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EAN : 9782231001117
267 pages
Editions Rombaldi (30/11/-1)
4.27/5   60 notes
Résumé :
UN DE BAUMUGNES (Trilogie de Pan (T2)
À la « Buvette du Piémont », un vieux journalier est attiré par un grand gars qui parait affreusement triste et provoque ses confidences : Albin venait de la montagne, de Baumugnes. Trois ans auparavant, il était tombé amoureux fou d'une fille qui s'est laissé séduire par le Louis, « un type de Marseille, un jeune tout creux comme un mauvais radis». Le Louis ne lui avait pas caché que son intention était de mettre la fill... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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“Un de Baumugnes” est le premier texte de Jean Giono que je lis.

Ces quelques  pages sont un souffle littéraire qui m'a subjuguée dès le début de ce court roman. Je me suis prise une gifle, une bonne gifle.

J'avais apprécié les romans de Thyde Monnier et son ode à ses terres de Haute Provence, mais avec Giono, l'écriture particulière permet à la littérature de porter plus haut et plus fort encore les valeurs de la Nature à travers une  poignée d'hommes et de femmes humbles et courageux.

La langue de Giono, c'est d'abord un choc ; il m'a fallu relire plusieurs fois la première page avant d'entrer dans son style. Il y a là quelque chose de rugueux, de brut et de fort mais jamais déplaisant. J'ai tout de suite été immergée dans le passé, dans l'ailleurs, dans un monde enfoui et oublié. Tout ce que je cherche dans la lecture.

Les mots, les phrases ont épousé l'esprit des personnages, leur monde, leur essence. Cette prosodie, si particulière rapporte au mieux leurs pensées, douleurs, mais aussi les barrières sociales qui sous-tendent ces récits.

Et puis, ces gens sont poètes mais ils ne le savent pas. Giono, lui, nous le montre.

Comme un torrent qui charrie les pierres et emporte tout sur son passage, comme les sentiers arides qui relient les collines entre elles, cette histoire de sauvetage est d'une puissance incroyable.

Dans le cadre d'un hymne aux Hautes Alpes, les thèmes gionesques s'entrecroisent et se heurtent pour nous raconter le double destin d'une victime et d'un rédompteur. La victime, c'est Angèle, séduite par un mauvais garçon marseillais, donc victime de  la ville. le rédempteur, c'est Albin, le fils de la Terre. le narrateur, Amédée est merveilleux de pudeur et de bravoure et nous colle à notre lecture, mieux qu'avec un polar moderne.

La musique d'Albin, parce qu'elle est la voix même de la pureté  du village de Baumugnes “enlève” le Coeur d'Angèle, parce qu'elle est la musique de la promesse et de la réconciliation, et m'a enlevé le Coeur moi aussi. J'en redemande…
Lien : http://justelire.fr/un-de-ba..
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L'amour , la passion, l'amitié, la quête du bonheur, mais surtout la présence infinie du monde rural fondent les réalités de ce roman : la campagne avec son austérité, sa rigueur , sa rugosité, son code de l'honneur, ses moeurs farouches, sa poésie, et en contre point, la corruption de la ville.
Ce second volet de la trilogie de Pan, raconte la déchéance et la rédemption d'Angèle grâce à Albin et d'un journalier trimardeur, le vieil Amédée, il faut écouter le chant d'amour de de l'harmonica qui dit dans le silence de la nuit, l'amour d'Albin.
C'est beau comme du Giono !
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Dévorer Jean Giono et plus spécifiquement « Un de Baumugnes » pour en digérer toute la grandeur sans connaitre l'essence de la bourgeoisie, conduit à un malentendu.

