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Patrick Reumaux (Traducteur)Elizabeth Bowen (Préfacier, etc.)
EAN : 9782752900241
640 pages
Phébus (01/10/2004)
3.79/5   29 notes
Résumé :
Joyce relisait ce livre chaque fois qu'il souhaitait s'empêcher de dormir. Un roman noir tout ce qu'il y a de classique en apparence (Le Fanu fut dans ce registre le seul rival de Wilkie Collins), mais ficelé à l'irlandaise, c'est-à-dire sans marchander sur les ingrédients indispensables : le whiskey, la mort violente... et le surnaturel.

Quelques messieurs plus ou moins distingués aiment à se réunir le soir au club, dans une bourgade des environs de... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Il faudrait toute l'imagination d'un Lewis Carroll afin d'inventer le mot adéquat pour désigner cet épais roman de le Fanu. Je dis bien "inventer" car, à mon sens en tous cas, il n'existe pas en notre langue de mot exact pour le définir. L'expression "Ovni littéraire" me paraît, dans ce cas-ci, singulièrement stupide : on ne peut pas mêler les UFO à l'univers de le Fanu - non, on ne peut pas. "Hybride" ne sonne pas plus juste. Quant à "truc" ou "machin", franchement, ils sont bien trop communs. "Kaléidoscope" quant à lui présente une analogie avec la rapidité et la vivacité qui ne peuvent s'allier avec le rythme de l'ouvrage. "Curiosité" serait, à la limite, le mieux approprié mais resterait encore maladroit.

Construit, semble-t-il, à la va-comme-j'te-pousse, partant, en tous cas dans les débuts et toujours en apparence, dans toutes les directions, alliant une once de la préciosité du XVIIIème siècle à une manière d'écrire qui, surtout dans les scènes mélodramatiques (rassurez-vous, elles ne sont pas nombreuses) prouve bien son appartenance au XIXème, révélant pourtant aux moments cruciaux un traitement du suspens et de l'intrigue qui ne déparerait pas l'un de nos romans contemporains, "La Maison Près du Cimetière" démontre en outre un sens de l'analyse psychologique beaucoup plus moderne qu'on ne s'y attend.

Avec cela, des personnages solidement brossés parmi lesquels seuls les couples de jeunes amoureux seuls s'en tiennent aux stéréotypes d'usage dans le roman de l'époque. Tous mènent un branle endiablé dans cette petite ville de garnison nommée Chapelizod et proche de Dublin dans laquelle nous entraîne Le Fanu. En effet, si le rythme de l'histoire a quelque chose de paresseux - surtout au début de l'ouvrage - les faits et gestes de nos personnages en revanche ne tardent guère à avoir des conséquences qui, à leur tour, engendreront certaines actions qui ... etc. Il y a du théâtre qui s'ignore là-dedans, un théâtre qui ne laisse pas une minute de répit au lecteur. (Joyce a-t-il songé à cette particularité lorsqu'il a introduit des scènes purement théâtrales dans son "Ulysse" ?)

Pour diverses raisons extérieures, il m'est arrivé d'abandonner ce livre au bout de une ou deux pages. Mais toujours - toujours - il m'a fallu le reprendre et aller plus loin. Non pour connaître la solution à l'intrigue centrale - qui est le fameux Charles Archer. Non parce que j'y recherchais une histoire fantastique - le goût du macabre et du gothique qui caractérise Le Fanu se retrouve bien ici mais il n'a pas choisi de les exploiter à fond, au contraire de ce qu'il fait dans nombre de ses nouvelles. Mais parce que les personnages, leurs préoccupations, la vie qu'ils irradiaient m'intéressaient et, pour ainsi dire, me fascinaient. Parfois même, ils semblaient m'appeler.

