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sur 278 notes
Lamentations d'un vieux beauf complètement à la masse

Oui j'ai lu ce livre. Non c'est pas une blague.
J'étais vraiment curieuse de lire par moi-même ce dégueulis de ouin-ouin.
Déjà, titre du premier chapitre : « Moi aussi, je suis une victime ». Ça donne le ton 🙃 Suit une intro à base de regardez, j'ai une fille, je ne peux pas être misogyne. En plus ma maison est pleine d'enfants, je ne peux pas être un violeur. Et puis à cause de tous ces traumatismes qu'on me cause je suis diabétique et je peux plus manger de sucre. Que tout le monde arrête d'être troméchant avec moi svp, je suis votre ami 🥹 Bref, le premier chapitre n'est qu'une longue tentative de justification d'un pauvre gars qui se victimise beaucoup mais qui a plutôt l'air de se sentir coupable d'il ne sait trop quoi. Mais tout ça c'est bien sûr la faute aux féministes, aux wokistes, aux communistes modernes et même aux gens de la radio… bref, du monde entier sauf lui (et ses potes cis hétéro blancs riches, sûrement).
Second chapitre, ode à la coke avec option étalage de tout son palmarès de jet-setteur camé. Enfin, c'est censé être un avertissement doublé de mea culpa avec glaçage regardez-comme-j'ai-tout-vu-tout-vécu mais bon, passons. Bon ok, je dois bien admettre qu'il livre dans ce chapitre deux ou trois réflexions assez intéressantes, mais il finit toujours par retomber dans son pathos ouin-ouin et c'est vraiment fatigant.
Vient ensuite un chapitre sur ses diverses retraites catholiques. En toute honnêteté, il n'est pas non plus dénué d'intérêt, mais cette fixette qu'il fait sur son zizi et sur son statut d'hétérosexuel éternellement victime du reste de l'humanité gâche vraiment tout son propos. Au final ça tourne toujours en branlette égocentrique dégoulinante de condescendance omnisciente. de même pour le chapitre suivant, traitant des armées et de la colonialisation, dont je n'ai pas vraiment compris ce qu'il venait foutre là, à part étaler encore un peu sa culture et sa science infuse. Plutôt que des confessions, ce livre est vraiment un ramassis d'auto-congratulation et de regardez-moi-comme-je-suis-humble-et-intelligent saupoudré de beaucoup de sarcasme larmoyant.
Et on termine en apothéose ultime avec ce merveilleux chapitre intitulé « le désir effrayant », dans lequel le monsieur nous explique qu'on peu s'estimer heureuses, nous les femmes si ingrates envers nos sauveurs les hommes hétérosexuels, que la loi et la prison existent : sans ça, les agressions sexuelles seraient infiniment plus nombreuses. Mais il faut remettre les choses en contexte : tout ça, c'est seulement la faute de la génétique et de la biologie ! 🤷‍♀️ Absolument pas du patriarcat et de la culture du vi0l bien sûr.
On y trouve également une apologie de la pornographie et de l'institution du mariage qui ne sont certainement pas des outils du patriarcat mais bien ce qui sauve, encore une fois, les méchantes femmes tentatrices du désir irrépressible des pauvres hommes hétérosexuels, dramatiques victimes de leur condition non choisie.

Il se fait porte-parole des hétérosexuels mais je crois que beaucoup d'hétérosexuels s'en sentiront insultés. Tout ce qui est représenté ici, c'est la classe des vieux porcs vexés et frustrés de ne plus pouvoir tremper leur biscotte comme bon leur semble, consentement ou pas.
Le meilleur moyen de devenir effectivement hétérophobe ? Lire ce livre. Heureusement, il mesure seulement cent pages et c'est bien sa seule qualité.

