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Anouk Grinberg (Éditeur scientifique)Laure Bernardi (Traducteur)Edwy Plenel (Préfacier, etc.)Anouk Grinberg (Narrateur)
EAN : 9782708240339
256 pages
ATELIER (24/09/2009)
4.64/5   21 notes
Résumé :

Rosa Luxemburg fut une des figures lumineuses du mouvement socialiste au début du siècle, une des seules à s'être opposée à la guerre de 14-18. Pour cela, elle passa presque toute la guerre dans les prisons d'Allemagne. Pendant ces années, elle écrivit quantités de lettres à ses amis; il y est peu question de politique, ce sont surtout des incitations à vivre, à rester bon " malgré tout et l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Certains lieux tendent à se lisser sous les couches du marketing, à glisser dans l'agitation débridée des « teuflands », des « alcoolodromes » dont les débordements pourraient précipiter dans le trou noir de l'oubli, des hommes, des femmes, des hauts faits qui ont ébranlé l'Histoire.

C'est tout particulièrement le cas de Berlin (on pourrait aussi citer spontanément Barcelone …) où entre autres le canal Landwehrkanal renvoie tristement le reflet de Rosa Luxemburg, assassinée dans des conditions sordides par des soudards diligentés par le gouvernement socialiste, aux commandes après la chute du kaiser en novembre 1918.

Rosa Luxemburg (1871-1919), d'origine polonaise, fut à la fois une théoricienne et une activiste du mouvement social au sein du parti socialiste allemand.
Dans ce mouvement social allemand, elle fut surtout une des rares personnalités, avec Karl Liebnecht, à refuser « l'union sacrée », la trahison du parti socialiste allemand et son adhésion à cette abominable guerre mondiale qui allait ensanglanter le monde pendant quarante ans. Hitler, Mussolini, Franco, Pétain, Staline et autres Tojo, sont des vomissures de celle culture de la barbarie industrielle forgée en 1914-1918.

Rosa Luxemburg se dressa contre cette apocalypse qui se déployait. A notre époque où les forces obscures contaminent avec succès, les unes après les autres les fondations d'une civilisation progressiste, elle devrait être une inspiration. Mais l'époque préfère référencer et récompenser d'autres sortes d'influenceuses...

Fatalement, la pensée et l'activité provoquèrent l'arbitraire du pouvoir et de la « justice » de l'empire. Rosa Luxembourg fut incarcérée pendant la majeure partie de la période 1914-1918 avec un régime plus ou moins sévère selon les lieux de détention.

La comédienne Anouk Grimbert a compilé des lettres écrites de prison, qu'elle a mises en scène pour un spectacle de théâtre. Ce livre contient ces lettres sélectionnées, enrichie avec bonheur d'une version audio avec la voix et les commentaires de l'actrice.

Si naturellement la tragédie historique n'est jamais très éloignée des propos, ces lettres expriment surtout les préoccupations, les émotions de la femme dans leurs dimensions humaines et non pas celles relatives à la révolutionnaire politique.
Ces lettres permettent ainsi de découvrir une femme attachante, pleine de charme malgré le tragique du contexte.

La majorité des lettres ont été adressées à ses amies Luise Kautsky, Sonia Liebknecht (les épouses de…) et de Hans Diefenbach (un jeune homme dont elle était amoureuse. Rosa Luxemburg fut loin d'être une vierge rouge) sans que l'on sache s'il s'agit d'un choix éditorial d'Anouk Grimbert ou d'un échantillon représentatif du fonds documentaire ayant traversé l'Histoire.

En dépit de toute sa fougue pour le combat social, la femme qui lui correspond le plus n'est pas fondamentalement la pétroleuse au poing levé :

« Toi non plus, ma chérie, tu ne veux rien savoir de mon bonheur à être « dans un coin tranquille », et tu n'as que moqueries pour cela. Mais il faut bien pourtant que j'aie quelqu'un pour me croire quand je dis que si je virevolte dans le tourbillon de l'Histoire, c'est par erreur, et qu'au fond, je suis faite pour garder les oies. Tu dois me croire, tu m'entends ? »
(18 septembre 2015-A Luise Kautsky p. 56)

Les vicissitudes de la vie, en premier lieu ces incarcérations arbitraires, ne font pas obstacle à l'amour de la vie :

