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EAN : 9782070306688
320 pages
Gallimard (27/10/2005)
3.38/5   17 notes
Résumé :
"Tout se passe comme si mon combat spirituel avait lieu quelque part dans une clairière. Je pénètre dans la forêt, je ne trouve rien et la faiblesse me force aussitôt à ressortir ; souvent, quand je quitte la forêt, j'entends ou crois entendre le cliquetis des armes dont on se sert dans ce combat."

A la fois fasciné et repoussé par Prague, en quête d'une Terre promise et exilé à Berlin, fiancé timoré et séducteur impénitent, sportif accompli, hypocon... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Un travail biographique inédit paru en France en 2005 qui complète parfaitement le témoignages de Max BROD ("Franz Kafka. Souvenirs et documents", 1945) et les chantiers biographiques comme ceux de Klaus WAGENBACH ("Franz Kafka, 1883-1924", Akademie der Künste, 1966), Claude THIEBAUT ("Les Métamorphoses de Franz Kafka", 1996) et de Peter-André ALT ("Franz Kafka. der ewige Sohne. Eine Biographie.", 2005, non encore traduit).
On n'y trouvera pas d'éclairage nouveau sur les écrits mais les épisodes existentiels y sont merveilleusement détaillés (Max Brod, Hermann Kafka, les trois soeurs Kafka, Isaak Löwy, Felice Bauer, Julie Wohryzek, Milena Jesenska, Robert Klopstock, Dora Di[a]mant). On appréciera particulièrement les deux longs chapitres (également riches de péripéties, de bonheurs, d'écueils et de souffrances futures) consacrées à deux coups de foudre de notre "serial seducer" : les rnecontres de Julie (Wohryzek) en février 1919, puis de Milena (Jesenska) en juin 1920...
Ouvrage irremplaçable ; il s'emplit peu à peu de mille finesses psychologiques nous donnant les "clés" d'une connaissance intime des êtres croisés par l'artiste, "clés nous donnant d'autres clefs" pour identifier les modèles des personnages de "La Métamorphose" et des 3 énigmatiques romans inachevés qui ont fait sa gloire (posthume)...
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L'insaisissable Franz Kafka.

Franz Kafka meurt de tuberculose le 3 juin 1924 à l'âge de 41 ans. Sa célébrité sera posthume. Gérard-Georges Lemaire nous livre ici une biographie de l'auteur tchèque d'expression allemande sur la base de sa correspondance avec ses amis, ses fiancées et sa famille ainsi que sur celle de ses familiers entre eux. Il s'en dégage de nombreux aspects de la personnalité de Kafka qu'on peut essayer de regrouper en trois grandes orientations, trois grands pôles d'intérêt permettant de mieux appréhender la vie de l'auteur et, peut-être, de mieux cerner la complexité de son oeuvre. On considérera Kafka sous l'angle de la judéité, puis de l'indécision et enfin de l'écrivain.

Né dans une famille juive peu pratiquante, Franz Kafka gardera toute sa vie des liens avec sa communauté d'origine. A Prague, il fait partie de la minorité juive germanophone. Élève brillant, studieux et plein d'humour, il devient docteur en droit comblant ainsi les espérances d'ascension sociale de son père. Cependant, il entretient des relations d'amour-haine avec ce père (à qui il adressera une lettre mémorable), relations rééquilibrées par la bonté et la tendresse de sa mère. Sa relative indifférence religieuse ne doit pas masquer son attachement à la culture juive. En effet, à partir de 1910, il se passionne pour le théâtre yiddish et rêve de participer à l'essor du sionisme. La religion et la culture juive traversent donc l'ensemble de sa vie en laissant indiscutablement une tache indélébile dans son esprit.

Malgré les aspects brillants de sa personnalité (humour, séduction, faconde, amitiés), Kafka demeure un homme insatisfait et indécis. Affirmer, juger, trancher lui semble presque surhumain (ce qui peut expliquer en partie ses relations avec un père autoritaire et sûr de lui). Il ne sait jamais exactement ce qu'il veut et ce qu'il ne veut pas et souvent il donne l'impression de vouloir un peu des deux à la fois. Parfois, il lui paraît nécessaire et confortable que les autres choisissent pour lui. Que ce soit pour son métier, pour se séparer de ses fiancées, pour quitter Prague ou pour déménager, tout se passe pour Kafka comme si les obstacles de la vie quotidienne ne valaient pas la peine qu'on se donne pour les surmonter. Ainsi, apparaissent déjà entre l'homme Kafka et le monde qui l'entoure une sorte d'incompatibilité physique, d'incompréhension ontologique.

