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EAN : 9782360841677
Inculte éditions (04/05/2022)
3.38/5   4 notes
Résumé :
« La table de l’écrivain n’est jamais éloignée de quelque charnier » : cette phrase de Boubacar Boris Diop, qui figure au fronton du nouveau livre d’Espitallier, rend assez bien compte de ce qu’est Tueurs : un livre où alternent, dans un jeu de miroir glaçant, descriptions d’exactions commises en temps de guerre et propos tenus par ceux-là-même qui les ont commises. Les descriptions composent une fresque impitoyable, tandis que les propos des « tueurs » font ressort... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Je n'ai pas trop compris quel était le projet de ce livre.
Je pensais plus ou moins tomber sur un essai illustré par des exemples sur ce sujet toujours incompréhensible pour beaucoup d'entre nous de la manière dont des personnes lambda peuvent devenir des tortionnaires en objectisant leurs victimes.
Mais en fait, l'auteur décrit 100 images ou extraits de films témoignant de violence ou de tuerie, souvent de façon (volontairement, je l'ai bien compris) très factuelle, avec des détails de peu d'importance et de façon parfois très répétitive, déconnectée de leur contexte historique. Il est bien difficile de se représenter mentalement certaines de ces descriptions.
Il les entrecoupe de citations tirées de témoignages de tueurs, bourreaux, mercenaires, génocidaires et assassins en tout genre, sans d'ailleurs se préoccuper du fait que ces entrecoupages vont interrompre pas mal de descriptions d'images et nous obliger à sauter des pages pour lire la suite, et à revenir en arrière ensuite, ce qui n'est ni heureux ni pratique.
Certes, ce tourbillon de sévices, de tortures et d'exécutions sommaires donne un peu le tournis, et certes, les propos recueillis font bien souvent froid dans le dos, mais j'ai refermé ce livre sans vraiment avoir le sentiment d'avoir avancé d'un iota sur le sujet.
On reste dans le constat de l'horreur et dans son incompréhension.
Alors c'était quoi, finalement, ce livre ? Une tentative de performance artistique ?
Si c'est le cas, je suis clairement passé au travers.
Sur le même sujet, je conseille plutôt l'excellent dernier roman de Frédéric Soulier, Ainsi tuent les hyènes.
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En 100 descriptions d'images fixes ou animées, assorties de citations d'acteurs des grands et des petits carnages modernes et contemporains, un regard cru, brutal et acéré, sur la haine, la cruauté et le meurtre de masse. Une expérience décapante et salutaire.


Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/07/20/note-de-lecture-tueurs-jean-michel-espitallier/

Le fait de donner la mort (et de la recevoir) est partie intégrante de la guerre depuis que celle-ci existe, autant dire depuis toujours. Pourtant, il y a un stade nettement supplémentaire dans l'assassinat légitimé par l'autorité, qu'elle soit nationale ou proclamée comme telle ou quasi-telle : celui du meurtre perpétré avec une certaine jubilation, comme en se jouant d'une difficulté ou même comme en y prenant plaisir – ajoutant à un sens du devoir inévitable une authentique délectation ou, plus prosaïquement, un moyen de tromper l'ennui et l'attente. C'est à ces meurtres-là que s'est intéressé, en un extraordinaire montage d'images « réelles » (fixes ou animées) racontées sur papier, entrecoupées de bribes occasionnelles d'interviews de tueurs et de témoins, données à lire telles quelles sans commentaires, sans voix off et sans glose, le poète Jean-Michel Espitallier.

