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sur 12460 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Enfin lu après des années de report, connaissant la nature métaphorique du roman et la complexité de Camus. Finalement, j'ai bel et bien eu affaire au récit d'une ville condamnée à la peste du début à la fin. Dans les faits, c'est cela qui se passe: d'abord, les rats, puis les hommes, enfin l'hécatombe, l'hypothétique sérum, les guérisons aléatoires... Les personnages, symboliques, sont peu nombreux, le récit, assez lent, est pourtant riche en horreurs. Pour Camus (j'ai cherché!), il s'agissait de montrer une ville sous l'Occupation allemande, représentée par la peste. Et oui, tout y est, après réflexion: la résistance, le collabo, et puis l'attente, le piétinement, la résignation des uns, la révolte des autres. Après réflexion toujours, je me dis: "d'ailleurs, quelle ville aurait pu se voir ainsi fermée au monde entier sans la moindre aide extérieure, s'il s'était vraiment agi d'une maladie?" A travers les lignes mais aussi tellement énorme que l'on pourrait n'y voir que du feu, la métaphore est parfaitement filée, et plusieurs choses, après lecture, me reviennent comme des évidences: personne n'est sûr qu'il s'agisse de la peste, la bacille responsable de la "vraie" peste n'est pas la même ici, il n'y a qu'un seul médecin qui s'occupe toute l'épidémie, et on remarquera que malades et soignants se touchent sans mesure de protection, comme si ne pas se faire contaminer était une question de volonté... Ce qui est bel et bien le cas dans cette histoire. Qui, en fait, ne parle absolument pas de peste. du grand, du très grand art.
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Albert Camus livre ici sa ville natale aux affres de la peste. du contexte colonial il n'est presque pas question : le journaliste Rambert venu de métropole au début du roman l'évoque pour expliquer sa présence à Oran.
J'ai lu La Peste il y a une trentaine d'années: le livre m'avait plu, j'avais en vain cherché le parallèle avec la peste brune qui est pourtant le contexte même de la gestation de l'ouvrage - parallèle fortement suggéré par ma mère qui m'avait alors prêté son Livre de poche. Je m'étais contentée d'un 'c'est un bouquin qui parle d'une épidémie' avant de passer à la lecture suivante.
Effectivement, ce livre parle d'une épidémie dans une ville méditerranéenne européenne. L'adolescente que j'étais alors s'est probablement moins arrêtée sur les réflexions du narrateur, de Tarrou ou de Paneloux, plus intéressée alors par la progression du récit. Je n'ai pas voulu relire La Peste pendant le confinement alors même qu'Anne-Sophie Lapix en parlait alors comme d'un succès de librairie à ce moment-là: on ne lit pas le guide de montage d'un vélo alors qu'on est lancé à pleine vitesse dans une descente!
Camus est un auteur exigeant dont chaque mot est pesé - le personnage de Grand et sa svelte amazone sur sa jument alezane parcourant les allées fleuries du bois de Boulogne le montrent bien- et dont les réflexions interpellent à chaque page. Lire ou relire La Peste après ce que nous avons vécu ces deux dernières années apporte une résonnance particulière à l'ouvrage. Une lecture d'actualité.
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La Peste

Lire Camus, c'est s'offrir le plaisir d'une conversation avec l'un des auteurs français contemporains les plus intelligents. Pas le plus bavard, pas même le plus séduisant, stylistiquement. Et pourtant, assis au coin du feu ou réuni avec lui, dans plus d'intimité, je l'imagine, l'auteur de la Peste, ce Rieux/Camus, faire la narration des épisodes de la somptueuse et tourmentée citée d'Oran, de sa belle voix généreuse. Et quelle admirable et brillante réflexion ! Car la Peste (comme l'Étranger, comme La Chute) est le roman d'un homme engagé : c'est que « le rôle de l'écrivain, disait-il au moment de recevoir son prix Nobel, ne se sépare pas de devoirs difficiles ». et pour Camus, il est avant tout autre de se mettre « au service de ceux qui subissent l'histoire », de leur liberté : car c'est là, la seule vérité.