Malgré toutes ces considérations, il y a un domaine sur lequel Kafka ne transige pas : la littérature. En effet, s'il donne pleine satisfaction comme agent d'assurances, la seule chose qui compte réellement à ses yeux demeure fondamentalement l'écriture. Il cherche d'abord à être reconnu comme écrivain, comme créateur, comme artiste … mais principalement auprès des siens, de ses amis, de ses fiancées, de ses familiers : il ne cherche à être reconnu que des gens qu'il connaît et apprécie, il fait preuve alors d'humour, de drôlerie et de bonhommie. Parfois, il n'hésite pas à faire des lectures publiques dans lesquelles il excelle en sachant capter et fasciner son auditoire. Ses publications de son vivant resteront toujours confidentielles et on doit à Max Brod la vulgarisation de son oeuvre contre la volonté du testament. Cependant, cette passion littéraire l'a possédé toute sa vie et à l'article de la mort, sur son lit de tuberculeux, il rédige, il corrige et continue de façonner ses romans. Véritablement, il s'épanouit par la littérature, il ne vit que pour l'écriture et c'est en ce sens que l'on peut parler de la sincérité de Kafka : il est totalement engagé dans son oeuvre.

Comme tous les écrivains majeurs, Kafka a façonné une littérature bien trop riche et trop complexe pour espérer être saisie dans son intégralité. Cette biographie apporte cependant un éclairage complémentaire sur son oeuvre même si en ne faisant appel qu'à sa correspondance et son journal intime, elle ne s'appuie que trop rarement et de façon elliptique sur ses romans et ses nouvelles. C'est ce qui demeure pour moi la limite du livre de Lemaire : le coeur de l'héritage que Kafka nous a légué (bien malgré lui !) reste en périphérie sans correspondance bien marquée entre les péripéties de sa vie et la façon dont il les « met en fiction ». Cette lacune est à mon goût préjudiciable car la lecture de de la Métamorphose, du Château et du Procès par exemple montre l'importance du rapport entre la biographie de l'homme-Kafka et l'interprétation, la déformation que lui fait subir le créateur-Kafka ainsi que l'oppression qu'il ressent devant une vie somme toute banale et peu remarquable. G.-G. Lemaire aurait peut-être dû nous indiquer des pistes , originales de préférence, pour essayer de comprendre un peu mieux, ou un peu moins mal, l'auteur tchèque, mais il nous laisse avec une biographie « sèche », sans fioritures, qui, même si elle nous donne envie de relire Kafka, nous laisse seul avec notre pauvre capacité de se mesurer aux sommets de l'art de Kafka.
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biographie basée surtout sur la très riche correspondance de Kafka à ses amis, dont Max Brod, son plus fidèle. ce livre m'a plutôt fait penser à un essai qu'a une bio pure et dure. un peu déconcerté mais j'y ai appris de nombreuses choses sur cet écrivain qui, de son vivant, n'a pu apprécier le succès du Procès ni du Château, publiés après sa fin (atroce). Seules ses nouvelles, publiées dans divers journaux et autres, ont fait écho auprès de ces concitoyens.
L'art est également présent dans cet ouvrage,tout comme la judéité, le sionisme, et bien sur les vaines tentatives amoureuses de Kafka, son questionnement permanent, ses angoisses assassines, et pour clore le tout, sa maladie qui l'emportera à 41 ans.
en parcourant cette biographie, on peut se poser la question du rôle du père dans le psychisme de Kafka (sa "Lettre au père" est elle plus romanesque que réelle?), et enfin de se demander si Kafka n'était pas né juif, aurait il eu ce succès (relatif de son vivant) ? En effet, La solidarité joue un rôle prépondérant dans sa carrière, grâce à Max Brod particulièrement. Qu'en aurait il été si Kafka avait été un "goy"?
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Ce n'est pas une biographie comme je m'y attendais et comme je les aime. Ce n'est pas un texte suivi qui parle de la naissance , de la vie et de la mort avec analyses et interprétations. C'est plutôt une biogrpahie qui se base sur les écrits de ses amis principaux ou ceux de Kafka lui-même. Un peu d'interprétation mais pas assez à mes yeux de novice de Kafka. Malgré ma lecture complétée, j'ai de la difficulté à me situer l'homme et l'écrivain et je crains de retenir peu de ce que j'ai difficilement lu...
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
A l'automne [1913], il se rend en Italie : Trieste, Venise, Vérone, Desenzano, sur le lac de Garde, périple qui le conduit au sanatorium de Riva. Là, il fait la connaissance d'une Russe peu farouche qui lui tire les cartes, puis d'une jeune Suissesse [Gerti Wasner dite "G.W."] qui réside près de Gênes et qui lui plaît sur le champ. Il veut la séduire. Cela prend l'allure d'un jeu de collégiens : la nuit, comme leurs chambres sont l'une au-dessus de l'autre, il communique avec elle en frappant au plafond ; le jour, ils canotent sur le lac en devisant légèrement. Cette rencontre lui apporte une révélation inespérée : "Mon séjour à Riva a été d'une grande importance à mes yeux. Pour la première fois, j'ai compris une jeune fille chrétienne et j'ai vécu presque entièrement dans sa sphère d'activité" [Journal, 15 octobre 1913].

