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EAN : 9791036000935
160 pages
L’Atalante (21/10/2021)
3.61/5   66 notes
Résumé :
Avec sa femme, son fils et son chien, Didier Martin, comptable, vit une période particulière. Depuis trois ans le pays a assigné ses citoyens à résidence. Les livraisons se font par drone. L'heure d'ouverture des fenêtres est programmée.
Le protagoniste raconte son histoire à la première personne. Petit à petit le lecteur comprend que son état mental est incertain. Il semble se plaire dans la seule compagnie de ses poissons exotiques.
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Critiques, Analyses et Avis (24) Voir plus Ajouter une critique
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Un polar original qui m'a bien plu. J'avais déjà lu son précédent roman "Dernier désir" qui était un peu machiavélique. Celui-ci ressemble à une situation sanitaire que nous avons vécu il y a trois ans : la pandémie de covid. le début de la lecture a été difficile pour moi, car se replonger dans la situation de cette pandémie n'est pas forcément un bon souvenir, mais très vite l'histoire part un peu dans l'irréel et j'ai pensé au roman de George Orwell "1984". le récit est bien mené et ce livre a été vite lu (150 pages seulement).
Notre héros Didier Martin vit dans un appartement avec sa femme, son fils et son chien. Il a besoin vital d'écrire, et au lieu de prendre des feuilles ou un cahier, il écrit sur les murs tout ce qui lui passe par la tête. En avançant dans le récit, l'histoire devient de plus en plus délirante, mais je ne vous en dirait pas plus.
J'ai beaucoup aimé le roman dont le héros est loin d'être sympathique et c'est un euphémisme...On le suit dans son délire dans ce huis-clos.
Ce roman a été écrit pendant la pandémie. Il a reçu le prix de la littérature policière 2022.
Je vous le conseille bien volontiers.
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Si je vous dis "Virus, confinement, télétravail, courbes et décomptes, pass sanitaire", ça vous parle ?
Tant mieux, en poussant la porte de l'appartement 816, vous ne devriez pas être trop dépaysé.
Encore que...

Mais ne brûlons pas les étapes, équipons-nous du masque obligatoire et commençons la visite.
Dans le salon, voilà Didier Martin.
Petit comptable discret, discipliné, propre sur lui. Comme le reste de la population monsieur Martin est cloitré chez lui avec femme et enfant, tous soumis à un confinement drastique visant à endiguer la pandémie qui depuis 3 ans (!!!) ravage le pays (toute ressemblance avec des faits réels n'aurait bien sûr rien de fortuite...)
Dieu merci, le Gouvernement veille : Didier et ses compatriotes sont entre de bonnes mains ! Les mesures d'exception se succèdent, chacun remplit consciencieusement sa FJP (Fiche Journalière de Présence) et se plie de bonne grâce à l'alternance des IGT (Isolement Général Total), IGP (Isolement Général Partiel) et autres IGSP (Isolement Général Semi-Partiel).

Et que fait Didier, au milieu du salon ? Il écrit, pardi !
Chaque jour, le petit comptable tient un journal de bord et nous décrit en détails son emploi du temps, le contenu des livraisons alimentaires organisées par le ministère, le conflit larvé qui l'oppose à son fils de 17 ans, la joie qui l'envahit quand un décret exceptionnel l'autorise à entrouvrir sa fenêtre de deux centimètres, son incompréhension puis sa colère face aux quelques écervelés qui, non contents d'enfreindre l'assignation à résidence, mettent en danger l'ensemble de la communauté nationale...
Et puis bien sûr sa confiance aveugle en l'État ("Il y a des raisons à cet Isolement, on n'isole pas les gens par plaisir. Je n'ai pas les compétences pour remettre en question les décisions prises. Mon esprit critique s'exprime autrement et dans d'autres circonstances, je ne suis ni policier, ni scientifique, ni responsable politique. Moi, je suis comptable.")
Un témoignage honnête, donc, et le récit d'un quotidien réglé comme du papier à musique, dont tous les faits notables sont soigneusement consignés.
On s'occupe comme on peut.

