Le secret de la relation de Franca et Génio m'a captivé....
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Du ministre de la guerre au plus petit des soldats, tous, ils trouvaient les manœuvres ridicules. Tous ils trouvaient la guerre blessante et ridicule. Ils étaient le seul peuple, dans le monde, pour qui la guerre était vraiment ridicule. Mais le monde exigeait la guerre, les manœuvres, l'armée. La guerre était la vessie, ou la rate, ou la plante des pieds du monde. Alors ils faisaient les manœuvres sans oser se regarder, comme des êtres sages et lucides qu'un chantage fatal contraindrait à des actions absurdes et comédiennes.
Dans Pravesa-Massiglione, tout était calme, silencieux. Le tintamarre du klaxon de tout à l'heure, stupide tonnerre humain errant éperdu, presque elle le regrettait.
Elle avait été trop dure, trop exigeante. Trop " personnelle ". Ce séjour à Pravesa-Massiglione lui avait permis d'y voir plus clair, de mettre le doigt sur l'habitude qu'elle avait de croire à sa propre importance. Ce roman, par exemple, elle avait cru qu'il se rapportait à elle. A elle, Mathilde Bracchiapelli ! Quelle folie ! Parce que, dans le roman, ils mangeaient des Rat casqué. Parce que le roman se passait dans un quartier semblable à la rue Mangiatecugini. Parce qu'il y avait un prêtre, un dentiste, un cordonnier. Parce que le cordonnier avait une âme, un moment, comme la sienne, enveloppée de frôlements, obsédée de soupçons. Les âmes des uns et des autres ont des postures semblables, voilà tout. Les corps en ont bien !
Jacques AUDIBERTI – Un siècle d'écrivains : Des tonnes de semences (DOCUMENTAIRE, 1998)
L'émission « Un siècle d'écrivains », numéro 158, intitulée « Des tonnes de semences », diffusée sur France 3, le 08/04/1998, et réalisée par Marie-Louise Audiberti et Philippe Condroyer.