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Terje Sinding (Traducteur)
EAN : 9782842422325
Éd. Circé (28/09/2007)
3.86/5   11 notes
Résumé :

Deux amis d'enfance se retrouvent après une longue séparation. L'un - le narrateur - est resté au village, n'a pas fait d'études, habite toujours chez sa mère et vivote en jouant de la guitare dans les bals du samedi soir. L'autre - Knut - est parti en ville, a fondé une famille et est devenu professeur de musique. Il revient maintenant pour les vacances avec sa femme et ses enfants. Pendant trois jours d'été un dra... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Partie dans La remise à bateaux, un hangar de pêcheurs désaffecté au creux d'un fjord norvégien.
La remise à bateaux, un endroit pour rêver, un endroit gorgé de secrets bien gardés.
J'ai été bien inspirée de suivre le chemin qui m'y a mené. Motivée par la curiosité de rencontrer un univers dont je ne connaissais rien.
Et là, ça fait tout drôle ! surtout quand on ne sait pas où on met les pieds, mais bon, j'aime bien être étonnée , bousculée, aussi je me suis laisser dérivée sur les mots de Jon Fosse.
Ah Jon Fosse, pardonnez-moi, mais je ne connaissais pas et, il est sûr que je ne vais pas l'oublier de si tôt ainsi que son écriture si particulière.

La remise à bateaux, lieu où tout commence : refuge d'une amitié, abri des premiers et derniers émois au milieu des coquillages, de vieilles seines et, le ressac des vagues tout proche libérant le son d' une musique entrechoqué.
La remise à bateau où l'histoire d'une inquiétude, d'une solitude, d'un océan de sentiments ou d'une marée de pulsions.
L'inquiétude ressenti par le narrateur à chaque fois qu'il est bouleversé.

« Je ne sors plus, une inquiétude m'a envahi et je ne sors pas. C'est cet été que l'inquiétude m'a envahi. J'ai revu Knut, ça faisait bien dix ans que je ne l'avais pas vu. Knut et moi on était toujours ensemble. Une inquiétude m'a envahi. Je ne sais pas ce que c'est, mais l'inquiétude me fait mal dans le bras gauche, dans les doigts. Je ne sors plus. Je ne sais pas pourquoi, mais ça fait plusieurs mois que je n'ai pas mis les pieds dehors. Il n'y a plus que cette inquiétude. C'est pour ça que j'ai décidé d'écrire, je vais écrire un roman. »

Les retrouvailles avec Knut, son ami d'enfance, venu en famille passé les vacances et la rencontre de sa femme, lors d'un été, plongent le narrateur dans un énorme chaos émotionnel : un élément perturbateur va provoquer un séisme, tel une lame de fonds, et faire remonter à la surface des histoires passées toujours vives. Dès lors, l'écriture permets au narrateur de trouver l'apaisement, un succédané pour tenir au loin la douleur.
Seuls les protagonistes du récit ayant eu un lien très proche avec le narrateur sont nommés Knut son ami d'enfance, Torkjell, l'ami musicien avec qui il se produit, et bien sûr le vieux Svein, le propriétaire de la remise à bateaux à présent décédé.

J'ai particulièrement apprécié l'écriture et le style de Jon Fosse qui dans une langue simple permet de nous projeter dans le psychisme du narrateur, et partager son odyssée intime. Une écriture dont la limpidité, l'authenticité, la proximité avec le protagoniste principal m'a rappelé celle de Tarjei Vesaas avec Mattis dit la houpette dans Les oiseaux.

Les nombreuses répétitions et l' utilisation d'un jeu de mots restreint permettent au lecteur de vivre de l'intérieur les tempêtes du narrateur. La profondeur psychologique est servie par la puissance des éléments, la présence du fjord et celle de l'eau accompagnent les pas du narrateur dans son cheminement intérieur et physique.
Les trois parties du récit, elles, apportent des variations sur les faits du récit : la première où le narrateur exprime ses ressentis, la seconde où il essaie de saisir ceux de son ami Knut et enfin la dernière qui amène le dénouement.

