En lisant les critiques déjà publiées, j'ai constaté que l'idée d'un roman ennuyeux ressortait souvent. Personnellement, je n'ai pas ressenti d'ennui en parcourant les pages de
L'éducation sentimentale. Bien sûr, certains aspects du roman, notamment les préoccupations politiques de ses personnages, échappent au lecteur moderne et ont sans doute perdu de leur intérêt aujourd'hui, mais l'ensemble de l'intrigue n'a rien de désagréable et aucun passage ne m'a véritablement semblé tirer en longueur.
L'histoire développe plusieurs axes qui s'entrecroisent régulièrement, imitant ainsi la vie du personnage principal, qui papillonne d'un objectif à l'autre sans jamais en atteindre aucun. Il y a la trajectoire amoureuse, annoncée par le titre, d'un Frédéric impatient qui, courant plusieurs lièvres à la fois, finit évidemment par se retrouver seul, sans avoir jamais connu une véritable relation. Il y a les jeunes gens qui gravitent autour de lui et qui se retrouvent invariablement sur sa route chaque fois qu'il sort de chez lui (c'est d'ailleurs l'un des points qui m'a le plus dérangé : pour finir, il semblait être impossible de traverser Paris sans les croiser tous). Leurs trajectoires traversent le roman sans qu'ils n'y entrent jamais de plain-pied. Il y a également la quête de fortune et de reconnaissance de Frédéric, aboutissant aux mêmes déboires que sa vie amoureuse car manquant tout autant de persévérance et de suite dans les idées. Enfin, il y a la toile de fond, la vie parisienne des années 1840. Elle ne manque pas de charme non plus.
Finalement, la vie de Frédéric est résumée dès son arrivée à Paris. Après avoir commencé ses études, il les abandonne vite, pensant avoir mieux à faire. Cette dynamique revient ensuite sans cesse, Frédéric poursuivant toujours ce qui est vain en délaissant ce qui aurait pu être fécond. On est plusieurs fois consterné par tant d'acharnement à cheminer vers le malheur., et à chaque étape de son parcours, on aimerait lui crier qu'il fait un mauvais choix. D'ailleurs, Frédéric finit par s'en rendre compte lui-même, mais évidemment trop tard.
Si l'on ajoute à ces éléments l'écriture remarquable de
Flaubert et sa capacité à multiplier les descriptions incisives de la société de son époque,
L'éducation sentimentale est un classique que l'on peut recommander sans crainte.