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EAN : 9782226426918
486 pages
Albin Michel (03/01/2018)
3.93/5   21 notes
Résumé :


Tout à la fois épopée initiatique et roman philosophique, cette oeuvre ultime d'Anne Dufourmantelle, magistrale et prémonitoire, nous mène aux confins du temps et de la terre.

Deux quêtes s'y font écho, à des siècles de distance : quittant ses montagnes de l'Altaï, un roi mongol entreprend une expédition par-delà la Chine et l'océan Pacifique jusqu'aux rives de l'Equateur tandis que, de nos jours, un groupe de chercheurs, fasciné par ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Comment peut-on se souvenir de son avenir ?
Vous avez quatre heures pour disserter - original le sujet du bac philo cette année - ou, plus agréablement, quelques heures de lecture passionnantes et enrichissantes du dernier roman de Anne Dufourmantelle, philosophe et psychanalyste, pour nourrir votre réflexion et peut-être, vous faire découvrir des questionnements inattendus, tout en étant embarqué dans un roman d'aventures, riche en rebondissements.
Une fois commencé, je n'ai plus lâché ce récit. Rien n'est plus parlant, me semble-t-il, en terme de ressenti.

Pitch enthousiaste, soit, mais de quoi s'agit-il vraiment me direz-vous ?
Tout d'abord, plusieurs hypothèses, à la fois historique et métaphysique, ont servi de point de départ au roman et éclairent le propos :
« Les Mongols auraient découvert l'Amérique latine avant Christophe Colomb »
« Quelle assurance avons-nous que le temps existe ? »
Ce qui s'appelle bousculer des certitudes, mais l'imaginaire ne permet-il pas d'ouvrir des champs d'investigation, de progresser dans nos connaissances ?

Une double trame narrative, alternance de chapitres consacrés aux deux histoires se déroulant à sept siècles de distance, donne du rythme. D'un côté, 1321, des guerriers mongols entrainés par leur roi, descendant de Gengis Khan, partent en expédition pour découvrir à l'est un monde inconnu, un géomètre vénitien est chargé de relater leur épopée ; de l'autre, 2020, un petit groupe de passionnés, scientifiques et historiens, s'intéressent à des fragments d'un énigmatique manuscrit rédigé à la fois en dialecte mongol et en latin.
Plus les intrigues se développent, plus elles s'entremêlent, illustrant l'hypothèse que le temps n'existe peut-être pas, que finalement tout serait connecté, passé présent et futur.

J'aime penser que la troisième exploratrice de ce récit, c'est Anne Dufourmantelle elle-même. Forte de son expérience psychanalytique et philosophique, elle nous offre des personnages nombreux, d'une grande diversité et surtout d'une grande vérité, certes ancrés dans leurs époques respectives, mais qui finissent par se rejoindre grâce à la liberté…du roman.
Les changements de temps, d'espaces, de quêtes sont avant tout au service de sa réflexion sur l'âme humaine. C'est ce qui fait tout l'intérêt de ce roman, de son travail, malheureusement tragiquement interrompu l'été dernier, alors qu'elle venait de rendre à son éditeur ce manuscrit.

