Marseille, Giono s'évade de son univers professionnel aux côtés d'Ulysse dans le bleu de la Méditerranée et l'azur du ciel  provençal, pris , lui aussi, aux mirages des îles. Giono va raconter une histoire bien différente de celle narrée par Homère , l'Odyssée, le voyage d'Ulysse pour revenir jusqu'à son île natale Ithaque , où est sensée l'attendre sa fidèle épouse Pénélope. (L'Odyssée original commenté récemment par Mélanya).
Ce long texte déterminera sa vraie vocation et son devenir de romancier.
Ici, ce retour, d'île en île, est une musardise de femme en femme et Ulysse l'artificieux se complet à passer du temps, beaucoup de temps ,de couche en couche, celles de belles dames : Kallisté, Timarete, Orée, Lyssia, Melitte, Calyptso, Circé. Il coule des jours heureux, peu pressé de rentrer au bercail jusqu'au jour où Menelas qui a retrouvé son Hélène lui confie que Pénélope n'est pas fidèle, elle a pris moult amants, des jeunes évidemment dont un certain Antinoüs qui, de surcroît, la gruge. Il surprend des conversations qui semblent confirmer son triste sort «  Paraisse le godelureau aux joues nettes et vous voilà sur le dos… Vous faites comme a fait la femme d'Ulysse.. Madame Pénélope passe pour une femme de sagesse… pour l'heure elle est passée  »Ulysse le crâneur prend le cafard, il est amer il faut qu'il rentre chez lui, dare-dare, il est temps de se hâter. Mais que dire lorsqu'il faut justifier d'une si longue absence ? dix ans ! Peu de chose. Un gros mensonge !
Les décors de la Grèce antique deviennent ceux de la Provence : mas, caboulot, calanque, combe, maquis, cigale, pigeonnier rond, manoir, taillis d'avelaniers (noisetiers en provençal)…
C'est un récit poétique, onirique, truculent, plein de philosophie.
Je me suis revue dans la cour du Lycée Stéphan Gsell, lors des récréations, réinventant avec force imagination, avec mes copines de classe , les histoires de dieux, déesses, héros grecs à notre façon, leur donnant à travers nos récits plus de vie et d'aventures .
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Dans son premier roman, écrit en 1927, Giono réécrit le mythe d'Ulysse sur le chemin de son retour à Ithaque. Alors que dix ans se sont écoulés depuis la fin de la guerre de Troie et que la nouvelle de sa mort s'est partout répandue, circule à présent la rumeur d'une idylle de Pénélope avec Antinoüs, un ami de son fils Télémaque. Notre héros, rongé de chagrin, se fait passer pour un voyageur venant de rencontrer Ulysse vivant, et témoigne pour lui des raisons de son retard : à l'opposé de ses compagnons rentrés depuis longtemps dans leurs foyers sous des auspices favorables, le valeureux Ulysse a connu au fil des ans l'acharnement effroyables des forces occultes et des déesses qui l'ont accablé d'épreuves. Et le pseudo témoin d'inventer, traversé par une inspiration magique, sa propre légende telle qu'Homère la retranscrira.
Poètes et musiciens s'emparent de cette histoire glorieuse qui se répand comme un feu de broussailles dans toute la contrée tandis qu' Ulysse, effrayé par les conséquences incontrôlables de son mensonge, craint la colère des dieux.
Qu'adviendra-t-il ? Ulysse sera-t-il puni ? Reverra-t-il Ithaque ? Son épouse lui a-t-elle été fidèle ?
La suite de l'aventure le révèlera.
Ce roman de Giono, dont l' enfance fut baignée de culture grecque et de paysages méditerranéens, contient une réflexion sur la création littéraire et ses rapports à la réalité : sous la roche, les arbres, les paysages, les troupeaux, la mer, attend le génie des lieux qui prendra vie grâce à la puissance créatrice de l'homme, sombre et lumineux héritage des dieux. Cette mystérieuse alchimie transmute le monde en y insufflant le souffle poétique qui, avec le travail de la terre et le soin aux bêtes, rendra le monde habitable.
