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sur 1851 notes
J'ai lu le Prince, probablement trop naïvement, sans m'être renseignée au préalable, m'imaginant sûrement y découvrir les secrets de l'âme ténébreuse de tous les grands manipulateurs froids et cyniques, dont la célèbre Marquise de Merteuil des Liaisons Dangereuses pourrait être le parangon.
Et donc, je ne vous cacherai pas que j'ai été quelque peu déçue en en découvrant la teneur véritable. En fait il s'agit plutôt d'un essai écrit par un conseiller zélé mais somme toute fort honnête dans son dévouement à son « prince ». Cela pourrait s'intituler « leçons de sociologie et de stratégie politiques à l'usage des dirigeants inexpérimentés ». Voici donc une suite de conseils, certes avisés, mais pas spécialement retors comme on pouvait s'y attendre. Lorsque Niccolò Machiavelli se risque à proposer une attitude pas nécessairement en accord avec les codes éthiques et les préceptes communément admis de la morale judéo-chrétienne, cela relève davantage du bon sens politique que d'une extraordinaire fourberie. J'irais même jusqu'à penser que ces conseils soi-disant « machiavéliques » sont incommensurablement plus moraux que l'agissement ordinaire de n'importe quel homme politique ordinaire de ces cinquante dernières années.
Pour ce faire, l'auteur s'appuie soit sur l'histoire ancienne (antiquité), soit sur l'histoire récente (le XVème siècle) de la péninsule italienne (car bien évidemment, l'Italie telle que nous la connaissons n'a que 150 années d'existence, il s'agissait à l'époque de Machiavel d'une mosaïque de cités états ou de petits royaumes).
Cet essai est très didactique pour les jeunes souverains de l'époque, peut-être un peu moins de nos jours. Son crédo semble être : "Appuyez-vous sur le soutien populaire, méfiez-vous des courtisans et des proches du pouvoir." Machiavel y définit les différents types d'état qu'un « prince » peut être amené à diriger ; puis il disserte de l'art et de la manière de conquérir et/ou conserver le pouvoir selon différentes situations ; il aborde ensuite la délicate question militaire, la main armée que le prince doit toujours savoir mettre dans sa poche s'il tient à sa place ; par la suite, il donne des conseils de démagogie, de compromission ou de trahison visant encore et toujours à asseoir et à maintenir le pouvoir ; enfin il en termine avec une partie que l'on peut qualifier de « stratégie à long terme et vision pour l'Italie » qui est celle qui nous dévoile probablement le mieux le dessein, l'idéologie et la ligne politique propre de Nicolas Machiavel.
En somme, un ouvrage intéressant d'un point de vue historique ou politique mais finalement très mou du genou en ce qui concerne véritablement le « machiavélisme ». Ce Niccolò Machiavelli était sans doute trop droit et dévoué à son souverain pour être tout à fait à mon goût, mais bien évidemment, cet avis sans machiavélisme aucun, n'est qu'un misérable petit avis de rien du tout, c'est-à-dire, pas grand-chose. Si vous êtes un prince, vous pouvez vous permettre de le négliger totalement.
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Machiavel, dont Nietzsche admirait la « volonté de voir la raison dans le réel et non dans la morale » est encore l'objet de bien des interprétations. On lui reconnait un statut de précurseur des sciences politiques, de par l'empirisme et la dimension pratique de son oeuvre. Mais on prête aussi à celui qui a inspiré l'adjectif « machiavélique » d'avoir inspiré bien plus que cela, notamment les régimes totalitaires, Mussolini lui-même, se disait fervent admirateur.
En réalité, l'oeuvre du diplomate florentin n'était pas destinée au grand public, il s'agissait là d'un présent offert à Laurent de Médicis, écrit alors que ce dernier était en disgrâce dans une Florence en proie à l'instabilité institutionnelle, et une Italie morcelée à la merci des appétits des grandes puissances voisines.

Machiavel inaugure une nouvelle approche tactique du politique. le prince, pour être en mesure de gouverner, doit être conscient de ses caractères, car la crainte lui profitera bien plus que l'amour, mais aussi pour dompter les revers de fortune.