Kierkegaard, un autre philosophe (du passé pour nous) a écrit :
« Parce que je me retourne vers le passé, je vois l'avenir »
Une intuition ? Un souvenir ?
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Souviens-toi de ton avenir est le dernier roman d'Anne Dufourmantelle, philosophe, romancière et psychanalyste, publié à titre posthume, l'écrivaine nous ayant quitté tragiquement le 21 juillet 2017. J'ai découvert cette auteure par son essai magnifique intitulé L'Éloge du risque.
Ce roman nous mène très loin. Il est possible qu'il nous mène plus loin que l'horizon, plus loin que le temps. Il est possible que le temps ne ressemble pas à l'image que nous nous en faisons. Et si nos rêves étaient une manière de trébucher dans le temps... ?
Ce sont deux histoires qui font écho à sept cents ans de distance. Deux histoires qui finissent par s'entremêler. Ce sont deux quêtes. L'une maritime, vers d'autres contrées lointaines, peut-être une manière de sauver et étendre un empire menacé en le projetant de l'autre côté de l'océan, vers des terres encore inconnues. L'autre, celle de désirer reconstituer l'itinéraire du roi mongol, comprendre, identifier la destination de cette épopée.
En 1321, sur les hauts plateaux de l'Altaï, un roi Mongol dénommé Akhan, descendant de la dynastie de Gengis Khan, pressentant une menace fatale des chinois sur son empire, décide d'entreprendre l'ultime voyage par-delà la Chine, vers l'océan.
Sept cents plus tard, une équipe de chercheurs passionnés de textes anciens, renoue avec l'itinéraire du roi et de ses troupes, par le biais des fragments d'un texte, sorte de carnet de voyage, écrit par un géomètre génois, Adalberto, dans deux langues, l'une le phags-pa (l'un des alphabets mongols) et l'autre en latin. Ses fragments ont été dispersés dans le monde. L'équipe va alors tenter de reconstituer le puzzle, comprendre le message transmis par le temps, identifier la destination de leur fabuleux périple, vers l'océan Pacifique, puis l'Équateur. S'ensuit quelque chose qui ressemble à une sorte d'enquête, digne d'un thriller. Réveiller une hypothèse, contredire un pan de l'histoire liée aux origines de la découverte de l'Amérique...
Depuis une librairie de Paris, nous partons, nous voyageons ainsi de Bâle à Madrid, de Naples à Londres, de Budapest à Quito.
Les deux récits vont faire écho, s'alterner, chapitre après chapitre. Les deux quêtes, bien différentes, ont pourtant bien des points communs. Certains personnages se ressemblent aussi, comme si l'auteure avaient voulu jouer sur une forme de jeux de miroirs, jouer avec le temps, ce temps qui vacille lorsque les rêves s'en mêlent comme des chausse-trappes. C'est ainsi que l'auteure semble convoquer par instant quelque chose qui ressemble de près, non pas forcément à du fantastique, mais du moins à quelque chose proche du parapsychologique.
Nous voyageons entre deux rives du temps. Ces deux rives ne sont pas forcément si éloignées. Nous voyons les personnages de ces deux rives s'animer, parfois se quereller, s'affronter aussi. La passion les anime. D'autres sentiments aussi comme le désir, l'amour, la jalousie... Nous sommes les témoins muets comme si nous étions sur une barque entre ces deux rives.
Notre barque avance, nous avançons dans le temps abyssal. Il est possible que les méandres du temps nous emportent dans le fleuve immense qui serpente entre ces deux histoires. Quel en sera le lien ? Qui tendra les bras, appellera les gestes pour rassembler les fragments dispersés d'un puzzle à reconstruire ?
C'est un roman grisant, nous sommes happés dans le temps de ces deux histoires qui ne cessent de s'interpeler, comme si les personnages respectifs avaient le sentiment de se connaître, de s'attendre d'une rive à l'autre. Nous sommes appelés vers la fin du livre comme le courant qui nous entraîne inlassablement entre ces deux rives. Nous avançons dans la brèche du temps. Il est possible que nous trébuchions dans un rêve qui nous amènerait sur une jonque abordant un rivage sur une plage de l'Amérique, précédant de quelques années le célèbre navigateur Christophe Colomb.
Le rêve d'une terre promise...
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Les peuples qu'il a assujettis depuis trois siècles se révoltent. Ils retrouvent le goût de l'indépendance ou tombent dans un autre asservissement. L'empire mongol s'étiole. le dernier Khan rêve pourtant encore de conquête et projette une expédition maritime dans laquelle il entraîne une poignée de ses rudes montagnards des steppes, vers une destinée dont il ignore tout. Nous sommes au XIVème siècle. Les Espagnols n'ont pas encore fait main basse sur ses contrées auxquelles Amerigo Vespucci laissera son nom.

Anne Dufourmantelle construit son roman sur cette hypothèse selon laquelle les Mongols auraient devancé les Espagnols en Amérique du Sud. Dans Souviens-toi de ton avenir, par chapitres alternés, elle imagine en parallèle l'aventure romancée de l'arrière petit fils de Genghis Khan et les péripéties d'une équipe d'archéologues et historiens du XXIème siècle qui tente de consolider pareille conjecture.

