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EAN : 9791095115168
298 pages
Yovana (23/11/2018)
4.19/5   24 notes
Résumé :
Jakarta, 1995. La ville est en pleine ébullition à l'approche du cinquantenaire de l'Indépendance. Léo, directeur des cours au Centre franco-indonésien depuis plus d'un an, mène une vie tranquille dans sa vaste demeure, sur laquelle veillent ses domestiques. Dans le quartier de Glodok, Meng fait naître de ses mains expertes des replicas, ces offrandes funéraires de papier dont les Indonésiens d'ascendance chinoise font grand usage. Observateur admiratif, Léo devient... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
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N'oublie pas Irma - Hélène Honnorat - Editions Yovvana - Masse critique d'octobre 2019.
Je commence toujours par les remerciements, aux éditions Yovana qui m'ont envoyé ce livre avec un petit mot personnalisé, ce que j'ai grandement apprécié, et bien sûr Babélio et ses formidables Masses Critiques.

Au travail !

Tout se déroule à Jakarta, capitale de l'Indonésie, elle se situe sur la côte nord-ouest de l'île de Java. Un mélange historique de cultures - javanaise, malaise, chinoise, arabe, indienne et européenne. Jakarta /dʒaˈkarta/ (en indonésien, Djakarta jusqu'à la réforme orthographique de 1972 ; en français, les deux formes se rencontrent encore) (Wikipédia).
La devise de Jakarta est "L'unité dans la diversité"

Les personnages principaux :
-Léo, directeur des langues du Centre franco-indonésien.
-Irma, étudiante au centre, belle-soeur de Meng, Léo en est amoureux.
-Meng, propriétaire d'un commerce de "replicas" , offrandes funéraires en papier.
Pak Rinto, chauffeur de Léo et La Japonaise, la voiture de Léo.
Quentin, attaché d'ambassade et Estelle, son épouse.
Tanu, chef d'équipe du commerce de Meng.
Le docteur Bao.
Et d'autres encore, mais disons secondaires.

Tout commence quelques jours avant le cinquantenaire de l'indépendance
au mois d'août 1995, Jakarta est en effervescence. Indépendance qui avait été proclamée le 17 août 1945 par Soekarno après plus de trois siècles de domination hollandaise.
"Au moment du « mouvement du 30 septembre 1965 », Soeharto était commandant du Kostrad (en), les réserves stratégiques de l'armée de terre indonésienne. Il organise la répression du mouvement et décrète la dissolution du Parti communiste indonésien (PKI), que l'armée accuse d'être l'instigateur du mouvement.
Suivent des massacres qui font environ un million de victimes communistes ou supposé tels en quelques mois5. Un rapport de la CIA datant de 1968 affirme que ce massacre est « l'un des plus tragiques du XXe siècle, mais aussi l'un des plus ignorés ».
Le 11 mars 1966, Soeharto contraint Soekarno, encore officiellement président, à signer la « Supersemar » (acronyme de Surat Perintah Sebelas Maret, « ordre du 11 mars »). Cet « ordre » sera considéré par Soeharto comme un transfert de pouvoir
Soeharto est élu président de la République le 21 mars 1968 par le Majelis Permusyawaratan Rakyat Sementara (assemblée délibérative du peuple provisoire) que Soekarno avait nommée en 1959." (Wikipédia)
Voilà pour L Histoire, en très très bref, c'est bien plus complexe que cela.

Pour la petite histoire:

Léo attend l'arrivée de Quentin et Estelle qui vont débarquer de Paris chez lui le temps de trouver une maison à leur goût, ce qui n'est pas de tout repos dans la ville grouillante. Il n'était pas très chaud pour cet accueil, ayant ses habitudes, célibataire, mais il n'avait pas trop le choix, ayant une grande demeure et quelques domestiques.
En dehors de son boulot, il rend souvent visite à Meng, son ami , dans le quartier chinois "Glodok", il lui achète d'ailleurs souvent des replicas, et l'observe travailler dans son atelier. Toujours dans sa Japonaise avec son chauffeur Pak Rinto.
Quentin et Estelle s'installe chez Léo, il leur fait visiter la ville, leur explique grosso modo les us et coutumes et les trois sujets tabous en Indonésie : la religion, la corruption et les Chinois.
Quand un jour où Léo était allé rendre visite à Meng, il se trouve devant l'atelier en feu et s'entend hurler par Irma : va-t-en.- Mais pourquoi ? Je peux aider... - Tu as entendu? : va-t-en ! Léo est asthmatique, Il ne peut pas rester dans la fumée. Il apprend peu après que Meng a disparu mais n'a pas été brûlé dans l'incendie qui n'a d'ailleurs touché que l'atelier. Alors commence une enquête avec Quentin et Estelle pour retrouver Meng, inutile de demander l'aide de la police dans le quartier chinois, elle ne se serait même pas déplacée, la violence anti-Chinois étant régulière à Jakarta.
Le corps de Meng est retrouvé mort affreusement mutilé. Qui l'a tué, que signifie ce message laissé dans le livre de comptabilité de Meng à la page des comptes de Léo "N'OUBLIE PAS IRMA- JANGAN LUPA IRMA" S'agit-il d'Irma l'étudiante ? Pourquoi ces mutilations ? le docteur Boa affirme qu'elles sont post-mortem. Tanu le chef d'équipe blessé dans l'incendie mais pas en danger meurt brutalement, pourquoi ? le docteur Boa sait.
L'enquête continue, dans la tension de l'approche du cinquantenaire de l'indépendance et le grand rassemblement de population sur la Place Merdeka (Liberté). Qui va découvrir l'assassin ? Comment ?
Surprise. J'ai été surprise de la fin, je ne m'y attendais pas.
J'ai aimé découvrir un peu l'Indonésie et Jakarta, les religions, la diversité de population, la ville, la politique. J'ai apprécié l'épilogue, et les sources de de l'auteure. 298 pages d'enquête sur fond historique.
Avis aux amateurs.



