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sur 677 notes
Lors d'une visite au camp de concentration de Buchenwald où il accompagne ses élèves, un professeur découvre sur une photographie un détenu qui ressemble à s'y méprendre à son propre père. Troublé, il entreprend des recherches qui vont le mener sur le double chemin de son histoire familiale et de la folie nazie.

Peut-on comprendre les mécanismes qui font que des hommes se livrent à la barbarie ? Peut-on percer l'essence du "Mal absolu" dont les camps de la mort furent le théâtre, quand, ainsi que le déplorait Jorge Semprun, le tourment moral qui habitait les détenus, au coeur de l'expérience de ces camps, est intransmissible ? Intransmissible parce que ce mal n'est pas un concept, mais quelque chose que l'on ressent à l'intérieur de soi, et qui est indicible parce que ne peuvent l'appréhender que ceux qui l'ont subi.

Fabrice Humbert a l'intelligence -ou l'humilité- de ne pas prétendre résoudre cette énigme. Au lieu de cela, il se sert de son récit et de son personnage principal (le professeur narrateur) pour s'interroger sur l'héritage que nous laisse ce terrible pan d'histoire, "ce laps de temps court mais effrayant ouvrant la boîte de Pandore de l'Humanité", et qui ne serait que le révélateur du potentiel de violence que recèle l'homme depuis toujours. Et de rappeler qu'en effet, le nazisme ne fut pas l'oeuvre de quelques fous furieux dont la monstruosité aurait été évidente -et rassurante-, mais une violence administrative, organisée, dénuée de passion...

C'est pour cela qu'en recherchant l'origine de cette violence en se basant sur l'exemple des camps, le narrateur en vient à s'interroger sur la genèse de sa propre violence, et par extension sur celle qui sommeille en chacun de nous. Et en partant du principe qu'en ce qui le concerne, ce sont ses peurs qui réveillent sa colère et sa brutalité, il imagine qu'en les analysant, il parviendra peut-être à comprendre le processus de cette violence. C'est pourquoi, lors de son enquête, il s'intéresse presque davantage au bourreau -un médecin SS- de son aïeul qu'à ce dernier. En effet, ce médecin non seulement est le parfait exemple de ces individus qui furent des rouages du mécanisme d'extermination mis en place par le IIIème Reich (un homme somme toute banal) mais il est aussi pour cette raison celui que choisit notre professeur comme représentant de ses peurs. S'il élucide les raisons qui ont poussé le médecin à devenir ce monstre ordinaire, il maîtrisera ces peurs -nées, finalement de l'incompréhension face à l'horreur- et donc sa violence...

J'en reviens à cette notion d'héritage que j'évoque plus haut... l'abomination que furent les camps d'extermination (et l'ensemble des comportements qui y ont contribué : les dénonciations, la résignation...) nous a surtout laissé des questions sans réponse. Elle est une preuve de ce dont l'homme peut se révéler capable, et nous laisse démunis face à ce constat.