« Mais la vie est « ainsi », depuis toujours, et tout en fait partie : douleur, séparation et nostalgie.
Il faut la prendre comme un tout, et tout trouver beau et bien.
Enfin, c'est comme ça que je fais. Et pas par sagesse longuement méditée, mais simplement parce que telle est ma nature. »
Je sens instinctivement que c'est la seule façon juste de prendre la vie, voilà pourquoi je me sens réellement heureuse dans n'importe quelle situation. Je ne voudrais rien retrancher de ma vie (...) »
(19 mars 1917-A Sonia Liebknecht p. 138),

Même son inaction contrainte pendant les événement révolutionnaires en Russie n'altèrent pas cette sensibilité pétrie de stoïcisme :

« (...) Dis moi, comment peux-tu, telle une triste cigale, continuer à chanter ta chanson de malheur, tandis que de Russie nous arrive le cri si clair de ce choeur d'alouettes ?
Ne comprends tu donc pas que c'est notre cause qui l'emporte et triomphe là-bas, que c'est l'histoire du monde en personne qui y livre combats et, ivre de joie, danse la carmagnole ?
Est-ce qu'on ne doit pas oublier toutes ses misères privées, quand l'intérêt général est à ce point en marche ? (…)
Mais de ne pas pouvoir y participer ne me rend pas triste du tout, et il ne me vient pas du tout à l'idée de gémir sur ce que je ne peux pas changer, et d'abîmer ainsi ma joie à voir ce qui se passe.  »
(15 mars 1917-A Luise Kautsky p. 125 et 126)

Dans ces conditions carcérales, le salut passe par l'introspection, la contemplation positives et actives. Et il est permis de recevoir des livres qu'elle dévore. Rosa Luxemburg met à profit la situation pour se cultiver, approfondir ses connaissances, aiguiser sa curiosité. Elle devient ainsi passionnée et très informée notamment en sciences naturelles, botanique, ornithologie...

Mais en dépit de cette lumière intérieure, des sombres pressentiments rodent, taraudent son esprit, même si formellement aucune décision judiciaire suprême n'a été énoncée à son encontre.

En lisant ces lettres, cette complicité avec les oiseaux, impossible de ne pas faire le rapprochement avec Cassandre, dans Agamemnon d'Eschyle, qui sait qu'elle va mourir :

« Las ! Hélas ! Je n'ai point le sort
Du rossignol au clair babil !
Il peut s'envoler, lui avec le corps ailé
Dont les dieux l'ont vêtu !
Ils lui ont permis les douceurs
D'une vie qui pourrait ignorer les sanglots…
Mais moi, ce qui m'attend, c'est le tranchant du fer
Dont on va me pourfendre ! »

(EschyleAgamemnon-trad Victor Henri Debidour p. 207)

Et telle Iphigénie sacrifiée à Aulis, il fallait que Rosa Luxemburg fut immolée pour que le vent de la barbarie (re)prenne son souffle pestilentiel.