Vous est-il arrivé, alors que, à moité assoupi, vous contemplez les personnages d'une tapisserie sur le mur d'une maison ancienne, de voir ceux-ci se détacher de la toile et descendre sur votre couverture pour y continuer leur petite vie ? A moi, oui, dans mon enfance. Eh ! bien, avec "La Maison Près du Cimetière", c'était la même chose, à ceci près que le phénomène n'avait rien de visuel. Il arrive, bien sûr, que des personnages vous poursuivent hors d'un livre. Mais il s'agit en général d'un ou d'une solitaire dont les actes ou les motivations vous hantent. Alors qu'ici, c'était toute cette ronde de petits personnages irlandais de la fin du XVIIIème siècle qui jaillissaient de leur Chapelizod et ne semblaient pas vouloir me laisser en paix tant qu'ils ne seraient pas parvenu à me raconter jusqu'au bout leur petite histoire.

Et pourtant, l'intrigue principale, pas plus que les intrigues annexes, ne sont particulièrement extraordinaires ...

Mais il faut croire que, avec "La Maison Près du Cimetière", Sheridan le Fanu est parvenu, par un miracle dont il n'avait peut-être pas conscience, à préserver la vie d'une toute petite ville irlandaise et de ses habitants, tels que lui-même pouvait se les rappeler de son enfance personnelle et tels qu'ils ne sont plus depuis belle lurette. On ouvre le livre et hop ! ils ressuscitent, pleins d'entrain et tout prêts à nous conter leurs dernières aventures, leurs derniers bonheurs. Bref, un ouvrage bizarre et résolument atypique, où le talent et la nostalgie du passé se confondent pour offrir au lecteur un bouquet hirsute, malicieux et fleurant bon l'Irlande dont on ne s'étonnera pas qu'il ait réjoui James Joyce. ;o)
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La découverte d'un crâne dans le cimetière de Chapelizod, près de Dublin, est le point de départ des confidences du narrateur, Charles de Cresseron, neveu du curé de cette petite ville, qui retrace pour nous les mystères auxquels il a été confronté dans sa jeunesse, vers 1760 lorsqu'il avait 14 ans...
Assassinats, morts violentes, disparitions, mystères, surnaturel, secrets, liaisons dangereuses... Tout s'entremêle et se télescope dans ce roman, la lecture est un peu lente, car les phrases sont longues, un peu à la Proust, mais le suspens est croissant, et le lecteur a vraiment la chair de poule...
Un vrai thriller gothique !
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Nous sommes en 1773 à Chapelizod, une petite ville près de Dublin, vouée un jour à devenir industrielle, mais encore toute campagnarde. Une petite ville bien tranquille, où la vie s'écoule joyeusement entre auberges et champ de course, cancans, disputes, visites et galanteries bon enfant. Mais sous ces apparences, bien des mystères et des secrets apparaissent.

Accompagné d'un cercueil, un jeune homme revient au pays. Son nom, beaucoup le devinent : entaché autrefois par son père dans une sinistre affaire, sur laquelle il cherche désormais à lever le voile. Dans la maison qu'il choisit d'habiter, près du cimetière, un fantôme a longtemps terrifié les précédents locataires...

Ici, le bedeau a un bien lourd passé, les jeunes filles des amours complexes, les disparitions se multiplient et une femme en noir impitoyable fait chanter les braves bourgeois et leurs naïves épouses.

*

Un roman foisonnant, dans lequel personnages et intrigues se multiplient, s'enchevêtrent, comme les genre se confondent. le réalisme se pimente de fantastique, et la satire prend des accents de gothic novel.
On s'y perd un peu, parfois, d'autant plus que le récit est très lent. Mais il trouve toujours moyen de raccrocher son lecteur, par un sourire ou un mystère, puis un suspense croissant. Finalement, il devient difficile de quitter ce monde issu d'un autre temps, désuet avec charme et remarquablement vivant.

Un classique qui mériterait d'être plus connu en France, comme savent si bien en publier les éditions Phébus.