C'est ce qu'évoque Fabrice Humbert sans jamais tomber dans le manichéisme.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Tout ce que j'aime réuni dans ce roman : La famille, les secrets, la question des origines.. Et écrit avec beaucoup de finesse
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Livre très prenant qui nous apprend beaucoup sur cette période noire de l'Histoire.
J'ai été captivée du début à la fin.
Je le recommande.
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Le roman de Fabrice Humbert s'inscrit dans le courant du renouveau de la littérature concentrationnaire inauguré par "Les Bienveilllantes". Laurent Binet avec son roman-essai sur Reinhard Heydrich, "HHhH" l'illustre aussi. La nouvelle génération - l'auteur est trentenaire- revisite cette période dramatique, longtemps occultée et en interroge le sens. le mérite particulier de Fabrice Humbert est de tisser un écheveau serré avec la vraie/fausse reconstitution d'un épisode du camp de Buchenwald, une histoire personnelle et familiale et une quête identitaire. Cet objectif ambitieux est atteint d'une certaine manière, puisqu'il y a un vrai suspense dans l'enquête menée dans une savante progression. le récit, à la première personne, donne autant d'importance au sujet narrateur, qu'à l'objet de l'étude - les circonstances de la mort d'un grand père dans le camp de Buchenwald - . D'un côté le narrateur, qui, comme l'auteur, enseigne la littérature dans un lycée franco allemand, fait de la boxe pour se défouler, est très préoccupé, quoiqu'il en dise, de son rôle d'héritier dans une famille très bourgeoise dont il finira par percer le secret. de l'autre côté, la vie à Buchenwald, telle que reconstituée minutieusement, pour les besoins de l'intrigue. On peut accepter, au nom des droits imprescriptibles de la fiction, que L Histoire soit reconstruite et adaptée au récit de l'auteur, à la manière de Yannick Haenel, dans "Jan Karski", et ce, quoiqu'en dise Jacques Lanzmann. Mais on ne peut empêcher qu'un malaise gagne le lecteur à voir la Shoa utilisée comme le simple décor d'une intrigue. Décor soigné, certes, puisque de grands auteurs sont convoqués, de manière un peu universitaire - Styron, Levi, Semprun, et même le grand Sebastian Haffner ("Histoire d'un allemand"), évoqué comme "referendar" auprès de l'un des protagonistes du récit. Emporté par l'élan, le propos s'enhardit dans une audacieuse modernité, imaginant une intrigue amoureuse torride entre le narrateur et la petite fille d'un conjuré de l'attentat contre Hitler organisé par von Stauffenberg. le narrateur est envouté par cette jeune blonde rock-star bibliothécaire à la plastique avantageuse, libérée de toute interrogation métaphysique sur son passé. C'est donc un peu décontenancé que l'on pose ce livre, certes plein d'ambition et de talent, mais emporté par sa virtuosité loin de toute vraisemblance. Il n'est pas impossible que Fabrice Humbert trouve un large public, bluffé par ses audaces, son introspection psychologisante, sa reconstitution minutieuse de la vie d'un camp de concentration, l'ambiguïté sur la vérité de l'histoire racontée et ses complaisantes références maléfiques.
Lien : http://diacritiques.blogspot..
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Professeur de lettres dans un lycée franco-allemand, le narrateur accompagne ses élèves à Buchenwald. Lors de cette visite, il est frappé par la photo d'un déporté qui ressemble étrangement à son père. Il enquête sur cet homme, David Wagner, et parallèlement sur l'histoire de sa propre famille. Ses recherches le confrontent à l'horreur de la Shoah, et à son propre rapport à la violence...
J'ai découvert "L'origine de la violence" en 2009, je l'ai relu dans le cadre d'un prix de lecteurs. J'ai retrouvé le même plaisir de lecture lorsque le narrateur fouille dans le passé familial... puis le même choc quand il est question de Buchenwald. Fabrice Humbert traite de l'horreur des camps sans fard, il nous livre des faits bruts, atroces. Ce faisant, il s'interroge sur la violence, le sadisme sans bornes des bourreaux. Plus diluée, éparpillée, la deuxième partie du roman m'a moins convaincue : l'auteur y développe des réflexions sur le nazisme (et là j'ai trouvé des longueurs), il revient également sur l'histoire familiale des Fabre - adultère, relations père-fils, identité et filiation... En dépit de ces quelques réserves, cet ouvrage reste pour moi un récit intense, révoltant, bouleversant, sur la Shoah et la violence humaine...

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Un roman puissant, bouleversant, un style épuré, sans fioriture.
Un roman magistral,
le meilleur parmi tous ceux que j'ai lus,

depuis longtemps,
qui relativise d'un coup l'intérêt de beaucoup d'autres.

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Pas évident de donner mes impressions sur ce livre : des critiques quasi unanimes, un ressenti mitigé et une histoire pourtant pleine de sens.

Lors d'une visite de Buchenwald avec ses élèves, le narrateur, jeune professeur de littérature, est comme happé par une photographie représentant le médecin du camp : à l'arrière-plan, un prisonnier ressemble étonnamment à son propre père, Adrien Fabre.
La ressemblance est trop frappante, l'impression d'étrangeté est trop forte, et Adrien élude un peu trop le sujet quelques semaines plus tard…
De là, commence un travail de reconstitution et d'enquête grâce auquel le narrateur découvre un pan inattendu de son histoire familiale. Il trace peu à peu le portrait de David Wagner – un détenu juif parmi tant d'autres, tailleur parisien rêvant de réussite, jeune homme charmeur et opportuniste, victime des camps de la mort… Son véritable grand-père.
Inlassablement, notre héros poursuit sa quête, cherche des explications : en Allemagne où il s'installe et tente de reconstituer à la fois les événements autour de la mort de David et le destin des protagonistes, en Normandie où sa grande famille bourgeoise se réunit ponctuellement, à l'hôpital où son grand-père Marcel – l'autre, celui de toujours – accepte enfin de lever le voile.

Si on ne se débarrasse pas aisément d'une telle révélation, on ne tourne pas davantage le dos à une filiation, une appartenance : Adrien est bien plus le fils de Marcel Fabre que de David Wagner, et le narrateur son petit-fils. Fabrice Humbert explore avec finesse la filiation, le poids des origines « véritables », celui de l'éducation et bien entendu la force du secret de famille.

Une trame intéressante, une écriture fine et percutante : tout est là pour faire un grand roman. Et pourtant, L'Origine de la violence ne m'a pas réellement plu. Il m'a malheureusement fait enfin comprendre ce qui me déplaît souvent dans les textes teintés d'autofiction : l'autopsychanalyse. Certes, le héros veut comprendre « l'origine de sa violence » mais le décorticage méthodique des uns et des autres est l'occasion de développements parfois très longs, voire ennuyeux.
Une partie importante du récit est consacrée aux camps : et, c'est terrible à dire mais, pour qui a lu ne serait-ce que Primo Levi et Jorge Semprun, ce n'est pas toujours passionnant. Ici, l'auteur aurait dû selon moi se concentrer sur le factuel, et moins se précipiter dans les considérations plus générales sur une thématique explorée déjà si finement.

