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sur 798 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« Dans une famille, le non-dit est ce que l'on guette. Mais le bruit d'une famille consiste à le noyer ».

C'est une grande maison dans la prairie, une maison couleur lavande aux volets violets, sertie de vérandas, de tourelles et de grandes cheminées, adossée à la colline de High Point Farm, dans l'état de New York. Ceux qui vivent là ont perdu la clé de cette grande ferme un peu brinquebalante, anarchique, d'une propreté douteuse, envahie par les herbes et les immenses arbres qui la cachent en été, entourée de terrains broussailleux et vallonnés, où vit la famille Mulvaney, c'est-à-dire six personnes : le chanceux et énergique père Michael, la pétulante et fantasque mère Corinne, les trois fils Mike le sportif, Patrick l'intellectuel et Judd le benjamin un peu invisible, et la solaire fille Marianne. Mais aussi des chevaux, des chiens, des chats, des chèvres, un canari…il fait bon vivre dans cette famille où chacun trouve sa place dans cette atmosphère de fête, entre rituels, codes familiaux uniques plein d'humour et d'originalité et vieilles légendes familiales racontées à table, surnoms surprenants donnés à chacun, joyeux bruits et chants dès potron-minet, tâches assignées et respect de la singularité de chacun.

« Les Mulvaney étaient une famille qui trouvait précieux tout ce qui lui arrivait, où l'on conservait la mémoire de tout ce qui était précieux et où tout le monde avait une histoire ».

Joyce Carol Oates nous présente la famille parfaite, ce genre de famille qui fait des envieux, s'exposant sur toutes les photos de la maison avec des sourires à en faire craquer la peau des joues. Ces photos tellement démonstratives qu'elles finissent par mettre mal à l'aise, comme si elles cachaient certaines lézardes, certaines failles, tapies, prêtes à surgir et à faire leur oeuvre de destruction au moindre accroc. Comme si étaler ainsi le bonheur permettait de se prouver quelque chose et de cacher d'importantes faiblesses. Comme si ce trop-plein de lumière sur la photo ricochait sur nous, éblouissante et fiévreuse, permettant de ne pas examiner de trop près telle mâchoire crispée, tel regard étrange, tel poing aux jointures blanches de devoir serrer fort…Soleil brillant aveuglant, comme dans un miroir fracassé…

L'auteure, à travers cette famille, semble avoir trouvé un sujet d'étude parfait, passant du temps consciencieusement avec chaque membre, analysant avec minutie la personnalité et la psychologie de chacun, les ajustant les uns par rapport aux autres, maillage parfait, pièces se soutenant les unes par rapport aux autres telle une construction en sucre dont l'effondrement d'un seul d'entre eux pourrait avoir un effet domino catastrophique. Pourtant n'est-ce pas dans les épreuves qu'il est donné à voir la solidité de cette construction familiale précisément ?

« On n'oublie jamais le paysage de son enfance, pensa Corinne. Les souvenirs les plus anciens sont ceux que l'on chérit le plus. Elle espérait que Michael et elle avaient donné à leurs enfants un paysage qui les accompagnerait toute leur vie. Une consolation, un réconfort ».

Pourtant lorsque le drame arrive cet été 1976, lorsque la fille iconique de la famille est tragiquement salie, la désintégration de la famille, lentement, va commencer. Joyce Carol Oates a renversé un des sucres, pilier de l'ensemble, en l'occurrence la fille tant aimée, sorte de princesse chérie, et analyse l'effondrement de tous les autres sucres. Eclatement de la bulle de cocon, fin de la magie…Exil de Marianne par les parents sans un mot de consolation, chagrin dévastateur, perte des repères, rejet de la famille par le village, entreprise qui périclite, alcoolisme, éclatement de la famille…C'était donc ça la famille Mulvaney que tout le monde enviait, à exploser ainsi au premier drame venu ?

