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EAN : 9782756419442
192 pages
Pygmalion-Gérard Watelet (22/03/2017)
4.42/5   36 notes
Résumé :
" Je vois Gabrielle, ma fille, m'observer de son regard indéchiffrable. Pourquoi ce livre ? Après tout, c'est notre passé, sa vie, mes sentiments. Il concerne qu'elle et moi, pourquoi l'exposer aux yeux de tous ? Parce que nous en avons besoin. Parce que nous devons guérir de cet amour contrarié et nous retrouver.
Je n'écris pas un livre sur l'autisme, encore moins un guide ou un mode d'emploi, j'offre les souvenirs que je nous ai volés. L'histoire banale d'u... >Voir plus
Que lire après Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autresVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
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Quand « Asperger mon amour » devient « Gillio en quête d'amour filial »
« Tout ce que je sais avec certitude, c'est que sa souffrance est croissante, et qu'avec son mal-être se manifestant avec toujours plus de violence, ce sont des années de souvenirs enfouis qui me submergent, de peurs refoulées, de frustrations tues pendant trop longtemps, de témoignages d'amour que nous n'avons pu échanger, de choses qui n'ont jamais été et ne seront jamais. » p.11

Aujourd'hui, je n'ai pas envie d'écrire une chronique comme je le ferai en temps normal. J'ai plutôt envie de t'écrire, Maxime, de te dire ce qui m'a plu (alors là il y a matière à réflexions, la chronique risque d'être longue…), ce qui m'a déplu (pas grand chose en fait, punaise c'était trop court !), les émotions engendrées avec ces mots arrachés à ton coeur de père, bref te dire ce que j'ai pensé de ton « récit ».

On l'a bien compris sous ta grande taille et ton humour caustique se cache un grand coeur, et plus encore un père qui aime profondément sa fille, un père en quête éternelle des signes de l'amour de cette petite fille insouciante devenue adolescente… de toi, je ne connaissais qu'Orcus Morigan, une de tes identités (face ?) cachées avec laquelle tu as écrit Manhattan Carnage, on y retrouvait indéniablement ton humour noir, ton cynisme et ton côté loufoque et un peu fou. Il faut dire aussi que j'entends beaucoup parler de toi, entre Louve des Victimes de Louve et un K à part, ces deux là ne cessent de nous casser les oreilles avec leur Gillio par ci, leur Gillio par là. Je leur fais totalement confiance pour penser qu'ils ont probablement raison de le faire, c'est d'ailleurs pour ça que « Les disparus de l'A16 » a rejoint ma PAL. Bref, Maxime, tu sembles être un auteur issu du roman noir et qui pourtant se révèle peu à peu dans bien d'autres genres, je pense, entre autre et avec un certain étonnement à tes collaborations avec Sophie Jomain, ce n'est certainement pas là que je t'aurai attendu… Alors forcément, avec ce titre-ci, je t'y attendais encore moins, vraiment, je ne connaissais pas cette parcelle d'intimité que tu as généreusement partagé pour notre plus grand plaisir.
« Ce qui nous fait le plus mal, les moments où notre coeur se serre à nous étouffer, c'est quand tu nous demandes quand tu ne sera plus autiste. » p.15

Enfin, revenons à nos moutons (aux tiens du moins…). Dans « Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres », tu te livres, un véritable récit autobiographique fait d'expériences, de ressentis, d'émotions personnels. Un ensemble de mots écrits à la volée, à l'instinct, sur une page Facebook pour tenter de communiquer davantage avec cette petite fille, Gabrielle qui, « coincée » dans sa bulle d'autiste, s'est érigée une armure inviolable qui semble pourtant disparaître, s'atténuer du moins, sur les réseaux sociaux. Tu doutes de ce procédé semble t-il un peu impudique, oui ça l'est évidemment, mais pourquoi douter de quelque chose qui peut te permettre de dire tout ce que tu souhaites à cette petite fille devenue grande et presque inaccessible ? Pourquoi te jetterions – nous la pierre d'avoir voulu par tous les moyens l'atteindre pour lui dire les choses avec honnêteté, humour et parfois même avec crudité et franc parler ?
« En ouvrant à tous le livre de notre vie, j'avais conscience – j'espérais – que ma fille trouverait ces billets, les lirait et qu'elle comprendrait à quel point sa soeur, son frère et elle sont tout pour moi. Ma base, mon essence, mes fondations. » p.12