Dans les derniers soubresauts de son empire moribond, Akhan a la volonté de faire connaître la civilisation mongole à la face du monde occidental, autrement que pour son art de la guerre. Il embarque avec lui un scientifique aventurier italien, le géomètre, lui confiant la mission de rédiger pour la postérité, dans la langue native, le phags-pa, mais aussi en transcription latine, le journal de son épopée. Pierre de Rosette d'un autre temps.

A la découverte des fragments d'écriture de ces textes que les siècles ont disséminés sur la planète, l'équipe d'archéologues moderne se fait à la conviction que cette épopée mongole a bien abouti en Amérique du Sud, sur la côte du Pérou.

Cet ouvrage peut se lire comme un roman d'aventure. Mais l'histoire des hommes ne serait pas ce qu'elle est sans l'implication des sentiments dans ses méandres et c'est bien dans la description des caractères et comportements de ses personnages que l'on découvre les compétences de psychanalyste d'Anne Dufourmantelle. Sans jamais forcer le trait, sans trahir l'impact du contexte culturel d'époques et de civilisations si lointaines et différentes, elle sait dresser des portraits psychologiques d'une rare authenticité. Que ses personnages soient sous l'emprise des rites chamaniques ou des paradis artificiels de nos cultures sans dieu, leur intervention dans l'intrigue relève de la même évidence qui fait du narrateur extérieur un véritable témoin de chaque lieu et chaque époque.

Bel ouvrage à la sensualité bien dosée, au suspens flegmatique et crédible, même si la thèse recueille peu d'adeptes parmi les personnes avisées, si l'on en croit la documentation que l'on peut trouver sur le sujet. Il y a pourtant bien une explication aux traits de type mongol qui se sont imprimés dans les gènes des indiens de la côte ouest de l'Amérique latine. Mais tout ceci n'est qu'un roman, au demeurant fort bien construit, d'autant plus prenant lorsqu'on progresse vers son dénouement.
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« Beau ciel, vrai ciel, regarde-moi qui change !
Après tant d'orgueil, après tant d'étrange
Oisiveté, mais pleine de pouvoir,
Je m'abandonne à ce brillant espace,
Sur les maisons des morts mon ombre passe
Qui m'apprivoise à son frêle mouvoir.
(…)
le vent se lève... ! Il faut tenter de vivre !
L'air immense ouvre et referme mon livre,
La vague en poudre ose jaillir des rocs !
Envolez-vous, pages tout éblouies !
Rompez, vagues ! Rompez d'eaux réjouies
Ce toit tranquille où picoraient des focs. »
(Paul Valéryle cimetière marin)

En refermant ce livre, et en repensant à la tragédie héroïque de l'auteure, comment ne pas songer aux vers de Paul Valéry.
Les flots qui recouvrent la quête de nouveau monde et emportent une belle personne.

A Paris, dans la librairie Syracuse, le cercle des chamans disparus s'affaire et s'enflamme autour de leur Pierre de Rosette, des manuscrits, extraits d'un récit bilingue en alphabet mongol ésotérique et une correspondance en latin. le présumé rédacteur, un vénitien, Adaltero qui se révèle être un géomètre géographe réquisitionné par le roi mongol, Akhan, descendant de Gengis Khan. Car le récit oscille entre les aventures au XIVeme siecle de ce souverain alors que la dynastie Yuan mongole qui s'est imposée sur l'Empire du Milieu est sur la défensive et va céder sa place à la flamboyante dynastie Ming et les tumultueuses péripéties bien actuelles d'historiens professionnels et improvisés.

Le récit riche en paradoxes, à commencer par le titre, « Souviens toi de ton avenir », des passerelles dans le temps, une mise en abime, un kaleidoscope où des êtres, des visages se frôlent. Paradoxe des paradoxes, l'auteure transporte ses acteurs de leur élément naturel, de l'infini terrestre des étendues de Mongolie, du mythique et effrayant désert du Takamaklan à l'Océan Pacifique. Les farouches hommes des plaines transportés sur cette jonque qui se métamorphose en bateau ivre.