Très vite pourtant, tout déraille. L'exercice d'écriture et de transparence, d'abord destiné à tromper l'ennui, tourne peu à peu à la confession malsaine.
Lorsque Didier se met à rédiger ses comptes-rendus à même les murs, placards, vitres et surfaces planes de l'appartement (au moyen de ces fameux feutres à pointes fines qu'il commande par dizaines sur un site de e-commerce universel nommé Mississipi [suivez mon regard]), le lecteur comprend que notre citoyen modèle n'est peut-être pas si équilibré que ça.
"Complètement timbré" serait peut-être même plus juste.

On nageait jusqu'alors dans l'absurde, on se noit à présent dans l'horreur.

Le style est sobre, direct, efficace, et la plongée dans l'univers délicieusement kafkaïen de l'appartement 816 fut pour moi une vraie réussite ! (quoi ? Vous pensez que je devrais consulter ?)
En recevant ce petit livre (gentiment offert par Babelio et les éditions de L'Atalante) je craignais pourtant un peu l'overdose, après des mois et des mois de BFMTV, de gestes barrières et de restrictions sanitaires... Bien heureusement il n'en fut rien !
Qu'il fut grisant au contraire de cotoyer ainsi la folie pure, de presque la toucher du doigt !

Vous l'aurez compris : le texte éminemment actuel d'Olivier Bordaçarre m'a fait forte impression.
En plus de nous révéler par paliers progressifs l'intimité tourmentée d'un homme malade (psychopathe-né ou fragile victime d'une crise sans précédent ?), l'auteur nous alerte évidemment sur les dérives d'un système au bord de la démence, l'empilement infini de règles nouvelles et d'interdits de moins en moins rationnels, et les effets psychiques d'un confinement prolongé.
Force est de reconnaître que le résultat est tout à fait effrayant...
Prêts pour la 5ème vague ?
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« Toute ressemblance avec des événements existants ou ayant existé serait purement fortuite"

Pourtant, vous le connaissez Didier Martin, c'est un peu votre voisin : ce type sans histoire, comptable chez CompteX dans une ville lambda. Sa femme, son fils, son chien, ses poissons de collection. Une vie tellement banale, un homme tellement normalisé qu'il en est devenu quasiment invisible. Raison de plus pour s'en méfier, non ?

Car depuis que le virus frappe la France, la vie de Didier comme celle de ses concitoyens a changé. Les périodes d'Isolement Généralisé Total (IGT) alternent avec celles d'Isolement Généralisé Partiel (IGP) ou Semi-Partiel (IGSP).

On pointe chaque jour sur EasyHere, on fait ses courses via des commandes sur Ravi ou Mississippi avant d'être livré à la fenêtre par drône et d'aller sur écran faire sa promenade virtuelle, on écrit son journal de bord quotidien sur Rezo, le portail officiel. Ce monde vous effraie ? Je vous le redis : la ressemblance est forcément fortuite…

Mais ce monde n'effraie pas Didier Martin. Viscéralement légitimiste, cette reprise en main par le pouvoir lui va bien. Mais lui, finalement, va-t-il si bien ? Lui qui écrit chaque jour sur les murs de son appartement, sur les portes, les placards et même sur les interlignes de ses livres ? Lui qui fait les télé-devoirs de son fils ? Lui qui fait chambre à part avec sa femme ? Tout cela va mal finir…

Appartement 816 de Olivier Bordaçarre est un roman noir et profond, qui décortique étape après étape le comportement évolutif d'un homme résigné, d'un homme enfermé, d'un homme détraqué. Jusqu'aux limites de la folie. Et du meurtre.

Appartement 816 est l'analyse - pas tant caricaturale - d'une société où la prise en main par quelques-uns de la liberté individuelle de beaucoup d'autres devient la norme, aux limites sans cesse un peu plus repoussées. Et pourquoi s'en priver, puisque - on vous le répète - c'est pour vous protéger ! Et comme le dit Didier, contre la propagation du virus, « nous avons l'exemple de la Chine. Suivons-le ! ».