Davantage encore que les analyses historiques et philosophiques sur récits et documents pratiquées avec un immense talent de scientifique et de conteur par paradoxal par Christian Ingrao (« Croire et détruire », 2010, qui se penchait sur le parcours d'initiation nazi menant de jeunes intellectuels d'extrême-droite réputés brillants à la direction de sonderkommandos assassinant en masse les Juifs ukrainiens ou lituaniens) ou par Harald WelzerLes Exécuteurs : des hommes normaux aux meurtriers de masse », 2005), davantage même que les témoignages sans aucun fard, ni côté victimes ni côté bourreaux, recueillis et assemblés par Jean Hatzfeld au Rwanda dans ses « Dans le nu de la vie » (2000) et « Une saison de machettes » (2003), trois auteurs que Jean-Michel Espitallier cite en bon rang dans ses précieuses sources en fin d'ouvrage, « Tueurs », publié chez Inculte en mai 2022, communique la pleine puissance et la sauvagerie glacée de cette horreur nue, mélange de folie, de cruauté, d'entraînement et d'un je-ne-sais-quoi (qui n'est certainement pas ici un presque-rien) demeurant indéfinissable – qui entache pourtant si durablement l'espèce humaine.

Loin certainement de toute idée de banalité – ou de banalisation – du mal (dont sont souvent friands celles et ceux qui aiment bien renvoyer dos à dos victimes et bourreaux, dont les rôles seraient interchangeables en fonction de la direction d'où soufflerait le vent de l'Histoire), Jean-Michel Espitallier pratique ici une redoutable opération à vertu potentiellement prophylactique. Détournant avec une audace folle les moyens techniques propres à la poésie (dans un usage si différent de ceux qu'on lui connaissait par exemple dans « L'invention de la course à pied », dans « Syd Barrett » ou dans « Cow-boy », mais sans doute déjà présent, au moins à l'état de traces, dans son « Army »), il nous permet de saisir par les mots tout ce qui se joue dans l'arrière-plan des photos, et tout ce que l'image se refuse à dire toute seule – comme d'ailleurs, comme rétrospectivement balbutiante dans son horreur, son cynisme ou son incrédulité, la parole elle-même des acteurs concernés. Il faut beaucoup de courage et de talent pour pouvoir ainsi rediriger l'art vers une cible si proche de l'indicible, de la seule sidération face à ce qui nous dépasse tant en apparence, de manière à nous en procurer une intellection supplémentaire ne passant pas nécessairement par le seul intellect.