Le style du roman est riche, son abord m'a paru malaisé. Il est émaillé de nombreux termes poétiques qui ont nécessité un recours fréquent au dictionnaire. J'ai eu l'impression d'examiner une pièce de joaillerie trop travaillée où l'artisan aurait ajouté ça et là quelques pierres précieuses superflues, surchargeant inutilement l'ensemble. Et puis j'ai abandonné l'usage du dictionnaire (dans lequel d'ailleurs tous les mots ne figuraient pas) et peu à peu, la beauté du texte m'a emportée, un peu comme emporterait un torrent de montagne, sans qu'on s'interroge sur les richesses qu'il contient.
Et l'effet est fantastique.
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Dans une lettre de 1925, Giono écrit à propos de Naissance de l'Odyssée :
« Je refais pas à pas, si l'on peut dire, sur une vieille carte, les errances d'Odysseus le divin menteur ; j'ai acquis l'intime certitude que le subtil, au retour de Troie, s'attarda dans quelque île où les femmes étaient hospitalières, et qu'à son entrée en Ithaque, il détourna par de magnifiques récits le flot de colère de l'acariâtre Pénélope. »
Nous voila prévenus, le jeune Giono se lance dans un anti-Ulysse. Est-ce pour autant un pro-Pénélope ? Pénélope a-t-elle sa place dans le panthéon des veuves abusives d'Anatole de Monzies ? Malgré une meute de prétendants émoustillants, elle reste fidèle à son Ulysse qu'elle croit mort, qui, lui, se croit cocu, mais ne se prive pas d'aimer les femmes, ce qui achève de le distinguer d'Anatole de Monzies. C'est dans ce vaudeville que nous replonge Giono. Homère est-il plus misogyne qu'Anatole de Monzies ? Pas moins. Calypso s'en plaint d'ailleurs à Zeus : de quel droit les Dieux mâles fricotent-ils avec des demoiselles, tandis qu'une Déesse qui succombe à un beau grec se fait traiter direct ? Cancel Homère, cancel ! Et pourquoi Giono s'est-il lancé dans ce remake de l'Odyssée ? Mystère ! D'autant que je l'avoue le rouge aux joues, j'ai dû sortir mon Littré.
« accoiter, maffler, hucher, s'irruer, écheler, rioter, aiguer, enchapper, s'adolorer, araire, chebec, pourchas, asphodèle, scabieux, oseraie, dryade, bauge, musser, cal, chiton, pastouré, venellé, couffe, rebecqueuse, souquenille, gineste, tartane, lustral, prêle, ridelle, bédoule, cyprière, canéphore, caroube, roupine, semoustat, tympanon, trirème, nicette, ourque…
Et parfois Littré s'est avoué vaincu. Un texte comme un coffre au trésor, et quand on l'ouvre, c'est du toc. Les métaphores font poète du dimanche ("Les poulpes l'ont sucé comme un grain de raisin" p.87 "; "les branches méduséeennes d'un figuier" p. 101 et j'en passe) . C'est laborieux, limite scolaire. Si tout ce que j'ai lu de Giono relève du don, de l'extase, du céleste séjour, cette « réfutation de l'Odyssée «, ce palimpseste chiant est une punition. Et pas que pour moi. Après deux ans et demi de travail, de relectures et de corrections, Giono finira par écrire en juillet 1927 « Ces dieux, ces déesses me sortent des narines à la fin».
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« Naissance de l'Odyssée » (1930) est le quatrième récit publié par Jean Giono, après « Colline » (1929), « Un de Baumugnes » (1929) et « Regain » (1930), mais c'est le premier roman achevé par l'auteur (entre 1920 et 1924). de l'aveu même de l'écrivain, « il ne faut considérer ce livre que comme un jeu littéraire, un essai, en laissant à ce mot son sens expérience » (Préface à l'édition originale). Pour un essai, c'est un essai réussi, et même transformé, avec bonus (les amateurs de ballon ovale apprécieront j'espère la finesse de cette remarque toute rugbystique). On a connu des premiers romans moins réussis !