Lien : http://babel-oueds.livejourn..
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Ce roman est une fresque sur une petite ville de la banlieue de Dublin en 1773. On y retrouve les intrigues sociales, les commérages, les complots pour la promotion sociale et les jeux de courtisanerie. Les personnages sont pittoresques, bien décrits et attachants. Ils ont leurs côtés délicats autant que leurs facettes mesquines et il y a des moments aussi tendres que franchement hilarants.
D'aucune évoquent un côté surnaturel ou policier pour ce roman, mais franchement, c'est totalement minoritaire, quelques chapitres sur 600 pages, et n'est pas l'essentiel du récit. L'intrigue policière permet surtout de clore le livre qui aurait pu s'étirer indéfiniment tant la petite ville regorge de potentiel d'historiettes. A lire comme les grands récits de la vie de cette époque, écrits au XIXe siècle.
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Si vous aimez les histoires multiples qui s'entrecroisent , de nombreux personnages bavards , mais au combien attachants , d'une petite communauté Irlandaise avide de cancans , une ambiance gothique et teinté de romantisme avec un soupçon de fantastique , ce livre est fait pour vous .
Il est difficile de rentrer dedans mais , une fois happé , ce livre ne vous lachera plus . A lire et à relire , vous y trouverez toujours quelque chose .
Le fanu , surtout connu pour sa nouvelle vampirique 'carmilla' , est un auteur à redecouvrir .
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
[...] ... Entre-temps, Dangerfield avait atteint l'un de ces tendres pâturages, près de la berge de la rivière, qui, voir supra, ravissent le brave homme de pêcheur à la ligne ; son bouchon dansait déjà sur les rides du courant et la verte vallée, qu'il arpentait aux côtés de son compagnon, résonnait de temps à autre de son étrange rire rauque, dont Irons ne se risquait évidemment pas à demander la cause.

Il y a une toux de cimetière ... je ne vois pas pourquoi il n'y aurait pas un rire de cimetière. Il est certain que, dans celui de Dangerfield, il y avait un présage : une jubilation qui n'avait rien à voir avec l'allégresse, quelque chose qui vous mettait plus mal à l'aise que ses plus sévères remontrances. Si un homme n'est pas naturellement rieur, mieux vaut qu'il s'abstienne de rire. Les bipèdes qui aiment la chasse aux souris et aux charognes ont un chant à eux et personne n'y trouve à redire. On peut bien n'aimer ni la chouette ni le corbeau, n'empêche qu'on les respecte quand ils s'en tiennent à leur cri, croassement ou ululement, ce qui est loin d'être agréable, mais c'est de la nature sans artifice, et donc on s'y fait. Tout ce que l'on demande à ces oiseaux semblables à des gentilshommes, c'est de ne pas se tromper de chant : qu'ils n'aillent pas faire semblant d'être musiciens ou, s'ils jouent de la musique, nous infliger un pur chiqué en guise de gazouillis.

Irons, un éternel sourire spectral flottant sur ses lèvres minces, se tenait un peu en retrait avec une gaffe, une épuisette, une seconde gaule, un petit sac de vers et le reste de l'attirail, ne parlant qu'interpellé, ou pour suggérer un changement d'amorce ou de mouche, ou encore un lancer dans un endroit particulier, car Dangerfield était de l'avis de ce brave colonel Venables : il est bon que le sportif amateur s'associe à un honnête pêcheur expérimenté qui lui communiquera, sans réserve ni arrière-pensée, les arcanes de son art.