La vérité de la Peste n'est pourtant pas si évidente. Roland Barthes, l'an 1955, écrivit à Camus pour lui signifier que sa morale de la solidarité était par trop détachée de toute Histoire, par là-même affaiblie : dévitalisée.

Pour Camus, dans la réponse qu'il lui fit, le symbole ne nuit nullement à la référence historique, et le choix de l'allégorie, loin de signifier une échappée de l'histoire, s'inscrit dans une réflexion sur la façon dont l'homme doit agir face à celle-ci, à toutes les époques : car « la terreur [a] plusieurs [visages], ce qui justifie encore que je n'en aie nommé aucun pour pouvoir mieux les frapper tous. » Pour Camus, La Peste est le roman de la résistance au fascisme, et tout l'indique, tous l'ont compris. Barthes non.
Barthes, regrette que le mal soit sans visage mais aussi sans naissance. Et reproche à Camus de ne s'intéresser qu'à ses effets. C'est que Camus n'est pas un révolutionnaire. Il traite de la révolte, ici comme dans l'homme révolté, il traite de l'instant : « pour la victime, le présent est la seule valeur, la révolte la seule action ». Ce le grief que Barthes, et aussi Sartre, font à Camus, de n'envisager un engagement qu'au côté des victimes, revendiquant une posture qu'ils associent à une prise de position hors, voire hostile à l'histoire.
Pourtant, Camus dresse, lors de son discours de Stockholm (lorsqu'il reçoit le Prix Nobel de 1957) un tableau terriblement noir du vingtième siècle. Et le nihilisme dans lequel se sont réfugiés bien de ses contemporains ne lui correspond pas : au contraire, il célèbre « un art de vivre par temps de catastrophe, pour naître une seconde fois, et lutter ensuite, à visage découvert, contre l'instinct de mort à l'oeuvre dans notre histoire ». Contrairement à ce qu'avançaient Sartre et Barthes, Camus ne se dérobe donc pas à l'histoire et n'envisage pas de vivre – en tant qu'homme et en tant qu'écrivain – hors d'elle. La solidarité, qui est la grande victoire face à la Peste, la résistance collective, n'est-elle pas la condition même d'une histoire possible ? peut-être pas du grand soir, Camus n'y croit sans doute pas, mais de celle qui permet de vivre malgré le mal, inévitable.
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Après avoir lu quelques pages, j'ai voulu savoir si cette histoire était vraie, je me suis donc renseignée, et j'ai appris que "Camus semble s'être inspiré d'une épidémie de peste bubonique survenue à Oran en 1945, succédant à une épidémie plus sérieuse qui eut lieu à Alger en 1944".

J'ai également trouvé les informations suivantes :
"Choisir de lire « La Peste » d'Albert Camus offre une exploration profonde de la condition humaine et de notre réponse collective à la crise. le roman aborde des thèmes universels tels que la solidarité, l'indifférence, l'amour, la souffrance et l'absurde".

"Le roman d'une épidémie à Oran devient clairement une allégorie de la résistance au nazisme, “la peste brune”. Camus y énumère les réactions d'une collectivité face à un fléau : l'héroïsme du quotidien, la réinvention de l'amour, les profiteurs du marché noir , le désespoir, la lutte."

Ma lecture en a été totalement chamboulée, en lisant je pensais constamment aux guerres, aux épidémies, et je réalisais à quel point ce livre fait ressortir la vérité.

Ça m'a beaucoup émue et touchée. C'est un coup de coeur.