En 1919, Giono revient de guerre, et trouve un emploi dans une banque marseillaise, où il occupe la fonction exaltante de conservateur des titres, dans une salle de coffres située au sous-sol : « Ce livre a été écrit dans un souterrain » (Préface à l'édition de 1960). « L'Odyssée » d'Homère est un livre qui le suit depuis ses quinze ans, et qui contribue grandement à sa culture classique, et particulièrement antique. Ici c'est le moyen d'évasion le plus approprié pour l'enterré vivant qu'est Giono. Il y a déjà longtemps qu'il a découvert l'homérique, et c'est justement ce texte qui va servir de base à son roman.
Le sujet est original : Ulysse rentre chez lui, un peu penaud parce qu'il a traîné en chemin avec des femmes légères (et court vêtues), et il se demande quelle histoire il va raconter à Pénélope, pour se faire pardonner. D'où le titre : « Naissance de l'Odyssée » ? L'Odyssée n'étant plus le récit des aventures « vécues » par Ulysse, mais celui des aventures « racontées » par Ulysse, ce qui chez un méridional, a des chances d'être non seulement épique, mais encore emphatique voire tartarinesque !
C'est un Giono auquel on n'est pas habitué. Oh ! ce n'est pas la grosse galéjade du « Bar de la marine » (celui de César), Giono n'est pas un amuseur ; mais il distille un humour subtil qu'on ne retrouve pas souvent dans ses oeuvres postérieures. On a vu qu'il changeait l'histoire. Il change aussi les personnages : Ulysse est un vantard, peureux, infidèle, plus tordu que rusé, Pénélope est une jolie garce, elle aussi infidèle et menteuse comme pas deux (la belle Hélène, d'Offenbach), et les autres personnages à l'avenant. Pourtant on ne glisse à aucun moment vers la comédie, le vaudeville ou l'opérette. Les personnages ne « sentent » pas la caricature, mais restent plausibles, dans cette histoire parallèle qui, ma foi, aurait pu se passer ainsi.
Et puis ce qui fait la spécificité de Giono, c'est la poésie :
« Aplati sur le sable humide, Ulysse ouvrit les yeux et vit le ciel – rien que le ciel ! Sous lui, la chair exsangue de cette terre qui participe encore à la cautèle des eaux.
La mer perfide hululait doucement : ses molles lèvres vertes baisaient sans relâche, à féroces baisers, la dure mâchoire des roches ».
« Naissance de l'Odyssée » atteint ainsi un double but : Giono désacralise en quelque sorte l'oeuvre (le chef-d'oeuvre) d'Homère, sans rien lui enlever de sa force, ni de sa puissance d'évocation, et en même temps il crée un nouvel objet littéraire, entre l'hommage et la parodie tout en y incluant sa propre mythologie (qu'on retrouvera tout au long de son oeuvre), ses propres convictions et sa propre poésie.
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Naissance de l'Odyssée (1930), Jean GIONO






Dans l'Odyssée d'Homère, Ulysse, le héros aux mille tours, est seul narrateur de ses aventures qu'il déroule pour contrer la rumeur selon laquelle il est mort. Calypso, Circé sont des nymphes qui l'ont gardé captif.
Revisitée par Jean Giono, l'Odyssée devient le fruit d'une création collective, liée à la transmission orale, dont les premiers maillons sont Ulysse et son compagnon Archias. L'oeuvre est le mensonge d'un hâbleur pour éviter la colère de Pénélope.

L'épopée de Giono ne contient que deux mentions à la guerre ou au combat. Ulysse n'est pas un héros épique, un chef valeureux guidant son armée mais un paysan riche, lâche et volage. Pénélope est une épouse frivole, infidèle et acariâtre.

La première partie du livre conte le voyage d'Ulysse vers Ithaque. Et c'est en souhaitant rétablir la vérité concernant sa mort, qu'Ulysse doit faire face à la réplique de l'aède : « Mais, s'il est vivant, qu'a donc fait ton camarade pendant dix ans ? » Pour ne pas perdre la face, Ulysse justifie cette disparition en inventant une série d'aventures totalement invraisemblables. L'aède les colporte à tous vents, et « Ulysse et le beau périple » est repris par « tous les poétaillons de la ville », chacun y apportant « son petit morceau à la mode »... Réalisant qu'il a perdu tout contrôle sur son récit, Ulysse est terrifié à l'idée de paraître devant Pénélope, convaincu qu'elle ne croira pas un mot de ces « aventures trop grosses pour lui ».