Tu nous offres surtout un témoignage poignant, déstabilisant, sensible, drôle, et très humain surtout, mais jamais larmoyant, jamais tu ne sombres dans le pathos, jamais tu ne te plains, jamais tu n'enjolives la chose, jamais tu ne joues la carte du drame, bien au contraire, c'est généreux, et ça sonne simple et juste suffisamment pour résonner en nous de manière subtile et délicate. Une bien belle façon de lui transmettre ton amour et de nous informer avec tendresse sur ce handicap si peu connu. Même si on devine bien sûr que c'est loin d'être simple de vivre chaque jour auprès d'une autiste, ça on l'a bien compris, un véritable défi quotidien, épuisant, démoralisant, difficile, parfois empreint de solitude.
« Oui tu es autiste ET allergique. Tu ne serais pas un peu chiante, des fois ? » p.14

Normalité, différence, évidemment que ton autiste ne rentre pas dans le moule, c'est « chiant » comme tu dis, je comprends. En même temps, n'est-ce pas la société qui n'est pas adaptée à eux plutôt qu'eux adaptés à elle. La question se pose. Même s'il y a des réactions inconcevables, des colères ingérables, des phobies indomptables (punaise, le coup des ventilateurs ou de la Polo blanche, je n'y aurais jamais pensé…), ça fait beaucoup de choses « chiantes ». Tu parles avec une certaine rancoeur des déconvenues face un système loin d'être préparé à l'accueil de cette pathologie psychologique (?) qui compte quand même 650000 cas en France, tu es en droit d'attendre de l'aide, merde depuis quand être différent signifie être parqué, cloisonné, pestiféré ? Pire encore quand tu nous racontes une expérience d'une ancienne élève face à un professionnel :
« Une ancienne élève à moi a eu un garçon, diagnostiqué autiste. le pédopsychiatre qu'ils ont consulté à eu l'obscénité de lui dire que si son fils était handicapé, c'était certainement parce qu'elle était française, alors que le père de l'enfant était d'origine marocaine. Cherchez l'erreur. » p.38

Quand la connerie humaine (désolée pour la grossièreté) vient vous (et nous) achever, comment oser avoir (penser) de tels propos. J'imagine la colère, le sang qui bouillonne sous la peau, les envies de meurtre qui font surface, j'imagine que ça n'a pas dû te surprendre tant que ça et peut-être même as-tu eu des expériences similaires… C'est navrant et cela m'a littéralement estomaqué ! Il ne faut pas s'étonner que tu en deviennes cynique (et qu'est ce que ça doit fait du bien de rabattre le caquet à ces gourdes et gourdots qui ont souvent les bons mots pour plaire).
« (…) une convive me demande si j'ai des enfants. Quand je lui réponds que j'en ai trois, elle me taquine :
– C'est bien pour les impôts ça fait quatre parts.
– Non, avec l'handicapé ça fait quatre parts et demie.
J'ai vu avec délectation son sourire se figer, et n'ai rien fait pour dissiper sa gêne. » p.94

Tu parles aussi des bonnes choses, parce qu'il y en a évidemment ! Quand ta fille a une attitude qui rentre dans une certaine « normalité », tout est plus exacerbé, tes sentiments, tes émotions et on le ressent assez vivement, on se le prend en pleine figure d'ailleurs, un grand gaillard comme toi qui paraît être pince-sans-rire, à priori, ému aux larmes pour un sourire, un « tu me manques », c'est beau, très beau d'assumer ce trop-plein d'émotions, cet excès lacrymal qui vient titiller tes yeux, ce coeur qui pulse plus que de raison.
« Quand une étincelle somme toute anodine fait exploser la cocotte-minute que je peux être, crois-moi je suis loin d'être le meilleur papa du monde. » p.99