La première prescription de Machiavel concerne le caractère du prince. Il y a en effet une multitude d'inclinaisons dans la personnalité humaine, et il convient pour connaitre ses forces et faiblesses de s'appliquer le « connais-toi toi-même » socratique. Pour Machiavel, il importe peu que le prince se connaisse, sa vision des choses est utilitariste et pragmatique, il s'agit moins d'être que d'être perçu, le prince doit agir sur les représentations que le peuple a de lui.
Pour cela il a le choix entre être aimé et être craint. Pour Machiavel, il ne fait aucun doute que l'amour, sentiment fugace, ne peut conduire à l'unité et la stabilité de l'autorité du prince. Ce qui rend la crainte préférable aux yeux de l'auteur, c'est le sentiment de prudence et de peur du châtiment qu'elle inspire. Elle saura tenir tranquille les ennemis extérieurs, mais aussi les conspirateurs endogènes.
A la condition que cette crainte ne dégénère pas en abus, il faut éviter absolument d'être méprisé, d'avoir trop de piété, mais d'un autre côté, il ne faut pas non plus être l'objet de haine du peuple.
Pour ce faire il faut au prince, respecter la propriété de ces sujets, mais aussi réussir un équilibre fragile entre les intérêts des grands et des corps constitués tel que l'armée, avec ceux du peuple.

La seconde prescription du conseiller politique est de se rendre maitre de la fortune, la philosophie politique de Machiavel prône un libre arbitre qui n'en a pas encore le nom. En effet, il ne nie pas que les évènements fortuits arrivent et peuvent être irrésistibles, mais il peut y avoir une loi du précédent, le prince doit être le capitaine de son navire, tantôt hisser la grand-voile, tantôt savoir amarrer, mais jamais naviguer à vue.
Il doit toujours savoir d'où vient le vent, et quand il va tourner, autrement dit, il doit s'adapter constamment à son environnement.
C'est avec cette capacité de résilience emprunte d'empirisme que le prince pourra arriver aux objectifs fixés par Machiavel.

L'auteur est conscient qu'avec cet ouvrage, il rompt avec la pensée politique de son temps. Sa pensée est novatrice dans la mesure où elle fait fi des considérations métaphysiques des Anciens. Ces prescriptions sont amorales et utilitaires, le prince doit se placer par-delà le bien et le mal, il doit tout à la fois être le renard, pour sa ruse et sa malice, et le lion, pour son impétuosité, vers laquelle Machiavel penche davantage.
Il n'est plus mention de cité idéale, de souverain bien, ni même de bonheur du peuple, d'Etat ou encore de Dieu, libre au prince de discourir sur tous ces sujets, mais ils n'ont aucunement leur place dans les coulisses du pouvoir.

Ce prince sans vergogne doit gouverner pour une seule raison, asseoir son autorité et stabiliser son pouvoir au sein du royaume. C'est avec cette grille de lecture que Machiavel, grand admirateur de César Borgia, entreprend d'analyser les régimes antiques et contemporains, les princes ayant échoués et ceux ayant réussi à asseoir leur autorité selon les prescriptions retenues par Machiavel.
Il en conclu que le prince nouveau doit suivre la voie de Sévère, en raison de la sujétion absolue qu'il a reçu de l'armée, ce qui est indispensable à la conquête d'un royaume, mais une fois le prince installé, il doit comme Marc, qui étant de descendance héréditaire n'a pas eu à favoriser l'armée au détriment du peuple, trouver un équilibre entre le peuple et les puissants, une conception que reprendra Montesquieu à son compte.
Néanmoins, illustré par l'exemple du roi du Soudan, en apparente contradiction avec les conseils proférés par Machiavel, les actions du prince doivent être adaptées aux circonstances et elles sont toutes justifiées par la stabilité de son autorité, se profile à l'horizon ce que Richelieu appellera plus tard la Raison d'Etat.
(#2014)
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Un traité brillantissime à l'usage des détenteurs du pouvoir. Tout au moins à ceux de l'époque où il a été écrit (1532) au début du XVI ème siècle, car l'ouvrage n'est pas aussi machiavélique que l'on pourrait l'imaginer ; au sens moderne du mot.