Ne faites pas comme moi, ne lisez pas ce livre svp et surtout n'allez pas donner d'argent à ce genre de caca. C'est une honte qu'une maison d'édition gaspille de l'énergie et du papier pour ça.
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« J'aime mieux être homme à paradoxes qu'homme à préjugés »
Célèbre confession, non pas d'un homme de pub à la formule bien perchée mais de Rousseau, philosophe ou douanier, mais ce n'est pas de sa faute. Nota bene, je parle de feu Jean-Jacques, pas de glaçon Sandrine, qui elle n'aime que les hommes déconstruits et qui n'aime pas trop Frédéric Beigbeder, ni Jean-Jacques d'ailleurs.
La barbe a blanchi, les idées aussi selon ses détracteurs, et Fredo Calimero passe aux aveux mais il s'accorde quand même beaucoup de circonstances atténuantes et charge une époque qui le laisse en rade avec ses couilles qui pendouillent. Il a la culpabilité douillette.
Le personnage public m'agace et ne m'intéresse pas mais je partage souvent ses goûts littéraires irrévérencieux et à défaut de tomber en pamoison devant son style, j'aime son sens de la formule et la fluidité de ses pages. Et puis, je souscris pleinement à sa lutte contre une littérature aseptisée à la sauce woke et aux bons sentiments.
Il nous raconte son histoire (et se la raconte beaucoup) de has been de la reniflette, sa retraite à l'abbaye Sainte Marie de Lagrasse et son stage au 21 ème régiment d'infanterie de Marine. Il se cherche ainsi peut-être un Dieu pour se faire pardonner (l y a du boulot) et un moyen de soigner sa maladie du nombril : le narcissisme.
Le récit démarre par le taguage de sa maison à Guethary suite à des prises de position contre la pénalisation des clients des prostituées. La tolérance, il n'y a plus de maison pour cela. de la tolérance, il n'y en a plus beaucoup pour le provocateur qu'il est. On a quand même du mal à le plaindre quand on connait le prix du mètre carré à Guéthary et les tous petits soucis qui l'affligent mais son petit acte de résistance ironique contre les outrances du féminisme radical et son portrait-robot de présumé coupable pas très repentant visent juste.
Catho + Hetero + ChroniqueurauFigaro + Blanco + cincuento + critiquedannieErnaux= la tête à toto sur l'échafaud LGBTQQIA+ (un signe de plus et on en fait un code Wi-fi !)
Au final, ce n'est pas le roman de l'année, ni du mois, et peut-être même pas de la semaine, et il est surtout inutile de sortir les extincteurs. Ce n'est pas un brûlot misogyne mais la chronique d'un anachronique narcissique (parfois pathétique) qui se rend compte que la fête est finie et qui aimerait sauvegarder sa liberté de penser et d'écrire ce qui lui plait.
Il partage avec les Confessions de Saint Augustin sa rupture avec les Manichéens… en moins pieux, les idées plus friponnes qu'Hippone.
Un mâle pour un bien.
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Ces « confessions », fort brèves, se divisent en cinq chapitres : « Moi aussi, je suis une victime » ; « Adieu la coke » ; « le refuge » sur une retraite que l'auteur a faite dans un monastère ; « Un chaos structuré » sur un séjour dans le 21e RIMA ; « Un désir effrayant » sur l'obsession sexuelle. ● Les deux premiers chapitres à la prose primesautière et espiègle, sont agréables à lire, pleins de formules amusantes, même si la thématique de la « coke » n'est vraiment pas nouvelle sous la plume de Beigbeder. ● Il a incontestablement le sens de la formule. Par exemple : « le seul moment où la France me manque, c'est quand je n'y suis pas. À l'étranger, je la regrette ; à domicile, je la déplore. » ● Les deux suivants, les chapitres 3 et 4 m'ont paru fastidieux, et du reste ne sont pas inédits, comme l'auteur le souligne en avant-propos. ● le dernier chapitre est sans doute celui qui prête le plus volontiers le flanc aux critiques car l'auteur y généralise à tous les hommes, hétérosexuels comme homosexuels, son obsession sexuelle particulière. ● L'ensemble m'a paru assez médiocre, en-dessous du niveau moyen de ses autres livres. Cependant, Beigbeder ne mérite pas d'être traîné dans la boue comme certaines critiques ici le font. En particulier, dire qu'il est has been me paraît assez à côté de