Tu es un père et c'est ça qui compte, un père n'est pas que compatissant, un père n'est pas que sourire, un père c'est un être humain qui s'exprime, l'humanité n'est jamais plus belle que dans ces émotions exacerbées, l'amour, la colère, évidemment que tu n'es pas le meilleur papa du monde, personne ne l'est sauf peut-être pour son propre enfant… Quand le paon parade de fierté d'avoir pu être le papa de sa fille, un protecteur, l'être le plus fort de la Terre entière, ce n'en est que plus touchant. C'est bien que tu précises « un peu » car point de honte à avoir, je comprends cette réaction, elle est humaine, elle est saine, elle est normale.
« J'ai un peu honte dix ans après, mais ce souvenir n'est pas que douloureux. Si mon coeur de père saigne toujours devant tes larmes et ta solitude, à ce moment précis, j'ai été ton sauveur, ton chevalier, ton papa pourfendeur de cauchemars et de vilains monstre au volant de polos blanches. J'ai botté les fesses à tes angoisses, et c'est contre moi et moi seul que tu t'es réfugiée, que tu t'es abandonnée, mon petit bout de gonzesse potelée, ma petite princesse péteuse. » p.26

Quant à ton style Maxime, c'est un vrai plaisir à la lecture. Tu écris tellement bien les choses, que j'ai customisé mon livre de post-it colorés, mon roman n'en est plus vraiment un, on dirait presque un sapin de Noël ! Je voulais relever ces phrases voire ces paragraphes qui me parlaient et agrémenter cette « chronique » de citations (si je m'étais écoutée, j'aurai copié-collé ton récit dans son intégralité ou presque). Avec toi, on ne peut pas dire que l'on s'ennuie non vraiment, mais toi non plus tu ne dois pas t'ennuyer avec Gaby. C'est bien de prendre les choses avec humour et dérision, tu l'assumes et j'admire cet aspect de ta personnalité, tu le maîtrises sans aucun problème, en revanche c'est nettement plus difficile de mettre des « mots sur des maux » (petit clin d'oeil à ta nouvelle au passage) et tu le fais parfaitement. Et là, c'est vraiment génial parce qu'on gobe, on s'imprègne, on apprend aussi beaucoup.
« Vous connaissez les adolescents, aviez – vous entendu parles des autistes ? Bienvenue dans l'univers angoissant des adotistes, un monde qui ne laisse pas les parents indemnes… » p.88

Quand on te dit « autiste », tout comme tu le dis si bien au début du roman, on pense au personnage interprété par Dustin Hoffman dans Rain Man, on a donc cette image d'être humain très intelligent dans l'esprit et un peu plus gauche dans son corps, finalement être autiste c'est surtout être dans une bulle peu accessible aux autres, une problématique dans les interactions sociales. le monde tourne autrement pour eux alors les actes, les mots ont donc des significations tout autre aussi. Voilà ce que j'ai compris, tes écrits sont à la fois tendre et pédagogique pour nous, tiers, intrus, un peu voyeur dans cette relation qui n'appartient qu'à vous deux, mais quelle relation ! Tu transpires l'amour pour ta fille et rien que pour cela je salue ton courage du partage, ton courage dans chaque journée qui passe, ta détermination à faire en sorte que Gaby ait une vie la plus « normale » possible. C'est fascinant et difficile à la fois. A travers tes mots, Gaby prend une dimension tout autre, Gabrielle, un bien joli prénom pour une petite fille différente.

Tu nous parles d'elle, de ses réactions honteuses pour toi, de sa solitude, sa douleur face au rejet des autres, ta douleur de ne pas savoir comment l'aider, le regard des autres chaque fois qu'elle aura des réactions, des paroles, des gestes inappropriés. Ces émotions à elles sont complexes, difficiles à cerner, comme tu dis elle rejette vos sollicitudes, vos bras ouverts pour l'aider. Finalement dans cette histoire, ce sont deux êtres qui souffrent, une petite fille incomprise, un père qui ne demande qu'à comprendre… D'ailleurs, Maxime en parlant de ta petite pissouze (surnom affectif chez moi ! ), tu es sûre que ta fille est autiste ou bien elle s'est simplement métamorphisée en cobra ? Franchement, comme tes amis, j'ai ri à ce passage, comment ne pas faire autrement, j'imagine ta consternation, ta honte mais quand même avoue que c'est drôle avec le recul !
« L'attaque sera foudroyante. D'une précision chirurgicale. le prédateur qui ne laissera aucune chance à sa malheureuse proie. » p.56