Un ouvrage qui s'attache à définir dans un premier temps les notions de monarchie et de république à la lumière des états de l'époque ; puis de théoriser la conquête du pouvoir et la méthode pour le conserver… le tout hors de la morale communément admise.

Édifiant…

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Peut-on être à la fois prince et peuple ? C' est ce qu' essaie de montrer Nicolas Machiavel dans son ouvrage "Le Prince"Ce dernier est un ouvrage dédié à Laurent I I de Mêdecis par son auteur Machiave ( 1469-1527)l. Ce dernier est connu pour être un conseiller zélé des princes. Il s'agit d'un traité politique écrit au début du xvi eme siècle par Machiavel , écrivain et homme politique florentin, qui montre comment devenir prince et le rester, analysant des exemples de l'histoire antique et de l'histoire italienne de l'époque.
Dans cet ouvrage, l'auteur ne donnait pas de conseils aux princes et qu'au contraire il conseillait dans certains cas des actions contraires aux bonnes moeurs, il a été souvent accusé d'immoralisme, donnant lieu à l'épithète machiavélique. l''ouvrage a été porté aux nues et fortement célébré . L'ouvrage a été loué et analysé par de nombreux penseurs .
Livre qui mérite d'être lu .
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MACHIAVÉLIQUE ?
Les écrits de Machiavel lui ont valu de féroces inimités. Avec la particularité, remarquable, que cette hostilité s'est perpétuée à travers les siècles jusqu'à aujourd'hui. Ses ennemis ont même réussi à imposer dans le vocabulaire le terme "machiavélique" comme synonyme de : perfidie, traîtrise, manque de scrupule. A travers cette fallacieuse utilisation de son nom, Machiavel se trouve donc doté d'une fort mauvaise réputation dans l'histoire; privilège que seul Le Marquis de Sade partage avec lui pour des raisons toutes aussi abusives et mensongères. Mais qui sont donc ces ennemis si acharnés et que l'on retrouve en presque toutes les époques depuis la publication de ces écrits? C'est bien entendu en lisant Machiavel, avec l'attention qu'il mérite, que l'on trouve la réponse. Car l'on constate alors que Machiavel y décrivit avec un goût de la vérité et une extraordinaire lucidité l'ignominie du pouvoir et de la domination, de ses représentants de toutes catégories et de tout temps; leurs moeurs, leurs manières d'agir, leurs crimes. C'est ce dévoilement radical de l'infamie des puissants qui ne lui a pas été pardonné. C'est pourquoi il se trouve encore aujourd'hui des gens se prétendant historien attribuant aux "idées de Machiavel" la responsabilité de ce qui n'est rien d'autre que la pratique de leurs maîtres et l'évidence de leur propre servitude.
-Le personnage
Car il faut comprendre que Machiavel du fait des circonstances de l'époque, n'aurait tout simplement pas eu la moindre possibilité de faire paraitre un livre "contestataire". Mais il lui brulait de mettre en lumière ce qu'il avait compris des moeurs de la domination (de par son emploi, il était extrêmement bien informé et il n'avait pas les yeux dans sa poche). Il choisit donc la seule voie qui lui était possible en rédigeant son livre sous la forme d'un ouvrage pour l'édification des princes et en le dédiant aux Médicis (la famille dominante de Florence).
Ce qui lui permit de tout dire. Mais ce n'était bien sur pas aux princes qu'il s'adressait en vérité, mais au contraire à tous ceux qui pourraient estimer que ces logiques politiques là devaient cesser, n'étaient pas tolérables. Dans le Prince, l'on ne trouve donc pas des "conseils" mais la mise en lumière des pratiques courantes de la domination, de ce qui se faisait partout alors en Italie (et ailleurs aussi) dans les nombreuse principautés.
Aucun cynisme donc chez Machiavel, mais au contraire une très sérieuse prise de risque !
Par chance, le Médicis qui reçut l'ouvrage, soi-disant en hommage, reçut le même jour en cadeau une meute de chiens de chasse qui monopolisèrent toute son attention et abandonna le livre dans un coin. C'est ainsi que "Le Prince" put commencer sa brillante carrière. Il y a différentes manières de dire le vrai; il faut aussi espérer des lecteurs qui en trouvent l'usage. Peu de temps après La Boétie écrivit son "De la servitude volontaire" qui ne parut que 20 ans après sa mort, et fort discrètement.
-Le contexte
