Billie'S Blues

Vous aimez le roman noir ? Les bouquins où l'intérêt de l'enquête le dispute à celui, hyper-réaliste, de l'arrière-plan social ? Les inspecteurs attachants ? Alors lisez John Harvey.
L'écriture et les enquêtes sont de facture assez classique, mais le style, concis, « économique », est néanmoins très prenant, très efficace, doublé d'un solide sens de la narration, ce qui fait qu'on a vraiment du mal à lâcher le livre. L'autre atout, ce sont les personnages : l'inspecteur Charlie Resnick, du commissariat de Nottingham, (une ville économiquement sinistrée, où violence et chômage se partagent les rues, où les crimes sont sordides), divorcé amoureux des vieux standards du jazz, vit seul avec ses quatre chats et se nourrit de sandwiches appétissants. A la fois désabusé et humaniste, on s'y attache en dix lignes. Ses collègues sont eux aussi campés de manière très réaliste, des flics plus ou moins sympathiques qui font leur boulot comme ils peuvent, avec leurs limites et leurs défauts. On retrouve tout ce petit monde dans les dix romans consacrés à Resnick, donnant à la série une allure de feuilleton assez agréable.

Je suis toujours ravi de découvrir sur les rayonnages des bouquinistes un de ces petits volumes que les éditions Rivages offraient — et offrent peut-être encore — à ses clients chaque année. C'est à chaque fois l'occasion de découvrir un auteur que je n'aurais peut-être pas eu l'occasion de découvrir. Je ne connaissais pas du tout cet écrivain pourtant prolifique.

Est-ce que Billie's blues me donne envie de découvrir plus avant son oeuvre ? Sans doute. Mais en même temps, quelque chose me gêne. Quoi exactement ? C'est difficile à dire. Mais je vais tenter une explication.

La trame est intéressante, mais m'a donné l'impression d'être une version simplifiée de ce que fait l'auteur par ailleurs. Je n'ai pas eu le sentiment de vivre aux côtes des différents personnages, mais plutôt de les suivre à distance, au travers d'une bonne paire de jumelles. D'un autre côté, l'auteur aurait pu faire le choix de détailler l'enquête ou la description de certains événements et en faire quelques choses de très glauque, voire malsain. Non plus.

Alors est-ce le style habituel de l'auteur ? Est-ce une version édulcorée de ce qu'il fait d'habitude. Et dans ce deuxième cas, est-ce que sa façon de raconter une enquête policière me satisferait ? Pas sur. J'en veux pour preuve ma désillusion avec James Ellroy que j'ai beaucoup aimé dans Dick contino's blues et pas du tout apprécié dans ses oeuvres plus traditionnelles.

En bref : J'ai beaucoup apprécié cette nouvelle policière et j'essayerai sans doute de lire autre chose de cet écrivain. Mais je ne ferai pas la même erreur qu'avec James Ellroy. Si j'en trouve plusieurs chez un bouquiniste, je ne prendrai pas la pile.
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