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EAN : 9782283029480
816 pages
Buchet-Chastel (04/01/2018)
4.16/5   898 notes
Résumé :
Epopée romanesque d'une incroyable intensité, chronique poignante de l'amitié masculine contemporaine, Une vie comme les autres interroge de manière saisissante nos dispositions à l'empathie et l'endurance de chacun à la souffrance, la sienne propre comme celle d'autrui. On y suit sur quelques dizaines d'années quatre amis de fac venus conquérir New York. Willem, l'acteur à la beauté ravageuse et ami indéfectible, JB, l'artiste peintre aussi ambitieux et talentueux ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (186) Voir plus Ajouter une critique
4,16

sur 898 notes
Dans ce roman très sombre on suit le parcours de quatre amis sur plusieurs décennies. Chacun de ces garçons ayant fait de brillantes études, ils excellent dans leur domaine, qu'il soient artistes, avocat ou architecte, et évoluent dans le monde new-yorkais.

Le livre se construit autour du personnage énigmatique et solaire de Jude.
On sait qu'il souffre, on se doute de la nature de ses blessures, on voudrait comprendre.
L'auteure ne nous épargne en rien les détails lorsque l'enfance puis l'adolescence de Jude nous apparaissent sous la forme de bribes de souvenirs, dans toute leur noirceur.

Jude exerce une fascination, un émerveillement, un trouble, sur le groupe. Il l'exerce aussi sur le lecteur. Comme un magicien, habile dans l'art ne pas dévoiler toutes ses blessures, il s'immisce dans nos pensées, il y plante des images, des cauchemars, et si peu d'espoir. Il oscille entre la peur et la haine de soi, sans jamais oser espérer le bonheur.

Une histoire où tout est extrême — trop d'horreur, trop d'amitié, trop d'amour, trop de talents — pour que l'histoire paraisse crédible. Des personnages bons (avec quelques failles pour .JB., mais si peu), d'autres horribles. Comme dans un conte de fées de noir vêtu jusqu'à la fin.

Cette histoire a cependant l'intérêt de nous embarquer au cœur des hommes, au plus profond de ce qu'ils sont capables d'accomplir, en bien comme en mal. Et aussi de se construire sur un schéma différent de ce qu'on attendrait de la vie de ces hommes au fil du temps. Ce sont toujours de grands garçons , des "Peter Pan", qui ont su sauvegarder leur belle histoire d'amitié, tout au long de leur vie. Ils s'épanouissent différemment de la norme.

Le cas de Jude est à part. C'est un adulte enfermé à jamais dans l'enfer de son passé. Et tout au long des pages, on le voit toujours comme un enfant blessé, qui ne sait pas recevoir, ni se voir tel qu'il est.

Un roman qui souffre de longueurs, de répétitions de scènes trop ciselées, trop précises. On a l'impression d'être dans un labyrinthe où toutes les portes ne mèneront de toute façon à aucune issue positive, quoiqu'il se passe. Un labyrinthe de l'enfer.

Au final que peut-on retenir de cet intense roman noir ?
Une histoire émouvante où l'essentiel de la narration traite des traumatismes de l'enfance. Leurs impacts sur la vie sont- ils réparables, quand ils sont si profonds ?
Il aborde aussi d'autres thèmes, sur la famille, la vieillesse, l'homosexualité, l'addiction.
D'autres questions aussi :
Jusqu'où l'homme peut-il aller dans sa cruauté, dans sa capacité à supporter la douleur et la solitude, à souffrir de l'abandon, à comprendre l'autre, à partager, à donner ?
Est-il encore humain quand il se montre parfois si cruel ?

C'est un roman sur la vie et les hommes, où chacun voudrait une vie comme les autres, humaine, avec ses instants de bonheur. Bonheur qu'on ne sait pas toujours expliquer.

C'est un roman perturbant, angoissant. Les faits paraissent exagérés car ils sont insupportables, mais la vie nous démontre parfois que l'homme est cruel, et que peut-être nous sommes trop naïfs.