Tel un beau poisson prisonnier d'une seine de mer, le narrateur, supposé s' appelé Bard, se débat pour échapper aux mailles du filet, et le lecteur, accroché, est partie prenante de ce mouvement circulaire si bien rendu par le rythme de l'écriture de Jon Fosse.
Une litanie des émotions entrecoupée par le clapotis des vagues contre des barques amarrées. Des mantras obsessionnels sans cesse ressassés par le narrateur, barde d'une culture qu'il ne peut oublier dont il est en quelque sorte le dépositaire lorsqu'il joue dans les bals populaires, amènent peu à peu une tension dramatique.

Le narrateur, Bard le barde (oui, je reconnais c'est un peu facile), oscille entre monde réel et monde fantasmé, monde passé et présent , monde intérieur et extérieur. La remise à bateaux est l'espace à la croisée de ces mondes. Bard arrivera-t-il a surmonté sa crise ? survivra-t-il à ce triangle amoureux?

La remise à bateaux de Jon Fosse, traduit du nynorsk ou néonorvergien par Terje Sinding (également traducteur d'Ibsen) est l'une des nombreuses oeuvres de l'auteur surtout connu comme dramaturge. Si comme moi vous ne le connaissiez pas je vous invite à le faire.

Une lecture surprenante et ravie de cette découverte.

Une lecture que l'on a envie d'écouter pour mieux s'en imprégner aussi rendez-vous sur Franceculture où Olivier Martinaud en fait la lecture d'un extrait à voix haute :
https://www.franceculture.fr/emissions/je-deballe-ma-bibliotheque/olivier-martinaud-nous-lit-35
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« Une inquiétude m'a envahi.Je ne sors plus.C'est cet été que l'inquiétude m'a envahi. C'est pour ça que j'écris. »
Bard, le narrateur, rencontre Knut, son ami d'enfance, marié et deux enfants, devenu professeur de musique. Il est venu passer l'été avec sa famille, dans le petit village, un trou perdu.
Lui , il n'est rien devenu, vit toujours chez sa mère, et gagne un peu sa vie en jouant occasionnellement de la guitare dans des bals.
Revoir Knut a déclenché son inquiétude, il écrit dans son grenier pour l'éloigner. Ses. souvenirs d'enfance remontent à la surface, la remise à bateau de Svein le fermier, leur endroit secret, leur groupe de rock, et celui d'une........Cependant cette rencontre met surtout en évidence la vacuité de son existence. Mais la vie de Knut est-elle vraiment à envier ?
Il navigue entre passé et présent, où la troisième figure est la femme de Knut, femme insatisfaite vraisemblablement, aux intentions troubles et jouant un jeu dangereux et ambigu avec lui.
Son monologue répétitif est déroutant. Est-il un simple d'esprit ou seulement une âme angoissée ? Dans les méandres de son esprit tourmenté, sujet à la peur et à l'angoisse, il vogue entre fiction et réalité. Est-ce-qu'il rêve, imagine ou raconte ce qu'il a vécu ? Ces faits et pensées noyés dans les brumes de ses états d'âme rappellent beaucoup la plume de Tarjei Vesaas, mais aussi du grand auteur suédois Göran Tunström, un de mes auteurs de prédilection.
Ces pays du nord, où l'hiver passe dans l'obscurité, et l'été dans la lumière du jour, où la nature et le climat sont sauvages, l'homme n'est pas des plus extravertis. C'est pourquoi cette littérature d'introspection est leur marque.