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Il y a bien plus effrayant que la Covid la peste.
‘' ils s’installaient dans le présent ‘
J ai perdu la paix
Je la cherche encore aujourd’hui, essayant de les comprendre tous et de n être l ennemi mortel de personne. Je sais seulement qu’il faut faire ce qu ‘il faut pour ne plus être un pestiféré ‘’ ce qui est naturel c est le microbe. le reste ,la santé , l intégrité ... c 𠆎st un effet de la volonte
Par une belle matinée de mai une svelte amazone, montée sur une somptueuse jument alezane, parcourait au milieu des fleurs, les allées du Bois.....les animaux malades de la peste.
L amour, la souffrance et l exil. les petits pestiférés que nous sommes.
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J'ai la chance d'avoir une médiathèque bien fournie en livres audio et c'est l'occasion de relire d'une autre façon des livres déjà lus, dont le souvenir est lointain, et que le travail de l'acteur lecteur aide à redécouvrir, permettant d'apprécier des beautés de texte ou subtilités, qu'une lecture parfois trop rapide, aurait laissé ignorer. C'est ainsi que je viens de relire la peste. Ecrire une vraie critique sur ce roman me donnerais l'impression de retourner au lycée et je contenterais de mentionner tout le bien que je pense du docteur Rieux, ma complète adhésion à son mode de pensée, et le plaisir que j'ai pris à cette relecture. Une formidable leçon d'humanisme qu'il est difficile d'ignorer.
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Quand on lit ce classique aujourd'hui, il est impossible de ne pas penser à ce que nous avons vécu avec le covid ! C'est incroyable le nombre de similitudes qu'on y trouve ... le comptage des décès par jour, le confinement, les journalistes, la politique, etc. Ici, nous sommes à Oran dans les années 40. On assiste au commencement d'une épidémie de peste. Je rappelle que Camus à reçu le prix nobel en 1957 pour son oeuvre. Incroyable aussi, le roman est classé "thème de l'absurde" car lu au 2ème degré, il s'agit d'une allégorie de l'occupation des nazis ! Ce livre est juste incroyablement intelligent et vachement bien écrit ! un petit chef d'oeuvre donc ! Un classique à lire absolument ! Je ne compte plus le nombre de citations que j'ai relevé dans ce livre !
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La conjoncture actuelle (avril 2020 : COVID 19, terrible pandémie) pousse apparemment beaucoup de lecteurs à (re)lire La Peste et notre amie Sandrine57 crée pour avril une lecture commune de cette oeuvre sur Babelio. Je reprends donc un livre que j'ai lu lors de mon année de philo, il y a.....quelques décennies ; lecture qui, à cette époque m'avait rebutée en particulier en raison de la typo très petite (alors aujourd'hui...imaginez-vous!) et de son caractère dense et touffu pour ce qui concerne l'impression.

Je n'ai pas changé : je n'aime toujours pas les livres écrits petit et peu aérés. Mais j'ai plus de constance qu'à dix-sept ans !


Nous sommes à Oran, en 1941 apparemment, et un mal étrange s'est emparé de la ville. le docteur Rieux évoque des événements aussi traumatisants qui eurent lieu à Canton, à Constantinople (en 1871) où, selon Procope, il y aurait eu dix mille morts en un jour.

A Oran, un arrêté préfectoral interdit le courrier, confine les gens intra - muros, place les malades et leur famille en quarantaine. Les morts sont d'abord inhumés, de nuit, dans le cimetière vite devenu trop étroit. On va donc créer des fours crématoires et brûler les corps, hommes et femmes mêlés. le rite musulman n'est plus respecté, le rite chrétien, à peine. Les tramways ne transportent plus de voyageurs mais des cadavres par centaines : l'évocation des camps nazis et des trains qui y menaient est claire.

La peste se propage via les rats, qui contaminent les puces qui infectent l'homme. On attend les doses de sérum qui arrivent par avion, trop lentement, trop peu nombreuses. L'administration n'a pas pris la mesure de l'épidémie.