Je remercie la Masse Critique de Babelio et les Éditions Buchet-Chastel pour ce roman qui ne laisse pas indemne, qui montre une facette de l'homme qu'on préfèrerait ne pas voir.



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Tel que son éditeur le présente – la chronique sur trente ans de quatre amis de fac venus conquérir New York, un grand roman américain au souffle puissant !... – je m'étais dit qu'Une vie comme les autres avait tout me plaire. Peut-être l'occasion de me racheter auprès de Babelio après avoir égratigné le précédent ouvrage qui m'avait été proposé à la critique.

Un grand avocat, un grand acteur, un grand peintre, un grand architecte. de vraies réussites pour les quatre amis de fac, chacun dans sa spécialité, avec argent et célébrité à la clé. Mais n'allez pas imaginer une grande fresque romanesque, conforme aux canons du rêve américain, empreinte d'optimisme, d'aventures et de victoires, juste écornées comme il se doit par les contrariétés et les peines qui ne manquent pas de frapper ceux qui sacrifient leur vie privée à leurs objectifs professionnels. Dans ce roman, les brillantes success stories des quatre personnages ne sont qu'une toile de fond.

Une vie comme les autres est un roman intimiste sombre, très sombre. Tellement sombre dans certaines pages, qu'il m'a inspiré par instant – à l'opposé d'un genre littéraire qui fait fureur aujourd'hui – un fort sentiment de feel bad.

Le livre est essentiellement consacré au parcours de l'un des quatre amis. Cet homme, Jude, mène une vie qui donne l'apparence d'être comme les autres. Il s'emploie activement à donner cette apparence, avec, en façade, une brillante et profitable carrière d'avocat.

Mais en réalité, sa vie n'est pas une vie comme les autres. Jude traîne un handicap, une difformité ou un blocage – ou peut-être les trois à la fois ! – qu'il s'efforce en permanence de dissimuler, mais dont les stigmates échappent certains jours à son contrôle. Il porte aussi la mémoire d'une vulnérabilité qui ne s'efface jamais, et le pressentiment d'une culpabilité dont il ne parvient pas à se libérer. Un pressentiment secret qui ronge son estime de soi et le conduit à s'infliger des scarifications, des automutilations à la lame de rasoir, qui au final ne font qu'aggraver ses disgrâces physiques et psychologiques.

Peut-on mener une vie comme les autres quand on a eu une enfance pas comme les autres ? Une enfance dont les monstrueuses circonstances ne sont dévoilées que tardivement au lecteur. Pas besoin cependant d'être grand clerc pour lire entre les lignes et vite comprendre que l'enfance de Jude l'aura mené d'avilissements en avilissements, dans une véritable corruption du corps et de l'âme qui lui a été imposée à son corps défendant – une expression qui prend vraiment tout son sens –, jusqu'à l'« accident » final qui lui vaudra son handicap physique.

Beaucoup de longueurs, de détails et de répétitions dans le récit, qui semble pourtant enfermé dans une sorte de rythme circulaire en trois mouvements schématiques. Dans un premier temps, ses amis implorent Jude de leur expliquer l'origine de ses accidents de santé récurrents. Deux, Jude se dérobe, sous des prétextes qui sont toujours à peu près les mêmes. Trois, se sentant coupable de son manque de transparence, il se punit par de nouvelles scarifications, aggravant encore ainsi son état de santé. Ses amis, intervenus pour lui prêter assistance, demandent à comprendre... bouclant ainsi la boucle.

Difficile d'être captivé pendant les huit cents pages de ce roman, si l'on n'éprouve pas une empathie sincère pour ses personnages, d'autant plus que la lecture n'en est pas toujours fluide. Peut-être influencé par les ouvrages que j'avais lus précédemment, j'ai été contrarié par la rugosité du texte, par la banalité et le manque de finesse de son écriture en français, sans que je puisse dire s'il reflète le style de Hanya Yanagihara, ou si la traduction manque de polissage.

