Je crois simplement que l'on devrait accorder à l'artiste, pour son bien comme pour celui de son public - et permettez-moi de dire officiellement aujourd'hui que je n'aime pas du tout les termes comme "public" ou "artiste", et en particulier la hiérarchie qu'implique l'usage d'une telle terminologie-, je crois donc que l'on devrait accorder à l'artiste l'anonymat. Il devrait avoir le droit d'agir en secret, en quelque sorte, détaché - ou, mieux encore, insouciant - des supposées exigences du marché, exigences qui, si elles sont considérées avec suffisamment d'indifférence par un nombre suffisant d'artistes, disparaîtront tout simplement. Et puisqu'elles auront disparu, l'artiste abandonnera son faux sentiment de responsabilité vis-à-vis de son "public", et son "public" renoncera à son rôle de dépendance servile.
)
glenn gould
g.g. – Eh bien, pour tout vous dire, je n’y
ai pas vraiment réfléchi. Mais improvisons!
Que diriez-vous par exemple de la situation
politique au Labrador?
g.g. – Je suis sûr que cela pourrait engendrer un dialogue fort intéressant, en effet,
M. Gould ; mais nous devons garder à
l’esprit que high fidelity
est avant tout
destiné à un public américain.
g.g. – Oh, c’est exact. Eh bien, dans ce cas,
peut-être que les droits des aborigènes dans
l’ouest de l’Alaska feraient un bon sujet.
g.g. – Oui. Soyez-en certain, M. Gould, je
ne voudrais surtout pas faire l’impasse sur
des sujets aussi sensationnels; mais dans la
mesure où high fidelity est destiné à un
lectorat féru de musique, nous devrions au
moins, je crois, entamer notre discussion
dans le domaine des arts.
. Magazine publié aux États-Unis entre 1951 et 1989 et
consacré à divers aspects de la musique (équipements
audio, enregistrements, biographies d’interprètes
reconnus, etc.). (n.d.t.)
glenn gould
g.g. – Oh, naturellement. Peut-être
pourrions-nous examiner la question des
droits des aborigènes à travers des études
ethno-musicologiques de terrain à la Pointe
Barrow.
g.g. – Eh bien, je dois avouer que j’avais à
l’esprit une ligne d’attaque, pour ainsi dire,
plus conventionnelle, M. Gould. Vous vous
en doutez, j’en suis sûr, la question quasi
inévitable dès que l’on aborde votre carrière
est la controverse qui oppose concerts et
médias, et j’ai le sentiment qu’il nous faut
au moins l’évoquer.
g.g. – Oh, bien, je ne vois pas d’objections
à répondre à quelques questions sur ce sujet.
De toute façon, cela engage avant tout, à mon
avis, des considérations d’ordre moral plutôt
que musical; donc je vous en prie, allez-y.
g.g. – Eh bien, c’est très aimable à vous. Je
vais essayer d’être bref, et ensuite, peut-être,
pourrons-nous changer de sujet.
g.g. – Parfait!
g.g. – Bien. On vous a entendu dire que
votre intérêt pour l’enregistrement – pour
glenn gould
les médias en général, en fait – représente
un intérêt pour l’avenir.
g.g. – C’est exact. Je l’ai même déclaré dans
les pages de cet illustre magazine, pour tout
vous dire.
g.g. – Tout à fait. Et vous avez également
déclaré, inversement, que la salle de
concert, la scène, l’opéra, etc., représentaient le passé ; peut-être un aspect de votre
propre passé en particulier et, de manière
plus générale, le passé de la musique.
g.g. – C’est vrai, même si je dois admettre que
le seul contact professionnel que j’ai eu avec
l’opéra s’est soldé par une petite trachéite que
j’ai ramassée en jouant dans l’ancien palais des
festivals de Salzbourg. Comme vous le savez,
c’était à l’époque un bâtiment extrêmement
soumis aux courants d’air et je…
g.g. – Peut-être pourrions-nous parler
de votre état de santé à un moment plus
opportun, M. Gould; mais il me semble – et
j’espère que vous me pardonnerez de vous le
dire ainsi – que les déclarations de ce genre
sont toujours par nature un peu intéressées.
C'est la tradition post-Renaissance qui a mené le monde occidental au bord de la destruction. Vous savez, cet attachement bizarre à la liberté de mouvement, à la liberté d'expression et tout le tremblement est un phénomène étrangement occidental. Tout cela fait partie de l'idée occidentale selon laquelle on peut aisément séparer les paroles des actes.
(...)
Seules les cultures qui, par hasard ou d'habile manière, ont contourné la Renaissance voient l'art comme la menace qu'il est en réalité.
g.g. : - Je présume que l'URSS en fait partie?
