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sur 1265 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Angéline, ses quatre fils, ses trois brus et leurs enfants, toujours menacés d'expulsion parce qu'ils sont gitans, occupent un terrain abandonné. Esther, ancienne infirmière reconvertie en bibliothécaire, a un projet : lire des histoires aux enfants gitans. Tous les mercredis, par tous les temps, Esther arrive au volant de sa voiture, sort des livres, raconte, montre les images aux enfants de plus en plus attentifs au point qu'ils l'attendent avec impatience jusqu'à essayer de prolonger ces instants de lecture. Les mois passent, grâce à la fidélité dont fait montre Esther, si les gitans la nomment encore gadjé c'est gentiment et avec respect.
Alice Ferney, de sa belle écriture, raconte les conditions de vie et le mépris que doivent supporter les gitans. Grâce et dénuement, un beau roman à lire.
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Dans Grâce et Dénuement, Alice Ferney poursuit son exploitation dans la veine introspective, avec beaucoup de talent.

Elle raconte, sans jugement et avec beaucoup de respect, la vie des gens du voyage, des gitans, dans une atmosphère feutrée et contemplative à travers un prisme nouveau, où l'amour des livres est capable de rapprocher des êtres humains qui tout sépare.

Rêveuse des mots et magicienne des songes, Alice Ferney possède cet art subtil qui consiste à nous faire oublier qu'elle emploie des mots, nous prenant en otages de son récit et d'un univers que nous découvrons avidement.

Le dénuement est matériel dans la vie des gitans. Sans moyens de subsistance véritable, sans infrastructures sanitaires, malvenus, indésirables, ils mènent une vie singulière dictée par les traditions, les rituels, une grande fierté, un choix de vie qu'ils acceptent d'endurer dans une inertie pourtant remplie de grâce.

On le sait, les écrivains sont des « voleurs de vie », s'inspirant des confidences et des aveux recueillis. Ils observent, guettent, imaginent la vie des gens qu'ils croisent.

Alice Ferney a une capacité folle à incarner ses personnages avec une aisance presque insolente et elle raconte son histoire de façon poétique, aussi inattendue qu'irrésistible.

Cela permet un juste éclairage et fait naître des réflexions sur certains destins.


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Je crois que c'est la première fois, si ma mémoire est bonne, que je lis une oeuvre qui nous raconte d'une façon très belle la vie de ces gens du voyage... Ferney nous narre, sans censure, et avec un plume délicate et sensible, les conditions de vie très dures des gitans. Elle nous raconte les préjugés, le manque d'éducation, la crasse, les évictions, la mise de côté, la marginalité, le sentiment d'être partout chez soi tout en appartenant à nul part... Elle nous parle aussi d'une communauté tissée serrée, de l'amour, de la filiation, des liens du sang, du sexe, de la fraternité... Au delà de l'histoire, qui se suffi à elle-même, ce roman, toujours actuel, sert, je l'espère, à nous dresser un portrait juste, sensible et vrai de ce peuple, afin de briser un peu le tabou, le mépris et les préjugés... Un très beau texte que je recommande à tous.
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Grâce et Dénuement est le roman qui m'a permis d'entrer dans l'univers de son auteure, Alice Ferney. C'est sans doute celui qui m'a le plus ému à ce jour... Je le trouve magnifique, empli d'humanité et de poésie.
C'est un roman publié il y a quelques années. Sans doute, d'une certaine manière, par les mots et la façon de les dire, est-il actuel, plus que jamais...
Au bord de nos villes, il y a des caravanes parqués parfois de travers dans des endroits qui semblent clos, parfois c'est un terrain vague ou abandonné, des morceaux de ferraille autour d'elles jonchent le sol où courent des enfants aux visages et aux cheveux sales, criant à tue-tête, parfois pieds nus.
Alice Ferney nous invite à visiter un camp de gitans et les conditions difficiles dans lesquelles vivent leurs occupants et en particulier les enfants. Parfois il n'y a ni eau ni électricité.
Esther, ancienne infirmière reconvertie en bibliothécaire est éprise d'une idée merveilleuse, un désir presque incroyable mais que ne devrait pour autant pas surprendre, celui d'initier par elle-même, à la lecture, des enfants de gens du voyage privés de scolarité.
Comment parler de deux mondes qui cohabitent à proximité, dans une incompréhension souvent totale et réciproque ? Ces deux mondes seront-ils un jour réconciliables ?
Alice Ferney parvient avec beaucoup de justesse, de pudeur, de compassion aussi, à nous dépeindre une réalité que l'on peine parfois à accepter de voir. Elle dépeint ce qui est, ce qu'elle voit, ce qui parfois est insurmontable, elle le fait sans jugement.
C'est ainsi qu'elle parvient à entrer dans ce monde fermé, avec ses codes, ses règles, elle apprend à connaître les familles, une famille en particulier où règne une veuve et ses cinq fils, c'est presque un clan en soi, mais surtout il y a des enfants illettrés, non scolarisés, libres si l'on veut, toujours dehors qu'importe les saisons, le temps qu'il fait, il peut pleuvoir, il peut venter, les enfants peuvent courir pieds nus dans la gadoue, ils sont libres c'est vrai... Esther s'en émeut, Esther s'en indigne, l'indignation est souvent un premier geste, un premier geste vers une autre liberté, celle d'apprendre.
Quand Esther franchit les portes de ce camp de gitans, elle n'a pas encore franchi toutes les frontières pour parvenir jusqu'au coeur de ses enfants. Il y a les rebuffades, les moqueries, la méfiance d'un monde qui lui est tout d'abord hostile... Mais c'est une hostilité où les enfants sont les premières victimes, parce que les obstacles sont multiples pour les amener à être scolarisés.
Mais à force de ténacité, Esther poursuit obstinément son désir. L'apprentissage est un chemin, il suffit de poser un mot, puis deux, puis trois, les autres viennent après. Des pas se déroulent, ce sont des histoires qu'on raconte à des enfants ahuris en se promenant sur les pages d'un livre, des rêves qu'on imagine, un doigt se promène attentif, court sur une phrase pour rattraper une image, un paysage, un oiseau, rejoindre le bord d'un monde insoupçonné.
J'ai été touché par le parcours d'Esther passant d'infirmière à bibliothécaire, continuant d'une autre manière à apporter le soin, seul l'outil change... Ici c'est le livre...
C'est aussi un livre peuplé de belles voix intérieures, celles qu'on n'entend si peu souvent, Alice Ferney nous invite à tendre nos visages vers ces voix qu'elle jette dans son écriture poétique comme des constellations. Elle nous invite à lever les yeux, faire ce pas de côté nécessaire, le temps d'un livre qu'il ne faut surtout pas refermer comme une porte...
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Les gitans... Un peuple en marche et en marge.
Une communauté dont on nous a appris à nous méfier.
Je me souviens très bien que ma grand-mère nous mettait en garde contre les enlèvements d'enfants !
Et pourtant les gens du voyage intriguent et fascinent même, par cette capacité qu'ils ont à vivre en autarcie.
L'importance qu'ils attachent à leur "tribu" n'a d'égal que le mépris qu'ils ont des lois et leur obstination à les contourner.