Une vie comme les autres plaira surtout à ceux qui portent un intérêt particulier, voire personnel, aux grands thèmes qui y sont développés, les séquelles de l'enfance abusée, l'addiction à l'automutilation, l'homosexualité masculine.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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♫ Les Quat'zamis
Sont contents quand ils sont réunis
Les Quat'zamis
Sont heureux car ils aiment la vie ♪

Effectivement au nombre de quatre, Willem, JB, Malcolm et Jude, je pose trois et je retiens un, ils se sont juré amitié et soutien indéfectible alors qu'ils n'étaient encore que de jeunes adultes emplis de fougue et d'ambition légitime au regard du potentiel de chacun.
Heureux d'être ensemble, assurément.
Heureux car ils aiment la vie mériterait un sérieux bémol. J'en vois un qui traine sérieusement la patte sur le guilleret chemin de la vie. Oui, Jude, inutile de te cacher, tu es le maillon faible. L'élément perturbateur du quatuor. le quidam éprouvé, furieux adepte des idées noires de Franquin, qui aura cependant le plus touché mon p'tit coeur de lecteur pourtant rompu aux pires atrocités.

Une Vie Comme Les Autres est le bouquin des "trop". Pas de trop, loin s'en faut.

Bien trop long à démarrer, il aura nécessité pas moins de trois boites d'escargots Gérard, format familial, pour susciter un quelconque intérêt de ma part. Un envol pris tardivement page bien trop loin mais qui aura eu le mérite d'asseoir un récit particulièrement captivant et éprouvant par la suite.

Une ambiguïté fondatrice sur le passé de Jude usée jusqu'à la corde.
Le suspense, c'est bien. Mais sur 800 pages, penser à parsemer la bête de moult rebondissements histoire de fidéliser le chaland, c'est pas mal non plus.

A trop charger la mule qu'à la fin elle se casse. Proverbe cité de mémoire conjecturalement poreuse.
Jude est un catalyseur à emmerdes. L'incarnation vivante du malheur et de l'affliction qui en découle.
Le chemin de croix de JC, à côté, c'est Alice au pays des merveilles.

Nonobstant ces quelques griefs personnels, Hanya Yanagihara interroge véritablement sur le sens de la vie, de l'amitié et sur sa capacité personnelle à transcender un passé chaotique par trop prégnant.
L'amour et l'amitié comme remparts ultimes à la noirceur morbide qui squatte vos synapses inlassablement, y a pire comme sujet.
Si l'univers qui vous est ici proposé est monstrueusement friqué, il prouve que le bonheur ne se déclame pas à l'aune de sa réserve à biffetons.
L'interaction entre ces quatre potes est intéressante mais peine à faire vibrer le curseur plaisir comme le fera ultérieurement et sans discontinuer l'ami Jude et sa cohorte de révélations sordides.
Le style relativement sans relief de l'auteure ne l'empêchera pas de toucher, de temps à autre, au sublime.
En effet, le lecteur, en totale empathie avec ce prétendu serial loser autoproclamé, pourrait même avoir le palpitant au bord des larmes. Des moments de grâce bien trop rares pour faire oublier les innombrables pages ronflantes qu'il aura fallu se fader auparavant.

Une vie comme les autres est un bon bouquin qui aurait gagné en intensité s'il avait affiché quelques centaines de grammes en moins sur la balance.

Merci à Babelio et aux éditions Buchet-Chastel pour cette déprime passagère...