Le bourgeois est le mâle qui occupe et, par ses habitudes, habite le bourg. Il s'est donné comme unique spécialité de construire murailles et murs pour se protéger et enfermer ses certitudes. Ainsi se dessinent des rues, avenues, places et impasses qu'il connait parfaitement et maitrise avec suffisance. Il se protège de l'extérieur, de la forêt, de la nature et surtout de ce qui le terrorise au plus haut point : l'inattendu du cosmos. le bourgeois est une créature de peur qui forge de la certitude en lieu et place de la confiance et de la foi. Il assemble des règles et des lois comme substitut à la justice et à la vérité toujours en mouvement. Il constitue des contrats pour éloigner l'amour et le désir de l'autre, cet inconnu. le bourgeois est étriqué et anxieux devant tous mysticisme, toute spiritualité et toutes questions communes qui relient les humains entre eux. A la fin, tout ennui, toute pulsion se transforme en lui en perversion, en haine de l'autre. Paniqué par la mort, le bourgeois vole le temps des autres sous sa forme « argent », il l'accumule notamment en leur vendant des objets frelatés. le bourgeois a conçu un univers fait de néant. Aujourd'hui le bourgeois est néolibéral, athée, ultra-narcissique. Il rêve que le transhumanisme et le big-data du futur calculé sont les réponses à ses frayeurs. Au mieux, le bourgeois pourrait être le jeune homme riche des évangiles, il pourrait être sauvé s'il se libérait de ses peurs.

Le héros d' »Un de Baumugnes » est un vieil homme qui appartient à la classe sociale la plus basse. Journalier du monde rural, il traverse le monde sauvage pour offrir ses bras et son temps en échange du gîte et du couvert. La menue monnaie lui sert à « boire le litre » avec des gens de rencontre. Il n'est riche que de son amour des autres, de sa foi et de sa confiance en une vérité qui le dépasse.

Dans ce roman, le bourgeois est un paysan physiquement et psychiquement blessé qui enferme sa fille dans une cave car elle a été engrossée en dehors du contrat. C'est dans l'enceinte de ses clôtures qu'il décide des lois, règles et certitudes de son monde, son fusil est son sceptre. Comme chez Thérèse Desqueyroux de Mauriac, l'enfermement des filles et des femmes est une constante dans la manière de procéder de la bourgeoisie.

Le journalier est le héros grec, Hector fortuit qui redonne confiance et rouvre le monde à l'inattendu de la vie ne demandant qu'à se répandre. Ce héros est du « pays d'en haut » où la vérité est construite de confiance et d'amour. le couple et l'enfant sauvée pourront se rendre alors au « pays d'en haut », le héro restera dans la vallée pour achever son oeuvre.
Lire Giono sans comprendre la spiritualité de l'écrivain, c'est comme lire Hannah Arendt ou Simone Weil sans percevoir leur lumière humaine et leur grâce ; c'est se cantonner à l'enfermement bourgeois qui, par décision de Pouvoir, veut définir ce qui est Bô, Aart, Kulture ou Loi.

Lien : https://tsuvadra.blog/2021/1..
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Un de Baumugnes
Jean Giono (1895-1970)
Publié en 1929, ce magnifique roman de Jean Giono fait partie de la trilogie de Pan avec « Regain » et Colline » que j'ai par ailleurs commentés, une oeuvre triple dont l'inspiration est née de la terre et de l'âme populaire. L'action se situe comme de coutume sur les plateaux crépitant de soleil et de solitude de Haute Provence dominant le ronronnement de la Durance non loin de Manosque.
Tout commence à la Buvette du Piémont où Amédée, un vieux journalier en fin de foulaison à Marigrate, remarque un jeune garçon triste et taciturne qui, la boisson faisant, se confie à lui avant de quitter le village les travaux finis. C'est Albin, un jeune homme clair comme l'eau, qui tombé amoureux de la belle Angèle Barbaroux, belle à crier au péché, se l'est vue ravir par un garçon de mauvaise vie, un certain Louis dont l'intention est clairement de la faire travailler sur les trottoirs de Marseille. Albin foudroyé par la beauté d'Angèle :
« …Elle était sur l'autre bord de la Durance…C'était bien elle. Je la reconnaissais à la forme juste de son geste. Elle avait troussé son jupon et elle était nue de toutes ses cuisses ; sans corsage, elle était nue de ses seins roux comme de grosses prunes et, ainsi faite, elle pataugeait dans l'herbe et l'eau en chantant. »
Trois années ont passé et Albin est toujours inconsolable. Amédée, tel un père, décide alors de contrer le destin, se rendre à la Douloire, la ferme des Barbaroux où restent Clarius le père, un être fruste et sauvage, Philomène une mère accueillante et Saturnin l'homme à tout faire.
« Ça sentait le champ de maïs ténébreux…Ça sentait la résine et le champignon et l'odeur de la mousse épaisse. Ça sentait la pomme sèche. » Amédée loue ses services, «il est de la terre, il aime la terre lourde de blés, avec des cyprès contre les bastidettes, avec des touffes de chênes verts, avec de l'herbe roussie par le soleil et des ruisseaux vides où coule, à la place de l'eau, le bruit des charrettes, le parfum du thym et le rire des gardeuses de chèvres. »
Amédée a sa petite idée et s'engage alors dans une aventure dont le finale est assez hallucinant après des jours de tranquillité agreste et bucolique au milieu des thym et sarriette.
Albin est de Baumugnes, la montagne des muets, le pays où on ne parle pas comme les hommes. Parlant à Amédée :
« Baumugnes, c'est moi. C'est fourré dans ma peau : les choses solides, de la couleur et du goût des herbes, du chant des arbres, du grincement des maisons de bois dans le vent glacé, et des choses, comme qui dirait des choses d'air, ça qui fait que le coeur tremble de joie, ou s'alentit, adoloré, de ce que le bruit, le parfum ou la couleur porte en plus de sa chose propre. »
Déjà on remarque le style original pour ne pas dire originel de Giono, un style poétique adapté au terroir mettant en lumière la richesse de la terre et les travaux qui s'y rattachent, une terre riche de secret et de violence, terroir où les passions sont silencieuses, un style surprenant et authentique. Un hymne à la liberté et à la gloire des vivants, un appel au bonheur dans la pudeur et la dignité, malgré la rudesse et la rusticité des sentiments qui souvent cachent une tendresse émouvante avec un bel élan d'amitié quasi filiale entre Amédée et Albin.
Un chef d'oeuvre.
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J'ai pris Giono de plein fouet.