Dangerfield avait les yeux fixés sur le bouchon, mais ses pensées étaient ailleurs. Chaque fois que Sturk le rencontrait, pour dîner ou au club, envolés son arrogance de docteur et on organe de stentor ! il sombrait pour un bon moment dans une humeur ténébreuse et pensive. Lorsqu'il en sortait lentement, il ne pouvait parler qu'à l'homme aux binocles [= Dangerfield] mais s'arrêtait en chemin, redevenant songeur, comme errant dans un rêve qu'on ne se remémore qu'à demi ; puis, quand il prenait congé de Dangerfield, il ne le faisait qu'avec un regard qui s'attardait, un sombre repli sur soi, comme s'il avait encore un dernier mot à dire, après quoi il s'en allait, l'air vague et triste. Il était naturel que, avec les vues qu'il avait sur l'agence, Sturk lui portât un intérêt particulier. Mais il y avait quelque chose de plus et cela n'échappa pas à Dangerfield à qui, d'ailleurs, rien de ce qui le concernait n'échappait jamais. ... [...]
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[...] ... A la lumière flamboyante de la bougie, elle jeta par dessus l'épaule des coups d'oeil inquiets à droite et à gauche dans l'escalier. Que la fenêtre du vestibule paraissait noire, avec les dessins blancs des flocons de neige qui se succédaient perpétuellement en glissant le long des carreaux. Qui pourrait dire quel visage horrible, caché derrière le rideau de dentelle blanche de la neige, était peut-être là, tout prêt, en train d'épier son passage ? Ainsi, d'un pas léger, avec agilité, Betty, la cuisinière, montait dans l'escalier.

Si ceux qui écoutent aux portes entendent rarement dire du bien d'eux, il arrive que les curieux voient plus que ce qu'ils désirent voir et, quand elle atteignit le palier, Betty, jetant un coup d'oeil de côté avec une curiosité de mauvais augure, contempla un spectacle qui la fit presque s'évanouir.

Rampant dans l'embrasure de la porte, à droite du vestibule, la cuisinière, dis-je, aperçut quelque chose - une forme, quelque ombre profonde, oui, seulement une ombre profonde ... à moins que ce ne fût un chien. Elle leva la chandelle, risqua un oeil sous le bougeoir : sur ma vie, ce n'était pas une ombre mais une forme parfaitement nette.

Une forme vêtue de noir, qui se faisait toute petite, le visage levé. C'était le visage de Charles Nutter [que tout le monde croit noyé], immobile et furtif. Le temps que dura la fascination - celui que vous prendriez à compter, en vous appliquant, jusqu'à trois -, les regards horrifiés se rencontrèrent. Mais il ne put y avoir aucune erreur. Elle aperçut le sombre visage austère aussi nettement que jamais. La lumière vacilla dans le blanc des yeux de l'apparition.

Se levant soudain, le spectre frappa la bougie d'un coup de chapeau. Poussant un hurlement, la fille lui balança à la figure le chandelier, qui s'écrasa avec un bruit d'enfer contre la porte et tout fut instantanément plongé dans les ténèbres. ... [...]
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En ces temps-là, c’était la grande époque de Chapelizod, et cette époque était finalement, peut-être, je puis vous le dire à l’oreille, en dépit de ses couleurs et de ses aventures, moins agréable à vivre qu’à rêver ou à connaître dans les livres.
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Ensuite, il y avait l'église du village, avec sa tour sombre et bruissante de la base au sommet, flanquée d'un lierre épais et tordu.
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Si ceux qui écoutent aux portes entendent rarement dire du bien d'eux, il arrive que les curieux voient plus que ce qu'ils désirent voir...
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Vidéo de Joseph Sheridan Le Fanu
BANDE ANNONCE - "Carmilla" - LE FANU & MAZZANTI .BANDE ANNONCE - "Carmilla" - LE FANU & MAZZANTI Collection Métamorphose - Éditions Soleil EN LIBRAIRIE LE 8 OCTOBRE 2014 © ÉDITIONS SOLEIL / MAZZANTI À l?occasion du 200e anniversaire de la naissance de le Fanu, Isabella Mazzanti illustre de façon sensible, sombre et romantique « Carmilla », une ?uvre majeure de la littérature vampirique du XIXe siècle, métaphore implacable de l?amour interdit. Bram Stoker reconnaîtra plus tard la dette qu?il a envers son compatriote lors de la parution, en 1897, de « Dracula », roman devenu culte.
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