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EAN : 9782823611618
688 pages
Editions de l'Olivier (01/06/2017)
4.12/5   47 notes
Résumé :
« Il m’arrivait souvent de songer que je vivais peut être à la marge de ce pays, à la lisière de sa raison politique et sociale, alors qu’en réalité je me trouvais en son centre, ce cœur brutal et aveugle qui déjà battait en silence pour celui qui allait advenir bien des années plus tard. »

Un agent immobilier vend des parcelles de la Lune aux particuliers, un homme invente l’autopsie en self-service, des bourreaux racontent les exécutions qu’ils ont ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Il fut un temps où j'aimais l'Amérique.
Sa démesure et sa diversité, son dynamisme et ses élans, ce puissant vent de liberté qui en fait le pays de tous les possibles.
Il fut un temps où j'aimais l'Amérique ... mais ça c'était avant. Avant de lire les 92 (j'ai bien dit 92 !) chroniques du sieur Jean-Paul Dubois - expert si l'en est de toutes les bizarreries états-uniennes ! - réunies dans la copieuse compilation que voilà.

Je connaissais (et appréciais) le romancier, c'est avec joie et curiosité que j'ai fait la connaissance du journaliste. Ancien grand reporter au Nouvel Observateur, Dubois avoue pourtant en préambule qu'il n'aime pas poser des questions. Ce qu'il préfère, c'est plutôt "observer, regarder la forme des choses et le contour des gens, les écouter tandis qu'ils racontent le bruit de leur vie".
En exhumant ici différents articles écrits entre 1990 et 2001, à l'occasion de ces 72 (j'ai bien dit 72 !) voyages aux USA, c'est précisément ce bruit qu'il nous restitue, ces vies qu'il nous rapporte, ces gens à qui il donne la parole. À travers eux il nous promène de New-York à San Francisco et du comté d'El Paso aux dernières réserves indiennes qui jalonnent la frontière canadienne, le tout en passant par le désert des Mojaves (et sa regrettée "Mojave phone booth*"), l'île de Martha's Vineyard si chère aux Kennedy, ou encore les toilettes de Graceland où le King posa pour la dernière fois son illustre postérieur.
Que de kilomètres parcourus et d'États traversés !

Avec son regard un peu décalé et son style toujours si plaisant, Dubois aborde un nombre incalculable de thématiques (controverses sur la peine de mort, fondamentalisme religieux, individualisme et libéralisme débridé, ravages du sida en cette fin de 20ème siècle, folie des armes au Texas, fièvre du jeu à Las Vegas, indécence des ultra-riches et extrême misère des plus nécessiteux,...), qui toutes mettent en évidence, à des degrés divers, les excès et les contractions de ce cher Oncle Sam.
Même si certains de ces nombreux textes aux allures de nouvelles m'auront marqué plus que d'autres, il m'est difficile de m'attarder ici sur l'un ou l'autre d'entre eux. Courts et cinglants, ils sont tous soigneusement documentés et nous livrent des contenus étonnants, improbables, tristes parfois, effrayants souvent, édifiants toujours...
Mis ainsi les uns à la suite des autres, en une sorte d'anthologie un peu foutraque, ils sont comme autant de projecteurs braqués tous azimuts sur des fragments d'Amérique, et le tableau global qu'ils éclairent n'est pas franchement réjouissant.
J'y ai quand même fait de belles rencontres (au hasard et à titre d'exemple : des indiens Séminoles "lutteurs de crocodiles" dans les réserves des Everglades, Paul Glover l'inventeur d'un étonnant système de monnaie locale appelé "Ithaca-Hours", ou encore quelques héros du 11 septembre) ... et d'autres un peu plus surprenantes (une stripteaseuse obtenant au tribunal la prise en charge de ses prothèses mammaires déclarées comme outils de travail, un shérif sadique et particulièrement "ingénieux" dans l'élaboration d'une nouvelle politique carcérale en Arizona, ou enfin divers illuminés attendant l'Apocalypse dans des abris souterrains).
Sacré panel, n'est-ce pas ?
Après tout, comme l'écrit Dubois, "l'Amérique [est] sans doute le seul zoo de la planète à laisser errer et divaguer en liberté une pareille variété d'individus exotiques, aux idées toxiques et retorses, tous affairés, chaque matin, à bricoler et à mettre en oeuvre une masse de projets incongrus, terrifiants ou pathétiques."
Vu comme ça, forcément...

Alors oui, il fut un temps où j'aimais l'Amérique. Par bien des aspects elle me fascine toujours, mais à la lumière de ces 92 récits il me faut bien l'admettre : moi aussi elle m'inquiète.
Et pas qu'un peu.