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Léo, jeune expat français, mène une vie tranquille à Jakarta. Il vit dans une grande maison avec quelques domestiques, son travail de directeur des cours du Centre franco-indonésien lui plaît, ainsi qu'Irma, une des étudiantes du centre. Léo s'est également découvert une passion pour les "replicas", des offrandes funéraires en papier utilisées par les Indonésiens d'origine chinoise. C'est dans ce cadre que Léo a fait la connaissance de Meng, artisan hors pair qui crée ces merveilles de papier. Léo devient un proche de Meng, qui s'avère par ailleurs être le beau-frère d'Irma. La vie est donc belle et paisible, mais le charme est bientôt rompu par l'arrivée de Quentin, fraîchement muté à l'ambassade, et de sa femme Estelle. Léo se voit contraint d'héberger le jeune couple en attendant que celui-ci se trouve un logement convenable dans la jungle immobilière de la ville. Circonstance bien plus dramatique, l'atelier de Meng prend feu et le corps sans vie de celui-ci est découvert horriblement mutilé dans un cimetière abandonné. Sachant pertinemment que la police ne sera d'aucune aide dans cette affaire impliquant un "Chinois" dont la famille est pourtant implantée en Indonésie depuis des générations, Léo décide de mener l'enquête. Mais en cet an de grâce 1995, sa tâche est compliquée par les festivités célébrant les 50 ans de l'indépendance du pays, qui mettent la ville et les autorités en ébullition. D'autres souvenirs plus lugubres et beaucoup moins glorieux affleurent également, puisque 30 ans auparavant, en 1965, des centaines de milliers de membres du parti communiste indonésien et de la minorité chinoise ont été massacrés sur ordre du général Soeharto. Qui a tué Meng et pourquoi, et que signifie le message "N'oublie pas Irma", retrouvé dans la comptabilité de l'atelier, les réponses se trouvent peut-être dans l'histoire récente de l'Indonésie, entre racisme et vieilles rancœurs politiques et religieuses, à moins qu'il ne s'agisse de rivalité commerciale ou amoureuse.
Voilà un livre plaisant à lire, écrit par une auteure qui connaît manifestement son sujet et qui distille intelligemment (et avec un certain humour) quelques clés de compréhension de ce pays complexe et mal connu (en ce qui me concerne). J'en ai appris beaucoup en peu de pages et en me divertissant, je n'en demande pas plus.
En partenariat avec les éditions Yovana via Netgalley.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Je remercie sincèrement NetGalley pour cette découverte: "N'oublie pas Irma"par Hélène Honnorat.
Pour moi, Jakarta c'est une première. C'est un bonheur que de se promener dans cette ville. Nous sommes en 1995, à l'aube du cinquantenaire de l'Indépendance et la ville en est aux préparatifs de la fête. Léo, un français, responsable du Centre franco-indonésien habite la ville depuis plus d'un an. Seul dans sa grande demeure avec ses domestiques, il sera l'hôte du couple que forme le nouvel attaché à l'ambassade française et sa conjointe. On sent Léo amoureux de l'Indonésie, il en a appris la langue, les us et coutumes, l'histoire et on voit bien aussi le plaisir qu'il a à faire découvrir ce pays et ses peuples. Léo s'est lié avec Meng, un chinois artisan de replicas du quartier de Glodok. Celui-ci sera sauvagement assassiné et Léo sera obsédé par la recherche du meurtrier de son ami. Ce meurtre est presque prétexte à ce que l'autrice nous raconte toutes les exactions, meurtres et persécutions dont sont victimes les chinois dans ce pays. L'arrivée au pouvoir de Sokarno et la proclamation de l'Indépendance en aout '45 a donné lieu à de nombreuses années de crises, de luttes sociales et identitaires et de rébellions séparatistes. Puis, vint Soharto qui lutte contre le parti communiste, les Chinois, les conservateurs, les religions, le Timor, les tribus, bref c'est une période noire où entre 500,000 et 3 millions de personnes furent tuées. Il est difficile dans un court roman de nous faire comprendre tout ce qui a bien pu se passer dans ce pays et j'ai quelquefois eu du mal à bien saisir. Mais au final, j'ai visité Jakarta, j'ai presque compris pourquoi Meng a été tué et je suis heureuse d'avoir rencontré Léo.
Merci pour #NoubliePasIrma #NetGalleyFrance
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J'ai obtenu ce roman policier lors d'une opération Masse critique et je remercie les Editions Yovana et Babelio d'avoir pu découvrir ce livre. Si j'avais demandé à pouvoir le lire, c'est que l'action se passait dans en Indonésie, un pays que je ne connais pas et qui plus est, une Histoire que je ne connais pas non plus.
A la lecture du roman, j'ai eu très vite l'impression que l'enquête que mène à titre personnel Léo, le personnage principal, n'est qu'un prétexte pour l'auteure de nous parler de l'Indonésie, de son passé colonial, de son histoire récente –notamment les événements de 1965-, de ses moeurs etc… Ce qui explique pourquoi je me suis légèrement ennuyée, le meurtre de Meng est certes résolu mais parce qu'il faut bien le résoudre, c'est réglé en deux coups de cuillères à pot, si je puis parler ainsi. J'ai eu l'impression que la seule chose qui intéressait l'auteur c'étaient les événements de 1965 : six généraux furent retrouvés assassinés et le pouvoir en la personne de Suharto (ou Soeharto) qui prit le pouvoir à ce moment-là, se chargea d'accuser les communistes et de lancer une répression terrible contre eux, en pointant aussi du doigt les citoyens chinois qui vivaient en Indonésie. Au moins j'ai appris quelque chose à défaut d'être enthousiasmée par l'enquête de Léo.
