Il s'agit d'un livre d'entretien de
Paul Auster avec
Inge Birgitte Siegumfeldt, universitaire danoise, spécialiste de l'oeuvre de
Paul Auster. Au fil des conversations et des échanges qui dureront trois ans ,
Paul Auster revient sur les grands thèmes principaux abordés dans son oeuvre : le cinéma, la politique, le baseball, la marche, la mémoire, la naissance et la vie de ses personnages. En évoquant livre après livre, chacun de ceux déjà écrits et publiés au début de ces entretiens,
Paul Auster commente et détaille le processus et les mécanismes de l'écriture et donne des informations sur la façon dont les histoires ont été construites. Quels sont les éléments autobiographiques, parfois même de façon inconsciente, et quels sont les éléments de pure création. "Chaque livre est un voyage sur un chemin qui est inconnu de l'auteur lui-même." Pour
Paul Auster, la prise de conscience de soi se réalise lorsque nous commençons à réfléchir à nos propres pensées, lorsque nous sommes en mesure de raconter une histoire. «Nous possédons tous, intérieurement, un récit continu, consistant, de qui nous sommes, et nous nous le racontons tous les jours de notre vie.» Parfois l'histoire que l'on se raconte sur nous-même est assez vraie, d'autres fois, tellement en décalage avec ce que le reste du monde perçoit que ça devient pathétique. Mais, P.A. ne croit pas qu'il soit possible de" saisir entièrement l'essence de quelqu'un. Il est impossible de résoudre le mystère d'un être humain. Par exemple, nous existons en tant qu'individu au travers de nos liens aux autres, nous sommes habités par d'autres personnes, la famille, nos amis, les auteurs dont nous avons lu l'oeuvre, tous font aussi partie de ce que nous sommes.
Dans le processus de création,
Paul Auster est toujours dans le doute, dans une position d'humilité. Il reprend à son compte cette phrase de
Beckett :" Echouez mieux, oui, c'est exactement ce qu'il faut faire. Il faut continuer-et essayer "d'échouer mieux" . Il parle de la quasi-impossibilité d'exprimer exactement en mots nos pensées. «capturer une part de la vérité d'une chose, je suppose que l'on y parvient par touche et parfois de biais.» La réalité est trop complexe et le langage n'est qu'une approximation du réel. «Nous ne pouvons jamais parvenir à une vérité stable. Il n'existe pas de réponse unique.»
Dans sa fabrique de l' écriture, la forme ne précède pas le contenu. le texte trouve sa propre forme au fur et à mesure du travail d'écriture. Dans le processus de création, pour
Paul Auster, le besoin de marcher est essentiel. «Marcher c' est ce qui attire les mots à toi, ce qui te permet d'entendre les rythmes des mots à mesure que tu les écris dans ta tête. » Quant il marche,
Paul Auster pense à ce qu'il est en train de faire, il voit des images qu'il va ensuite retranscrire en mots. Pour lui," le monde est l'idée que nous en faisons. le monde est en quelque sorte une construction de notre imagination" . Ecrire lui donne le sentiment d'être humain, lui permet de trouver sa propre humanité.
Ces entretiens entre
Paul Auster et
Inge Birgitte Siegumfeldt nous font revisiter les romans ou les récits autobiographiques que nous avons lus et aimés, parfois sous un jour nouveau, parfois nous font découvrir de nouveaux éléments qui nous avaient échappés. Pour les livres que nous n'avons pas lus, l'interêt de ces échanges est évidemment moins pertinent, mais ils peuvent, en revanche, provoquer l'envie de les découvrir. Alors, comme le dit si bien
Paul Auster : «le livre devient une collaboration entre l'écrivain et le lecteur et, chaque livre [....] est un livre different pour chaque personne qui le lit. »
Les amateurs et admirateurs de
Paul Auster trouveront leur bonheur dans la lecture de ce livre qui donne au lecteur la sensation de partager avec lui des idées, des pensées, des sentiments et une impression de grande proximité, comme si nous avions assisté nous même à ces échanges avec l'auteur.