Appartement 816 est un journal de bord où le style de Bordaçarre, réaliste et quasi-mécanique, donne corps à la pensée déviante de Didier Martin, monte en puissance puis révèle la folie obsessionnelle de celui qui a définitivement quitté le monde réel pour plonger dans ce nouveau monde qu'on lui sert sur un plateau, où tout ce qui n'est pas encore interdit semble devenu possible.

Appartement 816 n'a bien évidemment aucune ressemblance avec des événements ayant existé. Encore que… Ne serait-ce pas « presqu'arrivé » près de chez vous ? Et depuis combien de temps votre voisin n'a t-il pas entrouvert sa porte ?
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Ne dit-on pas de l'enfer qu'il est pavé de bonnes intentions ? Tiens, prenons le confinement strict qui nous a été imposé en 2020, pour exemple. Je ne doute pas de son bien fondé et même à supposer le cas contraire, je ne suis de toute façon pas qualifiée pour le remettre en question, comme dirait Didier Martin, notre « héro » du roman Appartement 816, qui lui se trouve être en Isolement Général Strict ou IGT, depuis bientôt 3 années consécutives, soit le cauchemar, rendu réel dans ce livre, de milliers de nos concitoyens en 2020.
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le point commun entre notre confinement et celui du monde parallèle au nôtre crée par O.Bordaçarre, c'est que l'on ne peut nier que si cela fut pour la majorité d'entre nous la meilleure façon d'éviter quelconque virus, ce fut aussi pour certain(e)s l'impossibilité de s'extraire d'un enfer quotidien. Ceux, celles qui se trouvèrent enfermés avec leur (s) bourreau (x) sans échappatoire, H24. Ceux, celles qui n'y ont pas survécu. Nous savons que les maltraitances familiales et conjugales ont été nettement en hausse pendant cette triste période.
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le stress de l'enfermement, en plus d'être extrait du regard de la collectivité ont déchaîné les natures violentes... Faut-il en déduire que le regard moral et pénal de la collectivité est le parapet de la violence ? A moins que ce ne soient les injonctions de la société à être un citoyen normalisé qui engendrent une frustration et une violence à peine contenue ?
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Une des questions importantes que soulève ce roman, à mon sens. Mais ce n'est pas un livre « cérébral », cela déplairait à Didier qui a une dent contre « les cérébraux ». C'est avant tout un livre d'ambiance, très oppressante, un huis clôt pour le moins inquiétant. Un livre non dénué d'humour noir qui m'a arraché plus d'un sourire malgré l'ambiance glaçante. Par exemple, lorsque Didier planche sur le devoir de français de son fils lycéen « Le héro de roman peut-il être médiocre ? » sachant que Didier lui-même n'a pas grand chose du héro de roman valeureux. Didier qui parle météo à chaque nouvelle journée de son « journal » , de la même façon qu'il nous parle de ses prochaines courses, de ce qu'il mange, ou de ses poissons exotiques qu'il adore regarder. de la même façon qu'il râle que le corps de son voisin qui s'est défenestré n'ai pas encore été extrait des grilles sur lesquelles il s'est empalé en tombant. Didier vit très bien son confinement, quoique...
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Inspirez, expirez ! Retour dans une époque anxiogène, enfermés entre quatre murs à admirer le soleil insolent et la chaleur provocante du dehors. Dans cet « Appartement 816 », vit Didier Martin, un homme terne, ennuyeux dont la froideur psychologique et l'insensibilité crasse grossissent au fil du temps qui passe. Si la situation fait penser à notre premier confinement, quelques limites ont été franchies, laissant entrevoir un futur plus ou moins proche pour la temporalité de l'action. le narrateur, Didier Martin 41 ans, prénom et nom lambda le plongeant véritablement dans l'anonymat est marié à Karine, père de famille d'un adolescent de 17 ans. Dans cet appartement où tous sont confinés, le lecteur ne visualise pourtant que lui. C'est lui qui évoque l'Isolement Total auquel ils font face depuis plusieurs mois, lui encore qui en décrit les principes de fonctionnement, lui toujours qui narre la vie quotidienne du lever au coucher. Futur proche, Nouveau Monde, nouvelles règles, nouveau protocole strict à suivre : le pointage sur EasyHere, l'envoi de la Fiche Journalière de Présence, l'ouverture des fenêtres à heures fixes, le contrôle de la population par drones, la livraison des courses à domicile, l'élimination des ordures par incinération immédiate. Si le réseau social agréé Rezo encourage la mise en ligne de journaux d'Isolement, Didier Martin, lui en a décidé autrement : il écrit sur toutes les surfaces disponibles de son appartement avec des feutres à pointe fine. « Je trouve cela beaucoup plus concret d'écrire sur les vrais murs que sur des feuilles de papier. Au moins, je suis dans la vraie vie. » C'est son second acte de véritable rébellion après l'ouverture des fenêtres de 2 cm sur des périodes non autorisées.