Aimant beaucoup la prose de Thomas Bernhard, j'ai d'emblée été séduite par celle de Jon Fosse, dramaturge norvégien née en 1959. Les répétitions comme chez Bernhard qui donnent un rythme, une musicalité, peuvent dérouter au premier abord mais sont en faites la source de vitalité de ce récit douloureux. C'est beau, magique,......merci mesrives.
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Cher Jon,
bien que ton narrateur écrive, lui aussi, j'espère pour toi que ce n'est pas ta vie qu'il raconte.
Probablement pas, d'ailleurs : toi, tu viens d'obtenir le prix Nobel de littérature.
Lui, il a 30 ans et vit avec sa mère, sans travail et sans amour. Ses seules activités sont les bals du samedi où il joue de la guitare, et la pêche sur le fjord.
Tu lui as fait une vie assez moisie, il faut bien l'avouer.
Aussi, lorsqu'il revoit par hasard son ami d'enfance, Knut, prof de musique, accompagné de sa femme et de deux petites filles, ça lui donne à penser, à ton narrateur.
Ça lui donne de l'inquiétude.
"et tout le temps je sens l'inquiétude, et j'entends les vagues, elles ne frappent pas comme elles frappent d'habitude, mais d'une manière tout à fait particulière, exactement comme elles frappaient autrefois, il y a longtemps, sauf que maintenant je les entends à travers une inquiétude"
Mais Knut ne nourrit-il aucune inquiétude, lui ?
Eh si, bien sûr.
Parce que tous les deux, finalement, illustrent chacun à leur façon l'art de se pourrir la vie tout seul.
Il aurait pu rencontrer une fille, ton narrateur, mais il n'a pas osé leur parler, même pas les regarder. Pire, c'est Knut qui partait avec, à la fin des concerts.
Et Knut qui pourrait savourer le bonheur familial, regarde maintenant sa femme avec méfiance : ne lorgne-t-elle pas sur un autre homme ?
Tout, absolument tout, se passe dans leur tête : amertume, rancune, jalousie, culpabilité, les deux hommes se montent le bourrichon à partir de rien, d'épisodes insignifiants mais jamais oubliés, jamais digérés…
… et le tout couvert de poussière et de moisissure, comme ces rebuts à jamais entassés dans la remise à bateaux.
Tu leur as donné une existence terrible à tes personnages, Jon.
Mais tu écris tellement bien, tellement bien, qu'on te pardonne tout.

Traduction parfaite de Terje Sinding.
Challenge Nobel
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Je suis envoûtée...
L'écriture de Jon Fosse me fait le même effet que lorsque j'écoute de la musique répétitive, j'adore.
C'est effectivement dans la répétition qu'il donne le rythme de ce roman dont le titre évocateur "La remise à bateaux" rappelle que l'auteur est norvégien.

Le narrateur habite avec sa mère dans une maison blanche vers la baie au fond du fjord où des barques sont amarrées. Il a une trentaine d'années et vit de petits boulots et de bals où il joue de la guitare, mais le plus souvent oisif.
Un jour d'été il rencontre sur la route son ami d'enfance Knut revenu passer ses vacances en famille, avec sa femme et ses deux filles.
Enfants et adolescents ils étaient très proches, se retrouvaient le soir dans une remise à bateaux abandonnée où ils ont eu l'idée de monter un groupe de rock.
Aujourd'hui Knut est professeur de musique et leur situation sociale et familiale semble les opposer.
Quand le narrateur croise la femme de Knut à la pêche, elle le drague ouvertement et le malaise s'installe dans le trio. L'inquiétude l'envahit et sa seule échappatoire est de s'enfermer pour écrire un roman.

On peut avoir l'impression qu'il ne se passe pas grand-chose et pourtant la tension est palpable.
Avec ses phrases ouvertes qui laissent le lecteur suspendu et ses mots répétés je trouve que le lauréat du prix Nobel de littérature 2023 a une force d'évocation incroyable.


