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Michel Leiris (Préfacier, etc.)
EAN : 9782070324934
178 pages
Gallimard (11/10/1988)
3.6/5   58 notes
Résumé :
L'intervention du philosophe s'avère, ici, distincte autant de celle du critique que de celle du psychologue (médecin ou non-médecin) comme du sociologue.
Car il ne s'agira pour lui, ni de peser au trébuchet la poésie baudelairienne (portant sur elle un jugement de valeur ou s'appliquant à en offrir une clé), ni d'analyser, comme on ferait d'un phénomène du monde physique, la personne du poète des Fleurs du Mal. Tenter, bien au contraire, de revivre par l'int... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Cet essai est un portrait psychologique du poète ; Sartre n'aborde la production littéraire que pour étayer ses arguments au fil des pages. Un portrait nuancé mais parfois répétitif.
Une des idées qui m'a interpellée : Baudelaire est tellement épris par sa propre singularité qu'il se dédouble afin de se contempler dans un geste narcissique :
« L'effort de dédoublement prend ici la forme la plus nette : être à soi-même objet, se peindre comme une châsse, pour pouvoir s'emparer de l'objet, le contempler longuement et s'y fondre. P125
« L'attitude originelle de Baudelaire est celle d'un homme penché. Penché sur soi, comme Narcisse. [ ] Pour nous autres, c'est assez de voir l'arbre ou la maison ; tout absorbés à les contempler, nous nous oublions nous-mêmes. Baudelaire est l'homme qui ne s'oublie jamais. Il se regarde voir ; il regarde pour se voir regarder ». p23
Sur la douleur baudelairienne : « Elle ne fait qu'un avec son orgueil [ ]. La souffrance pour Baudelaire n'est pas le remous violent qui suit un choc, une catastrophe, mais un état permanent. [ ] Baudelaire a choisi de souffrir. La douleur, dit-il, est la noblesse ». p88
« Baudelaire : l'homme qui se sent un gouffre. Orgueil, ennui, vertige : il se voit jusqu'au fond du coeur, incomparable, incommunicable, incréé, absurde, inutile, délaissé dans l'isolement le plus total, supportant seul son propre fardeau, condamné à justifier tout seul son existence, [ ] replié dans la contemplation et, en même temps, jeté hors de lui en une infinie poursuite, un gouffre sans fond [ ]. » p40
Le paragraphe ci-dessous parle d'une existence stagnante, de son incapacité à se renouveler :
« Peu d'existences plus stagnantes que la sienne. Pour lui, à vingt-cinq ans, les jeux sont faits : tout est arrêté, il a couru sa chance et il a perdu pour toujours. Dès 1846, il a dépensé la moitié de sa fortune, écrit la plupart de ses poèmes, donné leur forme définitive à ses relations avec ses parents, contracté le mal vénérien qui va lentement le pourrir, rencontré la femme qui pèsera comme du plomb sur toutes les heures de sa vie, fait le voyage qui fournira toute son oeuvre d'images exotiques. [ ] On a le coeur serré lorsqu'on lit Fusées ou Mon coeur mis à nu : rien de neuf dans ces notes rédigées vers la fin de sa vie, rien qu'il n'ait cent fois dit et mieux dit. » P151 « On a le coeur serré », dit l'auteur : c'est rare dans ce livre de tomber sur un paragraphe où transparaît l'empathie. L'essayiste a adopté la distanciation.
La dernière phrase de l'essai : la vie du poète témoigne de cette vérité : « le choix libre que l'homme fait de soi-même s'identifie absolument avec ce qu'on appelle sa destinée. » Autrement dit, être poète maudit – c'est lui-même qui a choisi sa voie.
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Sartre procède à une psychanalyse de Baudelaire, analyse toute existentialiste. Qu'est-ce qui détermine un homme, un créateur doué ? Sa famille d'abord, les rapports ambigus qu'il entretient avec sa mère remariée à un homme qu'il déteste. Freud parlerait d'un oedipe outrancier. de là son rapport aux femmes en général à la fois catins (« qui veulent être foutues ») mais aussi êtres auxquels on voue une adoration où la souillure n'est pas concevable. Baudelaire transfère ses amours physiques vers les prostituées pour continuer de sublimer les femmes qu'il aime et qui ne doivent pas être « foutues » justement : Madame Sabatier, Marie Daubrun.
Mystique à ses heures, Baudelaire ne cesse de repousser, de vouloir contrarier Dieu et la nature qu'il exècre par-dessus tout. Il se met sans cesse à distance, peut s'estimer grand pécheur, presque voué à la damnation alors que ses crimes (qu'il invente comme une posture) sont véniels et ceux de tout un chacun.
De là le dandysme parfois un peu ridicule et frisant le travesti (mèche de cheveux verts), Baudelaire assume le fait que tout ce qui est fabriqué en dehors de la nature contrarie la création divine. C'est en cela qu'il conçoit la création de ces poèmes, création poétique « proche du suicide », car encore une fois, la vie et la nature sont des oeuvres de la création divine. Son maître en ce domaine est Joseph de Maistre.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Le révolutionnaire veut changer le monde, il le dépasse vers l'avenir, vers un ordre de valeurs qu'il invente; le révolté a soin de maintenir intacts les abus dont il souffre pour pouvoir se révolter contre eux. Il y a toujours en lui les éléments d'une mauvaise conscience et comme un sentiment de culpabilité. Il ne veut ni détruire ni dépasser mais seulement se dresser contre l'ordre. Plus il l'attaque, plus il le respecte obscurément...
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Baudelaire, c'est l'homme qui a choisi de se voir comme s'il était un autre.

(...)

Je suis un vieux boudoir plein de roses fanées
Où gît tout un fouillis de modes surannées
Où les pastels plaintifs et les pâles Boucher,
Seuls, respirent l'odeur d'un parfum débouché.

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Il a revendiqué sa solitude pour qu'elle vienne au moins de lui-même, pour n'avoir pas à la subir.
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Au moins le merle blanc, honni par tous les merles noirs, peut-il se consoler en contemplant, du coin de l’œil, la blancheur de ses ailes. Les hommes ne sont jamais des merles blancs.
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Faire souffrir c'est posséder et créer tout autant que détruire.
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