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EAN : 9782213017624
320 pages
Fayard (01/10/1979)
4.17/5   9 notes
Résumé :
Pour Alain Daniélou, l'Occident a perdu sa propre tradition et éloigné l'homme de la nature et du divin. Il nous y fait découvrir ici que les rites et les croyances du monde occidental ancien sont très proches du Shivaïsme et très aisément expliqués à l'aide des textes et des rites préservés dans l'Inde. Ce sont les religions relativement récentes du monde aryen et sémitique, Judaïsme, Christianisme, Islam et Communisme qui ont éloigné l'homme du reste de la créatio... >Voir plus
Que lire après Shiva et Dionysos : La Religion de la Nature et de l'Eros, De la préhistoire à l'avenirVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Par la médiation de ce "manifeste", Alain Daniélou nous appelle à retourner à la "Tradition primordiale" - son expression -, celle que l'homme a fait sienne depuis le Néolithique (plus ou moins six mille années précédant Jésus-Christ), avant que les modes de pensées "de cité" (jaïnisme et bouddhisme en Inde et autres monothéismes sémitiques) l'ait désabonné à ce courant : le shivaïsme-dionysiaque.

Ce mode de pensée et de pratique s'articule autour de l'individu "atomisé", donc non pas anthropocentrique, mais, plutôt, qui s'intègre dans la réalité cosmique autant que sa propre réalité subtile ; aussi, il bénéficie d'une cosmologie (sâmkhya) et d'une méthode (yoga) qui, respectivement, défrichent son macrocosme et son microcosme - notre corps n'est qu'un correspondant organique de ce qui nous entoure, du minéral jusqu'aux orbites célestes.

Selon l'auteur, qui convoque de nombreux exemples historiques, archéologiques, religieux, ... (culte du phallus "shivaïque" - les menhirs universels, épigones du lingam -, du serpent, du taureau ou bélier, de la Déesse-Mère, ...), cela a été la règle dans la religiosité de l'humanité que d'être en communion avec les pierres, les plantes, les animaux, ... ou encore que de prendre son corps comme un viatique de connaissance - sublimé par le tantrisme, qui fait de la jouissance purement sexuelle (et non reproductrice !) une gnose - mais cet ordre somme toute naturel (on pourrait dire "édénique") a été bousculé en notre ère de décadence, que les Indiens appellent Kali-Yuga, où toutes les balises traditionnelles se voient répudiées ; aussi, pour répondre aux impératifs du monde "moderne", et les crises qui l'accompagnent, l'indianiste nous propose - tel Julius Evola, qu'il cite abondamment - de revenir au shivaïsme-dionysiaque, par le Sâmkhya, Yoga ou Tantra (qui "lie" les deux), car ce "système" possède déjà, en lui, les réponses à nos crises actuelles, de l'écologie jusqu'à notre vision de la science, en passant par notre vision de la sexualité (la sortie du livre n'est pas étrangère au mouvement "hippie"), puisqu'il est, par nature, polythéiste, ou, plutôt, accepte la multiplicité théophanique de l'Unité qui Se répand ; et donc, comme on pourrait le dominer, Alain Daniélou n'est pas tendre avec les monothéismes, c'est impérialismes de l'Un qui seraient - selon lui - des couvertures pour cacher des velléités guerrières et autres impérialismes culturels... il laisse pourtant respirer le christianisme, qu'il pense être anti-christique (qui, lui, serait au contraire "dionysiaque"), et qu'on pourrait le "sauver" si on le dépollue des influences théologiques pauliniennes et, plus tard, des récupérations politiques depuis Constantin, ceux des mouvements le transmutant en une "religion de la cité" là où elle était, avec le Christ "authentique", shivaïque et dionysiaque, c'est-à-dire une spiritualité de la nature.