Un livre par conséquent très émouvant, pour mieux connaître celle qui fut une combattante exceptionnelle.
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« Rosa la vie. Lettres de Rosa Luxembourg », (Editions de l'Atelier) choisies par Anouk Grinberg, et lues par l'actrice sur le CD inclus dans le livre dans cette édition
Ce sont, choisies par Anouck Grinberg, et lues par elle, des lettres de prison de Rosa Luxembourg, écrites à son amie elle aussi révolutionnaire, quelques mois avant son assassinat par des futurs nazis.
Superbe livre, à lire et à écouter sous la voix inouïe, exceptionnelle, en permanence à la limite de la rupture de Anouk Grinberg, ce qui rajoute une note bouleversante aux mots de la militante allemande. Un livre assez peu « politique » somme toute, mais si plein de vie, avec tant d'émotions humaines, sensuelles, un goût si fort de la droiture et de la nature, un sens d'aimer et de l'amitié si intense… une telle manière de sublimer les plus petites belles choses ; une belle leçon de vie… J'y trouve plein de très beaux passages, un ton panthéiste, voire animiste assez peu « matérialiste » mais très poétique. Elle use souvent de la personnification en tant que style épistolaire. Quelques citations :
« Et si l'envie me prend, un de ces jours, de monter là-haut chercher quelques étoiles pour les offrir à je ne sais qui en guise de bouton de manchettes, je ne veux pas qu'un rabat-joie vienne me dire, l'index dressé, que je mets sens dessus dessous les atlas d'astronomie des écoles. »
« Ecris-moi vite une vraie lettre, de omnibus rebus, sinon je t'expulse de la chambre principale de mon coeur où tu es assise à côté de Mimi (sa chatte –NDR), et je te mets dans une pièce attenante. »
« Je me sens chez moi dans le monde entier, partout où il y a des nuages, des oiseaux, et les larmes des hommes. »
« Les hirondelles commençaient leurs habituelles envolées vespérales, et de leurs petites ailes pointues, elles mettaient en lambeaux la soie bleue de l'espace. »
« La lumière du ciel ourlait ces nuages d'un blanc d'écume éclatant, et au coeur, ils étaient gris, d'un gris très expressif, passant par toutes les nuances, du voile argenté le plus doux au ton orageux le plus sombre. Avez-vous déjà remarqué la beauté et la richesse du gris ? Il y a quelque chose de si distingué et pudique, il offre tant de possibles. Quelle merveille, tous ces tons gris sur le fond bleu tendre du ciel ! Comme une robe grise va bien aux yeux bleu profond. »
« Une seule chose me fait souffrir : devoir profiter seule de tant de beauté. Je voudrais crier par-dessus le mur : je vous en prie, faites attention à ce jour somptueux. »
Bizarrement, RL n'évoque dans ses lettres qu'une seule fois (est-ce un choix de Anouck Grinberg ?) une codétenue, sur le ton de la défiance…
« Devant un ciel comme celui-là, comment pourrait-on être mauvais ou mesquin ? Simplement, n'oubliez jamais de regarder autour de vous, et alors vous serez toujours bonne. »
Sur une émission de France Inter, Anouk Grinberg évoque ce destin volé par la petitesse et la lâcheté du monde mais lumineux de Rosa Luxembourg, et dont elle dit que « elle a les doigts branchés dans les prises de la beauté ».
Lisez, écouter ces lettres d'une prisonnière libre et magnifique.
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C'est un vrai coup de coeur que j'ai eu pour ce livre, les éditions de l'Atelier ont publié un livre ET un CD audio en complément, ainsi à l'intérêt de la lecture s'ajoute le plaisir du texte lu.
Une belle couverture rouge qui attire le regard le nom de Rosa Luxemburg. Un nom croisé au gré des lectures, plus spécialement dans " le Troisième Reich" de William Shirer, une femme dont je ne savais quasiment rien, juste une curiosité pour cette Rosa la rouge comme on l'avait surnommé, pour ce destin hors du commun, au début du XXème siècle être à la fois femme, juive, socialiste et pacifiste ne prédisposait pas à une vie simple.

Une brève (très brève) biographie) mais je me promet d'en lire une très bientôt.
Rosa Luxemburg est née en en 1871 en Pologne, des études d'économie politique à Varsovie, militante du parti socialiste polonais et membre de l'Internationale Socialiste elle est contrainte de s'exilée en Suisse, en 1898 elle devient citoyenne allemande et milite dans le parti socialiste allemand SPD dont elle est exclue en raison de ses positions pacifistes, elle crée avec Karl Liebknecht et Clara Zetkin le mouvement spartakiste. Entre 1914 et 1918 elle alterne périodes de liberté et emprisonnement en forteresse. C'est de prison que sont écrites les lettres rassemblées dans ce livre, prison d'où elle ne cessera jamais d'écrire.
Tout juste libérée, elle est assassinée en janvier 1919 lors de la répression de la révolte spartakiste de Berlin. Assassinat qui est le prélude à des années de barbarie.

Les lettres rassemblées ont été écrites pendans ses années d'incarcération et sont adressées à ses amis politiques : Clara Zetkin, Luise Kautsky, Sonia Liebknecht, à ses proches et Leo Jogiches son compagnon et grand amour.
On découvre une femme authentique et forte qui laisse parfois percer son découragement et sa solitude Mais très vite le courage revient et elle s'évade par les mots et songe aux voyages qu'elle fera une fois libérée
Elle trouve de l'aide dans la lecture des livres que lui envoient ses amis et qui parviennent jusqu'à elle quand ses geôliers le permettent. La poésie mémorisée lui apporte aussi parfois réconfort et évasion