la plaque puisque c'est précisément ce qu'il revendique dans tout l'ouvrage, dès même le titre. N'écrit-il pas : « j'avais une nouvelle ambition : vieillir. » ● J'ai trouvé ses critiques contre Annie Ernaux vachardes mais bien vues : « On peut jouer les victimes à vie comme Annie Ernaux. Elle est richissime depuis 1984 mais a répété pendant cinquante ans qu'elle était une transfuge de classe (quoique fille d'épiciers soit un sort plutôt enviable : il y a toujours de quoi manger dans une épicerie). […] Annie Ernaux a capitalisé toute sa vie sur la honte de sa jeunesse. Elle a hérité de ses parents épiciers un talent pour l'exploitation d'un fonds de commerce. […] Annie Ernaux a réussi à fabriquer une oeuvre à la fois creuse et plate. […] Sa façon de dénigrer Houellebecq quand elle a reçu son Nobel était aussi inélégante que celle du gardien de l'équipe de football d'Argentine, championne du monde, Emiliano Martinez, chambrant Kylian Mbappé après la victoire. Il ne leur suffit pas d'être consacrés, il leur faut encore enfoncer les perdants. C'est que la gloire ne rassure pas les imposteurs : ils doutent de leur valeur. » ● Il ne peut s'empêcher de faire de la provoc, comme lorsqu'il compare judaïsme et catholicisme avec une mauvaise foi certaine : « Quand Anne Berest, Lola Lafon ou Karine Tuil déclarent : « Toute ma vie, j'ai cru que je m'en fichais d'être juive, mais en vieillissant, je m'aperçois que je me sens juive au fond et blablabla », tout le monde salue leur sincérité touchante. Et quand moi je déclare : « Toute ma vie, je croyais que je m'en fichais de mon catholicisme, mais en vieillissant, je me prosterne devant Jésus dans une chapelle gothique et blablabla », je me fais traiter de sale réac, d'apôtre de l'intégrisme et de symbole de la bourgeoisie blanche conservatrice lectrice du Fig Mag, à jupe plissée, serre-tête en velours et carré Hermès », même s'il est vrai que sa conclusion me paraît pertinente : « La cathophobie est un racisme parfaitement autorisé, voire encouragé en France. » ● Ou bien : « Il faudra un jour qu'on m'explique la différence entre les Dom-Tom et les colonies. Pourquoi l'Algérie française, c'est mal, et la Calédonie française, c'est bien ? » ● Ou encore : « le point commun entre 1942 et 2022, ce sont les monceaux de cadavres de femmes et d'enfants. Et d'hommes aussi : plusieurs centaines par jour. Pourquoi trouve-t-on normal que les hommes meurent ? Cela ne me semble pas très féministe. » Même s'il est vrai qu'on peut s'étonner de trouver naturel que les individus de sexe masculin meurent à la guerre, le parallèle entre 1942 et 2022 laisse perplexe. ● En conclusion, c'est un livre vite lu et sans doute vite oublié, auquel on peut préférer L'homme qui pleure de rire (2020).
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Est ce que Frédéric Beigbeder a le droit de s'exprimer ?
Est ce que Frédéric Beigbeder a le droit de se victimiser ?
Est ce que Frédéric Beigbeder a le droit d'être en souffrance ?
Est ce que Frédéric Beigbeder a le droit de ne pas être d'accord avec certaines idées ?
Est ce que Frédéric Beigbeder a le droit à un minimum de respect en tant qu'homme blanc hétérosexuel de plus de 50 ans ?
La réponse à toutes ces questions est oui, évidemment.
Les personnes qui vous répondront le contraire ne sont que des fachos sectaires qui nous enfoncent un peu plus chaque jour et dangereusement vers l'obscurantisme.
L'idée d'un tel monde est effrayant. Chacun devrait pouvoir s'exprimer librement, et écouter respectueusement l'autre, même s'il n'est pas d'accord. Pas le monde des Bisounours, le monde, le vrai en réalité.
Sinon, un livre intéressant qui donne un point de vue masculin sur pleins de sujets actuels et hyper originaux, à savoir le féminisme, la drogue, le mal de vivre...mais qui a le mérite de secouer un peu le cocotier de la bienpensance qui, il faut bien le dire, devient grave relou et ringarde.
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Première approche de Frédéric Beigbeder avec ce titre qui m'a particulièrement attiré. J'étais mitigée après avoir vu deux - trois entretiens où j'hésitais entre il est loufoque ou il est cultivé voire intéressant.