C'est Judd, désormais trentenaire, qui raconte dans l'essentiel des chapitres l'histoire de la famille à la façon d'un album de famille, véridique, fait de souvenirs, de conjectures, de nostalgie, l'oeuvre de toute une vie…Judd le benjamin se reposant sur ses souvenirs mais aussi sur les souvenirs des autres, qui sont plus âgés et détiennent donc l'autorité. le « je » de ces chapitres-là alterne avec le « elle » des chapitres consacrés à Marianne.
Au-delà de l'histoire de l'éclatement d'une famille, et de sa reconstruction éventuelle sous une autre forme, ce livre est captivant dans sa façon de soulever les innombrables questions liées à toute famille. Les souvenirs que nous léguons à nos enfants, ce que nous leur transmettons, la façon de se construire et de grandir avec cet héritage, la façon de vivre après une tragédie familiale et de la surmonter, les étapes dans la vie des parents au fur et à mesure de l'avancée en âge des enfants. J'ai été très touchée par la mère, Corinne, optimiste, qui se bat envers et contre tout. C'est elle le pilier véritable qui saura redevenir la pièce maitresse de la famille. Elle est la clé de cette famille, elle sait unir, elle saura réunir de nouveau, même si l'amour porté à son mari l'a un temps aveuglée.

« C'était vraiment fini, n'est-ce pas ? Corinne ne s'en était pas tout à fait rendu compte. Cette demi-heure tumultueuse où tous les enfants, en rentrant de l'école, se pressaient dans la cuisine, haletants et surexcités, échangeaient les nouvelles de la journée, plaisantaient, riaient, fonçaient sur le réfrigérateur…au milieu des aboiements ravis des chiens, pour qui c'était aussi le grand moment de la journée. Ces années merveilleuses où Mikey était encore au lycée, et Judd encore à l'école primaire, P.J, Bouton, Ranger. Et leur bonne vieille maman rayonnante de plaisir, même quand elle ronchonnait : « Hé ! Bande de pillards ! Gare à vous si vous n'avez pas faim ce soir ! Comme si des garçons en pleine croissance risquaient de manquer d'appétit. Ces garçons affamés qui dévoraient des sandwiches au beurre de cacahuète, des cookies au chocolat, des tranches de cheddar américain, des petits-beurre rances dégoulinants de confiture».

Si la première partie m'a harponnée au point de ne pouvoir lâcher le livre, j'ai trouvé plus de longueurs à la seconde partie même si le charme opérait toujours. Avec en toile de fond les interrogations qui sont miennes constamment, vôtres sans doute aussi, celles de tout un chacun : notre vie nous appartient-elle vraiment ? N'est-elle pas celle de nos parents dans le sens où nous devons ce que nous sommes, nos fragilités, nos lubies, nos faiblesses, à nos parents, notre enfance, ce qu'ils nous ont transmis, nos gènes, notre histoire familiale même ancienne ? Quand devenons-nous libres ? le voulons-nous d'ailleurs, le pouvons-nous ? Accepter cette donnée n'est-elle pas le meilleur chemin pour s'en affranchir avant de transmettre à notre tour ? Vastes questions que Joyce Carol Oates analyse avec une intelligence admirable et beaucoup de subtilité.

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"Nous étions les Mulvaney ", jusqu'au jour de la St Valentin 1976...
Jusqu'au jour où la jeune fille de la famille, Marianne ( alias Bouton pour les intimes ), au cours d'une soirée boive un peu trop, et qu'il arrive quelque chose que dans sa bondieuserie, elle n'osera pas nommer.. n'osera pas dire, du moins , pas tout de suite .
S"en suivra la réaction de ses parents, de ses frères, de la communauté de cette petite ville américaine des années 70, si loin de notre état d'esprit à nous... S'en suivra la désintégration de la famille Mulvaney, telle qu'elle était avant le drame.
Car elle était parfaite la famille Mulvaney, la vraie petite maison du bonheur dans la prairie , en haut sur la colline, perdue dans un terrain immense, où, au milieu coule une rivière , traversée par Bambi et ses collègues ....
Une ferme remplie d'animaux ( du canari , en passant par les chevaux, les chiens, les chats) dont s'occupe une Corinne Mulvaney , un brin fantasque, qui a transformé la grange vétuste en magasin d'antiquités . Une mère , un peu trop pieuse et un père , tellement fier de sa réussite sociale .
Des parents qui s'aiment (surtout la mère ! ) .
Une fratrie de quatre : Mike un aîné aux excellents résultats sportifs (et si beau ), Patrick , un brin solitaire, qui aura les meilleurs résultats scolaires du lycée, Marianne la merveilleuse ( si pure et si gentille, si parfaite... ), et le petit dernier Judd, (10 ans au moment des faits), le narrateur devenu journaliste .
Une famille qui était si heureuse jusqu'au jour où ...