Toujours elle s'inquiète pour ses amis incarcérés ou ceux qui sont au combat et cherche à leur insuffler du courage et de l'espoir, elle écrit ainsi à Hans Diefenbach en se remémorant ses années en Suisse "Mon Dieu, comme le monde est beau, comme la vie est belle ! "
Ce qui se dégage de ces lettres c'est avant tout un courage magnifique, une volonté de résister inentamée même si parfois elle est prête de l'effondrement
Cette femme capable de manier la polémique est ici avant tout une femme qui lutte, qui se rassemble pour supporter l'isolement, la mort de ses amis, l'emprisonnement de ces compagnons et qui nous donne une extraordinaire leçon de vie et d'espoir.
'ai immédiatement été happée par ses lettres, par l'émotion et la profonde humanité qui s'en dégagent.
Une belle préface à ce livre par Edwy Plenel journaliste
La voix si particulière, l'émotion si juste que fait entendre Anouk Grinberg qui dans une courte présentation dit à quel point sa rencontre avec Rosa Luxemburg l'a marqué et est inoubliable pour elle
Ce qui fut un spectacle créé au théâtre de l'Atelier, est devenu livre et disque pour nous faire partager les mots de Rosa la rouge.


Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Née en 1870, alors que gronde la commune de Paris, l'allemande Rosa Luxemburg est une combattante née et sa vie est passionnante. Dans « Lettre de Rosa Luxemburg, Rosa, la vie » Anouk Grinberg propose un recueil de lettres choisies écrites en prison. Elle y ajoute une chronologie biographique bien utile.
Sa première passion, c'est la politique. Il faut rappeler que Rosa Luxemburg a fondé en Allemagne la Ligue spartakiste, avec Karl Liebknecht, et participé à la création du Parti communiste allemand en 1918. Retenue prisonnière pendant plusieurs années pour s'être opposée à la guerre, elle sera assassinée en janvier 1919 par des officiers des corps francs, dont sont issus les premiers nazis.
Il reste aujourd'hui l'image d'une héroïne révolutionnaire, économiste, théoricienne de la démocratie, femme cultivée et radicale. Mais ce n'est pas le portrait de « Rosa la rouge » qu'a choisi Anouk Grinbert c'est « Rosa, la vie » qui montre une femme très sensible, profondément humaine, comme en témoignent ces lettres de prison. On voit par exemple qu'elle s'attache à faire un herbier. Elle observe la nature et écoute les oiseaux. C'est très surprenant mais les solutions de survie le sont aussi quand on est privé de liberté. Et puis, il y a aussi ses colères et l'on voit qu'elle garde une certaine lucidité sur le monde, même enfermée.
Ce qui ne va pas du tout c'est que ce livre est accompagné d'un CD car Anouk Grinberg a lu ces lettres sur scène et en a fait un enregistrement. Quel dommage ! Elle lit avec une voix chevrotante qui prête à rire et a quelque chose de ridicule qui ne va pas du tout avec la personnalité de cette figure marquante du mouvement ouvrier international. Alors, un conseil, lisez le livre mais n'écouter pas le CD, ça gâche tout.

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Au delà de l'engagement politique de Rosa Luxembourg, on découvre sa personnalité particulièrement attachante dans cette sélection de lettres adressées à des proches : droite, sincère, sans concessions, mais aussi passionnée, aimante, généreuse et extrêmement sensible à toute souffrance rencontrée, que celle-ci concerne un être humain ou n'importe quel petit animal... du fond de sa prison, elle nous transmet une précieuse leçon de vie : "travailler et faire ce que l'on peut, et pour le reste, tout prendre avec légèreté et bonne humeur". Cet ouvrage comporte un CD du spectacle d'Anouk Grinberg qui reprend certaines de ces lettres... Une voix extraordinaire qui sert merveilleusement bien ces lettres remplies de vie et d'affection. Un grand moment d'émotion.
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Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Je suis heureuse de me lever aussi tôt (5h40), j'attends juste que Monsieur le Soleil veuille bien suivre mon exemple pour profiter un peu de ce lever matinal. Le plus beau, c'est que je vois et j'entends les oiseaux pendant la promenade dans la cour : tout un peuple de moineaux insolents, qui font parfois un tel raffût que je m'étonne qu'aucun garde zélé n'y mette le "holà"; il y a aussi un couple de merles, mais le petit mâle au bec jaune ne chante pas du tout comme mes merles de Südende. Celui-là crisse et chuinte un petit air à pleurer de rire ; peut-être qu'aux alentours de Mars, il consentira à montrer un peu de pudeur et qu'il se mettra alors à chanter comme il faut. (A ce propos, je ne peux m'empêcher de penser à mes pauvres moineaux qui ne trouvent plus leur petit couvert dressé sur le balcon et qui attendent sans doute tout dépités, sur la balustrade.)