Après certaines critiques l'accusent de parler de lui comment faire autrement quand on écrit son autobiographie ?

Frédéric Beigbeder, sa vie, ses amours, ses emmerdes et ses addictions (il cumule) est une bonne lecture.

Il est sincère, les temps ont changé, l'homme doit s'adapter à la nouvelle gent féminine. Étant mère d'un garçon, je me suis souvent demandé quel serait son avenir.

Après, c'est un style très agréable à lire, le livre est très vite lu. Il a le sens de l'humour, est cultivé, intelligent, spirituel et pratique à merveille l'autodérision.

Il se sert de citations d'autres auteurs et transmet l'envie de les lire.
Il ne mâche pas ses mots et dit ce qu'il pense. On est d'accord où pas.

« À l'intention des spécialistes : dans la guerre entre féministes, je me situe plutôt dans le camp d'Élisabeth Badinter et de Sylviane Agacinski que dans celui de Sandrine Rousseau et d'Alice Coffin. »

« La cathophobie est un racisme parfaitement autorisé, voire encouragé en France. »

Et à propos des enfants des années 60 :

« Ils ont vécu des existences inventives, des amours à rebondissements, des traumatismes à retardement. Ils se sont abimés parce qu'ils ont vécu. ».

L'auteur prend du recul et analyse une époque tout-à-fait différente de maintenant. Pas meilleure mais pas pire.

Ce fut une lecture instructive qui m'a donnée envie de poursuivre mes lectures. Je vais tenter 99 francs que j'ai laissé de côté parce que la publicité ne m'a jamais intéressée.

Finalement je ne regrette pas ma curiosité et vous conseille d'en faire autant.
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IT'S JUST ME MYSELF AND I...

Frédéric Beigbeder nous offre une fois de plus (de trop ?) une dyatribe centrée sur les choses qui le préoccupent le plus : lui, la coke et sa bite.
Lire Beigbeder, c'est comme retrouver un vieux pote foufou qu'on observe de loin, qu'on ne veut pas trop fréquenter non plus, mais dont on aime bien avoir des nouvelles car il a toujours quelque chose de neuf à nous raconter... mais dont on se dit quand même que tout ça va mal finir un jour.
Dans ces 160 pages, on apprend que Fredo a déménagé de Paris, qu'il essaye de ne plus toucher à la coke (à voir parce que vu qu'il en parle à quasiment toutes les pages, on imagine fort bien que sa copine Blanche-neige lui manque), que son habitat s'est fait taguer par des féministes terroristes et qu'il pense avec son service trois pièces.
Dans ces 160 pages, on s'amuse bien les 120 premières pages, c'est distrayant, puis arrivent les 40 dernières qui sont profondément malaisantes. Fredo pense avec son sexe, ça ce n'est pas nouveau, mais là où il se plante, c'est qu'il pense que tous les hommes sont comme lui, et que toutes les femmes sont des furies féministes qui réclament un asservissement des porte-couilles. Non, non Frédéric, ce n'est pas vraiment comme ça que ça fonctionne. Peut-être dans le milieu où tu as vécu, mais pas dans les milieux normaux. Une femme ne demande pas à ce qu'on lui tienne la porte ou qu'on lui offre des bijoux, elle veut juste être respectée. Tous les hommes ne pensent pas qu'à tirer de la femelle a tour de bras.
Donc, s'il te plait, arrête de faire des généralités avec ton cas personnel. J'en connais des comme toi, mais ils sont loin de faire la grosse majorité.
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L'auteur que j'ai toujours apprécié m'avait tenté avec le titre de son ouvrage, parce que moi même arrivée à 50 ans, j'ai du mal à comprendre la société d'aujourd'hui. Je ne suis pas un homme, je ne suis pas lesbienne, et j'ai toujours milité pour le droit des femmes MAIS aujourd'hui, je ne me sens plus du tout féministe comme le conçoit la nouvelle génération.
Je recommanderais cette lecture à ceux qui se sentent décalés dans les vérités qu'on nous assène tous les jours dans les médias. Il n'y a plus de discussion possible dans les conceptions que l'on peut se faire de la société dans laquelle on veut évoluer. On n'a jamais autant parlé de bienveillance et pourtant, on n'a jamais autant vu d'intolérance…
Même si je n'ai pas son parcours, notamment dans les sphères de l'intelligentsia ou du showbiz comme F. Beigbeder, j'approuve certains de ses propos où les hommes, et bientôt les femmes, sont paumés dans les rapports à autrui.
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Tourner les pages de cet ouvrage, c'est accepter de se retrouver en immersion dans une vie que beaucoup qualifieront de « patachon ». Pour ma part, j'en fais une lecture plus personnelle, la vie de Beigbeder, elle se définit comme une vie déstructurée pleine de réflexions profondes, de remises en cause et également d'un soupçon de « je fais du mieux que je peux avec les armes que l'on m'a données ».