PS: gros bémol sur la couv', véritable pub vivante pour les dragées F**aaaa...
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JB, Malcolm, Willem et Jude. Ils sont quatre, se sont rencontrés sur un campus universitaire et ne se sont plus quittés des bancs de la fac jusqu'à leurs premiers pas à New-York et la consécration de leurs carrières. JB, c'est le peintre. Il est d'origine haïtienne, aperdu son père très tôt et a été élevé par des femmes, sa mère, sa grand-mère et sa tante. JB est sûr de son talent, ambitieux, persuadé qu'un jour il sera au sommet. Pour réussir, il est prêt à tout et n'hésite pas à profiter de ses amis, voire à les trahir. Malcolm, c'est l'architecte. Il est métis, sa famille est riche, il a vécu chez ses parents jusqu'à près de 30 ans. Malcolm est discret, gentil, serviable. Il a du mal à prendre son envol, il hésite à ouvrir son propre cabinet d'architecture, par peur de décevoir ses parents. Willem, c'est l'acteur. Il est né en Suède dans une ferme avec des parents taiseux et un frère polyhandicapé dont il s'est beaucoup occupé. Il est beau sans le savoir, d'une gentillesse rare, dévoué à ses amis. Jude, c'est l'avocat. de ses origines, il ne sait rien, de son passé, il ne dit rien. Jude a vécu l'enfer et son corps en garde les séquelles, il boîte et souffre beaucoup du dos. Moralement, il est aussi très marqué mais il refuse de se confier, accorde difficilement sa confiance, se bat pour mener ''une vie comme les autres''. Ses amis sont une bénédiction pour ce solitaire dans l'âme, surtout Willem dont il est très proche.
Durant trente ans, nous allons suivre ce quatuor inséparable, de leurs débuts à leurs succès les plus éclatants. JB, Malcolm, Willem et surtout l'insaisissable Jude, diminué mais charismatique, sombre et solaire à la fois. C'est lui qui cristallise l'amitié des trois autres, toujours là pour l'aider, le soutenir, le protéger malgré son souci constant de ne pas être un poids, de se débrouiller par lui-même.

4 amis, 30 ans et...813 pages. C'est un poil long pour découvrir les terribles secrets de Jude. Hanya Yanagihara n'en finit pas d'entretenir un suspense lancinant en distillant des informations (toujours sordides) sur le passé de cet homme qui n'a vraiment pas eu de chance, tombant entre les mains des pires prédateurs les uns après les autres. Cette accumulation tend d'ailleurs à rendre son récit peu crédible. Et même si l'on passe sur le fait que ce cher Jude n'a vraiment pas eu de chance, il reste son comportement exaspérant tout au long de sa vie d'adulte. Lui qui se veut discret, qui n'aime pas solliciter l'aide des autres, est en fait constamment en demande. A force de vouloir tout faire tout seul, il commet moultes erreurs qui font de lui un boulet. Comment ses amis supportent-ils cela de longues années durant ? Grâce à leur bon coeur, bien sûr ! Que de grands sentiments, d'amitiés indéfectibles, de fidélité, d'amour même ! Mais malgré tout cela, Jude reste enferré dans son passé. Il a tellement été battu, exploité, humilié, rabaissé qu'il ne croit plus qu'on puisse l'aimer, qu'il s'imagine sale, laid, repoussant,mauvais. Et tous les témoignages d'affection autour de lui n'altèrent en rien cette idée qu'il ne vaut rien...Seules les scarifications qu'il s'inflige le soulagent un peu de sa douleur morale. Alors il ne se prive pas ! Il se lacère les bras à tout-va, causant le désespoir de tous ses proches.
Bref, ce personnage est un sac d'ennui qui met quotidiennement à l'épreuve l'amour de ses amis et la patience du lecteur.
Par ses excès, l'auteure a voulu créer l'empathie chez le lecteur et cela marche pour certains. D'autres seront saturés par toute cette noirceur, ne croiront pas à cette malchance chronique et s'impatienteront devant un Jude qui aspire au bonheur sans se donner les moyens de l'atteindre. le roman n'est pas mauvais, il se lit comme une saga américaine où les gens sont beaux, gentils, très riches et vivent dans l'opulence en plein coeur de Manhattan. Il aurait gagné à être plus nuancé et aussi plus court. Par contre, il faut avoir le coeur bien accroché pour supporter la vie désastreuse de Jude, âmes sensibles, s'abstenir.

Un grand merci à Babelio et aux éditions Buchet Chastel pour leur confiance.
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UNE VIE COMME LES AUTRES
de Hanya Yanagihara
traduit par Emmanuelle Ertel
Éditions Buchet ● Chastel

******* ❤ C O U P  d'E  C O E U R ❤ *******

Pendant une trentaine d'années, on suit le parcours de quatre amis qui se sont rencontrés à la fac (Malcolm, JB, Wilhem et Jude), mais le récit tourne principalement autour de Jude.

