Cette anthologie de la poésie turque du 13ème au 20ème siècles m'a permis de découvrir la richesse d'un univers littéraire encore inconnu. Et quel plaisir de le découvrir, loin des affres de l'actualité internationale ! Rempli de spiritualité, d'amour, de mort, de liberté, de parfums d'Orient, de douleur et de chagrin, de pureté et d'humanisme, j'y ai trouvé de quoi assouvir ma curiosité et ouvrir mon horizon culturel. C'est pourquoi je recommande ce livre dans l'esprit d'un Théophile Gauthier qui écrivait sur la Turquie en 1855: « Aux paresseux qui redoutent une traversée d'une dizaine de jours, ce volume servira de voyage en Turquie, et, après l'avoir lu, ils en sauront plus que nous qui n'avons pas dépassé l'entrée de la mer Noire, et dont le pied n'a foulé que quelques heures, sur la rive de Smyrne, cette terre où marchait le divin aveugle accompagnant sur sa lyre les récits de l'Iliade et de l'Odyssée. »
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Un beau livre qui donne un aperçu de la poésie turque avec ses plus grands auteurs. Les poèmes sont bien choisis et on trouve un petit résumé de la vie de chaque poète.
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Hottes de peines
Je suis comme le quai d'un océan: la vie,
Qui déverse sur moi ses hottes de peines.
Les navires qui passent et, de-ci et de-là,
Déversent sur moi leurs hottes de peines.
J'ai plongé ma jarre dans le fleuve des douleurs,
Je dois souffrir encore, elle n'est pleine qu'à moitié !
Et plus je me courbe, et plus je tombe bas,
Plus on vide sur moi des hottes de peines.
Poète, d'aucuns savent ta lamentable histoire,
Tu veux t'en libérer, tes efforts sont vains,
Celle que tu aimais du profond de ton coeur,
N'a-t-elle sur toi déversé sa hotte de peines ? ...
(Asik Ihsanî)
Douleur
Douleur m'a fait les cheveux blancs,
Et douleur a ridé mon front;
Douleur a dépouillé mon âme,
Pour la crucifier toute nue.
Puis comme à flots mon sang coulait
Et que satisfaite elle me toisait,
Alors douleur femme se fit,
Et douleur à moi s'est donnée.
(Nécip Fazil Kisakurek)
Spleen
Je porte dans mon coeur un poignard éternel,
Et toute jarre est vide où se tendent mes mains,
Et cherchant la lumière je me heurte aux fenêtres,
Mais le soleil est noir dans un ciel de ténèbres,
Et l'hombre s'étendra sur l'infini des temps.
Toujours cette soif, que rien ne désaltère,
Toujours cette course qu'un obstacle n'arrête,
Puis l'ombre s'étendra sur l'infini des temps.
(Ahmed Muhip Dranas)
Je ne te nommerai 'Fils' que si tu comportes en homme
peu m'importe si tu portes la couronne des rois ...
de te voir planter un arbuste me suffit à moi
Pour que je puisse, fier, te nommer mon Fils
Le Pain d'étoiles
Le pain est là sur mes genoux,
Et les étoiles très loin de mois,
J'y mords en contemplant les astres.
Et gorgé de rêve,
Incroyablement,
Je mange les étoiles.
(Oktay Rifat)