Challenge XXème siècle 2023
Challenge Gourmand 2023-2024
Challenge ABC 2023-2024
Challenge Nobel illimité
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C'est un style curieux que celui de Jon Fosse. Fait de phrases courtes. Sujet - verbe - complément. Sujet - verbe - complément. Sujet - verbe - complément. Fait aussi - vous l'avez compris - de (trop) nombreuses répétitions. le mot INQUIÉTUDE répété 21 fois dans les deux premières pages. le verbe ÉCRIRE et ses formes conjuguées, 15 fois. Et ça continue les pages suivantes, mais j'ai arrêté de compter. Ça vrille le cerveau cette accumulation des mêmes mots à chaque phrase, comme une ritournelle. Ça essouffle, ces phrases courtes. Et pour finir, ce style est celui qu'on trouve dans la littérature pour adolescents. Ça nous rajeunit, il est vrai.
.
Donc Bärd - le narrateur - est INQUIET. Il va ÉCRIRE un roman pour faire passer son INQUIÉTUDE. Il a trente ans passés. Il grattait de la guitare dans des bals, mais c'est fini. Il n'a plus de travail. Il vit chez sa mère. Il a revu Knut, son ami d'enfance, avec sa femme et ses deux filles, à côté de la remise à bateaux. Il a pêché des poissons sur le fjord avec la femme de Knut sous les yeux de son mari, qui est resté planté sur la rive à les regarder. Et il s'est même promené sur une île au milieu du fjord, avec elle, toujours sous les yeux de Knut.
.
La lecture est pénible, on a l'impression d'être un attardé mental à qui on doit répéter cent fois la même chose pour qu'il comprenne et retienne ce qu'on vient de lui dire. On a aussi l'impression d'entendre un disque rayé, mais il n'y a personne pour déplacer le saphir sur le sillon suivant. On voudrait que l'auteur cesse de tourner en rond, abrège et avance plus vite dans la narration. Je me rappelle les exercices de contraction de texte au lycée. Est-ce que l'IA peut venir à mon secours et me contracter ce texte? A moins que l'auteur veuille nous faire comprendre que Bärd - le narrateur - traverse un épisode de troubles psychotiques. Et qu'on doit, nous lecteurs, en subir les conséquences!
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J'ai fait un effort important pour ne pas arrêter ma lecture à la page 30. Dans l'attente de je ne sais quoi. Une aventure amoureuse? un suicide? ou un meurtre? À 10 pages de la fin, Knut se dit : "si seulement il pouvait se passer quelque chose". Je reprends espoir. Quand je pense que Jon Fosse vient de recevoir le Prix Nobel de littérature! Mauriac, Hemingway, Camus, Sartre, Garcia Marquèz, Lessing, Le Clézio, Modiano, tous ces Nobel là, je les ai lus et aimés. Mais pas Jon Fosse. Non, pas lui. Il a écrit un livre dont la lecture rend fou!
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
C'est ainsi que ça a commencé, dans l'obscurité, sous la pluie, sur une route qui longeait la grève, dans une vieille remise à bateaux, il y avait les vagues qui ne cessaient de frapper et la peau qui ne cessait de se dilater. Son baiser était une marque sur ma peau, il a pénétré dans mon corps pour y rester.
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.........comme la remise à bateaux, ce qui était si important, toute une vie en quelque sorte, ce n’est plus grand-chose maintenant, c’est toujours comme ça , à la fin il n’en reste plus rien, ça disparaît , tout change, et ce qui existait autrefois devient quelque chose d’entierement différent, ça devient tout petit, rien du tout, c’est comme ça on n’y peut rien, c’est comme ça. p.110
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et tout le temps je sens l’inquiétude, et j’entends les vagues, elles ne frappent pas comme elles frappent d’habitude, mais d’une manière tout à fait particulière, exactement comme elles frappaient autrefois, il y a longtemps, sauf que maintenant je les entends à travers une inquiétude
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Je ne sors plus, une inquiétude m'a envahi et je ne sors pas. C'est cet été que l'inquiétude m'a envahi. J'ai revu Knut ça faisait bien dix ans que je ne l'avais vu. Knut et moi on était toujours ensemble. Une inquiétude m'a envahi. Je ne sais pas ce que c'est, mais l'inquiétude me fait mal dans le bras gauche, dans les doigts. Je ne sors plus. Je ne sais pas pourquoi, mais ça fait plusieurs mois que je n'ai pas mis les pieds dehors. Il n'y a plus que cette inquiétude. C'est pour ça que j'ai décidé d'écrire, je vais écrire un roman. Je suis obligé de faire quelque chose. Je ne supporte plus cette inquiétude. Peut-être qu'écrire, ça m'aidera. C'est cet été que l'inquiétude m'a envahi. J'ai revu Knut. Il s'était marié, il avait deux filles. Quand on était enfants on était toujours ensemble, Knut et moi. Et puis Knut s'en est allé. J'ai crié pour l'appeler, mais Knut s'est contenté de s'en aller. Une inquiétude m'a envahi. (Page 9)
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C'est cet été que j'ai revu Knut, il s'était marié, il avait deux filles. Il y a cette inquiétude, je ne sais pas, mais il y a cette inquiétude. J'ai crié pour appeler Knut, mais il n'a pas répondu, il s'est contenté de s'en aller. Depuis, je ne l'ai pas vu. Il faut éloigner l'inquiétude, c'est pour ça que j'écris. C'est cet été que l'inquiétude m'a envahi. Je ne sors plus. Je n'ai pas touché à ma guitare depuis que l'inquiétude m'a envahi. (page 33)
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L'écrivain norvégien Jon Fosse lauréat du prix Nobel de Littérature 2023
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