Lien : https://charybde2.wordpress...
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Plongée dans l'horreur, la brutalité autorisée, ordinaire. Récit sans fard qui oscille entre témoignage et mise en mots des images de meurtres, tortures, exécution qui, dans une insoutenable culpabilité hante nos imaginaires, livrent l'homme à sa barbarie sans limite. Jean-Michel Espitalier alterne des images, des scènes sans autre suite que leur cruauté, et des témoignages de tortionnaires pour faire entendre, dans Tueurs, le pire d'une humanité aux instants où violence et destruction deviennent son unique réalité, son impitoyable justification.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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critiques presse (1)
LeMonde
10 mai 2022
Il s’agit donc d’une lecture essentielle mais éprouvante. On voit à travers les mots et il y a des mots que nous aimerions mieux ne pas regarder, tant le livre, sans recours à aucun pathos ni commentaire moral, en décrivant avec précision les exactions commises, suscite la stupeur et l’effroi.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Image n°26
Un petit lit en fer au milieu d’une salle de classe vide au sol carrelé. La tête du lit est constituée d’un cadre tubulaire en métal. À l’intérieur de l’espace ménagé par le cadre court une frise ajourée, également métallique, qui dessine le motif d’une double spirale reliée au cadre tubulaire par un faisceau symétrique de fines tiges de fer. Le sommier est un treillis galvanisé dont l’armature est une cornière acier. Le treillis est constitué d’une fine maille en lattes d’acier d’environ 10 millimètres. Sur le treillis sont disposées une boîte en bois, une barre dans laquelle est glissé un double étrier en forme de U, une chaîne. A quelque distance du lit, sur le sol, une truelle, une corde, une lanière en cuir, un double crochet, deux fils électriques munis de pinces crocodiles, une tringle, des tenailles, une jarre, un bâton, une pince arrache-clous.
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Image n°1
Un jeune soldat a été pendu par les pieds au canon d’un char. Des soldats l’entourent. Ils crient, l’interpellent, parlent entre eux. Certains rient à gorge déployée. Tous ont l’air très excités. Le soldat pendu par les pieds écarte les bras comme s’il allait pouvoir sauter et retomber sur ses mains. Il se balance. Il s’agite. On dirait qu’il fait la brasse. Un soldat brandit un bâton. Il donne quelques coups de bâton dans le dos du soldat pendu par les pieds. La tourelle du char se met à tourner. Tout le monde rit. Le soldat pendu par les pieds semble se concentrer sur lui-même pour tenter de garder un certain maintien. Son corps se balance comme un quartier de viande. La tourelle tourne encore et le pilote du char se met à pousser le moteur. Aussitôt, les pots d’échappement crachent une épaisse fumée noire. La tourelle tourne maintenant vers l’arrière puis s’immobilise quand le canon se trouve juste au-dessus des pots d’échappement. Et le soldat pendu par les pieds disparaît dans l’épaisse fumée noire qui sort des pots d »échappement.
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Image n°7
Trois hommes sont agenouillés au bord d’un trou qu’ils ont eux-mêmes creusé. Leurs pelles sont plantées dans le sol à proximité. On ne sait si les trois hommes se connaissent. Chacun est coiffé d’une casquette. Ils sont vêtus simplement. L’un d’eux porte une chemise à carreaux. Derrière eux trois soldats s’apprêtent à leur tirer une balle dans la nuque, à bout touchant. Ils sont concentrés. L’un des soldats sourit. Sur le côté et en arrière-plan, un groupe de civils regarde la scène.
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L'action est en Syrie, en Tchétchénie, en ex-Yougoslavie, en Algérie, en Israël, en Afrique du Sud, en Allemagne, en Indonésie, au Mozambique, en Pologne, au Cambodge, en Palestine, au Liberia, au Paraguay, au Vietnam, en Espagne, en Russie, au Rwanda, en Libye, en Chine, en Afghanistan, en Birmanie, au Congo, en Haiti, au Nigeria, au Chili, en Italie, en Irlande du Nord, en France, en Turquie, aux Etats-Unis, en Irak, c'est-à-dire n'importe où. (13)
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L’action est en Syrie, en Tchétchénie, en ex-Yougoslavie, en Algérie, en Israël, en Afrique du Sud, en Allemagne, en Indonésie, au Mozambique, en Pologne, au Cambodge, en Palestine, au Liberia, au Paraguay, au Vietnam, en Espagne, en Russie, au Rwanda, en Libye, en Chine, en Afghanistan, en Birmanie, au Congo, en Haïti, au Nigeria, au Chili, en Italie, en Irlande du Nord, en France, en Turquie, aux États-Unis, en Irak, c’est-à-dire n’importe où.
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Videos de Jean-Michel Espitallier (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean-Michel Espitallier
Cette lecture-performance de Jean-Michel Espitallier, suivie d'une rencontre, a été enregistrée dans le cadre du festival Hors limites à la bibliothèque Robert-Desnos de Montreuil le 15 avril.
Légende familiale romancée ? Fabulation prospective ? Poésie d'investigation, essais pour rater mieux et jeu de (fausses) pistes ? La biographie inventée d'Eugène, paysan des Hautes-Alpes devenu littéralement cow-boy – et vrai aïeul de l'auteur – tient de tout cela. Ainsi, le grand-père de Jean-Michel Espitallier est un jour parti garder des vaches en Californie, puis il en est revenu et a épousé sa grand-mère. C'est tout ce qu'il sait de lui. Alors, le petit-fils imagine, tâtonne, conjecture, s'interroge, ouvre un champ des possibles quelque part entre les pâturages alpins et les plaines du Far West.
Cette parenthèse dans une existence, tue sitôt refermée et oubliée sitôt que tue, Jean-Michel Espitallier l'emplit des grands espaces de la fiction spéculative : de l'Histoire américaine et de son revers, de son propre rêve américain d'enfant décillé par son regard d'adulte, de son humour, de son érudition, de sa tendresse – et de son goût pour la cocasserie, les exercices de style et l'expérimentation formelle !
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