Jude est un écorché vif. Il garde ses traumatismes au plus profond de lui et est incapable de les partager avec les personnes qui l'aiment. C'est un être constamment tiraillé entre la résignation que sa vie puisse continuer comme toujours et l'espoir que son existence change. Et Jude a beau essayer de dominer ses souvenirs, ils reviennent sans cesse pour l'assaillir, tels des hyènes sur une charogne.

Les mots me manquent pour vous parler de ce livre magnifique et bouleversant qui parle d'amitié, d'amour et surtout de la vie. L'histoire est triste avec des pages très douloureuses et malgré tout, il se dégage une telle beauté de ce texte... que je ne crois pas avoir lu, depuis "Albertine disparue", d'aussi belles pages sur la disparition d'un être aimé.

Quand aux personnages, ils sont tellement réels que l'on ressent une forte empathie pour eux.

Je sais que certains lecteurs ont trouvé des longueurs à ce roman mais ce n'est pas mon cas (en même temps, j'adore les "pavés" et j'avoue avoir de la peine avec les nouvelles). Pour ma part, aucune page n'est superflue et j'en aurais volontiers pris une centaine de plus.

Je l'ai lu juste après "My absolute darling" et les thèmes sont similaires mais, surtout, complémentaires. En fait, "Une vie comme les autres", à sa façon personnelle, prolonge "My absolute darling".

Et la traduction d'Emmanuelle Ertel est aussi belle que ce roman.

Je terminerai par une phrase du livre :

"L'amitié n'était-elle pas en soi un miracle, le fait de trouver une autre personne qui rendait le monde entier et sa solitude en quelque sorte moins solitaires ?" (p647)
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critiques presse (5)
Actualitte
02 novembre 2018
Autant vous dire que ce roman est extrêmement riche en émotions. Il m’a baladé, voire malmené entre tendresse, attachement féroce aux personnages, rires et très grande tristesse.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LaPresse
04 avril 2018
Publié en 2015, le bouleversant roman de l'Américaine Hanya Yanagihara vient d'être traduit en français. L'histoire semble banale, presque clichée. Quatre jeunes hommes se lient d'amitié à l'université.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Lexpress
22 janvier 2018
Un roman d'apprentissage qui se transforme peu à peu en exploration de la violence aux Etats-Unis. Impressionnant.
Lire la critique sur le site : Lexpress
LeFigaro
17 janvier 2018
Hanya Yanagihara publie Une vie comme les autres, histoire de quatre étudiants de Harvard de 1980 à nos jours. Magistral.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeMonde
17 janvier 2018
Avec « Une vie comme les autres », l’écrivaine américaine réussit à faire ressentir au lecteur les souffrances de son héros.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (184) Voir plus Ajouter une citation
Une relation ne procure jamais tout. Elle ne peut que te procurer certaines choses. Tu prends toutes les qualités que tu souhaites chez quelqu’un - l’attrait sexuel, disons, ou l’art de la conversation, ou le soutien financier, ou encore la compatibilité intellectuelle, la gentillesse, la loyauté - et tu choisis trois de ces qualités. Trois - c’est tout. Peut-être quatre si tu es très chanceux. Le reste tu dois le chercher ailleurs. Ce n’est que dans les films qu’on trouve quelqu’un qui t’offre toutes ces choses. Mais on n’est pas au cinéma. Dans le monde réel, on doit identifier quelles sont ces trois qualités avec lesquelles on veut passer le reste de sa vie, et ensuite chercher ces qualités chez quelqu’un. C’est ça la vraie vie. Tu ne vois pas que c’est un piège ? Si tu continues à essayer de tout trouver, tu finiras seule.
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Dans des moments plus généreux et empreints d’émerveillement, il s’imaginait Jude en magicien, dont l’unique tour consistait en la dissimulation, mais qu’il aurait perfectionné d’année en année, de sorte qu’aujourd’hui il lui suffisait de ramener un pan de sa cape de soie devant ses yeux pour devenir aussitôt invisible, même au regard de ceux qui le connaissaient le mieux. Cependant, à d’autres moments, il réprouvait amèrement ce tour de passe-passe, se sentait éreinté par toutes ces années à conserver les secrets de Jude et ne rien recevoir en retour hormis les bribes les plus avares d’informations, à se voir refuser la possibilité ne serait-ce que d’essayer de l’aider, de s’inquiéter publiquement pour lui. Ce n’est pas juste, pensait-il dans ces moments. Ce n’est pas cela l’amitié. C’est quelque chose, mais pas de l’amitié. Il avait le sentiment de s’être fait entraîné dans un jeu de complicité, auquel il n’avait jamais eu l’intention de jouer. Tout ce que Jude leur communiquait indiquait qu’il ne voulait pas qu’on l’aide. Mais Willem ne pouvait accepter cette idée. La question était : comment ignorer la demande de quelqu’un qui veut qu’on le laisse tranquille – même si cela signifiait mettre l’amitié en péril ? C’était une énigme navrante : comment aider une personne qui ne veut pas qu’on lui porte assistance tout en se rendant compte que ne pas l’aider revient à ne pas être son ami du tout ? Parle-moi, avait-il parfois envie de crier à l’adresse de Jude. Raconte-moi des choses. Dis-moi ce que je dois faire pour t’obliger à me parler.