C'est dans ce milieu qu'Alice Ferney nous invite à suivre Esther, jeune bibliothécaire touchée par la précarité dans laquelle évoluent des enfants pourtant pleins de vie et d'avenir.
Touchée aussi par des femmes dont la destinée est pieds et poings liés à leurs maris violents, méprisants, oisifs, mais aussi passionnés et constamment bafoués dans leur fierté d'homme.
Des femmes dont le ventre est en constante effervescence, toujours en recherche de maternité parce que les enfants sont leur seule raison de vivre.
Touchée enfin par Angelina, l'aïeule, mère dans ses tripes, mère à 100% de cinq fils tous différents les uns des autres.
Elle les connait par coeur, ses fils.
Elle sait leurs faiblesses, leurs coups de gueule et leurs coups de poing, leur lâcheté.
Mais l'esprit de clan est le plus fort, on ne renie pas sa chair et son sang !

Esther a décidé de faire la lecture aux enfants.
Alors, chaque semaine, elle gare sa voiture en bordure du camp et elle laisse venir à elle ces "laissés pour compte", ceux qu'on ignore, méprise,rejette.
Et ses lectures sont comme une étincelle, un déclic, un feu qui couve, une semence de laquelle germera le désir de la connaissance et la conscience d'autre chose.

Pour nous raconter cette tranche de vie, Alice Ferney calque sa plume sur le langage simple de ce peuple analphabète en utilisant des phrases courtes, ponctuées de nombreuses propositions incidentes.
Mais elle sait aussi, comme à son habitude, communiquer une émotion, donner force à un sentiment, le faire vibrer intensément dans notre âme de lecteur.
Après L'élégance des veuves, elle a su à nouveau me séduire avec cette très belle oeuvre !
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Quel beau titre! Reflet subtil du livre...

Grâce gitane, feu-follet insoumis, danse des rêves dans les flammes, envol libre et fier.

Dénuement gitan, fil des jours précaires, pauvreté sordide, illettrisme.

Nous découvrons Angéline,mère louve couvant de son regard jaune ses cinq fils chéris, leurs femmes et leurs enfants.Une famille gitane toujours en attente d'expulsion, survivant dans les décombres d'un terrain vague.

Seul contact avec l'autre monde, celui des gadjės, Esther, une bibliothécaire venue, tenace et douce, lire des histoires aux enfants.

Un lien ténu mais puissant va s'instaurer entre elle et eux, un lien menant vers le désir d'apprendre, d'accéder à la culture...

Les mots d'Esther , source d'échange, de partage, de tolérance.Les mots de l'auteure, simples et essentiels, poétiques.

J'ai aimé la façon dont Alice Ferney nous parle de cette communauté gitane, sans prendre parti, en les présentant comme ils sont :" Il y avait en eux une inertie magnifique, une façon absolue d'accepter le sort et la vie comme ils viennent. Ils étaient sublimes et désespérants".