23 Février 1915, prison de Berlin.
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Sur ma tombe, comme dans ma vie, il n'y aura pas de phrases grandiloquentes. Sur la pierre de mon tombeau, on ne lira que deux syllabes : "tsvi-tsvi". C'est le chant des mésanges charbonnières que j'imite si bien qu'elles accourent aussitôt. Et firgurez-vous que dans ce "tsvi-tsvi" qui, jusque là, fusait clair et fin comme une aiguille d'acier, il y a depuis quelques jours un tout petit trille, une minuscule note de poitrine. Et savez-vous, Mademoiselle Jacob, ce que cela signifie ? C'est le premier léger mouvement du printemps qui arrive. Malgré la neige, le froid et la solitude, nous croyons - les mésanges et moi - au printemps à venir ! Et si, par impatience, je ne devais pas vivre ce printemps, n'oubliez pas que sur la pierre de ma tombe, on ne devra rien lire d'autre que "tsvi-tsvi"...
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 Bonjour Petit Hans, me voilà de nouveau.

Je me sens tellement seule aujourd'hui, il faut que je me revigore un peu en bavardant avec vous. (...)
Là, j'allais bientôt vivre autre chose de beau: un rouge-gorge est venu se poser sur le mur, juste derrière moi, et m'a donné un petit concert. En ce moment, les oiseaux sont généralement occupés par leurs soucis familiaux, et on ne les entend que rarement, brièvement.

Et voilà qu'aujourd'hui donc, le rouge-gorge s'est mis à chanter, lui qui n'était venu me voir qu'une ou deux fois au début mai. Je ne sais pas si vous connaissez bien ce petit oiseau et son chant; moi-même, je n'ai vraiment fait sa connaissance - comme pour tant d'autres choses - qu'ici, et je l'aime infiniment plus que le rossignol tant vanté.

Les envolées éclatantes du rossignol me font trop penser à des airs de divas, elles évoquent trop un public, des triomphes grisants et des louanges pâmées. Le rouge-gorge lui, a une toute petite voix tendre, il chante une mélodie singulière, intime, qui sonne comme une ouverture, comme un début d'appel; vous souvenez-vous, dans la scène du cachot de « Fidélio », des trompettes de la délivrance qui sonnent au loin, et déchirent presque l'obscurité de la nuit ?

La chanson du rouge-gorge, c'est un peu ça, mais chantée tout bas, avec des trémolos d'une infinie douceur, si bien qu'on la dirait voilée, comme un souvenir perdu au fond des rêves. Quand j'entends cette petite chanson, mon cœur se tortille littéralement de délices et de peine, et aussitôt je vois ma vie et le monde sous un jour nouveau, comme si les nuages se défaisaient et qu'un rayon de lumière tombait sur la terre.

Aujourd'hui, cette petite mélodie tendre, chantée sur le mur, qui n'a sans doute pas duré plus d'une demi-minute, a fait naître dans ma poitrine quelque chose de très doux, de soyeux. Aussitôt, j'ai regretté tout le mal que j'ai jamais pu faire à un être humain, toutes les pensées et les sentiments durs que j'ai pu avoir ; une fois de plus, j'ai décidé d'être bonne, bonne à tout prix, tout simplement : c'est mieux que d' « avoir raison » et de tenir le compte de toutes les vexations. 

(23 juin 1917-A Hans Diefenbach p. 160 et 161)
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Au milieu des ténèbres, je souris à la vie, comme si je connaissais la formule magique qui change le mal et la tristesse en clarté et en bonheur. Alors, je cherche une raison à cette joie, je n'en trouve pas et ne puis m'empêcher de sourire de moi-même. Je crois que la vie elle-même est l'unique secret. Car l'obscurité profonde est belle et douce comme du velours, quand on sait l'observer. Et la vie chante aussi dans le sable qui crisse sous les pas lents et lourds de la sentinelle, quand on sait l'entendre.
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Fais donc en sorte de rester un être humain. C'est ça l'essentiel, être humain. Et ça, ça veut dire être solide, clair et calme, oui calme, envers et contre tout,car gémir est l'affaire des faibles. Etre humain, c'est s'il le faut, mettre gaiement sa vie toute entière "sur la grande balance du destin", tout en se réjouissant de chaque belle journée et de chaque beau nuage.
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