Pas question de tomber dans le pathos ou le tragique, l'auteur a ce don assez incroyable qu'on lui envierait presque, celui de tout saupoudrer d'humour afin de relativiser ce qui lui tombe sur le dos. Et si finalement, il avait raison ? Si finalement, il fallait apprendre à rire, à sourire et même se moquer ouvertement de ce que la vie nous réserve…

Ce livre respire l'honnêteté et la mise à nu sans aucune pudeur. le chapitre concernant la consommation de cocaïne et ses effets néfastes mériteraient d'être lu dans les établissements du secondaire tellement l'expérience transpire la réalité.

À la fois touchant et révoltant par moment, l'auteur nous livre sans détour et fioriture son amour démesuré pour les femmes et le désir qu'il a pour elles. Parfois cru, il explique comment résister au sexe féminin est complexe. Mais le temps qui défile lui fait finalement comprendre que le plus important – et sans nul doute le plus compliqué – ce ne sont pas les nuits torrides avec une femme différente à chaque fois, mais bien de retomber amoureux de celle qui vous accompagne au quotidien et qui supporte vos frasques.

Exercice littéraire ou introspection, on peut se poser la question. Pour ma part, je l'ai reçu et interprété comme un petit guide pratique pour retrouver une vie où règne l'harmonie et faire taire les vieux démons qui nous entraînent dans une vie chaotique…
Lien : https://ogrimoire.com/2023/0..
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[Attention, billet d'une longueur interminable, merci d'avance à ceux et celles qui auront le courage de lire jusqu'au bout, vraiment...]

Depuis le temps que je baguenaude sur la toile, en semant de-ci de-là mes critiques, j'ai renforcé mon besoin de me faire ma propre opinion sur les bouquins. Ainsi, certains ouvrages au premier plan médiatique ont pu amèrement me décevoir tandis que d'autres, cibles de tous les reproches, m'ont agréablement surprise. Quand le dernier opus de monsieur Beigbeder est sorti, sincèrement, je n'étais pas vraiment intéressée. J'ai lu quelques uns de ses bouquins et j'en ai vraiment aimé deux, mais pas au point de suivre sa carrière avec attention... Sauf que Confessions d'un hétérosexuel légèrement dépassé a fait polémique. Et si j'ai trouvé la défense orale de l'auteur un tantinet ridicule, je me suis dit que je ne pouvais guère avoir d'avis sans lire ledit bouquin, honnêteté intellectuelle oblige. D'autant plus que des avis, sur Babelio, m'ont fait rire et donné envie d'aller y regarder de plus près…