Une impression étrangement mitigée donc : L'Origine de la violence est une histoire intéressante, traitée avec subtilité, les réflexions sont pertinentes… mais des longueurs, des développements peut intéressants et un certain narcissisme m'ont déçue.


Lien : http://monbaratin.blogspot.c..
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Une enquête absolument passionnante, digne d'un polar, mais aussi empreinte de beaucoup d'émotion, que vous ne pourrez pas lâcher tant que vous n'aurez pas terminé ce livre. A la suite de la découverte de cette étrange ressemblance entre son père et un prisonnier de Buchenwald, le narrateur va mener des recherches minutieuses : il retrouve les témoins de l'époque, les fait parler, réunit peu à peu toutes les pièces de ce puzzle familial, de ce secret de famille qu'on a soigneusement tû.

Et comme tous les secrets de famille, cela cache des attitudes et des évènements pas vraiment jolis-jolis. Bassesses, lâchetés, mensonges, trahisons... tout y est, mais il faut encore trouver le pourquoi et le comment et répondre à toutes les questions qui se posent une à une, au fur et à mesure qu'on en apprend un peu plus sur les membres de cette famille. Et on a froid dans le dos de voir ce mal roder partout, cette violence, parfois sourde ou parfois éclatant au grand jour se propager et, telle une maladie infamante, atteindre tous ou presque tous les gens confrontés à cette histoire, et à cette période de l'Histoire.

La question cruciale est bien de comprendre où se situe l'origine de la violence.
Suite sur Les lectures de Lili
Lien : http://liliba.canalblog.com/..
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Un beau livre profond qui vient mêler à dessein des quêtes sur les origines : celle d'un grand-père inconnu retrouvé sur une photo exposée à la vue de tous , celle du mal absolu qui enferme le cadre de cette photo et qui entraina la perte de cet aïeul et de de milliers d'êtres: le camp de concentration de Buchenwald.

Rien n'est laissé au hasard : la narration autobiographique qui rend si proche le personnage principal dans sa progression, les témoignages de tous les survivants de cette époque recomposant les faits et les parcours, enfin l'exigence de la réflexion et les références qui l'alimentent (Levi, Semprun, Goethe, ...)

Un roman actuel, intelligent et touchant destiné à percer non seulement des secrets, mais, les carapaces de l'oubli alors que s'estompent peu à peu les ombres des horreurs du nazisme.

Un petit point d'agacement, mais, qui reste un détail :
j'ai trouvé incongrue la liaison du personnage principal avec une fille canon dont le grand-père fut ancien du NSDAP, et aussi un proche de Stauffenberg (un des principaux organisateurs de l'attentat raté contre Hitler en juillet 44).

Il me semble que la comparaison intéressante qui suit avec Haffner, auteur du journal d'un allemand : http://www.babelio.com/livres/Haffner-Histoire-dun-Allemand--Souvenirs-1914-1933/14813
, aurait pu être amené sans cet artifice où je suis juste venu me dire : "Cela fait beaucoup!"
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C'est lors d'un voyage en Allemagne, à Bunchenwald, avec ses élèves, que le narrateur découvre une photographie d'un prisonnier du camp, David Wagner, qui ressemble étonnamment à son père.
Cette image ne cessera de le tourmenter jusqu'à ce qu'il découvre le véritable parcours de cet homme, tailleur juif français, amoureux de l'épouse d'un riche préfet normand.
Mais qui était David Wagner, et qu'a-t-il fait pour mériter une fin si violente et si inhumaine?

Car la violence est le véritable thème ici, et l'insupportable aléatoire des destinées. Comment comprendre, justifier, le sort de millions de gens dans les camps? de devenir de la sorte le martyr de tout un continent?
Toute sa vie, le narrateur s'est interrogé, pour reprendre un titre de Primo Levi, sur "les élus et les damnés", ceux qui s'en sortent et ceux sur lesquels le malheur et la souffrance s'acharnent. Et au milieu que reste t-il, à part celui qui, spectateur de l'histoire, peut décider ou non d'intervenir?
Car finalement, qu'est-ce qui distingue les bourreaux des martyrs? Qu'est-ce que ce mal qui s'empare sporadiquement de certains parmi les hommes? Est-ce une folie ou un véritable Mal? Un dérapage de l'histoire ou une véritable conséquence de l'échec de la politique et de la morale européennes?

Deux parcours sont enchâssés dans le récit, celui du grand-père inconnu, et celui du narrateur ; mais ce double récit est également enclavé dans une double histoire, celle de la seconde guerre mondiale et celle de deux familles, hasardeusement connectées et pourtant diamétralement opposées, les Fabre et les Wagner.

La suite sur http://www.madamedub.com/crbst_101.html

Lien : http://www.madamedub.com
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