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* Je ne connaissais pas du tout, j'ai adoré l'histoire de ce "téléphone de nulle part"
(cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Mojave_phone_booth) !
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Pays aimé ou détesté, l'Amérique ou plutôt les Etats-Unis ne laissent personne indifférent....Jean-Paul Dubois y vécut, et s'y rendit plus de 70 fois pour le compte du Nouvel-Obs....il réunit dans "L'Amérique m'inquiète et autres récits" plus de 90 chroniques écrites pour le compte du journal... Un voyage dans la folie, la noirceur, ou l'horreur, un voyage au sein de cette société de tous les excès, de tous les délires, de toutes les folies et névroses et aussi de toutes les hontes.
Tout y passe : les droits constitutionnels, Dieu, la justice, la peine de mort, le dieu dollar, le sexe, les gaspillages, les affaires, la religion, la police, le Droit des armes, la pollution, Mc Donald's, Elvis, le 11 septembre et j'en passe. le fric, et encore le fric ....bref tout ce qui peut nous étonner, mais aussi nous indigner et nous faire gerber. On est, très souvent, bien loin du "rêve américain" décrit par d'autres auteurs. En tout cas, en ce qui me concerne, je n'ai pas rêvé ni fantasmé. J'ai été souvent sidéré et passionné par cette démesure, par ces excès.
Aussi mieux vaut, si l'on ne souhaite pas souffrir d'indigestion, prendre son temps, et lire une à deux chroniques par jour, poser le livre pendant quelques jours et le reprendre. Bref le savourer dans le temps.
On comprend ainsi comment certains arrivent à devenir Président de ce vaste pays, on s'étonne que d'autre aient pu l'être, et on découvre qu'il convient de s'attendre à tout avec ce pays et ses habitants. Un pays dans lequel le pire côtoie le meilleur.
Jean-Paul Dubois pessimiste ? Oh non précisera-t-il : "Je ne suis pas pessimiste. Je pense simplement être un optimiste bien informé" (P. 645)
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Tout un ensemble de chroniques plus ou moins intéressantes mais qui prennent tout leur sens dans le titre de l'oeuvre....
" L'Amérique m'inquiète" est le portrait d'un pays paranoïaque, violent, raciste, terrifiant et pathétique dans bien des domaines mais surtout tellement bourré de paradoxes car à côté de ça, il y a des gens formidables, aimants, tendres et volontaires!!!!
Certes, l'Amérique n'est pas un endroit qui m'attire par ses occupants, plutôt par ses paysages, je le trouve hypocrite et égoïste sur son mode de vie et les leçons qu'il veut donner, encore plus avec l'avènement de Donald Trump.... Et cette succession de chroniques, qui datent pourtant de plus de 20 ans pour certaines d'entre elles, m'a plutôt conforté dans cette idée...
Cependant, les chroniques sur New York d'après le 11 septembre sont terriblement émouvantes, tout comme celles sur la peine de mort et quelques autres...
Finalement, en conclusion de toutes ces petites histoires d'Amérique, je peux en déduire que c'est un pays bien étrange mais peut-être est en cela qu'on peut le trouver aussi fascinant...?
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Nous allons tous mourir. Ce n'est qu'une question de patience. Le processus, si l'on peut dire, est déjà engagé. Tout joue contre nous : les statistiques, le temps, et même les places financières. Nous voilà embarqués dans une vraie sale histoire. Alors autant vous la raconter dans ses moindres détails. Elle commence au début des années 1950 avec la germination de l'emblématique génération des baby-boomers. Usée par la friction des conflits, la mort était, à cette époque, tenue pour un sport démodé. Chacun pensait à revivre, replanter, repeupler les nations, passer de la civilisation des cimetières à celle des maternités. C'est ainsi que naquit l'avant-garde de l'après-guerre. Pour ces enfants du regain l'on espérait un mieux. Ils eurent le meilleur. Un futur de fourrure doublé d'un univers en expansion.
Le progrès leur offrit un monde de Teppaz et de berlines automatiques pourvues de directions assistées. Cette génération-là, la plus nombreuse de toute l'histoire de l'humanité [...], d'abord joueuse, se révéla très vite avoir une âme de propriétaire et décréta que l'avenir, le monde et ses environs lui appartenaient. Aujourd'hui, la grande armée continue sa marche forcée vers la quête du bonheur éternel. Pourtant, chez les plus informés de la troupe, la cadence a changé. Et c'est du pas de l'explorateur craintif que certains avancent vers l'âge de l'intranquillité. Quinquagénaires recomposés, « viagratisés » et sur la vie assurés, ils sentent que le piège du temps est en train de se refermer sur eux, qu'ils vont bientôt tomber, d'abord par centaines, puis par milliers, par colonnes, par grappes. Bref, en masse.