Qu'aborde donc ces fameuses Confessions d'un hétérosexuel légèrement dépassé ? L'ouvrage est découpé en cinq parties et se révèle d'un genre pas vraiment identifié. Auto-biographique ? Sans doute. Essai ? En théorie. En tout cas, l'auteur évoque les tags agressifs – et illégaux – qui ont souillé la façade de sa maison. Suite, visiblement à son engagement contre la criminalisation des clients des travailleurs/ses du sexe. Qu'importe son opinion – et la mienne – rien ne justifie qu'on insulte quelqu'un que ce soit sur les murs de sa maison ou de vive voix. Oui, qu'importe mes propres idéaux, je défends le droit de l'auteur à se sentir victime, à s'en plaindre, son droit, même, à ne pas comprendre ou accepter la société telle qu'il l'appréhende. Et ce, malgré la condescendance dont il fait preuve :

"Je ne suis pas sur les réseaux sociaux, n'ayant pas de temps à perdre, pourtant j'y suis souvent accusé de tous les maux parce que j'abuse d'une certaine liberté de ton dans la presse papier."

Que je n'ai pas été sensible aux arguments de son discours, cela n'a pas tellement d'importance. du moins, cela n'en aurait eu aucune si l'écriture avait été brillante. Scoop, elle ne l'est pas. Oui, monsieur Beigbeder est cultivé, oui, il est doué pour servir quelques punchlines, mais cela ne suffit absolument pas quand on se targue de faire de la littérature, et pas du divertissement. Lorsqu'il se plaint, il le fait avec le vocabulaire et la poésie des masculinistes qui sévissent sur les réseaux sociaux :

"Parce que je suis blanc, de sexe masculin, né bourgeois dans les années 1960, j'ai grandi dans le camp des dominants. Je n'ai pas eu l'impression d'en profiter. J'ai été frappé par un prêtre de mon école quand j'avais sept ans. J'ai été la cible d'un exhibitionniste au bois de Boulogne à l'âge de dix ans. J'ai été dragué par un pédophile au sixième étage de la rue de la Planche en 1979." (page 9)

Avec tout ça, j'aurais pu simplement déclarer que le bouquin n'a que peu d'intérêt à mes yeux, et qu'il n'en aura, finalement, que pour ceux qui, comme l'auteur, semble haïr copieusement ce que lui et ses camarades nomment la pensée woke. Sauf… Sauf qu'il va beaucoup plus loin que simplement parler de sa propre expérience, de ses propres traumatismes et désillusions, il égrène les généralités et les conclusions impérieuses sur les femmes, les hommes, le féminisme et toute la société. Il se prend régulièrement pour le porte-parole des hommes blancs hétérosexuels – et qui se chauffe au fuel ? - et, en cela, je ne peux pas juste hausser les épaules en marmonnant qu'il peut penser ce qu'il veut. Oui, il le peut, mais je refuse de ne pas pointer du doigt et du clavier ce qui pose problème dans son ouvrage.

Malgré les quelques pincettes qu'il tente de prendre, Frédéric Beigbeder se montre anti-féministe. Surtout, il semble ne pas saisir qu'il existe un multitude de féminismes et qu'il n'y a pas, et qu'il n'y aura jamais, un discours homogène féministe. Or ce qu'il décrit – avec des généralités grandioses -, ce n'est pas le féminisme dont je me réclame. Et puis, quand même, il ne semble se revendiquer victime que pour prétendre que les femmes et les hommes le seraient tout autant, et de la même façon :

"Toutes les femmes ont été draguées, droguées, harcelées, abusées, voire pire. Mais les hommes aussi." (page 10)

Oui, des hommes sont victimes. de viol, d'agression, de harcèlement, de violence intrafamiliale. Oui, nous devons les aider à prendre la parole, à changer les choses pour qu'ils soient reconnus et aidés. Sauf que les violences faites aux hommes ne sont pas systémiques. Et, souvent, leur mauvaise prise en charge, relève justement du patriarcat – pour le confirmer, il suffit de lire les commentaire sous les articles qui abordent les cas d'hommes victimes de viol quand la coupable sont des femmes -.