G.G. : - Absolument. Les Soviétiques sont un peu brut de décoffrage en ce qui concerne la méthode, je l'admet, mais leurs inquiétudes sont totalement justifiées.
g.g. – Pensez-vous que c’est là l’essentiel?
Je veux dire, étant donné mon expérience
des interviews – et j’en ai déjà réalisé un
certain nombre à l’antenne, comme vous
le savez peut-être –, je suis enclin à penser
que les révélations les plus instructives
découlent de sujets qui ne sont qu’indirectement liés au métier de celui qui est
interviewé.
g.g. – Par exemple ?
g.g. – Eh bien, par exemple, dans la phase
de préparation de mes documentaires radiophoniques, j’ai parlé de technologie avec un
théologien, de William James avec un géomètre, du pacifisme avec un économiste et
des rapaces qui peuplent le marché de l’art
avec une femme au foyer.
glenn gould
g.g. – Mais vous avez aussi interrogé des
musiciens sur la musique, je présume ?
g.g. – Eh bien, oui, en effet, à l’occasion, afin
de détendre l’atmosphère et de les mettre
à l’aise devant le micro. Mais il a été bien
plus instructif de parler avec Pablo Casals,
par exemple, du concept de Zeitgeist
qui,
évidemment, n’est pas sans rapport avec la
musique…
g.g. – Oui, j’allais justement me permettre
cette remarque.
g.g. – Ou avec Leopold Stokowski de
l’aspiration au voyage interplanétaire, ce qui
constitue – n’en déplaise à Stanley Kubrick,
je pense que vous en conviendrez – une
légère digression.
g.g. – Cela pose problème, en effet,
M. Gould. Permettez-moi alors d’essayer
de formuler la question de façon plus affirmative. Y a-t-il un sujet que vous aimeriez
tout particulièrement aborder?
. Littéralement: “esprit du temps”. (n.d.t.)
Je n'ai jamais compris l'obsession pour la liberté telle qu'elle est considérée dans le monde occidental. Pour autant que je puisse en juger, la liberté de mouvement a en général quelque chose à voir avec la mobilité, et la liberté d'expression, le plus souvent, avec une agression verbale autorisée socialement.
Être incarcéré serait donc la mise à l'épreuve parfaite de ma mobilité intérieure et de la force qui permettrait de me désengager de façon créative de ma condition humaine.
Spécial Eté ! Avant une petite trêve estivale !1,2,3 BD ! Chez les libraires ! présente les BD coups de coeurs de Jérôme et la librairie La planète Dessin à Paris !!! Et ce soir, ce n'est pas trois conseils de lecture mais plutôt la découverte des collections été des éditeurs à glisser dans les valises ! Lisez des BD et bonnes vacances.
-Les incontournables du roman graphique(ALICE GUY Catel & Bocquet, LE CRÉPUSCULE DES IDIOTS Jean-Paul Krassinsky, GUIRLANDA Lorenzo Mattotti & Jerry Kramsky, MAGIC PEN Dylan Horrocks, QUATORZE JUILLET Bastien Vivès & Martin Quenehen, JOHNNY CASH - I SEE A DARKNESS Reinhard Kleist) chez Cas-terman
-Version poche (La mémoire dans les poches Récit de Luc Brunschwig. Dessin d'Étienne le Roux, Mauvais garçons Récit de Christophe Dabitch. Dessin de Benjamin Flao, La position du tireur couché D'après le roman de Jean-Patrick Manchette. Adaptation et dessin de Tardi, …)
-La sélection BD poche (Seconds de Bryan Lee O'Malley, Glenn Gould de Sandrine Revel, Riche, pourquoi pas toi ? de Marion Montaigne, Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, Opération Copperhead de Jean Harambat, Noire d'Émilie Plateau, d'après Tania de Montaigne, Lip, des héros ordinaires de Laurent Galandon et Damien Vidal, le Retour de la bondrée d'Aimée de Jongh, le Mystère du Monde Quantique de Thibault Damour et Mathieu Burniat, Guantanamo Kid de Jérôme Tubiana et Alexandre Franc) chez Dargaud
-Sarbacane 20 ans (L'Aimant Édition poche Lucas Harari, le dieu vagabond Édition poche Fabrizio Dori, Dans la forêt Édition poche Lomig, Un travail comme un autre Édition poche Alex W. Inker)
-La Boîte à bulles 20 ans (La plus belle femme du monde Dorange et Roy, Dans les vestiaires le Boucher, L'immeuble d'en face Vanyda, Kaboul Disco Wild)
-Collection Nomad Urban Comics
1,2,3 BD c'est le jeudi à 18h30 sur la chaine Youtube et les RS. Trait pour Trait parcourt toujours les librairies de France pour des conseils de lecture.
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