Et je pressai ses lèvres. Sans résistance, muette, elle m'appartint. Je me sentais plongé dans une nuit impénétrable au-delà de laquelle je pouvais ressentir la présence de paysages oniriques et fantastiques. Pour la première fois, je tenais la Femme dans mes bras, cette réalité éternelle, ténébreuse, immense, lointaine qu'aucune femme ne pourra jamais incarner complètement à elle seule. Tout ce qui était enfoui en moi de rêves habituellement inassouvis et de réalités décevantes se mit à jaillir en flammes étincelantes. Jamais, je ne m'étais autant prodigué, avec une frénésie proche de la dilution, qu'auprès de ce corps malingre, souple et singulier qui n'abritait à mes yeux aucune personnalité, qui était vraiment l'idole.
Oskar A. H. Schmitz. La fiancée du diable