Le bouquin traînait là, dans mes étagères, jauni, froissé, poussiéreux, et je ne l'avais jamais lu, jamais acheté, jamais désiré.



Il était seulement là, parmi des centaines d'autres livres qui m'ont réconforté, quand j'étais malade de ce monde suicidaire et sadomasochiste, tendres compagnons de mes heures solitaires.



Et puis il y a eu un jour où ç'a été son tour.



Je n'avais plus rien à lire, et il attendait sagement son heure.



Sans enthousiasme, j'ai donc saisi le vieux volume rassis d'indifférence, et j'ai laissé tomber mes yeux sur les premières lignes.



Ils ne s'en sont pas relevés.



Une langue charnelle née des terres arides du sud-est de la France, rencontre de la lavande sirupeuse, du thym acidulé et des pierres coupantes des chemins exposés au mistral.



Des personnages rabotés, usés, cornés par un climat excessif et une nature aussi rude qu'entière — des personnages vivants, mais de cette vie puissante et primitive débarrassée des affectations de la civilisation cupide et vaniteuse.



Une nature, surtout, qui irrigue le langage, la narration, les êtres, qui gronde dans le ciel et tremble dans la terre, qui frémit dans la feuille et chante sous la langue, qui virevolte dans le ciel bleu et cascade dans les torrents. Une nature qui est vivante, puissante, omniprésente, et dont les humains ne sont au final que d'humbles puces cherchant un peu de sens et d'amour sur son dos large et sûr, bien qu'impitoyable.



La première fois que j'ai pris Giono de plein fouet, c'était par son roman « Regain », dans lequel mon écriture à moi, studieuse, audacieuse mais terriblement scolaire, s'est heurtée à celle de cet auteur méconnu pour ressortir de ce corps-à-corps cabossée mais libérée.



Lire Giono, pour moi, ç'a été une sorte de métamorphose. Je croyais tutoyer les cieux mais rampais dans la boue. Les torrents rocailleux dont les orages impétueux du Sud-Est ravagent parfois cieux et paysages dans les livres de Giono m'ont défait de ma gangue de prétention chenillesque pour m'arracher à ma chrysalide de certitudes.



Avec « Regain », j'ai déployé mes ailes dans le vent.



Avec « Que ma joie demeure », elles ont pris des couleurs.



Avec « Un de Baumugne », elles ont battu et attrapé les courants ascendants pour butiner le soleil et les étoiles.