Tu nous dis tout ou peut-être pas, en tous cas ça va loin, un défi chaque jour, des inquiétudes perpétuelles puissance dix, déjà qu'en tant que parent on signe pour être inquiet à vie, alors là, je n'imagine même pas l'angoisse croissante, les interrogations qui doivent te submerger toi et ta femme concernant l'avenir de Gabrielle. Je ne peux que vous souhaitez de continuer d'avoir le courage, la force de relever la tête et d'ouvrir vos épaules après chaque moment difficile, chaque fois que le désespoir pointe le bout de son nez, elle en a besoin la petite Gaby, et vous certainement encore plus qu'elle.
» Fasse que tu aies encore besoin de moi Gabrielle, parce que moi, j'ai besoin de toi, depuis que tu es arrivée, depuis le premier jour, depuis que tu m'as fait père ».

Je remercie Louve du forum Mort Sure et les éditions Pygmalion pour cet envoi et surtout merci à l'auteur Maxime Gillio et à Gabrielle pour ce partage très éloquent et très humain avant tout.
Lien : https://songesdunewalkyrie.w..
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Que connait- on exactement sur l'autisme ?Les asperger sont étonnants, bluffants parfois par leur érudition mais les autres.

Le livre de Maxime Giillo, créateur de la une page Facebook intitulée «Asperger mon amour».qui nous plonge dans la réalité d'une famille dont une des filles, Gabrielle, dont une filles, Gabrielle, est autiste.

Le diagnostic tarde à être établi puis le couperet tombe. Il faut essayer de faire de cet enfant un adulte autonome . Mais comment réagit face à ses colères intempestives, ses peurs irraisonnées, et ces réactions inattendues comme se précipiter pour mettre ses doigts dans les narines des inconnus.

Parfois cela entraine de situations vraiment cocasses, et l'auteur semble vouloir les traiter légerement mais d'autres dures .

Il est difficile que l'enfant puisse suivre la classe et tout devient pratiquement insurmontable lorsque la fillette devient une adolescente " une adotiste" les tourments propres à l'adolescence s'ajoutent à ceux du handicap ( injustice, harcèlement..)

L'auteur nous donne une belle lecon de vie " on apprend à s'accepter de vivre avec eux, on s'amerveille des petits progres.

Ce très beau récit est empreint de chaleur nous met en face de cet handicap qui ne se voit et que l'on peut avoir du mal à se comprendre , mais que l'on ne peut ignorer car près de 80 000 personnes en France en souffre que la prise en charge est loin d'elle que la prise en charge est loin d'elle parfaite et que les familles doivent régler cela.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Autant dans le témoignage brut que dans les implications plus profondes, il y a pour chacun quelque chose à apprendre et à méditer dans cette histoire de doigt dans le nez.

Dans ces tranches de vie, le père Maxime et l'auteur Gillio travaillent de concert. Partition à deux et quatre mains où la forme est au service du fond, d'une grande justesse dans le propos, le ton et le choix dans les mots (à défaut de la date, on le sait très friand de cette contrepèterie).
Un texte très bien écrit mais sans effet tape-à-l'oeil puisque Gillio n'est pas là pour donner dans l'esbrouffe stylistique. Il mobilise son talent d'écrivain pour dire les choses avec des mots simples mais qui marquent. Son récit fait mouche grâce une sobriété plus efficace que des tonnes de pathos et de tire-larmes à deux ronds cinquante. Oui, il y a le handicap, les doutes, les angoisses, la tristesse, la honte, l'épuisement, la souffrance… que t'en viens à te demander quand tu croises Gillio dans un salon comment il tient encore debout, avec le sourire, à balancer vanne sur vanne. Mais justement, il y a l'humour, les moments de rire et de tendresse, l'amour d'un père (et non, je ne sortirai pas un lieu commun sur la “force de l'amour”).
Gillio raconte des moments très durs mais pas que. Certains instantanés s'intercalent comme autant de bouffées d'hélium pour ne pas rendre le bouquin anxyogène au dernier degré. Beaucoup d'anecdotes sont drôles vues de l'extérieur, à commencer par celle qui donne son titre à l'ouvrage. Dans le même temps, tu comprends que les parents soient mortifiés, tu empathises. le décalage est tel qu'il crée un effet autant comique que dramatique. La grande force de ce bouquin est là, restituer la vie, par petits bouts, ni noire ni blanche ni grise ni rose, kaléidoscope qui passe de l'une à l'autre couleur et associe les teintes les plus improbables (en plus de t'assurer la victoire au Scrabble). Tout le spectre y passe, comme dirait James Bond. On en dira autant de la palette d'émotions qui accompagne le lecteur dans ce qu'il faut bien appeler une épopée autistique.