La deuxième partie décrit l'arrivée d'Ulysse à Ithaque. le style est plus simple et poétique, restituant la lumière et la paix de la terre natale. Pénélope attend le retour d'Ulysse, le récit de l'aède a ravivé son souvenir et son désir du jeune homme parti vingt ans plus tôt. Elle parfait le décor, maquille la réalité, jusqu'à envoyer chercher « le tissage de cette grande toile qui encombre le grenier ». Et le vieil Ulysse vaincra grâce à la peur que le récit de ses aventures imaginaires aura instillée dans l'esprit d'Antinoüs et des prétendants : « La chiquenaude d'Ulysse » frappa Antinoüs au menton « avec le poids effroyable du mystère ».

Ulysse comprend « la beauté de son mensonge », il va « l'utiliser sciemment ».
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Le rideau flexible des joncs s'ouvrit sur une étroite plaine qui mimait la chair liquide de la mer. Des vagues de froment brisaient contre le flanc rugueux de la montagne où l'écume des oliviers grésillait ; dans ces calanques ombrées et profondes dormait le flot étale des prés. Une bastidette à forme de nef était à l'ancre sur un champ de trèfles. Ainsi, sous le visage de la terre, Ulysse trouvait toujours les traits aimés de la mer.
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Comme il se retournait, il vit bondir dans la nuit des chevrettes rouges de feu. La flamme avait pénétré tout l'édifice des rameaux secs : crêtée de fumée torse, étirant sa chair éclatante, elle dansait et le brasier craquait sous ses pieds terribles. Cette danseuse, Ulysse la connaissait de longue date : il se mit près d'elle du bon côté, loin de sa chevelure étouffante et, le dis au vent, face à la flamme, il se mit à grignoter les olives.
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Certes,il n'était pas un trop mauvais garçon,mais il avait menti,menti d'affilée,comme on respire,comme on boit quand on a soif,tant et tant qu'il ne connaissait plus le vrai du faux,qu'il n'y avait plus de vrai dans sa vie , son imagination cristallisant sur chaque brin de vérité une carapace scintillante de mensonges[..... ]
Ulysse! Ce ne serait plus désormais ce nez de goupil,ces minces lèvres,ces yeux que l'habitude du rêve mensonger creusait de regards insondables , mais une hétéroclite amalgame de géants,de déesses charnelles,d'océans battant la dentelle des îles perdues.
Et il avait peur de paraître devant Pénélope déformé par cette ingurgitation d'aventures trop grosses pour lui.
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Depuis un moment, des inquiétudes d'oiseaux pépiaient au sein des arbres. Au-delà de la forêt, le ciel se poudrait d'argent qui étouffait les étoiles. Enfin un soc éblouissant dépassa la rondeur noire de la terre : l'onde molle de la nuit se mit à bouillonner contre l'étrave de la lune.
Au petit jour, le guitariste s'éveilla d'un sommeil fleuri comme une eau qui flue entre les genêts. Il perçut l'aube dans la lèche glacée du vent : il lui semblait que deux pétales de pervenche étaient collés sur ses joues. Sa nuit intérieure était illuminée par un grand genêt d'or, les paroles d'Ulysse glissaient encore contre ses oreilles avec le vent confus.
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Une forge ronflait entre ses côtes, il avait l'impression de forger sa liberté avec le marteau sourd de son cœur.
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Denis Infante a publié son premier roman Rousse publié aux éditions Tristram le 4 janvier 2024. Il raconte l'épopée d'une renarde qui souhaite découvrir le monde. Un ouvrage déroutant par sa singularité. Son histoire possède la clarté d'une fable et la puissance d'une odyssée et qui ne laissera personne indifférent. L'exergue, emprunté à Jean Giono, dit tout de l'ambition poétique et métaphysique de ce roman splendide : "Dans tous les livres actuels on donne à mon avis une trop grande place aux êtres mesquins et l'on néglige de nous faire percevoir le halètement des beaux habitants de l'univers."
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