J'ai aimé la sauvage force de vie d'Angéline, très tôt vieillie pourtant, la générosité et l'attention d'Esther.

Une histoire qui touche au coeur. Vraiment.

" Pourquoi tu fais ça?, dit Angéline. Je crois que la vie a besoin des livres, dit Esther, je crois que la vie ne suffit pas". Comme on l'approuve!
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Formidable saga qui nous immerge dans l'univers d'une famille semi sédentarisée de la banlieue parisienne à travers l'action d'une bibliothécaire qui va tenter d'approcher cette famille en contant des histoires aux enfants du conte.
Cette appréhension d'une culture gitane qu'on connait mal à travers la passion pour la littérature est une idée épatante, parfaitement exploitée par l'auteur qui signe ici son meilleur livre avec la conversation amoureuse, sur un tout autre sujet.. Une communauté parfaitement décrite et un roman qui exalte les bienfaits de la lecture, voilà deux arguments expliquant l'immense réusssite du livre paru et lu il y a maintenant plus de 15 années..
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Angeline, la vieille gitane, a inculqué la fierté à ses quatre fils. D'une pauvreté extrême, ils ne quémanderont pas et mettront au centre de leurs préoccupations : leurs familles, celles qui ont fondé pour trois d'entre eux, et celle qu'ils forment avec leur mère, qu'ils ne sont pas prêts de quitter.

Dans ce huit-clos surgit un élément extérieur : Esther, la bibliothécaire qui se propose de lire des livres aux enfants. Comme toute personne non gitane, elle est une "gadgé" pour eux. Très vite, elle apparaît cependant comme un souffle d'air frais dans leur tourmente, même pour Angeline, qui s'adresse à elle en parlant de "ma fille".

Le thème principal est l'apprentissage de la lecture, l'ouverture aux autres, mais l'auteure interroge aussi sur l'enfermement... ou la ressource, que constitue la famille, suivant les situations et les personnes.

Tout en se plongeant dans la vie des gitans, ce livre questionne sur des ressentis universels, sur les thèmes de la culture et la famille, deux univers qui ouvrent des portes et laissent aussi certains de côté.

Magistral.
Lien : http://partagerlecture.blogs..
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Plus parabole qu'enquête sociologique, ce roman sur le rôle des livres est assez subtil pour poser plus de questions qu'il n'apporte de réponses.
Je ne suis d'ailleurs pas sûre que le livre en soit le sujet principal. L'objet n'a pas une grande puissance évocatrice. Volé pour de rire par les enfants, manié avec plus ou moins de distance par les adultes, il ne s'impose pas comme puissance symbolique. Lire est une nécessité pour s'insérer dans le monde, l'école une discipline laborieuse et humiliante: non, la chose imprimée ne fait guère rêver.
Mais la lecture, la parole lue, les mots oralisés, le dit du conteur qui captive, voilà sans doute tout le bonheur des histoires : celles qu'on écoute, qu'on interrompt, qu'on questionne -n'est-ce pas Bettelheim qui disait qu'une histoire ne vaut que si l'enfant l'a entendue sur les genoux de ses parents, que si elle s'est faite sensuelle avant que d'être sensible.
L'écriture permet de se défendre et de comprendre, elle a à voir avec la froide rationalité. La voix porte les contes et les mythes, elle unifie, rassemble et donne du sens. Elle magnifie les gitans et fait grandir les enfants.
Pourquoi Esther vient-elle tous les mercredis au milieu des caravanes? Par désir de justice sociale? Parce que ses propres enfants sont grands ou trop occupés par les écrans, qu'elle n'aime rien tant qu'être celle qui la première ensemence un cerveau vierge et sans références? Sans doute d'abord parce qu'elle est juive et qu'elle partage avec les gitans le discutable avantage d'être de la race des proscrits et des survivants.
Esther l'étoile croit en son rôle de guide. Mais guide vers quoi? Vers le conformisme ? Vers l'acceptation ? Au moment où la famille est expulsée, elle leur apprend la fable du savetier et du financier. Moralité: être riche, quel sacerdoce. Restez pauvre, vous y gagnez la liberté. Quand la littérature fait bon ménage avec l'idéologie la plus rance. Parce que le livre, ça peut être ça aussi.
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Nous voilà plongés dans le quotidien d'une famille hors du commun: une famille très soudée, dans laquelle vivent la grand-mère, ses cinq fils, ses quatre brus, et tous les petits enfants. Nous plongeons dans le dénuement de cette communauté de gitans qui vit dans des conditions d'extrême pauvreté. Nous suivons leur quotidien et leur découverte des livres grâce à Esther.

L'auteur nous familiarise avec cet univers d'une manière délicate et le temps de quelques mois nous suivons les événements douloureux et joyeux de cette famille. C'est un monde qui m'est complètement étranger, et j'ai assisté à ce quotidien en ayant le coeur très souvent serré malgré les moments heureux. Une sorte de résignation voulue assez glaçante.

Un beau roman pourtant, dans lequel la lecture partagée est une sorte d'île au milieu de l'océan.
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