Jacqueline Harpman est une auteure belge que j'apprécie vraiment beaucoup. Je l'ai découverte en 1995 avec "
La plage d'Ostende", qui est, avec "
L'insoutenable légèreté de l'être " de
Milan Kundera, l'un des romans que je trouve les plus fascinants. Elle a l'art de subjuguer et de manipuler ses lecteurs. Elle est psychanalyste, et cela se devine, en particulier grâce à ses analyses psychologiques très fines des personnages.
Dès la lecture de la quatrième de couverture, j'ai senti que "Le bonheur est dans le crime" allait me bouleverser. C'est d'ailleurs la deuxième fois que je le lis:
"Un conducteur coincé dans un embouteillage, un jour de tempête à Bruxelles, est arrêté devant une maison de style éclectique... Étrange maison pour une étrange famille, les Dutilleul. Il y a Emma, la grand-mère qui aime choquer ; Simone et Philippe, les parents professeurs aspirés par la tornade qu'est leur vie familiale ; ainsi que les quatre enfants autour desquels se noue l'intrigue... À mesure que le récit progresse, des relations défendues se tissent entre les protagonistes et s'installe une atmosphère pesante où folie, suicide et « bonheur dans le crime » se côtoient."
Il est difficile de le résumer sans risquer de gâcher ce qui fait l'essence même de ce roman.
Jacqueline Harpman nous mène littéralement par le bout du nez tout au long de ce livre dont le titre semble tout dire et dont l'astuce n'est révélée qu'à la fin.
La dissimulation y joue un rôle essentiel : le mystère rôde autour de cette famille, ainsi que la folie.
L'écrivaine y évoque en effet notamment les secrets de famille, et la quête de l'amour parfait, inaccessible.
Elle utilise un procédé de narration assez singulier : un premier narrateur omniscient introduit le récit du narrateur principal - que ce dernier conte au passager de son véhicule suite aux souvenirs induits par la vue de LA maison.
Ce qui rend ce roman d'autant plus original est que le narrateur raconte les personnages de l'intérieur, puisqu'il est lui-même un des personnages de ce récit.
L'écriture de
Jacqueline Harpman, ses descriptions, ses monologues ou dialogues, ses expressions,... sont magnifiques, et la psychologie des personnages complexe et subtile.
J'ai trouvé ce livre intéressant à plusieurs points de vue : l'histoire palpitante, les personnages profonds, la "maison-mystère" qui joue un rôle important, et surtout la capacité de la romancière à nous faire ressentir un certain malaise, évoluant chez moi en répulsion au fur et à mesure de la lecture. Et le fait que cette histoire s'ancre tant dans le réel la rend plus dérangeante encore.
Même si je l'ai trouvé assez glauque et sordide, je suis d'avis que ce roman vaut la peine d'être lu pour apprécier le style de l'auteure, la musique de ses mots, et pour se laisser guider par cette narration énigmatique...