Autour d'Adalberto et d'Akkan, ces figures troublées, irradiées, Nûr le chamane aveugle, sa petite-fille Aghyar, entre deux univers, insaisissable, Guerroès, le jeune homme sombre et impulsif.
D'abord circonspects, nos chercheurs remontent la source, authentifient, mènent l'enquête non sans péril à commencer du fait de leurs propres fêlures et cet incroyable scénario, l'arrivée de Mongols sur la côte Pacifique en Amérique pré colombienne.

Un livre qui, semble t-il, a été plus ou moins snobé par le public. Ce n'est pas le moindre des paradoxes, tant avec la couverture, le style incisif, précis et inspiré, et le récit passionnant, tout est magnifique
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Si je devais le résumer....

Exercice assez difficile de part sa richesse.

Roman, d'aventure, initiatique, philosophique... c'est un peu de tout cela



C'est l'histoire...

Deux époques

XIVe  siècle, nous chevauchons la Mongolie en compagnie d'Akhan roi, descendant de Gengis Kahn et ses troupes. Celui-ci pressentant la fin de l'Empire au profit des chinois, désire partir à la conquête des Célèbes. Un chaman, sa petite fille sauvage et guerrière et Adalberto un géomètre italien l'accompagne. Ce dernier officiera en tant que scribe pour raconter les pérégrinations du roi.

2020, une équipe de chercheurs retrouvent des fragments des écrits en latin et langue mongole  de cette épopée et tente de percer le mystère de cette conquête du pacifique.
C'est un roman époustouflant, totalement captivant…

Lien : https://justelire.wordpress...
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Quelle assurance avons-nous que le temps existe ? C’est notre croyance la mieux gardée. La mort semble lui donner réalité, nos vies le confirmer, nos histoires aussi.
En Mongolie orientale, il y a six siècles, on appelait « Vent rouge » le signe que le même événement, invisiblement, coexiste sur plusieurs plans de l’espace et du temps.
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Lorsqu’un évènement est vécu complètement et en conscience, le temps s’accomplit. Il se boucle et, à la fois, s’ouvre dans toutes les directions.
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Les êtres ne se possèdent pas, ils se reconnaissent.
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Il hait dans le renoncement, la jouissance d’une nostalgie annoncée.
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Traduire, c’est mettre en tension des mondes.
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Vidéo de Anne Dufourmantelle
#JournéeDeLaPhilo2020 #Philosophie #LesRencontresPhilosophiquesdeMonaco #Philomonaco
Philosopher ensemble !
#Trailer de présentation des Rencontres Philosophiques de Monaco
Avec la participation de: Alain Fleischer, Anastasia Colosimo, Anne Dufourmantelle, Avital Ronell, Barbara Cassin, Bernard Harcourt, Bernard Stiegler, Boris Cyrulnik, Bruno Karsenti, Camille Riquier, Catherine Chalier, Catherine Millet, Charlotte Casiraghi, Christian Godin, Claire Chazal, Claire Marin, Claude Hagège, Cynthia Fleury , Davide Cerrato, Denis Kambouchner, Dominique Bourg, Donatien Grau, Edwige Chirouter, Elisabeth Quin, Emanuele Coccia, Éric Fiat, Étienne Bimbenet, Fabienne Brugère, François Dosse, Frédéric Gros, Frédéric Worms, Gary Gillet, Geneviève Delaisi de Parseval, Geneviève Fraisse, Georges Didi-Huberman, Georges Vigarello, Géraldine Muhlmann, Gérard Bensussan, Hakima Aït El Cadi, Jean-Luc Marion, Jean-Pierre Ganascia, Joseph Cohen , Judith Revel, Julia Kristeva, Laura Hugo, Laurence Devillairs, Laurent Joffrin, Luc Dardenne, Marc Crépon, Marie Garrau, Marie-Aude Baronian, Mark Alizart, Markus Gabriel, Marlène Zarader, Martine Brousse, Corine Pelluchon, Maurizio Ferraris, Mazarine Pingeot, Michael Foessel, Miguel de Beistegui, Monique Canto-Sperber, Nicolas Grimaldi, Olivier Mongin, Paul Audi, Perrine Simon-Nahum, Peter Szendy, Philippe Grosos, Pierre Guenancia, Pierre Macherey, Raphael Zagury-Orly, Renaud
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