Première rencontre avec
Iris Murdoch, première rencontre avec cette écrivaine anglo-irlandaise, et quand on sait ce que ces deux pays ont apporté à la littérature, on est en droit de s'attendre... au meilleur.
Sans créer une attente inutile, disons d'emblée que j'ai trouvé dans ce livre ce que j'y cherchais : une patte, une plume, un univers, un talent.
Le résumé que j'en propose va être bref et sortir des sentiers que je bats trop souvent.
Prenez neuf personnages et imaginez que chacun d'eux soit une carte à jouer. Il y a Martin, le narrateur, riche négociant en vins, Antonia son épouse, Georgie sa maîtresse, Alexander son frère, Rosemary sa soeur, Palmer le psychanalyste de sa femme, Honor la soeur du psychanalyste et ses deux secrétaires Miss Seelhaft et Miss Hernshaw.
Battez et mélangez un long moment les cartes afin que chacun des personnages se trouve là et avec qui vous ne vous attendiez pas à le trouver... mais où l'habile prestidigitatrice qu'est
Iris Murdoch savait, elle, qu'il y serait... à votre grand étonnement.
Le tour a marché pour moi... il n'y a pas de raison raisonnable pour qu'il n'en soit pas de même pour vous...
L'histoire va emporter tous les codes... sociaux, moraux, psychologiques.
Elle va bousculer tous les conforts... ceux du lecteur comme ceux de ses personnages.
Iris Murdoch ne ménage personne, et surtout pas les conventions, les poussiéreuses bienséances, l'ordre établi pour lequel elle semble éprouver une sainte horreur.
Alors, utilisant ses cartes et ses règles, elle nous invite à jouer à la bataille, une bataille pagaille où l'un des fondements essentiels est la déconstruction, la déstructuration, la joyeuse explosion des tabous et où votre joker ( clé de lecture ) est le symbolisme.
L'histoire est un incessant ballet de chassés-croisés tragicomiques, ironiques, cyniques, humoristiques, drôles et intelligents.
Le suspense est omniprésent, la tension permanente.
Comme dans la vie ou comme au théâtre, ce qui revient à peu près au même, nous avons affaire à une commedia dell'arte où tous les protagonistes portent un masque... et les masques changent et s'échangent ... parfois.
L'érudition n'est pas le point faible de l'auteure, et la psychanalyse semble être un dada, un cheval à bascule où l'on entrevoit l'ombre de papa
Freud inviter les uns et les autres à monter ce jouet "extraordinaire".
La structure narrative n'accorde aucun temps mort au lecteur et aux personnages... personnages emblématiques, symboliques qui vous viscèrent les neurones.
Le style est très "personnalisé" ; la syntaxe est riche, maîtrisée et requiert un minimum d'attention ( sourire ).
Un premier livre qui en appelle d'autres.