Comme on peut le deviner, ses interprétations pourraient ne pas résonner avec l'avis de beaucoup - surtout celle sur le "mélange des races" - mais sa perspective a toutefois le mérite d'être allaitée par une érudition protéiforme certaine, et qui mérite plus qu'un détour.
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La documentation est impressionnante mais je n'ai pas apprécié que l'homosexualité de l'auteur et soit si présente, nous éloignant un peu beaucoup de la métaphysique. Contient un récit très intéressant d'une initiation shivaïque. J'ai préféré le bouquin de B. Sergent. A relire qd même vu la complexité épouvantable du sujet.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
L'homme n'a pas une origine unique. Il existe quatre races d'hommes de souche distincte. Cette notion, longtemps niée par les Occidentaux pour des raisons surtout bibliques (le mythe d'Adam et d'Ève), tend à être envisagée aujourd'hui par certains anthropologues. La diversité des espèces et des races est un aspect essentiel de l'harmonie de la création. Les restrictions concernant les mariages interraciaux permettent d'éviter l'abâtardissement des espèces, de maintenir chacune dans sa noblesse et sa beauté. Le système des castes a pour but de permettre la coexistence de races différentes dans une même société en assurant à chaque groupe social une profession réservée et des privilèges distincts.
(...)
L'humanité ne trouve l'équilibre et le bonheur que lorsque les quatre groupes humains qui sont à la base des quatre castes sont en harmonie. Cela seul permet d'éviter les quatre tyrannies dont parle Manu, le grand législateur, et qui sont la tyrannie des prêtres, celle des guerriers, celle des marchands et celle de la classe ouvrière qui sont également néfastes et se succèdent indéfiniment jusqu'à ce qu'un équilibre social soit rétabli.

Il n'est pas nécessaire d'aller en Inde pour observer ce cycle inéluctable, l'Europe, dans le passé récent, a connu la prise du pouvoir par l'Église, puis par l'aristocratie suivie de la bourgeoisie capitaliste, et enfin la dictature du prolétariat. Aucune de ces formules n'est stable ni efficace. Elles aboutissent inévitablement à la tyrannie et à l'injustice. Seule une reconnaissance des quatre groupes essentiels à toute société et leur attribution de droits et de privilèges distincts peut permettre une organisation sociale stable et juste. C'est une organisation de ce genre, le système des castes, qui a permis à l'Inde, malgré les invasions et les guerres, de maintenir une civilisation ininterrompue depuis l'Antiquité. Le Moyen Âge européen avait tenté d'établir une organisation de ce genre. Ce fut l'Église, avec l'Inquisition qui rompit l'équilibre.

L'homme, né dans une catégorie donnée, correspondant à des aptitudes particulières, doit s'employer à se réaliser pleinement dans le cadre de la profession familiale. L'ambitieux qui veut occuper des fonctions pour lesquelles il n'est pas qualifié mène au désordre social. Le mélange des races produit des individus bâtards qui défigurent l'harmonie, la beauté de la création, qu'il s'agisse des animaux ou des hommes, car ils ne possèdent plus les vertus qui caractérisent chacune des races. Nous le savons pour les animaux, mais nous prétendons l'ignorer pour les hommes. Des animaux de pure race ont un caractère défini que n'ont pas les bâtards. Un chien de berger n'est pas un chien de chasse. On ne fait pas un chevalier avec un commerçant.
(...)
Ce sont les différences entre les hommes, leur inégalité qui sont la source de tout progrès, de toute civilisation. L'identité dans les aptitudes des diverses races est une fiction. Cela ne veut pas dire que chaque race collectivement ne possède pas des aptitudes que n'ont pas les autres. Il en est de même pour les individus à l'intérieur de chaque groupe. Le véritable problème social est celui de donner à chacun le maximum de chances de se développer selon ses tendances, ses capacités, ses besoins.