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N'oublie pas Irma Hélène Honnorat , éditions Yovana, novembre 2018 #NoubliePasIrma #NetGalleyFrance
1995, l'Indonésie fête le cinquantenaire de son indépendance. Une ville parée de rouge et de blanc, couleurs nationales mais une ville où le sang coule ...
Léo est le directeurs des cours au Centre franco-indonésien depuis un an. Il se plait dans cette ville , il s'y est fait des amis entre autres un artiste, Meng, spécialisé dans l'art des replicas, les offrandes funéraires que l'on fait brûler lors des enterrements . Or le feu ravage son atelier et Meng est retrouvé mort, mutilé . Qui, comment pourquoi? Voici les trois questions et Léo veut y répondre. La douce Irma la soeur de Meng est-elle elle aussi en danger? lui-même risque t'il quelque chose? Il va commencer l'enquête aidé dans sa tâche par un jeune couple arrivé depuis peu de France installé chez lui en attendant de trouver leur future maison.
Une enquête qui nous permet de plonger dans les méandres de la mémoire indonésienne, dans ce passé proche et sulfureux, dans les strates de sa population qui se détestent depuis des mille et des cent ... Un voyage initiatique qui nous dévoile un pays encore peu ou mal cicatrisé. les plages idylliques de Bali semblent bien loin ...
J'ai beaucoup apprécié ce roman et je remercie vivement les éditions Yovana pour cette découverte. Un voyage enrichissant que je ne peux que recommander à tous ceux qui aiment découvrir plus et encore.
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critiques presse (1)
LePoint
19 novembre 2019
En Indonésie aussi, le meurtre court les rues… La Française Hélène Honnorat nous entraîne sur l'île de Java dans un polar-voyage archi-exotique.
Lire la critique sur le site : LePoint
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
1
L’air s'est enflammé, s’est emparé d’un rang de motos et a tout avalé en un seul coup de langue. Quant au vélo blanc et or : tordu en trois secondes. Je me suis retourné ; le feu avait pris dans mon dos.
La voiture n’a guère résisté plus longtemps. Dans une cacophonie de sifflements, de ronflements, d’éclatements, elle aussi a capitulé. Les fumées enflaient à toute vitesse, emplissant la rue. J’ai distingué un instant le visage du chauffeur, sa casquette, sa livrée aux boutons brillants, ses yeux grands ouverts, ses mains qui n’avaient pas quitté le volant.
— Ada kebakaran ! Il y a le feu !
Tout le pâté de maisons s’était mis à résonner. Des bassines en émail, en fer blanc, des seaux, des tuyaux, des citernes. De l’eau, de l’eau ! Les habitants la jetaient sur le trottoir, à la base des murs, dans la gueule de la porte ouverte, autour de laquelle on s’affairait. Je suffoquais, figé. J’ai aperçu un couple, immobile comme moi. La femme portait une tunique barrée par une large ceinture. Un torrent de fumée est passé entre nous. Puis, plus rien. Sauf les cris, les ordres lancés.
— Va-t’en.
Subitement, Irma s'était retrouvée à mes côtés. Détachée, elle ne s’adressait qu’à moi, au milieu du vacarme et des flammèches. Je n’étais pas sûr d’avoir bien compris.
— Mais pourquoi ? Je peux aider…
Des silhouettes féminines faisaient la chaîne, posaient d’encombrants objets dans le caniveau, les arrosaient, les portaient plus loin. Quelques billets de banque voltigeaient, gros papillons de nuit.
Une façade s’est pliée en deux sans hâte. Ses pilastres craquaient, les contrevents ajourés ondulaient. Son toit s'est couronné d’étincelles. Nous étions pris dans un halo cramoisi. Elle a répété en français :
— Tu as entendu ? Va-t’en !
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Je peux te dire ce que tu aurais vu, du haut de ces cent trente-sept mètres : embrochée sur son axe nord-sud, Jakarta dans tous ses états, telle que je l’ai naguère découverte. À son nord extrême, l’ancien port. Pas celui des cargos, des porte-conteneurs et autres bateaux-citernes clapotant de pétrole jusqu’à la gueule ! Celui des voiliers-espadons qui cabotent d’île en île comme ils le faisaient trois siècles auparavant, bourrés de bétail, d’étoffes, de riz, de sucre, de poivre, de tabac, d’épices, d’indigo, d’écorce de quinquina… et de bois, de bois, de bois ! Montagnes de planches rouges sur les quais. Ici font escale les héritiers des pirates malais et des trafiquants chinois, les vaisseaux-fantômes, les Hollandais volants, naviguant aux étoiles à l’heure des balises Argos – tout au plus a-t-on greffé un moteur, parfois, sur le modèle d’origine. Sous la proue sautille une annexe en forme de pirogue, que l’on appelle sampan. Au bout de la dernière jetée, la Mer de Java, charbonneuse, lente, jonchée de débris.