Lecture anxiogène, étranges réminiscences d'un passé que l'on croit mort et enterré, Olivier Bordaçarre pousse les curseurs pour laisser entrevoir une autre réalité : celle de la privation totale des libertés élémentaires, choix des repas, possibilité de sortir de chez soi, aller travailler. Il rajoute le renoncement à la liberté d'expression qui, sous le joug de confinements successifs depuis trois ans, semble avoir totalement disparue. le seul encouragement à s'exprimer se fait sur Rezo, mais sous étroite surveillance du gouvernement. Dans cette nouvelle France, tout est contrôlé, vérifié, inspecté. L'isolement est devenu la norme, tout se fait en ligne, de la moindre commande sur Mississippi (on savourera l'humour de l'auteur) vivement encouragée, aux rencontres pour trouver un partenaire de vie. le travail est devenu du télétravail, les appartements se vendent et s'achètent à coup de visites virtuelles, les rendez-vous administratifs se font en Visio. Il n'y a plus aucune raison de sortir de chez soi. Sortir est devenu inutile. Dangereux. Illégal. Peu à peu, la notion même de penser disparaît au profit de l'application des règles. Cela tombe bien puisque Didier Martin ne pense plus. Il applique et exécute. Les 3 années qui viennent de s'écouler l'ont transformé en mouton. Tout est beau. Tout est en ordre. le système fonctionne, le gouvernement fait ce qu'il faut. Ceux qui ne sont pas d'accord n'ont qu'à disparaître de la surface de la Terre.

Pourtant, au fil des pages, à l'angoisse sourde du confinement s'ajoute une autre forme d'appréhension, plus vicieuse, plus latente : quelque chose ne va pas dans cet appartement, comme si son locataire, obnubilé par les règles, les devoirs, la teneur des informations télévisuelles, la langueur des jours sans fin en oubliait des choses fondamentales : l'esprit critique, la liberté d'agir et de penser. le monde s'immobilise, l'homme s'efface. Et plus l'inertie s'intensifie, plus les émotions disparaissent. « Parfois, je me dis que ce virus effectue un ménage nécessaire. La sélection naturelle n'a rien de scandaleux en elle-même. C'est une loi de la nature. » Aux confessions d'un enfant du siècle succèdent celles d'un être atteint par une forme de folie désincarnée. L' « Appartement 816 » devient alors le journal intime d'un être à l'état mental atrophié, aux émotions appauvries, à la capacité de réfléchir décrépite. le récit glisse lentement vers le roman noir aux confins de l'absurde et de la folie.

