Pluies d'hier et d'aujourd'hui, dans son creux étui de bois tendre, un saule garde vos fraîches odeurs, et c'est le soir, dans les chemins de saules, qu'on peut sentir les pluies d'autrefois.
Dans le jardin, sucré d'oeillets et d'aromates,
Lorsque l'aube a mouillé le serpolet touffu
Et que les lourds frelons, suspendus aux tomates
Chancellent de rosée et de sève pourvus,
Je viendrai, sous l'azur et la brume flottante,
Ivre du temps vivace et du jour retrouvé,
Mon coeur se dressera comme le coq qui chante
Insatiablement vers le soleil levé.
Sentez-vous cette odeur, cette odeur fauve et rousse
de beau cuir neuf, chauffé par l'automne qui flambe ?
Tous les cuirs du Levant sont là, venus ensemble
de souks lointains saturés d'ambre et de santal.
Des huiles et des gommes d'or les éclaboussent.
Petits saules courbés sous l'orage, le vent rabat vos longues branches comme une chevelure qu'on peigne toute d'un côté, et qui serait plus claire à la racine.
Petits saules haussant les épaules et trop tristes pour pleurer, je voudrais danser la ronde autour du monde avec vous, et tremper vos chevelures dans le liquide arc-en-ciel.
Ce château m'appartient ce soir jusqu'à la gorge
Mon cri nourrit la nuit tournante des couloirs
Et les grands escaliers que mes pas interrogent
Et l'ombre d'un passé qui voûte le miroir