Si le déroulé des événements nous intéresse - encore plus actuellement - c'est le comportement des hommes qui retient l'attention. Point de héros dans ce roman, juste des hommes qui, depuis leur condition éphémère, essaient de vivre. Certains veulent sauver leur peau voire s'enrichir de la peste (tel Cottard, intéressant par sa philosophie de l'instant; d'autres, comme Rambert, commencent par privilégier leurs aspirations légitimes (rejoindre sa femme en France) avant de devenir des acteurs efficaces de la lutte contre la maladie. Rambert, le journaliste, sera chargé de diriger une maison de quarantaine. Tarrou remplit des carnets, devient le confident du docteur . Il est surtout la voix d'Albert Camus, notamment dans sa prise de position contre la peine de mort. Il évoque son père sous les traits d'un juge qui envoie à la guillotine un « hibou rouge », petit homme roux meurtrier. Il est curieux qu'il ait placé son père dans ce rôle, lui qui était résolument anti peine capitale. La relation Albert-Lucien Camus semble avoir été compliquée.

Des thèmes reviennent, comme l'organisation tatillonne et plus ou moins efficace de l'administration (on fait des fiches, on est sûr ainsi de ne pas mélanger les inhumations d'humains et de chiens, dit-il, ironique) ; le choix de l'homme devant sa vie, sa responsabilité ; Oran, ville dite « grise et jaune » « aux rues noires »  mais étonnamment, les Algériens natifs sont absents de cette évocation, si ce n'est lors d'un passage sur les inhumations.

Et quant aux scènes marquantes, j'ai bien sûr en tête la mort du fils du juge mais aussi celle, extraordinaire, de l'effondrement, bras et jambes écartés par les bubons, du danseur interprétant le rôle d'Orphée sur la scène de l'Opéra. Il faudrait un Degas machiavélique ou un Toulouse-Lautrec déchirant pour le peindre.

Je crois que je pourrais écrire encore et encore sur ce livre plus que marquant. Je n'exclut pas d'y revenir encore, sous forme d'extraits cette fois, relevés au fil de ma lecture, pour réfléchir encore à la place de l'homme dans ce monde, à son niveau d'investissement et d'acceptation dans l'inacceptable ; peut-être aussi à l'empreinte laissée sur chacun par l'épidémie, tandis que d'aucuns annoncent que rien ne sera plus jamais comme avant le Covid 19. Je crains que beaucoup, égoïstes avant, un peu plus altruistes pendant, ne redeviennent ceux qu'ils étaient : intéressés surtout par eux-mêmes.

Difficile de garder foi en l'homme.
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En ces temps de confinement, je me suis lancée dans ce classique. Récit d'une épidémie soudaine, récit évidemment saisissant, brûlant d'actualité, où toutes les phrases ou presque pourraient être citées en écho à notre quotidien. Mais Albert Camus c'est plus qu'un récit, c'est une écriture parfaite, pas un mot de trop ni de trop peu. Il décrit l'humain, ses richesses, ses faiblesses. Il interroge la religion, la société, le politique, etc. Car au-delà du récit de la crise sanitaire, ce sont toutes les crises qui sont interrogées, les crises humanitaires, les crises économiques, les montées des extrémismes...
On ne resort pas indemne d'une lecture de Camus et c'est tant mieux (je me souviens encore 15 ans après de ma lecture de «L'étranger» et de ce qu'elle a provoqué chez moi). On ferme le livre bousculé et dérangé, plein de ces questions qui doivent continuer à nous construire. Et c'est sans doute ça Camus, la puissance des mots, la philosophie narrative.
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Après avoir lu L'Etranger, je me devais de lire La Peste, suite logique dans le parcours de Camus. de l'Etranger, on passe à la Peste ; de l'absurde, on passe à la révolte. Lire la Peste après avoir vécu une situation similaire depuis 2 ans ne peut qu'éclairer ce texte et donner raison à l'auteur.

Il y a même un côté "flippant" au fait que 80 ans plus tard, la capacité de réaction face à une épidémie reste la même : impréparation avec d'abord une prise en compte du risque trop légère puis devant les faits, au contraire, une sur-réaction qui conduit dans un premier temps à l'acceptation d'un effort collectif pour enrayer le mal puis par la suite, à une incompréhension débouchant sur un sentiment et une envie de révolte.

L'Etranger restera pour moi le meilleur ouvrage de Camus, mais La Peste est tout aussi ingénieux, captivant et brillant de réalisme... même 80 ans après.
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