Olivier Bordaçarre encourage son lecteur à réfléchir sur notre monde. Lorsqu'une situation exceptionnelle (la pandémie) devient un état permanent, et que l'homme acteur de ce monde finit par le contempler sans plus y participer, comment évolue réellement son état mental ? Combien faut-il de couches de règles, d'obligations, et de servitudes pour ensevelir toute forme d'humanité ? Que devient l'Homme dans une société militarisée, régie par la délation, les tests de virologies postés à intervalles réguliers, la toute-puissance de Mississippi ce nouveau magasin géant et d'Internet ? le narrateur de ce roman, « l'écrivain tout-terrain » qui écrit à « livre ouvert » vous en livre un bel aperçu, confessions intimes sur l'oreiller de vos angoisses. « Les cérébraux ont une chance inouïe de pouvoir passer leur temps à contredire, à critiquer, à moquer. Agresser par les mots, ce n'est pas moins grave qu'agresser physiquement. Ils profitent d'une liberté d'expression à des fins personnelles. Pour quel résultat ? À quoi sert la liberté d'expression ? À dire des insanités ? À salir ? À humilier ? Pour quoi faire ? »Toute forme de rapprochement avec des éléments récents est évidemment purement fortuite… ou pas ! S'il nous reste quelques neurones et un brin d'introspection, quelques émotions, un besoin d'exploration de notre humanité, « Appartement 816 » mérite d'être lu afin qu'il ne devienne pas le nôtre, même si, il faut l'avouer, il renvoie à des heures sombres de notre histoire commune. En cas d'aveuglement chronique, vous pouvez toujours acheter un congélateur grande cuve…