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« SETH : Mais tu ne comprends pas, Amy ? Tu te leurres. Une relation ne te procure jamais tout. Elle ne peut que te procurer certaines choses. Tu prends toutes les qualités que tu souhaites chez quelqu'un – l'attrait sexuel, disons, ou l'art de la conversation, ou le soutien financier, ou encore la comptabilité intellectuelle, la gentillesse, la loyauté – et tu choisis trois de ces qualités. Trois – c'est tout. Peut-être quatre, si tu es très chanceuse. Le reste, tu dois le chercher ailleurs. Ce n'est que dans les films qu'on trouve quelqu'un qui offre toutes ces choses. Mais ce n'est pas au cinéma. Dans le monde réel, on doit identifier quelles sont ces trois qualités avec lesquelles on veut passer le reste de sa vie, et ensuite chercher ces qualités chez quelqu'un. C'est ça, la vraie vie. Tu ne vois pas que c'est un piège ? Si tu continues à essayer de tout trouver, tu finiras seule.
AMY : [en pleurs] Alors qu'est-ce que tu as choisi ?
SETH : Je ne sais pas. [pause] Je ne sais pas.

À l'époque, il n'avait pas cru ces mots, parce que, à l'époque, tout semblait réellement possible : il avait vingt-trois ans, et tout le monde était jeune, séduisant, intelligent et brillant. Tout le monde pensait qu'ils seraient amis pour des décennies, pour toujours. Mais, pour la plupart des gens, évidemment, cela ne s'était pas passé. En vieillissant, on prenait conscience que les qualités que l'on estimait chez les personnes avec lesquelles on couchait ou que l'on fréquentait n'étaient pas forcément celles avec lesquelles on voulait vivre, ou être, ou passer ses journées. Si l'on était judicieux, et chanceux, on le comprenait et on l'acceptait. On se rendait compte de ce qui était important pour soi, et on le recherchait, et on apprenait à être réaliste. Ils avaient tous choisi différentes choses : Roman avait choisi la beauté, la douceur, la flexibilité ; Malcolm, pensait-il, avait choisi la fiabilité, la compétence (Sophie était intimidante d'efficacité) et la comptabilité esthétique. Et lui ? Il avait choisi l'amitié. La conversation. La gentillesse. L'intelligence. Quand il était dans la trentaine, il avait observé certains couples et posé la question qui avait alimenté (et continuait de le faire) d'innombrables conversations à l'occasion de dîners : c'est quoi leur histoire ? Aujourd'hui, cependant, à presque quarante-huit ans, il voyait les relations de couple comme des reflets des désirs les plus passionnés, et en même temps informulables, des espoirs et des incertitudes qui s'incarnaient physiquement, sous la forme d'une autre personne. Maintenant, il regardait les couples – au restaurant, dans la rue, à des fêtes – et s'interrogeait : Pourquoi êtes-vous ensemble ? Qu'avez-vous discerné d'essentiel pour vous ? Que manque-t-il à votre personne que vous souhaitez que l'autre vous apporte ? Il considérait aujourd'hui comme une relation réussie une relation dans laquelle les deux personnes avaient identifié le meilleur de ce que l'autre avait à offrir et avaient également décidé d'estimer cette chose. »