Certaines idées ne sont vraies que sur un plan et ne sont pas applicables sur un autre. C'est là que les slogans simplistes aboutissent à des absurdités. L'exemple classique des grammairiens indiens est comme suit : « Devant les dieux tous les êtres sont égaux, donc ma mère, ma femme et ma fille sont égales, je puis donc coucher avec l'une comme avec l'autre. » Les théories soi-disant égalitaires et démocratiques de notre temps aboutissent inévitablement à un nivellement qui est une frustration, une sorte d'esclavage pour tous. La liberté, c'est le droit d'être différent. Le fait que les pouvoirs ou les privilèges soient mal répartis est une chose à laquelle on peut remédier, un égalitarisme qui n'est qu'une abstraction en est une autre. Il n'aboutit qu'à l'élimination des plus faibles, mais aussi souvent des plus doués, de ceux qui créent les valeurs, la raison d'être d'une culture. La répression des « intellectuels », mais aussi des hommes qui, par leur talent, ont su arriver au succès, à la fortune, est une caractéristique des pays dits « socialistes ». (pp. 270-273)
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Euripide admettait l'universalité de la religion de Dionysos que le Dieu lui-même, escorté de ses Ménades, aurait propagée dans tout l'Orient avant de revenir l'implanter au lieu de sa naissance. Les Grecs expliquaient les similarités des cultes de Shiva et Dionysos par l'effet d'une expédition de Dionysos en Inde. Le voyage ou mission que Dionysos avait accompli en Orient pour y propager son culte était devenu une conquête de l'Inde fabuleuse par Dionysos et son armée de Ménades et de Satyres. Cette expédition avait duré deux ans et le dieu était revenu par la Béotie la troisième année. Il avait célébré sa victoire monté sur un éléphant des Indes. Selon Diodore, c'est en souvenir de cette expédition des Indes que les Béotiens, les autres Grecs et les Thraces, avaient institué des sacrifices triétériques à Dionysos. Les anciens Hébreux avaient été fortement influencés par le monde dravidien et shivaïte. Abraham venait d'Ur sumérienne et, malgré Moïse, les Hébreux jusqu'à David participaient à des rites extatiques. En Égypte, c'est Osiris dont les mythes et les légendes sont liés aux mythes shivaïtes. Osiris représente les pouvoirs de génération et de croissance. Il est également le dieu des Arbres et des Plantes. Hérodote et Diodore identifient Osiris à Dionysos. Osiris serait originellement venu de l'Inde monté sur un taureau. Il prit dans son armée les Satyres (les Ganas indiens) comme danseurs et chanteurs, propres à toutes sortes de divertissements. Plus tard, il retourna dans l'Inde où il fonda de nombreuses villes. Les rapports directs entre l'Égypte et l'Inde sont extrêmement anciens et indépendants de ceux de l'Inde avec Sumer, l'Anatolie et la Crète. Les échanges commerciaux très importants passaient plutôt par l'océan Indien et la mer Rouge. Lors du développement de la civilisation crétoise, les parallèles entre les cultes d'Osiris et de Dionysos devinrent apparents. Les premières représentations de personnages crétois dans la peinture égyptienne se trouvent dans les tombes de Sonmut et Useramon à Thèbes entre ~ 1490 et 1480.

L'unité des conceptions shivaïtes et dionysiaques était reconnue dans le monde hellénique comme une situation de fait. « Dionysos était déjà considéré par les anciens comme un dieu analogue à Shiva sous un de ses aspects principaux que le Tantrisme de la Main gauche met en relief. » (Julius Evola, Le Yoga tantrique, note p. 15.) Mégasthène, un Grec qui vécut dans l'Inde au IVe siècle av. J.-C., identifie Dionysos à Shiva dont le culte était, selon lui, particulièrement répandu dans les montagnes où est cultivée la vigne. Il remarque la similarité des expéditions du roi (Chandragupta) et des processions de Dionysos. Lorsque les soldats d'Alexandre se précipitèrent au sanctuaire shivaïte de Nysa (près de la moderne Peshawar, au nord du Pakistan actuel) pour embrasser leurs frères en Dionysos, ils ne concevaient pas qu'il puisse s'agir d'une autre divinité, d'un autre culte. (pp. 48-49)
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Sur le continent indien, les centres de culture dravidienne préaryenne qui ont laissé des vestiges archéologiques importants se trouvent principalement dans la vallée de l'Indus, dans le Pakistan actuel, en particulier à Mohenjo Daro et Harappa. La situation de ces importantes cités dans une région devenue relativement désertique en a préservé certains éléments. Cette civilisation s'étendait en fait sur une grande partie de l'Inde comme vers l'Occident.

« Les contacts [des cités de l'Indus] avec les anciennes civilisations proto-historiques ou historiques de la Mésopotamie, de l'Anatolie, de l'Égypte et de la mer Égée, sont importants... Il existe des preuves de contacts avec Sargon d'Akkad (vers 2370-2284 av. J.-C.), puis avec le roi Urnammu (vers 2100 av. J.-C.), mais Mohenjo Daro existait bien avant. Des objets provenant de Mohenjo Daro ont été trouvés à Tel Asmar et à Troie (vers 2300 av. J.-C.) ainsi que dans une tombe royale d'Ur. Des bronzes du Louristan et des armes mésopotamiennes se rencontrent à Mohenjo Daro... Des colliers de stéatite vernissée identiques se retrouvent à Harappa et à Cnossos... Des sceaux provenant de l'Indus se rencontrent à Ur dans le bas Euphrate et à Kish, Suse, Lagash, Umma et Tell Asmar... Un grand nombre de sceaux de stéatite portant des inscriptions en caractères de l'Indus se rencontrent à Barhein (Dilmun), mais aussi à Ur (vers 2350 av. J.-C.) et Lagash (période de Larsa). » (Mortimer Wheeler, The Indus Civilisations, pp. 111-115.)