[Gérard-Georges LEMAIRE, "Kafka", Chapitre "De la vie laborieuse et de la vie amoureuse", pages 203-204, éd. Gallimard (Paris), coll. "Folio biographies", 2005]
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Quelque chose de spécial attire Kafka chez ce Yirzhac (puis Jizhak et enfin Isjak) Löwy. Il y a d’abord tout ce qui l’a bouleversé au plus haut point dans le théâtre yiddish et ensuite dans la lecture de son journal parisien : « Notre-Dame l’effraie, le tigre du jardin des Plantes l’émeut comme l’image même du désespéré espérant qui trouve dans la pâture l’assouvissement du désespoir et de l’espoir… » Il le rencontre souvent pour écouter ses histoires, s’initier aux rites et aux coutumes orientales et, parallèlement, il se met à lire L’Histoire du judaïsme de Graetz. Il s’intéresse aux auteurs juifs qu’il ignore et déploie une grande activité pour aider ces acteurs de son mieux. (…)
Löwy est né à Varsovie en 1887 dans une famille hassidim très orthodoxe. À dix-sept ans, il s’est enfui de ce monde étouffant et s’est rendu seul à Paris tenter sa chance. Il est parvenu à se faire embaucher comme ouvrier. Le soir, il fréquentait le petit milieu du théâtre yiddosh amateur et il a réussi à jouer dans plusieurs spectacles. En 1907, il est entré dans une vraie troupe et s’y est imposé. Il est parti avec elle dans une grande tournée à travers l’Europe qui l’a mené à Prague en 1911. Kafka est impressionné par cet homme passionné et bouillonnant, qui va jusqu’au bout de ses rêves sans se préoccuper des conventions et de l’argent. Il est tout ce que lui-même aurait aimé être et qu’il sait ne pouvoir jamais devenir : l’incarnation d’une judéité revendiquée haut et fort. Son talent immense de conteur lui en impose autant que l’univers qu’il lui dévoile et qu’il convoite avec gourmandise. Ses cahiers se remplissent de propos tenus par Löwy, qui lui raconte sans fin des fables tirées du Talmud ou des anecdotes de sa vie passée en Pologne. Kafka l’écoute avec admiration et prend note de ce qu’il veut bien lui dire sur cet univers si lointain et qui lui est tellement étranger. Il l’emmène au théâtre ou se promène avec lui jusqu’à forteresse de Seon ou sur l’île de Hetz. (…) En définitive, tout ce qui vient de Löwy le captive, l’émeut et le fait jubiler intérieurement.
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Belle obstination que celle de Franz Kafka à défendre ses productions littéraires, car il est dès le début d'un pessimisme foncier à leur encontre. Rudolf Fuchs rapporte une anecdote particulièrement savoureuse et révélatrice sur la façon dont il affronte le problème, avec beaucoup de scepticisme, une certaine affliction et un humour irrésistible : " Lorsque son premier livre, "Betrachtung" ["Regard"] parut chez Kurt Wolff, il me dit : " Onze livres ont été vendus chez André. J'en ai acheté dix moi-même. Je me demande qui est le onzième. ".
L'humour – à ses dépens – reste son ultime recours.

[Gérard-Georges LEMAIRE, "Kafka", Chapitre "La vraie vie", page 248, éd. Gallimard (Paris), coll. "Folio biographies", 2005]
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Franz fait partie d'une génération de jeunes gens qui ont été élevés avec soin et qui, ont pour un certain nombre d'entre eux, se sont révélés des intellectuels de talent (philosophes, juristes, journalistes, professeurs, penseurs politiques, médecins), mais peu engagés dans la vie active, pas assez en tous cas pour réaliser un grand rêve de réussite dans le monde réel. (p.39).
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Kafka est impressionné par cet homme passionné et bouillonnant, qui va jusqu'au bout de ses rêves sans se préoccuper de conventions et de l'argent. Il est tout ce que lui-même aurait aimé être et qu'il sait ne pouvoir jamais devenir: l'incarnation d'une judéité revendiquée haut et fort. (p.179).
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Vidéo de Gérard-Georges Lemaire
POÉSIE AMÉRICAINE – Traversée new-yorkaise (France Culture, 1980) Une compilation des émissions « Albatros », par Gérard Georges Lemaire, diffusées les 15 juin, 22 juin, 29 juin, 6 juillet et 13 juillet 1980 sur France Culture. Invités : William Seward Burroughs, Serge Grunberg, Brion Gysin, Gérard de Cortanze, Jacques Roubaud, Chantal Thomas, Ted Berrigan, Bernard Heidsieck, Jacques Darras, Eric Sarner, Terence C. Sellers, Kathy Acker, Anne Waldman, David Shapiro, Alain Kirili, John Giorno, Kenneth Gangemi, Claude Minière, Olivier Kaeppelin, Denis Roche, Philippe Sollers et Christian Descamps.
+ Lire la suite
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