Avec l'extinction prochaine des baby-boomers nous allons entrer dans ce que les économistes spécialisés appellent déjà la « golden era of death ». Cet âge d'or de la mort, Wall Street, les milliardaires, les banquiers, les investisseurs de tous pays l'ont bien sûr anticipé. Aux États-Unis, et dans de nombreux pays occidentaux, les spéculateurs ont racheté les maisons funéraires, les cimetières et toutes les entreprises et services se rattachant à ce secteur d'activité. Une industrie qui, rien qu'aux États-Unis, brasse la somme de 17 milliards de dollars. Les retours sur investissement sont calculés, les statistiques bouclées, les paris ouverts, les dates plus ou moins balisées. La finance a misé contre nous tous. D'énormes paquets. Ce qui n'est jamais bon signe. De cet âge d'or, pour une fois, nous ne verrons pas le bout. Nous n'en serons même pas les figurants ni les acteurs. Seulement les victimes et les vecteurs.
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Oui, à la fin, quand la nuit tombe sur les collines, il ne reste plus que la stature d'un homme seul, debout, et qui attend. D'une certaine façon, lorsque Christian comparaîtra en justice, c'est Brando que l'on jugera et peut-être que l'on condamnera. A ce moment-là, lorsque les choses iront mal, l'acteur sait qu'il pourra compter su Nicholson et Kunstler afin de diviser sa peine. Pour les autres, tous les autres, il s'enfermera toujours derrière son visage. Et seuls les couloirs le verront pleurer.
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Avec Reebok qui lui enserre les chevilles, Seiko qui lui ceint le poignet et Campbell qui lui soutient l'estomac, Kerrigan n'a plus de soucis à se faire. Aux jeux de Lillehammer, ses commanditaires ne lui demanderont même pas de gagner la médaille d'or, seulement d'être là, de patiner, de se laisser porter, de glisser sur son image. Sa seule apparition olympique , couplée aux retombées de l'affaire devrait lui rapporter quelque chose comme 10 millions de dollars. Le coup de bâton qu'elle a reçu sur la rotule à définitivement fouetté sa carrière. Et sans doute à jamais brisé celle de Tonya Harding.
De Kerrigan, on saura à peu près tout quand on aura dit que son père, plombier, s'y entendait autant pour aboucher les tuyaux que pour souder une famille. Depuis toujours, accompagné de ses quatre fils, de sa femme aveugle, de ses propres frères, neveux et cousins, Kerrigan senior suit, encourage et préserve sa fille partout où elle patine. Avec sa seule famille il se fait fort de remplir une tribune. Et comme si cela ne suffisait pas, Nancy est une splendeur bien élevée, s'exprimant avec charme, sachant parfaitement mettre en valeur son petit côté country club et ne détestant pas se faire photographier pendant qu'elle s'exerce au golf.
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L'Amérique est pleine de ce genre de surprises. Elle est bouffie de crosses, obèse de ces abdomens corsetés dans de la lingerie pour culasses. Ce pays est un gigantesque holster, un endroit où l'on n'est rien si, en se déshabillant, on ne dévoile pas son attirail pour "chasser l'ours".
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Un rapport accablant d'Amnesty International sur ce sujet rappelle par exemple que les États-Unis sont - avec l'Iran, l'Irak, le Bangladesh et le Nigeria - l'un des seuls pays au monde où l'on exécute les mineurs. En Virginie, en Louisiane et en Arkansas, on peut se retrouver dans une chambre à gaz à 15 ans. En Alabama, à 14 ans. Dans le Mississippi, à 13 ans.
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Vidéo de Jean-Paul Dubois
Dans son dernier ouvrage intitulé "L'Origine des Larmes", Jean-Paul Dubois plonge ses lecteurs dans une histoire aussi sombre que captivante. Ce roman dépeint le destin tragique de Paul, un homme d'âge mûr, en proie à un passé familial tumultueux. le titre même du livre évoque la douleur et la souffrance qui parsèment le récit.
Paul, le protagoniste, est tourmenté par les sévices infligés par son père, un individu toxique et sadique nommé Thomas Lanski. Pour se venger des années de souffrance endurées, Paul commet l'impensable : il tente d'assassiner son père. Cependant, le destin en décide autrement, car au moment où Paul déclenche son arme, son père est déjà décédé.
Déterminé à accomplir sa vengeance, Paul transporte le corps de son père jusqu'à une morgue en banlieue de Toulouse. Là, dans un acte de défiance ultime contre son géniteur maléfique, il commet l'impensable : il tire deux balles dans la tête du cadavre, mettant ainsi fin à la vie de son père une seconde fois.
Dubois décrit avec une précision déconcertante la noirceur de l'âme humaine à travers les actions de Paul. le lecteur est plongé dans un tourbillon d'émotions, confronté à la cruauté et à la complexité des relations familiales. "L'Origine des Larmes" offre une exploration profonde de la psyché humaine et des conséquences dévastatrices de la vengeance.
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