Lien : https://aude-bouquine.com/20..
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Je suis resté longtemps assis sur une chaise de la cuisine, face à la fenêtre, le temps de déguster ce bon café du matin, tranquillement, sans bruit, peut-être une heure. Il faisait très beau. Ce mois de mars est exceptionnel tant au niveau de l'ensoleillement que des températures. De toute façon, depuis plusieurs années, nous passons directement de l'automne au printemps. Nous ne connaissons presque plus la pluie.
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Après le café, j’ai posé ma tasse dans l’évier. Je ne l’ai pas lavée tout de suite. On a tout le temps, maintenant. Je ferai la vaisselle quand l’évier sera plein. C’est agréable de pouvoir se permettre des choses qu’on ne se permettait pas auparavant. Ma femme déteste que je laisse les choses sécher dans l’évier. Moi non plus je ne supportais pas que les aliments sèchent dans les assiettes, que le fond des tasses se teigne de café brun, eh bien, dorénavant, j’aime gratter le fond des assiettes. Je prend tout mon temps pour cela. Je n’utilise même plus le lave-vaisselle. J’ai allumé la radio en sourdine pour ne déranger personne. De temps en temps, le matin, je mets la télévision et je bois mon café devant les informations. Les voix, les couleurs, les musiques facilitent le réveil. Mais, aujourd’hui, c’est comme un dimanche. Ma femme et mon fils ont toujours protesté quand j’allumais la télévision trop fort alors qu’ils étaient encore au lit. Cela m’est déjà arrivé, hélas, de ne pas prendre garde au volume. Un jour, mon fils est sorti de sa chambre, il est arrivé comme un fou dans la cuisine et il m’a dit (c’est vraiment arrivé) : « Pourquoi tu mets cette putain de radio hyper fort, putain ! On peut plus dormir dans cette baraque de merde putain fait chier ! » Et d’autres insanités que je n’écris pas ici. Il est intenable. Je m’en souviens comme si c’était hier et pourtant cet événement a eu lieu avant octobre dernier, un dimanche bien entendu. Je me demande d’où lui vient cette vulgarité. Alors, maintenant, je fais attention. Il y a les voisins tout autour.
J’ai écouté les titres et une partie du développement. Ils ont dit que les choses ne s’arrangeraient pas de sitôt, que l’IGT allait durer un bon moment (c’est déjà assez long, mais on finit par s’y faire, bon gré mal gré), qu’il fallait prendre son mal en patience. Les autorités comptent sur notre ténacité et notre capacité à être solidaires et responsables. Plusieurs fois par jour, les messages suivants passent sur tous les médias : il faut s’occuper de soi et prendre des nouvelles des siens, ne pas manger trop gras, noter sa température régulièrement, éternuer dans un mouchoir en papier puis le jeter, aérer son logement aux heures indiquées, ne pas croire tout ce qui traîne sur le web parallèle. Personnellement, je n’ai plus accès qu’à l’Internet agréé, alors je ne me sens pas concerné par ces alertes. Peut-être que des pirates parviennent malgré tout à franchir les barrages et à diffuser des idées malsaines sur la haute administration et l’État et je ne sais pas quoi d’autre. Je reste bien informé des mesures et de leur évolution au quotidien en écoutant scrupuleusement les annonces gouvernementales et je n’oublie jamais de pointer chaque jour grâce à l’application EasyHere. À 8 heures précises, j’envoie ma Fiche Journalière de Présence. Ils ont donné le nombre de morts, le nombre de contaminés et le nombre de victimes dans le monde. Ils ont aussi donné les statistiques et le prévisionnel sur les morts par semaine pour les mois à venir. Cela signifie que l’isolement est loin d’être terminé, parce que les chiffres ne sont vraiment pas bons. Il y a eu trois témoignages : une femme et deux hommes. J’ai pu en déduire qu’en général cela se passe plutôt bien, les gens trouvent à s’occuper et le journaliste a dit que le peuple enfermé depuis si longtemps est un héros. Il faut reconnaître que toutes les chaînes, tous les sites d’information ainsi que les stations de radio ont mis les bouchées doubles afin de subvenir aux besoins des utilisateurs. Il y a les grandes rencontres avec des experts, des analystes et des personnalités politiques, des rediffusions d’émissions qui ont marqué l’histoire des médias, des débats contradictoires, des événements sportifs retransmis en direct, des jeux nouveaux chaque semaine, des concerts mythiques, des artistes qui jouent en live depuis chez eux, des milliers de vidéos classées par thématique (nature, animaux, voyage, histoire des civilisations perdues, cuisine, sport), des communiqués et des alertes, et Rezo est une source inépuisable d’informations. Au final, je dis que celui qui s’ennuie ne doit pas faire beaucoup d’efforts.
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Chez les poissons, tout va bien. Je laisse la lumière allumée au minimum. Cela me rassure quand je m'endors sur le canapé. Les poissons sont là, à peine éclairés. Ils sont calmes. Ils vont et viennent. Ils grignotent une herbe, nettoient les parois, fouillent dans le sable. Ils nagent lentement. Ils découvrent l'espace continuellement puisqu'ils n'ont pas de mémoire. Cela doit être un drôle d'avantage, de ne pas avoir de mémoire. Oublier tout à l'instant même. Oublier tout. Les hommes n'ont pas ce talent. Pouvoir oublier tout, tout le temps. Le temps ne passe donc plus, peut-être. Ni le temps ni la mort. Pas de passé, pas de futur. Juste une chose un peu molle, qu'on appelle le présent, qui apparaît et disparaît aussitôt. J'aimerais beaucoup oublier de cette manière. Je me sentirais plus léger. Comme un poisson dans l'eau.
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Un policier m'a demandé quand j'avais vu monsieur Polita pour la dernière fois. Cela m'a fait penser aux séries policières que je regarde de temps en temps. Les policiers posent toujours cette question. C'est drôle de se retrouver comme dans un film.
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La compagnie des oiseaux. Le vieux poirier sans plus de poires. La mare et les insectes dans un rayon. Le paysage, au fond. Une ville tout là-bas.
Parfois j'aime faire des phrases sans verbe. Cela donne un côté poétique, je trouve.
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Dans son nouveau roman, Sens interdits, Chantal Pelletier projette le lecteur en 2046. L'enquête criminelle se déploie sur fond de drames environnementaux dans un pays régi par des permis de table, des contrôles de temps d'écran, des maisons de redressement alimentaire et des sessions de télécoaching punitif. Olivier Bordaçarre, dans Appartement 816, met en scène l'an 2030 dans un pays aux libertés et aux comportements modifiés par une épidémie. Dans un huis-clos hypnotique, un homme enfermé chez lui avec sa femme et son fils témoigne d'une époque et de ses effets sur la psychologie et les corps. Dystopie, anticipation, roman noir et réel : autant de liens à explorer qui montrent comment la littérature pense les enjeux de demain.
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