Machiavel vivait à Florence qui était somme toute une petite entité, menacée constamment par des ennemis diverses. Il y a chez lui un profond attachement à sa ville qui se trouvait également être à l'époque l'un des principaux centre culturel de l'Europe. Cet attachement n'est pas une forme de nationalisme mais au contraire un sens du commun, de l'appartenance à un tout. A cela, on peut rajouter une forte conscience du devenir historique, des changements possibles. Tout démontre que Machiavel n'était pas un ambitieux, tout au moins dans le sens mesquin et égotiste que l'on donne à ce terme aujourd'hui. Seule la possibilité d'agir lui importe; il est un citoyen à part entière, dans un sens que la médiocrité de notre époque rend difficile à saisir.
C'est au moment où Florence est une république qu'il déploie pleinement son activité. Il écrit seulement quand il n'y a rien de mieux à faire, quand il est maintenu à l'écart. Car son intelligence inquiète les médiocres qui pour cette raison le maintiennent dans des postes secondaires.
Il faut donc aussi envisager le Prince comme un agir, lié à des circonstances particulières (les Médicis sont au pouvoir) mais qui espère bien viser au-delà historiquement.
Quelles sont les possibilités d'une époque ? de quelle manière agir à un moment donné en prenant en compte l'ensemble des circonstances présentes ? Tout en sachant que l'on pouvait fort bien finir égorgé au coin d'une rue, si quelque potentat vous trouvait trop encombrant ou trop clairvoyant. La publication anonyme d'un ouvrage comme le Prince n'était à mon avis ni possible, ni adéquate ; car Machiavel vise sciemment au-delà de lui-même. Ce n'est donc qu'en lui donnant cette forme qu'il pouvait alors le pousser comme nouveau pion dans l'histoire même.
Avec le Discours sur la première décade de Tite-Live, le ton sera tout différent, le désir d'agir sur son temps tout similaire.
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Nicolas Machiavel ( 1469-1527 ), est un théoricien politique florentin ( Florence, que c'est beau ! )
Machiavel n'est pas, à ma grande surprise, machiavélique... sauf quand il cite des princes qui se créent une opposition pour venir écraser celle-ci, et se faire passer pour un héros au regard de son peuple.
Machiavel est synthétique : après une analyse des princes (gouvernants ) romains et italiens, il crée une sorte de système pour désigner la meilleure façon de gouverner.
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Quel dommage que le style soit très alambiqué, confus, et que de plus, je ne connaisse pas la politique de l'Italie du moyen-âge : une Italie très morcelée que convoitent Louis XII de France, Philippe d'Espagne, les Vénitiens, les Sforza de Milan, les Médicis, les Borgia... Oui, Rodrigo de Borja, Espagnol, transforme son nom en Borgia en Italie et devient le pape Alexandre VI, le licencieux.
Machiavel côtoie son fils César Borgia en 1502-1503, un des princes les plus cruels, qui assassine à tire-larigot, tout ce qui veut prendre sa place, couche avec sa soeur Lucrèce.... Enfin, le dernier pape auquel l'auteur fait allusion est carrément un guerrier et un conquérant : Jules II... !
La naissance de ce livre est étayée par le côtoiement de nombreux Grands dans sa fonction de légat, mais c'est César Borgia qui inspira, 10 ans après, Machiavel pour écrire le Prince, en 1513.
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Voici ce qui en ressort : les hommes sont mauvais, la cruauté ( et fermeté ) du Prince est nécessaire, sinon, il y a licence et rébellion du peuple, de l'armée : le prince est alors méprisé, haï, et à l'époque, il est souvent tué.
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Un prince peut être héréditaire ou nouveau (ce point est aussi analysé par La Boétie ) ;
il peut avoir de la fortune ( chance ), mais son libre-arbitre ( ses choix ) entrent en jeu : il peut être indolent, circonspect ou impétueux ;
il doit s'appuyer sur les lois, les armes et les exemples ;
il doit également s'appuyer sur ses soldats et son peuple.
Les soldats peuvent être des mercenaires, mais le prince a plus d'autorité sur une armée propre, une armée de son pays ;
et quand le prince est haï par son peuple, ça finit toujours mal pour le prince, ça me rappelle quelqu'un, présentement !
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Le dernier chapitre est attendrissant : Nicolas Machiavel demande, supplie le pape Léon X de tout faire pour unir l'Italie, ce pays convoité, déchiré et morcelé.
Je pense qu'il faudra attendre Cavour, au XIXè siècle, pour que sa prière se réalise.
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Ouah !