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Il gardait les rideaux fermés la plupart du temps, mais on pouvait les ouvrir tous d’un coup, et l’espace apparaissait alors comme un rectangle de pure lumière, le voile vous séparant du monde extérieur soudain d’une minceur incroyable. Il a souvent le sentiment que son appartement est un mensonge : celui-ci suggère que la personne qui y vit est quelqu’un d’ouvert, d’énergique, de généreux dans ses réponses, et, bien sûr, il n’est pas cette personne. Lispenard Street, avec ses alcôves, ses dédales obscurs et ses murs qui avaient été repeints de si nombreuses fois que l’on pouvait sentir les stries et les cloques, où les papillons et autres insectes s’étaient retrouvés entre les couches, constituait un reflet bien plus exact de qui il était.
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Chaque année, ses chances s’intensifiaient et se multipliaient, et il ne cessait de s’étonner des actes de générosité dont il faisait l’objet, d’être surpris par des personnes qui entraient dans sa vie, si différentes de celles qu’il avait connues auparavant qu’elles semblaient appartenir à une espèce complètement autre : comment, en définitive, Dr Taylor et Willem pouvaient-ils être tous les deux désignés sous le même terme « d’être humain » ? Et Père Gabriel et Andy ? Et Frère Luke et Harold ? Est-ce que ce qui caractérisait le premier groupe existait aussi dans le second, et si c’était le cas, comment ce second groupe avait-il choisi d’agir différemment, de devenir autre ? Sa vie ne s’était pas seulement améliorée, elle s’était renversée, avait accompli un demi-tour complet. Il était passé de rien à une générosité embarrassante. Il se rappelait, alors, la confession de foi de Harold, selon laquelle l’existence travaillait à compenser les pertes qu’elle pouvait infliger, et en appréciait la vérité, même si parfois il lui semblait que l’existence ne s’était pas seulement contentée de compenser le sort qu’elle lui avait infligé, mais s’était surpassée de façon extravagante, comme si sa vie même l’implorait de lui pardonner, le couvrant de richesses, de toutes les belles et merveilleuses choses qu’il avait pu espérer, de sorte qu’il ne lui en veuille pas et l’autorise à se poursuivre.
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Vidéo de Hanya Yanagihara
"Une vie comme les autres" d'Hanya Yanagihara, traduit de l'anglais (États-Unis) par Emmanuelle Ertel, disponible le 4 janvier 2018 aux éditions Buchet Chastel
Découvrez le roman sur http://www.buchetchastel.fr/une-vie-comme-les-autres-hanya-yanagihara-9782283029480
Épopée romanesque d'une incroyable intensité, chronique poignante de l'amitié masculine contemporaine, Une vie comme les autres interroge de manière saisissante nos dispositions à l'empathie et l'endurance de chacun à la souffrance, la sienne propre comme celle d'autrui. On y suit sur quelques dizaines d'années quatre amis de fac venus conquérir New York. Willem, l'acteur à la beauté ravageuse et ami indéfectible, JB, l'artiste peintre aussi ambitieux et talentueux qu'il peut être cruel, Malcolm, l'architecte qui attend son heure dans un prestigieux cabinet new-yorkais, et surtout Jude, le plus mystérieux d'entre eux. Au fil des années, il s'affirme comme le soleil noir de leur quatuor, celui autour duquel les relations s'approfondissent et se compliquent, cependant que leurs vies professionnelles et sociales prennent de l'ampleur. Révélant ici son immense talent de styliste Hanya Yanagihara redonne, avec ce texte, un souffle inattendu au grand roman épique américain.
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