C'est confortablement installé sur une pile de 10/18 que j'ai entrepris avec gourmandise la lecture de cette autobiographie.
Je me suis donc lancé sur "les chemins qui marchent", à travers les mémoires de
Francis Lacassin.
Et, comme le le disait si bien le détective chinois Charlie Chan : "un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas".
Après un moment de silence, il finissait par ajouter :
"Il se leva et prit son chapeau".
Mais ceci est une autre histoire ...
En 1957, dans un camp isolé du sud tunisien,
Francis Lacassin, un bouquin à la main, rêvait d'être scénariste.
Bernard Chardère, un prof de philo
De Nantes, dont le véritable nom était Pierre Ayraud, lui avait proposé de le rejoindre à Lyon pour fonder une société de production de courts-métrages.
Mais le destin en avait décidé autrement.
Quelques romans de
Boileau et de Narcejac, une ou deux recommandations amicales l'ont finalement guidé, en 1959, jusqu'à rencontrer les deux fameux auteurs de roman policier.
Avant de continuer cette chronique, il faut dire avant-tout, prévenir que
Francis Lacassin, tout au long de son autobiographie, aura du mal à se glisser dans ses propres mémoires, tant elles sont riches de rencontres, pleines de personnages de fiction et de redécouvertes.
Car le destin de
Francis Lacassin est placé sous le triple-signe du scorpion, de la littérature populaire et de la redécouverte !
La redécouverte de Fantomas, bien oublié après avoir été encensé par les surréalistes ...
Celle de
Jack London, cantonné à la bibliothèque verte et à une littérature jeunesse balbutiante ...
De Gustave le Rouge aussi, dont la
Bibliothèque Nationale ne possédait aucun des livres perdus ...
Celle encore de l'immense
Georges Simenon dont il fût l'ami et dont il démontra la modernité et l'originalité ...
Et de bien d'autres encore, que
Francis Lacassin a souvent sorti d'un injuste oubli grâce à de nombreuses rééditions inattendues et à des préfaces passionnantes dans les collection 10/18 et Bouquins de chez Robert Laffont.
Une réédition plus ou moins récente de
Jack London, voulant d'ailleurs jouer la carte de la modernité, avait cru pouvoir se passer des préfaces lumineuses de Lacassin.
Mauvaise pioche !
La lecture de "
Jack London ou l'écriture vécue" aura vite remis les pendules à l'heure !
Les mémoires de
Francis Lacassin sont donc un passionnant périple à travers la "littérature populaire", celle qu'il qualifiait parfois ironiquement d'"illettrée", celle dont il était un illustre "passager clandestin".
Cependant, ce livre de "Mémoires" n'est pas celui que j'aurai envie de conseiller pour une première rencontre avec
Francis Lacassin.
Ils sont quelques petits bouquins à lui préférer, à traquer chez votre bouquiniste attitré, quelques premières meilleures incursions dans l'univers de Lacassin :
- "passagers clandestins", "
à la recherche de l'empire caché", "
mythologie du roman policier" et quelques autres, souvent aussitôt épuisés que rarement réédités.
Francis Lacassin semblait avoir installé sa vie sous l'égide de cette citation de
Pierre Mac Orlan :
"Quand on a le goût des êtres exceptionnels, on finit toujours par en rencontrer partout".
La meilleure preuve en est que par ce livre j'apprends même que
Jean-Paul Sartre qui, prisonnier au stalag XII d'à Petrisberg près de Trèves avec mon grand-père, l'était aussi avec
Pierre Boileau.
Quel trio de talent les allemands n'avaient-ils pas là sous la main ?
Ceci dit, pour revenir une dernière fois sur les chemins qui marchent, on imagine bien
Francis Lacassin, aujourd'hui à "l'entracte de sa vie", poursuivant sa passion des livres, proposer à Saint-Pierre quelques bons vieux bouquins, et lui recommander quelque auteur oublié ...
* "la mort est un simple entracte de la vie". - "She" -
Henry Rider Haggard -