En fait, l'auteur ne semble souhaiter la libération des femmes que si ces dernières adoptent dés lors un comportement qui lui conviendrait, à lui :

"La véritable hétérosexualité enfin équilibrée naîtra le jour où une femme sifflera un homme dans la rue." (page 84)

Sur cette question du combat féministe, monsieur Beigbeder dit tout et son contraire. D'abord que le patriarcat n'existe pas :

"Quel patriarcat ?? Ma génération ne sait pas ce que c'est. Les papas sont tous partis de chez eux. Il n'y a pas de pères non divorcés dans les années 1970. Il est où, le fameux patriarcat dont les féministes me rebattent les oreilles ? J'ai été éduqué par une mère célibataire qui travaillait pour nourrir ses deux fils. Je n'ai d'autre modèle familial qu'une femme seule, et on m'explique qu'il faut vaincre le patriarcat ? Non, mais je rêve ! Heureusement que les femmes avaient du pouvoir dans mon enfance, sinon j'aurais fini à la rue." (page 10)

D'ailleurs, je me demande comment l'existence de mères célibataires pourrait bien prouver l'inexistence du patriarcat. Non, parce que des mères célibataires, il y avait dans les années soixante aussi. Donc avant qu'une femme mariée puisse ouvrir un compte en banque sans l'autorisation de son mari (la loi date de 1965)…

Plus loin, l'auteur a changé d'avis et parle d'éliminer le patriarcat. Oui, oui, celui-là même qui, selon lui, n'existe pas 74 pages avant :

"On peut éliminer le patriarcat sans stigmatiser les dragueurs, même s'ils sont pitoyables avec leurs chemises ouvertes, leurs 4 × 4 polluants et leurs lunettes de soleil en hiver." (page 84)

Passons sur le fait que drague et le harcèlement de rue, ça n'a rien à voir, je ne suis pas là pour faire de la pédagogie.

Ouais, l'auteur se montre anti-féministe. Et alors ? me demanderas-tu ami-lecteur… Ben rien, il a le droit d'être un Jean-Mascu, comme j'ai le droit de combattre cette idéologie. Surtout, j'ai le droit de dénoncer les inepties qu'il écrit. Genre :

"Ce qui cesse de protéger les violeurs, c'est le séquençage du génome humain. J'ai davantage foi en la police scientifique qu'en la délation numérique. Mais là encore, je peux me tromper, et cette opinion banale ne justifie pas une attaque de terrorisme pictural, merci pour votre compréhension. Si vous êtes agressée, il faut porter plainte tout de suite et effectuer tous les prélèvements nécessaires à une identification génétique."

Ce discours révèle l'ignorance crasse de l'auteur sur la question. Que les choses soient claires, sur le plan médico-légal, il n'existe pas de preuve absolue d'un viol. Lors de l'examen clinique, le médecin légiste pourra trouver des preuves qu'il y a eu pénétration – et éventuellement, de l'ADN -, et chercher des lésions attestant d'une pénétration traumatique. Sauf qu'une pénétration, même traumatique, n'est pas une preuve absolue de viol. Ben nan. Je le répète, il n'y a pas de preuve absolue, pas de baguette scientifique magique pour prouver le viol. de plus, ce n'est pas seulement une question de porter plainte et que le coupable soit condamné. On peut aussi s'interroger sur la multiplicités des peines avec sursis quand il s'agit de violences faites aux femmes. On peut aussi se poser des questions simples, comme pourquoi si peu de victimes de viol portent plainte ou de quelle manière la culture du viol complique les poursuites judiciaires.

Si la simple ignorance est dangereuse, elle ne me met pas grandement en colère. Contrairement à certains propos de monsieur Beigbeder... Propos imbibés de culture du viol et qui, hélas, nourrissent cette dernière. Car l'auteur parle des hommes comme de créatures seulement préoccupées par la baise, et soumises à des pulsions intolérables.