Certains se sentiront brutalisés par le style âpre de cette langue tout encroûtée de bonne terre fertile. Mais, pour ceux qui y planteront les semis de leur sensibilité, nul doute qu'ils y moissonneront des trésors d'émotions et d'images poétiques qui réchaufferont longtemps leurs âmes endeuillées par la modernité et son obsession pour le néant froid et glacé de l'autodestruction frénétique.



Giono, c'est régressif, c'est émancipateur, c'est réenchanteur, c'est vivifiant.



Bref, je kiffe.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
D'abord ce fut comme un grand morceau de pays forestier arraché tout vivant, avec la terre, toute la chevelure des racines de sapins, les mousses, l'odeur des écorces ; une longue source blanche s'en égouttait au passage comme une queue de comète. ça vient sur moi, ça me couvre de couleur, de fleurance et de bruits et ça fond dans la nuit sur ma droite. Y avait de quoi vous couper l'haleine !
Alors, j'entends quelque chose comme vous diriez le vent de la montagne ou, plutôt, la voix de la montagne, le vol des perdrix, l'appel du berger et le ronflement des hautes herbes des pâturages qui se baissent et se relèvent toutes ensemble, sous le vent.
Après, c'est comme un calme, le bruit d'un pas sur un chemin : et pan, et pan ; un pas long et lent qui monte et chante sur des pierres, et, le long de ce pas, des mouvements de haie et des clochettes qui viennent comme à sa rencontre.
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Je sentais que ça allait venir.
Après boire, l’homme qui regarde la table et qui soupire, c'est qu'il va parler. Surtout de ces hommes qui sont seuls dans le monde, seuls sur leurs jambes avec un grand vide autour, tout rond; enfin, un de notre bande, un de ceux qui se louent 'dans les fermes, à la moisson, ou à peu près.
Cette fois, j'étais de la louée des foulaisons à Marigrate, un gros ménage sur les bords de Durance, une campagne avec des° blés à perte de vue, des bois chasseurs, des vignes, tout le tremblement. Un gros ménage, quoi.
Ça s'était fait de pur hasard.
Nous autres, il n’y a rien de plus bohémien que nous. Dix jours avant, j'étais à Peyruis, dans une baraque, seul valet, un peu mon maître; peu de travail, bonne table, et puis, la maîtresse c'était une femme chaude; enfin, coq en pâte. Pour un oui, pour un non, je lâche tout et je descends. J'arrive à Marigrate. Ils étaient tous å suer sur les aires.
— Eh, j'y dis, vous prenez du monde?
— Des fois.
— Des fois, ça peut être ce coup-ci?
— Amène-toi.
Et me voilà engagé.
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Sacré garçon !
Fils de... Fils de... j'allais dire : fils de pute, mais, dans mon genre c'est censément un éloge que je voulais dire ; ainsi, il avait touché de main sûre la Douloire tout entière.
Non pas seulement moi qui le guettais par le fénestron, mais aussi, et de jet aussi juste, ceux du dedans des murs, ceux sans yeux, ceux que la chose avait tirés de leur sommeil pour les lancer dans le grand méli-mélo de leurs souvenances.
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Quand il fut nuit, je fis mon lit à côté d'un pré qui chantait de toutes ses herbes, et, la figure contre les étoiles, je me mis à dormir à mort.
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Ce qui m'avait attiré, je ne vous cache pas, c'est que, dans ces yeux, il y avait un quelque chose d'amer, une ombre, comme le reflet d'une viande qui pourrirait au fond d'une fontaine. Il s'appelait Albin. Il était de la montagne.
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Videos de Jean Giono (61) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean Giono
Denis Infante a publié son premier roman Rousse publié aux éditions Tristram le 4 janvier 2024. Il raconte l'épopée d'une renarde qui souhaite découvrir le monde. Un ouvrage déroutant par sa singularité. Son histoire possède la clarté d'une fable et la puissance d'une odyssée et qui ne laissera personne indifférent. L'exergue, emprunté à Jean Giono, dit tout de l'ambition poétique et métaphysique de ce roman splendide : "Dans tous les livres actuels on donne à mon avis une trop grande place aux êtres mesquins et l'on néglige de nous faire percevoir le halètement des beaux habitants de l'univers."
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