Parce que, quand tu compares la vie de la famille Gillio avec L'Odyssée, tu te demandes si ce n'est pas le même tour operator foireux qui a organisé le voyage. Et encore, Ulysse à la fin, il rentre chez lui, retrouve sa dulcinée et son moutard, happy end. Gillio, lui, elle, eux, ont pris perpète.
Perspective qui a de quoi coller les chocottes, il l'avoue lui-même. Mais, tel un héros grec, Maximos au chiton bariolé ne baisse pas les bras.
On se sent tout petit à côté. Pas parce qu'être confronté à la différence le grandirait lui – ça userait plutôt qu'autre chose –, mais parce qu'on se demande ce qu'on ferait dans la même situation… est-ce qu'on aurait la même endurance sur le long terme ?… parce qu'on a surtout le luxe de se poser la question dans l'abstrait.
Pour peu qu'on ait deux sous d'humanité, on se sent aussi un peu moins petit que d'autres. Comme les démons ou les Romains, le nom des obstacles est Légion, car ils sont nombreux. Chaque jour un Charybde, Scylla ou Polyphème à se coltiner. En premier lieu, un retard français considérable en matière d'autisme. On parle moins de l'évasion scolaire que de la fiscale, mais suffit de voir combien de parents envoient leurs gamins autistes à l'école en Belgique. En France, on leur dit poliment d'aller se faire foutre et seuls 20% sont scolarisés dans les établissements dits “classiques” (i.e. classes ULIS, rien que le nom, tout un programme). Là-dessus s'ajoute l'incompétence de certaines gens qu'on croise dans le bouquin. Parfois désarmés (parce que retard français, donc personnel pas formé), d'autres fois juste des gros cons si on veut bien me passer l'expression.

“L'enfer, c'est les autres” a dit un jour un célèbre bigleux. Plus d'un passage dans ce livre m'a amené à me demander qui était vraiment handicapé. J'en arrive à la même conclusion que Hugo Horiot, comédien et auteur. “Nous sommes dans une société autistophobe et, plus généralement, « handiphobe ». (…) C'est notre société qui est malade des contraintes de la normalité.” La moitié du handicap autistique est sociétal et vient des autres, pour en arriver à des aberrations délirantes qui relèvent de la peur, de l'ignorance et/ou de la haine – les trois vont souvent de pair. Note que ça n'a rien d'étonnant, l'évolution des mentalités de ces dernières années rime avec le non, le rejet, le pas de ça chez nous, pour une société toujours plus exclusive, plus fermée qu'hier et moins que demain.
“Une ancienne élève à moi a eu un garçon diagnostiqué autiste. le pédopsychiatre qu'ils ont consulté a eu l'obscénité de lui dire que si son fils était handicapé, c'était certainement parce qu'elle était française, alors que le père de l'enfant était d'origine marocaine.” (p.38)
Voilà où en est avec les autistes (et les Marocains) dans le pays des Lumières et des droits de l'homme avec de l'égalité et de la fraternité plein la devise. J'ai vérifié l'arbre généalogique de Gillio : aucun lien de parenté entre les clans MaxGillio et MacLeod. Il n'est pas né dans les hautes terres d'Ecosse il y a 400 ans, il n'a pas enseigné dans les années 1830, il rapporte un propos tenu au XXIe siècle par un professionnel (sic) de santé.
En cela, Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres est un ouvrage salutaire. Il ouvre les yeux sur le chemin à parcourir en matière d'inclusion, dans les institutions comme dans les caboches, pour que les autistes aient droit à une vraie place dans le monde, pas juste dans le coeur de leur parents. Et ça ne va pas se faire tout seul.

Un beau texte, une saine lecture, ce livre ne dépareille pas dans ma bibliothèque. Ni au-dessus, ni en dessous, ni à part. Avec les autres, comme ses si différents semblables.

