Après deux essais infructueux avec Ohran Pamuk (Neige) et Virginie Despentes (Vernon Subutex), deux livres que j'ai abandonnés très rapidement malgré l'intérêt que je porte à ces deux auteurs, j'ai déniché ce roman de Patrick Lapeyre, auteur inconnu pour moi, au fond d'une petite bibliothèque.
Ne me laissant pas rebuter par la couverture sale, très usagée et maculée de taches de café.
Je suis très vite entré dans cette intrigue, banale histoire d'un homme incapable de choisir entre son épouse et sa maîtresse. L'auteur nous plonge dans les pensées, les doutes quasi obsessionnels de cet homme, en parallèle avec ceux de son amante et dans une moindre mesure, du deuxième amant de celle-ci. le rythme est lent, l'écriture décortique la moindre pensée, le moindre geste, un peu à la manière de Robbe-Grillet. Mais c'est à ce prix que l'on saisit les difficultés existentielles – pathologiques - des personnages qui sombreront à peu près tous dans la dépression ou du moins dans des questionnements et des choix de vie douloureux. Cette mise à plat de la temporalité du récit nous permet à nous lecteurs, d'évoluer au rythme des personnages et de comprendre leur désarroi. L'action se situe entre Paris et Londres puisque Nora, la jeune amante est anglaise mais partage son temps et ses deux amants entres ces deux villes. Pour autant, l'auteur ne s'appesantit pas à décrire outre mesure l'environnement urbain. Les personnages sont seulement ancrés dans leur milieu, juste pour les définir socialement. L'un, traducteur d'anglais occasionnel végétant d'une commande à l'autre et l'autre, trader à la City qui finira par être licencié. L'inconsistance sociale de Nora l'oblige à vivre d'expédients et de la sollicitude de ses amants et d'amis. le livre est centré sur les hasards de la vie, les rencontres fortuites, mais aussi les passions amoureuses et les désirs qui nous déterminent dans nos actions. Le quotidien est décortiqué à outrance, ce qui a pu dérouter et agacer certains lecteurs. Pour ma part, je me suis souvent retrouvé dans dans ces personnages, leurs pensées, leurs actions, leurs doutes. Un autre aspect intéressant du livre est évidemment la différence essentielle entre le mode de pensée des hommes et des femmes. On recherche la même chose, mais pas du tout par les mêmes perceptions. Nos attentes sont souvent en décalage. A ce propos, on retrouve un peu cette problématique récurrente chez Kundera. On a toujours l'impression que l'homme et la femme ne vivent jamais dans le même « espace-temps ».
En résumé, c'est un livre riche, même si l'histoire est d'une banalité déconcertante, qui nous fait réfléchir sur nos choix, notre vie, nos sentiments...
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Argh ! La vie est brève et ce livre sans fin ! Quelle perte de temps que cette lecture que j'ai pourtant menée jusqu'au bout dans l'espoir d'y trouver un petit quelque chose qui mériterait son prix fémina... Quelle déception, la fin est pire encore que le reste! Ça se veut beau, ça se veut intelligent, poétique, moderne, pur et passionné... Et bien personnellement j'ai trouvé ça vide, arrogant, futile et inutile. C'est vrai je suis un peu trop dure, certains passages sont quand-même jolis et l'auteur a bien sûr un style intéressant et agréable mais vraiment le tout ne vaut pas le détour et les états d'âmes insipides de Louis Bleriot, Nora Neville et autres personnages tout aussi antipathiques ne m'ont vraiment en rien intéressée...
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Murphy Blomdale a beau parfois paraître résigné et mener depuis des mois une vie terne et autarcique, le temps n’a pu supprimer son besoin de revoir Vicky, parce qu’elle demeure son unique lien avec Nora.
Au point que ce soir on pourrait croire à les voir chuchoter qu’ils sont les deux dernières personnes à parler une langue disparue.
Vous aviez vos habitudes dans ce bar ? lui demanda-t-elle.
Elle venait souvent m’attendre ici, quand je sortais du travail et qu’on avait décidé d’aller dîner quelque part.
À présent, il n’y retourne plus que le week-end, presque toujours en solitaire, lui confie-t-il. D’abord parce qu’il n’a pas beaucoup d’amis à Londres, ensuite parce qu’il a aussi envie d’être seul pour le cas très improbable où Nora reviendrait et pousserait la porte d’entrée.