Si ce petit bouquin est assez loin de ce que j'en attendais, quelle baffe ! J'ai adoré !

La description des hommes avides de pouvoir et de richesse est d'une véracité et d'une crudité rares, ce me semble. (Etonnant d'ailleurs qu'il n'ait pas disparu englouti par les brumes de "l'Histoire"...).

Mais d'où sort donc le "machiavélisme" ? Pas de cet écrit en tous les cas, où les conseils aux "princes", anciens ou nouveaux (à l'époque, entendons-nous, mais en sommes-nous si éloignés aujourd'hui, je ne crois pas... A part que les nôtres n'ont plus d'armes aux côtés !). Où les conseils, je disais, sont on ne peut plus avisés, (pour l'époque, s'entend), appuyés d'exemples historiques divers et fabuleusement intéressants !
Le mot "machiavélisme" vient sans doute de l'intelligence, de la lucidité, de l'incroyable faculté d'analyse du personnage. Et du fait qu'il ne mâche pas ses mots, qui qu'il vise... Mdr !

Les petites phrases (citations) qui visent au coeur de la cible sont nombreuses, bien trop pour toutes les mettre sur Babelio ! Qu'elles soient sur les puissants, ou les autres...
J'ai vraiment beaucoup aimé. Indispensable pour tous les amateurs d'Histoire ! Attention cependant, c'est un peu ardu à lire par moments.
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Quand Machiavel commence à écrire le Prince, en 1512, il est emprisonné par les Médicis, pour cause de sympathies républicaines. La polémique ouverte il y a plusieurs siècles après les commentaires de J.J. Rousseau est donc sans fondements.
Pour préparer chacun à la lecture de ce -court- ouvrage, il convient simplement de prévenir qu'il ne s'agit pas d'une réflexion éthique ou morale : le Prince n'est pas une analyse du pouvoir juste, ni une apologie ou au contraire une dénonciation de la tyrannie. En cela, il est donc un livre moderne, rompant avec la tradition antique, poursuivie et enrichie par les penseurs chrétiens.
Cette réflexion est une analyse fine, pertinente et concrète du jeur de pouvoir. Ce faisant, Machiavel montre entre autres comment la morale peut être instrumentalisée par ceux qui recherchent et prennent le pouvoir, alors qu'elle n'est pas ou plus une fin en soir. D'où, à mon sens, l'expression courante de "machiavélisme"...
Il s'appuie sur le contexte de son époque et sur une grande culture des faits antiques. Ce faisant, il nous offre d'excellentes clés de lecture de la politique en tant que jeu de pouvoirs -applicables aussi (comme moyen d'analyser les éventuelles manipulations...) au fonctionnement des entreprises, associations et autres groupes sociaux-, toujours d'actualité.
Qualifier Machiavel de cynique, c'est comme refuser le diagnostic d 'un médecin au motif que la maladie découverte est trop honteuse...
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En 1832, est publié, à titre posthume, le traité de stratégie militaire d'un général prussien, Carl von Clauzewitz, titré De la Guerre. Parmi les nombreuses réflexions qui émaillent cet ouvrage, j'ai retenu celle-ci : "La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens".