(Chronique plus complète sur le blog.)
Lien : https://unkapart.fr/ma-fille..
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Il y a des livres qui vous touchent profondément, celui-ci en fait partie.
Un jour, une amie a aimé le post d'une page Facebook "Asperger mon amour"; j'ai parcouru ce post, d'un père qui parle de sa fille autiste, et j'ai terminé ma lecture les larmes aux yeux. Je n'ai donc pas hésité, lors de la dernière opération Masse Critique de Babelio, à candidater pour ce récit de Maxime GILLIO (accessoirement auteur de ladite page Facebook) et j'ai eu la change d'être sélectionnée.
Le récit n'est pourtant pas un style que j'affectionne, je n'ai dû lire que très peu de récits dans ma vie (il va peut être falloir y remédier)...
La lecture du post Facebook m'avait émue à l'époque, et ce sentiment s'est confirmé à la lecture de l'ouvrage. On passe du rire aux larmes (un certain passage m'a même fait pleurer de rire lorsque je l'ai relu à mon mari) et on est pris aux tripes par les mots de l'auteur, la mise à nu de ses sentiments.
En tant que parent, on ne peut qu'être touché par ce désir de voir son enfant heureux, révolté par la prise en charge désastreuse, de l'éducation nationale notamment, bouleversé par le sentiment d'impuissance ressenti par ce père qui se bat pour et contre sa fille. Un parent s'inquiète en permanence pour son enfant, souffre de le voir malheureux et espère de tout son coeur qu'il aura une belle vie. Maxime GILLIO ne déroge pas à la règle, même si ces inquiétudes sont décuplées du fait de l'autisme de sa fille; il sait trouver les mots justes pour exprimer toute une palette de sentiments, tout en traitant son sujet avec une touche d'humour.
En tant que « sans enfant », je pense que l'on est également bousculé par ce livre ; j'attends d'ailleurs impatiemment l'avis de mes deux meilleures amies qui se sont aussi laissé entrainer par Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres.
Une très très belle lecture, qui se termine sur une note dramatique avec la nouvelle Asperger mon amour en annexe, faisant également ressortir la méchanceté des enfants entre eux et la bêtise de certains parents; mais comme le dit Maxime, on ne réagit pas toujours de la meilleure des façons face à ce que l'on ne connaît pas et qui nous fait peur.
On ne peut qu'espérer, que Gabrielle saura apprécier les mots de son papa, et surtout qu'elle pourra réaliser ses rêves.
N'hésitez surtout pas à franchir le pas !
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j'ai vu passé ce roman un peu par hasard et bouche à oreilles. La couverture attire l'oeil, le résumé fait le reste. Je me disais qu'avoir un parent au micro, un genre de témoignage plus que de docu serait bien, serait différent. Et j'avais raison, d'autant plus avec Maxime Gillio aux commandes, j'ai eu un coup de coeur pour ce roman. Pas intersidéral, mais un coup de coeur qui se détache du reste de mes lectures assurément.

Je n'avais jamais rien lu de lui, mais je le suppose assez caustique dans ses romans. Il y a un cynisme qui m'a toute de suite parlé et des phrases cash qui font mouche. Je préviens, car ça peut rebuter une personne qui a du mal avec ce ton, même si on comprend vite qu'il faut donner le change quand on souffre et que c'est sa manière de le faire pour l'auteur. J'ai pensé à ce sketch de Guy Bedos sur « peut-on rire de tout ? » la question se pose quand on parle d'un sujet aussi sensible que le handicap et surtout l'autisme, sorte de tabou mal compris. L'auteur parle de RAY MAN et j'ai trouvé ça si vrai, le truc que tout le monde sort quand on dit « autisme » et qui ne semble pas si proche de ce que des connaissances qui l'ont vécu me font ressortir. Avec des gamins pas forcément géniaux et machines à compter, juste atypique avec un fonctionnement qu'on ne cerne pas bien au final de l'extérieur à part de grands lieux communs, du genre « ils évitent le regard ». Que sait-on de plus ? Tous les autistes ont-ils les mêmes « trucs » ?