Je suis resté romantique, s’amuse Murphy en la regardant, émerveillé par la beauté et la plénitude de ses formes, mais sans trouble, en tout cas sans aucune excitation.
Confidence pour confidence, Vicky lui avoue que de son côté elle continue de sursauter à la moindre sonnerie de téléphone, convaincue d’entendre enfin la voix de Nora.
Je ne sais pas si tu te souviens, lui dit-elle, de ce personnage de Bradbury, dans les chroniques martiennes, qui a la particularité de changer de sexe et d’identité dès qu’il rencontre quelqu’un.
Je n’ai jamais lu Bradbury.
En fait, sans le vouloir, il prend chaque fois le visage de celui ou de celle que l’autre attendait depuis des années. Comme s’il devenait la projection de son désir.
À la fin, tout le monde lui donne la chasse et il n’est plus qu’une silhouette galopante, épouvantablement malheureux.
Murphy doit convenir que ce pourrait être une bonne définition de Nora.
" Malgré la distance qui les sépare, on a l'impression permanente que Murphy et Blériot se déplacent de part et d'autre d'une paroi très fine, aussi transparente qu'une cloison en papier, chacun connaissant l'existence de l'autre, y pensant forcément, mais sans pouvoir lui donner un nom ou un visage, de sorte qu'ils paraissent tous les deux progresser à tâtons comme des somnambules avançant dans des couloirs parallèles
Peut-être que les souvenirs sont beaux à cause de cela. Parce qu'avec le temps, le filtre des années, ils deviennent comme des produits purifiés, débarrassés des scories du chagrin et de la peur.
A l'est, du côté de Canary Wharf, les chiffres des cotations boursières continuent de défiler sur la tour de l'agence Reuters comme si de rien n'était.
Alors je vous quitte rassuré. Je suis convaincu qu'on se retrouvera tous les deux à Philadelphie, lui dit Borowitz en lui broyant la main d'émotion.
En bas, ses collègues expédient les affaires courantes et commencent leurs cartons tels des fonctionnaires démissionnés. La cafeteria est quasi-déserte.
Il marche pendant qu'elle dort dans son lit, avec la sensation d'avancer de salle en salle à l'intérieur de son sommeil, jusqu'à la chambre secrète où bat le coeur de l'enfant.
"Bienvenue aux éditions P.O.L", un film de Valérie Mréjen. Pour les 40 ans des éditions P.O.L, quelques un(e)s des auteurs et des autrices publié(e)s aux éditions P.O.L écrivent une carte postale et laissent un message aux éditions P.O.L.
Avec par ordre d'apparition de la carte postale: Violaine Schwartz, Jean-Paul Hirsch, Lucie Rico, Emmanuel Lascoux, Jacques jouet, Philippe Michard, François Matton, Frédéric Boyer, Catherine Henri, Suzanne Doppelt, Lamia Zadié, Marianne Alphant, Suzanne Duval, Laure Gouraige, Emmanuel Carrère, Jean Rolin, Elisabeth Filhol, Célia Houdart, Nicolas Fargues, Nicolas Bouyssi, Louise Chennevière, Frédérique Berthet, Marie Darrieussecq, Jocelyne Desverchère, Jean Frémon, Kiko Herrero, Julie Wolkenstein, Emmanuelle Bayamack-Tam, Liliane Giraudon, Frédéric Forte, Pierric Bailly, Valère Novarina, Hélène Zimmer, Nicolas Combet, Christian Prigent, Patrice Robin,, Emmanuelle Salasc, Alice Roland, Shane Haddad, Mathieu Bermann, Arthur Dreyfus, legor Gran, Charles Pennequin, Atiq Rahimi, Anne Portugal, Patrick Lapeyre, Caroline Dubois, Ryad Girod, Valérie Mréjen / Dominique Fourcade, Marielle Hubert, Robert Bober, Pierre Patrolin, Olivier Bouillère, Martin Winckler, Jean-Luc Bayard, Anne Parian, Nathalie Azoulai, Julie Douard, Théo Casciani, Paul Fournel, Raymond Bellour, Christine Montalbetti, Francis Tabouret, Ryoko Sekiguchi,
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