En 1532, est publié, à titre posthume aussi, cet ouvrage de Nicolas Machiavel, homme politique et philosophe italien, titré Le Prince. Il s'agit là aussi d'un traité mais dont la substance est de conseiller un prince sur la bonne politique à mettre en oeuvre pour conserver le pouvoir sur une province conquise, le plus souvent par la guerre forcément.

Son ouvrage s'adressait en fait à celui dont il voulait ni plus ni moins que s'attirer les faveurs, le savoir puissant en une principauté la plus large possible : Laurent de Médicis, dit le magnifique. Machiavel rêvait déjà d'une Italie unifiée, avec bien sûr à sa tête ce Médicis qui avait recueilli son suffrage. Une Italie débarrassée des "barbares" qui tour à tour ont occupé son sol, au premier rang desquels figuraient les Français. Eh oui !
On sait que cette aspiration d'unification ne se sera exaucée qu'en 1870.

Dans ce petit traité, Nicolas Machiavel s'attache à nourrir la réflexion de ce prince auquel il destine son ouvrage afin qu'il dure en son règne, et que dure par là l'avantage qu'il en tirera lui-même. Charité bien ordonnée commence par soi-même. Beaucoup de sagesse dans ces réflexions, on ne peut plus intéressées, parmi lesquelles celle-ci qui conseille au prince d'être craint de ses sujets sans jamais s'attirer la haine. Et cette autre qui fait la quatrième de couverture aux éditions De Borée : "Il y a deux manières de combattre, l'une avec les lois, l'autre avec le force. La première est propre aux hommes, l'autre nous est commune avec les bêtes."

Un ouvrage pas vraiment divertissant, je vous le concède, mais intéressant sur la psychologie de ce personnage qui ne fit jamais rien que par calcul. Un brin machiavélique quand même !

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Le Prince de Machiavel n'est bien sûr pas aussi machiavélique que le nom commun qu'a donner son auteur. Ce n'est peut être aussi pas son écrit le plus provocateur. Par contre, il faut le replacer dans l'époque pour comprendre la rupture que ce livre va opérer. Jusqu'à Machiavel tous les traités du bien gouverner étaient basés sur les bonnes moeurs chrétiennes qu'un prince se respectant devait obligatoirement essayé de tenir. Ne nous leurrons pas, ils n'essayaient pas vraiment. Mais les futurs dirigeants étaient tout de même éduqué dans cette optique. L'auteur, lui était en rupture avec la vision chrétienne du monde, il s'apparentait plus à la philosophie libertine, matérialiste. La rupture de Machiavel dans ce livre qu'il offre à son protecteur est qu'un prince étant au-dessus des autres ne doit pas et surtout n'est absolument pas tenue de part sa place de respecté les bonnes règles. Qu'un seul but importe vraiment, comment prendre le pouvoir, et le conserver. Mais Machiavel sait que si le prince veut pouvoir conserver son pouvoir et ne pas être détesté de son peuple, il doit fournir une apparence de respect des us et coutumes. Il pousse le réalisme politique à prévenir le prince que s'il veut garder son pouvoir, il doit s'appuyer sur le peuple et non les grands qui lorgnent sur son trône. le machiavélisme au sens stricte est plutôt un réalisme politique, encore utilisé de nos jours par beaucoup de nos hommes politiques : caressant pour obtenir le pouvoir et faire le contraire en nous laissant croire que c'est pour notre bien, qu'ils y sont obligé. Bien qu'il soit indubitablement un livre de cours, de flatteries, ainsi que beaucoup d'autres oeuvres italiennes de la renaissance, protection oblige, c'est un livre claire voyant sur la politique des anciennes royautés que sur celle des républiques actuelles.
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