Ce livre apporte des réponses à toutes ses questions. Des réponses pour une enfant qu'on voit grandir. le regard du père et tendre et sans concession. On s'émeut, on a envie de rire ou on a la gorge qui se serre sur quelques passages plus « hard ». Comme je le dis plus haut avec toute la tendresse d'un père Maxime Gillio évoque une situation impudique puisqu'il nous livre de ce quotidien, de leur intimité. Mais il tente de le faire avec une distance, un humour, l'une des phrases m'a semblé bien donné le ton. Il s'adresse à sa fille et lui dit avoir écrit ce roman à la place de voir un psy (en gros), et qu'avec l'argent économisé il ira avec elle au MacDo où elle prendra un MacFlury sans cacahuètes parce qu'elle est allergique à l'arachide. Concluant « Oui, tu es autiste ET allergique. Tu ne serais pas un peu chiante, des fois ? »

Cette phrase résume un peu tout le livre. Il y a de l'amour, de l'humour, des moments de grincement sourds, quand il est question du long arsenal à mettre en place pour accompagner son enfant dans un système fait pour l'enfant « normal » ou « moyen », celui qui ne dépasse pas, ne déborde pas. On y croise tout un tas de termes dans lesquels on parvient malgré tout à se repérer (CLIS, SESSAD…)

Plus que ça on suit l'évolution de Gabrielle jusqu'à ses seize ans, avec des hauts, des bas, les choix de ses parents retranscrit sans fausse pudeur. Certains peuvent d'ailleurs interroger le lecteur, c'était le plus frappant : à de nombreux moments l'auteur parle de ce qu'ils font pour accompagner Gabrielle, l'idée de ne pas la lâcher, de parfois l'accompagner jusqu'au bout. Je ne sais plus s'il l'utilise, mais presque l'idée du « malgré elle ». Et c'est là où ça peut titiller le lecteur. Est-ce trop ? Est-ce obligé et nécessaire ? Une chose ressort de ma lecture, si on se pose la question on n'a pas de réponse. Impossible de le dire de l'extérieur, au final.

Il me reste de ce roman un ton que j'ai trouvé juste et sans complaisance à part peut être l'entête du : « jamais sans ma fille autiste ». le rappel d'un roman bien connu m'a gêné ça faisait un peu facile et toomuch par rapport au reste.

Ce roman est écrit avec amour, avec détresse ne passant pas sur la maladresse d'un père, d'un parent tout court. Il montre toute la complexité de devenir parent et dépeint si bien tout ce qui ne sera jamais et dont il faut faire le deuil dans cette parentalité. C'est ce que j'en ai compris en tout cas. Les câlins, les échanges simples, le truc de se dire que le plus banal des sentiments devient d'un coup difficile à décrypter… tout ça laisse place à une relation qui n'a rien à voir. Hors cadre, très complexe et parfois sûrement déchirante. Il n'y a pas de complaisance dans le sens « ma fille est parfaite ainsi ce petit bijou aucun regret, etc.» Si l'auteur a des regrets et il l'avoue, car il s'inquiète sur l'avenir de sa fille et c'est ce qui devient le plus poignant et parlera à tout parent, ça, c'est universel et d'autant plus puissant chez un enfant différent. Il ne gomme rien de la complexité, la réalité brute et dure du handicap dans notre société. En ça, je trouve ça fort, honnête. Il aime sa fille, telle qu'elle est. Mais a conscience de tout ce qu'elle affronte avec son profil et tout ce qu'il aimerait pour elle. Pas un père parfait, mais un père qui aime et se débat, assurément. À lire pour comprendre un peu mieux, même un tout petit peu.
Lien : http://thereadinglistofninie..
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Au moment où nous passons devant un Zara,deux clientes en sortent ,dont l'une présente des signes indiscutables de nanisme.Pas une femme plutôt petite ,non une vraie naine,au sens médical du terme.Cette dernière descend les quelques marches du perron et te croise.
Habituellement, quand tu nous prépares un coup de Trafalgar ,tu marques un round d'observation ,tu lances une sommation ,des signaux avant-coureurs enfin tu préviens.
Mais là, rien.
L'attaque sera foudroyante.D'une précision chirurgicale.Le prédateur qui ne laissera aucune chance à sa malheureuse proie.
La naine passe à ta portée. Tu es certainement étonnée de croiser une adulte qui fasse ta taille,alors sans prévenir, tes doigts ,semblables aux crochets d'un cobra se plantent dans les narines de ta victime.
Schlac !
La pauvre effectue un saut de cabri en criant.Sa copine beugle également . C'est du flamand,je ne comprends rien.Je me précipite, te prends par la main.Je ne cherche même pas à m'excuser,je cours en te traînant. Je n'ose pas me retourner.Honte.colère. Tristesse.
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Retour dans la voiture. Je m'attends au pire, ferme les yeux et souffle :
- Gabrielle, qu'est ce qui s'est passé, qu'est ce que tu as fait de mal ?
- Ben rien, c'était trop drôle.
- Qu'est ce qui était drôle ?
- Le prof nous a mis deux par deux, et on a dû s'allonger.
- Les combats au sol, oui, je connais. Et alors ?
- C'était super marrant, on s'est senti le cul !
- Quoi ?
- Ben oui, on se sent le cul à chaque fois !
- Mais non, vous ne vous sentez pas le... Gabrielle, ce sont des exercices au sol, comme quand on fait la bagarre sur le lit pour de faux.
- Ah non, là, on se sent le cul !
- Mais... et tu l'as dit au prof ?
- Oui. Dès qu'on s'allongeait, j'éclatait de rire et je criais : " on va se sentir le cul !", et ça faisait rigoler tour le monde.
J'ai dû mourir de honte, et n'ai même pas osé retourner voir le prof pour m'excuser. Mais il y a quelques jours, alors que nous étions avec ton frère et ta sœur dans la voiture, je t'ai rappelé cette histoire que tu avais oubliée. Nous en avons tous les quatre pleuré de rire.
Finalement, il était bête ton prof. Se mettre des planchettes japonaises, des balayettes et des tartes sur le museau à longueur de séance pour s'intégrer, c'est dépassé. Mais se sentir le cul, pour mieux faire connaissance, c'est ce qu'on devrait tous faire, c'est toi qui a raison.
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LES ROIS DU MONDE