Les villes de l'Indus étaient établies dès 3800 av. J.-C. et durèrent jusqu'à leur destruction, au XVIIIe siècle av. J.-C., par les envahisseurs aryens. La religion principale de la civilisation de l'Indus était sans aucun doute le Shivaïsme. Les sceaux représentent Shiva ithyphallique et cornu, assis en posture de Yoga, ou bien dansant triomphalement comme Natarâja. On trouve également de nombreux symboles shivaïtes tels que des phallus de pierre, des svastikas, des images du taureau, du serpent, de la déesse des Montagnes.

« Le culte de Shiva et du Linga (phallus) a été un héritage laissé par les Harappiens [de l'Indus] chez les Hindous, renforcé par l'importance du taureau... et aussi à un moindre degré du tigre, de l'éléphant... et du « Minotaure » ainsi que d'animaux à visage humain. » (Wheeler, ibib, p. 109.)

Étant donné l'importance des contacts, il n'y a rien de surprenant à ce que nous retrouvions la même religion et les mêmes symboles de l'Inde à la Méditerranée. Les problèmes posés par les invasions aryennes seront les mêmes, et les survivances de l'antique religion et sa réapparition périodique seront similaires en Inde, dans le Moyen-Orient et l'Occident. (pp. 30-31)
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Dans le mythe mentionné par Aristophane et repris par Platon dans Le Banquet, les premiers hommes étaient androgynes. Pour les punir de s'être révoltés, Zeus les divisa en deux. De même, d'après les Purânas, les premiers hommes étaient des sages encore proches du divin qui engendraient des fils par une sorte de projection mentale. C'est pour détruire leur pouvoir qui menaçait celui des êtres célestes que Dieu créa la femme et la reproduction par l'union des sexes. Dans la Genèse, la création de la femme à partir d'une côte retirée à Adam implique l'androgynie de l'homme originel, créé à l'image de l'hermaphrodite divin.

Comme Shiva, le premier homme (Adam) était homme du côté droit et femme du côté gauche. Tous les rites tantriques dans lesquels la femme participe sont appelés rites de la main gauche. Le côté gauche est le côté faible de l'homme, réservé aux besognes humbles ou impures. C'est pourquoi on ne tend jamais la main gauche. Offrir un objet de la main gauche est considéré comme un signe de mépris. La circumambulation de l'image d'un dieu doit se faire en le tenant à sa droite, c'est-à-dire dans le sens des aiguilles d'une montre. Dans la magie tantrique où l'aspect féminin de la divinité est invoqué, elle se fait en sens inverse. Tout être bissexuel peut être considéré comme une émanation de l'aspect transcendant du dieu. L'androgyne, l'homosexuel, le travesti ont une valeur de symbole et on les considère comme des êtres privilégiés, images de l'Ardhanarïshvara. Ils jouent à ce titre un rôle spécial dans les rites magiques et tantriques, comme dans le Shamanisme. « Le but final du Tantrisme est de réunir les deux principes polaires Shiva et Shakti dans son propre corps... L'androgynie initiatique n'est pas toujours signifiée par une opération, comme chez les Australiens. Dans beaucoup de cas, elle est suggérée par le travestissement des garçons en jeunes filles, et vice versa des filles en garçons... Les pratiques homosexuelles, attestées dans diverses initiations, s'expliquent probablement par une croyance similaire, à savoir que les néophytes, pendant leur instruction initiatique, cumulent les deux sexes. » (M. Eliade, Méphistophélès et l'Androgyne, pp. 139 et 149.) (pp. 82-83)
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Du point de vue du principe créateur, le monde peut être envisagé comme illusoire, une sorte d'ectoplasme énergétique qui peut se résorber dans son principe. « De même que l'araignée sécrète et résorbe son fil, que de la terre poussent les plantes, que de l'homme sortent des cheveux et des poils sur la tête et sur le corps, ainsi c'est de l'Immuable qu'émane l'univers où nous sommes... De l'Immuable, proviennent les différentes sortes de créatures qui retournent se perdre en lui. » (Mundaka Upanishad, I, 1, 7, et II, 1, 1.)

L'univers est dans ce sens appelé Mâyâ, illusion ou apparence. Toutefois, « du point de vue d'une conscience finie, donc de l'homme..., le monde est une indiscutable réalité dont il ne peut faire abstraction en aucune manière. L'homme fait partie de la création. Il n'existe sous aucun aspect, physique, mental, spirituel, en dehors d'elle. » (J. Évola, Le Yoya tantrique, p. 36.) (p. 179)
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