Entre elle et toi, les quartiers « historiques » : l’ancienne Batavia et sa grand-place, l’ex-Hôtel de Ville et Cour de Justice… Depuis le balcon, les notables hollandais assistaient aux exécutions capitales : il y avait ceux que l’on rouait vifs, ceux que l’on exécutait à la pointe de l’épée, ceux que l’on pendait, ceux que l’on fouettait. Mais ceux qui hurlaient le plus longtemps – plusieurs jours, dit la chronique – avant de succomber étaient ceux soumis au supplice du pal. Cependant quatre-vingt-cinq pour cent des prisonniers mouraient (quelle ingratitude !) alors qu’ils étaient les hôtes des sous-sols inondables du bâtiment.

Tu aurais parcouru des yeux ce qui reste du quadrillage aquatique. L’avantage de la vue aérienne, c’est qu’elle permet d’échapper à la puanteur. Une pensée pour Apollinaire. Voie lactée ô sœur lumineuse des noirs canaux de Batavia… Ils t’auraient menée à Glodok. Tu aurais distingué la passerelle, à cheval sur l’artère principale, et ses escaliers qui furent un jour mécaniques, tapissés d’une moquette de crasse. Aperçu peut-être les cages à oiseaux hissées vers le soleil, oriflammes au sommet de leurs mâts. Tu aurais pu entendre, mélangés à leurs chants et à celui des vendeurs de légumes du marché, les cris autour d'un combat de coqs devant la porte du magasin de photocopies.

Et puis ton regard aurait suivi la rue de la Grande Porte Sud jusqu’au Monas et à l’esplanade, à tes pieds.
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J’avais frémi. J’avais compris qu’on pouvait être foudroyé.
Compris qu’on pouvait se prendre de passion pour l’incompréhensible, le mauvais goût, l’hétéroclite.

Les portes de la maison de la grand-mère Anna étaient argentées, comme les lions, les biches et les griffons qui foulaient l’herbe du jardin sur rue, tout en largeur. J’apercevais à l’arrière un jardin plus profond avec des pavillons. Les lions me semblaient plus romains qu’asiatiques, mais les nains en porcelaine, à peine plus hauts que les plantes, s’étaient à coup sûr échappés de l’empire du Milieu. Pas d’étage, pas de mur pignon avec redents à la batave ni de toit retroussé à la chinoise. Une galerie courait d’un bout à l’autre de la façade, soutenue par des piliers métalliques cannelés de facture européenne. Des anges, un peu partout, sur des sellettes : non pas des chérubins, mais des anges adultes, blancs, argent, un peu écaillés, sans doute métalliques eux aussi.

Je n’avais pas sonné. J’avais couru acheter une boîte de biscuits assortis et des dattes.
— Elle s’appelle Guanyin, vous la connaissez ?

La statuette portait une longue robe blanche, un chignon… Je m’étais lancé.
— La déesse de la miséricorde ?

Anna avait éclaté de rire.
— Oui, mais c’est Guanyin Prolongatrice de Vie : elle se tient derrière un rocher. Vous voyez, elle est très efficace avec moi !

Nouvelle explosion de gaieté. La figurine d'ivoire s’abritait sous un globe qu’Anna avait tapoté affectueusement.
— En effet.

Soixante-dix ans ? Quatre-vingts ? Impossible à dire. La grand-mère d’Irma était vêtue d’une robe gris perle, elle avait planté deux ornements de nacre dans son chignon, elle souriait de toutes ses dents intactes et s’exprimait en anglais d’une voix aiguë. Quand l’une des domestiques (j’en avais déjà aperçu plusieurs autres) m’avait ouvert, Irma avait simplement déclaré que j’étais son professeur de langue française. Désolée, elle ne parlait pas français, seulement hollandais, vieux javanais, indonésien et anglais.
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Nous avons tellement l’habitude, la Japonaise et moi, de fendre la ville du sud au nord, vers mon bureau, vers l’ambassade, vers Glodok, et retour, que je m’attends presque à la voir suivre seule le droit fil habituel. Je la dirige vers l’est, et constate qu’elle se soumet.

Dimanche familial à Lubang Buaya, restaurants en plein air sur les trottoirs. On lave la vaisselle métallique dans les rigoles, un vendeur de kérosène emplit ses bidons. Bébés vêtus d’un T-shirt trop grand, cul et pieds nus, jouant au bord des caniveaux – je me suis toujours demandé grâce à quel sortilège les mères évitaient qu’ils se fassent écraser –, marchands ambulants (soupe, porridge au poulet ou au poisson, bassines en plastique, brosses, tongs en caoutchouc jaune fluo), taxis collectifs, cyclistes. Je suis les indications de Basile. À l’arrivée, il nous désigne l’ancien aéroport et le site qui englobe le Musée de la trahison communiste, la Véranda des tortures, le Trou du Crocodile, le monument aux héros.
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