Ce qui nous fait le plus mal,les moments où notre coeur se serre à nous étouffer, c'est quand tu nous demandes quand tu ne seras plus autiste.Combien de temps ça va encore durer.
Il faut faire preuve de calme,de pédagogie de douceur.T'expliquer,encore et encore,que ton autisme n'est pas une maladie.Que c'est un handicap dont tu ne te débarrasseras jamais,mais que nous ferons tout pour que tu apprennes à vivre avec.
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Je n'ai pas tout compris ce que les gens disaient dans l'article,mais j'ai reconnu des mots.Et j'ai regardé dans mon dictionnaire le sens des autres.J'ai appris ce que 《suicide》 voulait dire,parce que dans l'article il y avait un monsieur qui disait qu'il avait Asperger comme moi et qu'il était tellement honteux et fatigué qu'il allait se suicider.J'ai trouvé ça très drôle. Comme ça ,on n'éprouve plus ce nouveau sentiment que je n'aime pas ,la honte......
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Sinon, il y a la piscine. Tu as toujours adoré l’eau. Une fascination presque hypnotique. Du reste, je te rappelle que tu me dois toujours un téléphone pour la fois où j’ai dû plonger tout habillé pendant les vacances. Tu avais décidé de sauter dans l’eau sans tes brassards. Tu avais huit ans.

L’eau te calme, t’apaise, te transforme. Quand nous sommes à la piscine, étrangement, tu te rapproches, tu viens dans mes bras, tu me regardes les pupilles ou les narines, tu me sors une ou deux bêtises, mais on est bien.

On devrait y aller plus souvent. Mais tu sais, cette fichue maladie de peau qui fait que je n’ose plus me montrer dévêtu, cette maladie qui, bizarrement, est apparue quand on a diagnostiqué ton autisme, elle m’en empêche. Encore le regard des autres. Je n’arrive pas à en faire abstraction. J’en suis désolé, Gaby…
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Vidéo de Maxime Gillio
Retrouvez la rentrée littéraire 2021 d'Auzou Romans avec cette rencontre tournée en direct dans les locaux d'Auzou à Paris le lundi 12 juillet. Une rencontre animée par Pierre Krause de Babelio et Jennifer Rossi, avec comme invités les auteurs Lucie Pierrat-Pajot, Maxime Gillio et Anouck Filippini.
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