"Tous des salauds ? Non, mais nous sommes des bêtes, c'est vrai, et nous en souffrons autant que les femmes." ( page 70)

"Dès que je rencontre une femme, je l'imagine en train de faire l'amour. C'est la vérité de l'homme. Quand on ne vous touche pas, c'est uniquement parce que la loi l'interdit." (page 71)

Des animaux qui n'agressent pas, mais pas parce qu'ils voient les femmes comme des êtres humains, des individus dont il faut le consentement, ben nan :

"Oui : la peur de la prison ferme retient les hommes d'agresser sexuellement toutes les femmes qui leur plaisent."

Pour lui, les pulsions des violeurs ne sont pas des pulsions de violence, mais des pulsions de désir :

"La criminalisation des clients de prostituées fut à cet égard une erreur politique, car elle augmente le nombre de frustrés sexuels, tout en précarisant les travailleuses du sexe. le but de la société devrait être de réduire les risques de la masculinité, pas de les décupler." P76

Il va même plus loin quand il semble dire que s'il ne viole pas les femmes, c'est juste que le « non » le fait débander :

"J'ai une chance, c'est que mon désir est incompatible avec le viol. En effet, depuis toujours et sans doute par instinct de survie, une jolie fille qui me dit non devient laide. La non-réciprocité de mon désir est si vexante qu'elle abolit mon envie. Je préfère bouder qu'insister." (page 81)

Monsieur Beigbeder tient un discours masculiniste qui semble vouloir minimiser les violences faites aux femmes. Plus que cela, il utilise la souffrance des hommes, non pas pour les défendre, mais pour mieux attaquer les femmes.

Soyons franc, ami-lecteur, oui, monsieur Beigbeider a le droit d'être anti-féministe, masculiniste et de tenir des propos sexistes. Il a le droit de dire et d'écrire tout cela. Comme j'ai le droit de combattre ces idéologies. Sauf que l'auteur semble vouloir plaire à tout le monde et, par conséquent, ne se montre courageux face à personne. Au terme de ma lecture, ma vision de cet homme n'est guère reluisante… Celle d'un bon écrivain, à la jeunesse flamboyante et noyée dans la cocaïne, qui se réveille à la cinquantaine, angoissé par la vieillesse et terrifié de bander mou. Certains achètent du Viagra, d'autres écrivent des bouquins. Quoiqu'il en soit, pour moi, c'est juste un mec qui préfère trouver un ennemi plutôt que de son confronter à ses peurs. Un vieux cynique recroquevillé dans le confort de ses souvenirs, terrorisé par l'évolution des mentalités. Une évolution qui ne peut que lui rappeler que son heure de gloire a sonné dans une autre décennie...
Lien : http://altervorace.canalblog..
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Ces confessions d'un vieux con obsédé par le cul, ex drogué et en quête de sens pourrait faire penser à un personnage de Despentes. Il pourrait aussi entrer en résonance avec le dernier livre d'Ovidie en mode voici l'un des spécimens hétérosexuel qui l'a amené à renoncer au sexe. Quoi qu'il en soit, ce roman autobiographique de Frédéric Beigbeder ne peut laisser de marbre. Si j'ai dévoré les 3 premiers chapitres, bien souri durant le 4 ème, le dernier m'a quant à lui poser plus questions. Il agace. Il irrite. Il sème le doute. Il pose question. Il démange. Il dérange. Difficile de rester de marbre. Si parfois, le mea culpa de l'auteur en mode je suis une victime de moi-même, de mon sexe et de ma vie donne envie de le secouer, voir lui en coller une. Il y a ces phrases qui font mouche, ces fulgurances littéraires qui restent en tête bien après avoir reposé le livre. Est-il si dépassé que cela ? Pas si sûre au vu de l'auto-analyse de sa vie et de la société qu'il peut faire. En décalage ou à contre-courant serait plus juste. Provocateur ? Un brin aussi. Comme le reste de son oeuvre, on aime ou on déteste, mais indéniablement, il fait parler.
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Thème : Frédéric BeigbederCréer un quiz sur ce livre

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