Si j'ai aimé ? Par instants, énormément , et à d'autres moments, quel ennui ...
C'est un roman dont la trame, le “squelette narratif” est excellent , mais qu'il est long...
Joyce Carol Oates ne se contentera pas de dérouler les faits de 1976 à 1993. Non! Elle fera trois pas en avant , quatre en arrière, puis deux en avant etc.. sans cesse , et c'est vraiment saoulant
De la genèse du couple Mulvaney jusqu'aux enfants devenus adultes, vous saurez tout !
Et même ce que vous n'avez pas demandé ! ( mais qui peut avoir son charme , selon votre humeur... Une page et demi, de descriptions sur les horloges, pendules et réveils de la ferme (couleur pervenche) de la famille... ♫ Ça m'énerve ! ♫)
Il faut attendre la page 184 pour que les choses avancent un peu.
Jusque-là l'auteur se contentait de camper le décor ( High Point Farm, le paradis... ). L'histoire ne décollera vraiment qu'au troisième tiers...
Et pourtant , j'ai aimé : par instants...
Des moments de grâce absolue, parce qu'il y a le style de Joyce Carol Oates, ses phrases si magiques, ses mots si bien assemblés...
Et puis les personnages auxquels on s'attache (les enfants , parce que les parents, on a envie de leur mettre des baffes ! )
Et lorsqu'on termine ce livre, on se dit que les choses auraient pu être autrement, que ce drame aurait dû être mieux géré par les adultes , mais on se dit aussi que ces enfants Mulvaney ne s'en sortent pas si mal, à la fin, parce que l'essentiel était là, la graine était en place, la base , le socle affectif.
Ils étaient les Mulvaney , ils le perpétueront...
En préface , l'auteure dédie son roman à ses Mulvaney à elle ...

Challenge pavés 2020
Multi défis 2020
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Le narrateur nous raconte l'histoire de sa famille ; c'est Judd le petit dernier, le bébé qui n'était pas encore né quand tout est arrivé :

« Nous, les Mulvaney, nous aurions été prêts à mourir les uns pour les autres, mais cela ne nous empêchait pas d'avoir nos secrets. C'est toujours le cas.

C'est un adulte qui vous raconte cette histoire : Judd Mulvaney, trente ans, rédacteur en chef… »

C'est l'histoire d'une famille américaine, après la guerre, à laquelle tout semble réussir, une maison couleur lavande, un couple amoureux, des enfants, trois garçons, et une fille, très belle, qu'on a surnommée Bouton, qui fait la fierté de tous, les animaux… jusqu'au jour de la Saint Valentin où se déroule un drame : le viol de Marianne dans sa belle robe rose.

On ne prononcera jamais le mot dans la famille : on dira agression puis « ça » et bien-sûr tout est de la faute de Marianne, elle avait bu et ne se souvient de rien (dit-elle). Bien-sûr, le violeur qui appartient à une famille riche, restera impuni. Nous en sommes seulement à une quarantaine de pages du roman, et on pourrait penser que tout est dit.

En fait, ce qui intéresse l'auteure, ce sont les réactions de l'entourage; la famille heureuse va plus ou moins exploser : le père qui fuit dans les consultations d'avocats et finit par ne plus vouloir voir Marianne, alors il l'envoie chez une lointaine cousine : on ne voit plus le « problème » donc il n'y a plus de problème…

Cette famille est vraiment spéciale, surtout les parents que j'ai trouvé particulièrement égoïstes, dans le déni constamment. La mère Corinne est le pilier de la maison, est en adoration devant son époux et le soutient ; son côté hyper-religieux est assez horripilant.

Il y a aussi trois garçons, Mickey junior, le sportif, champion de base-ball, Patrick, l'intellectuel de la famille, aux raisonnements étranges qui font penser qu'il est atteint d'autisme, Asperger et le troisième Judd, le petit dernier, pratiquement transparent.

Joyce Carol Oates aborde très bien dans ce roman le thème du secret et du déni qui l'entoure, le rejet qui en résulte, mais aborde aussi les USA dans les années soixante-dix quatre-vingts, le chômage, l'alcool et la vengeance qui viendra en fait de celui que l'on n'a pas prévu.

Ce roman sommeillait depuis longtemps dans gigantesque PAL et avec le repos forcé, je me suis enfin décidée ! je l'ai beaucoup aimé, le thème du secret, la réflexion de l'auteure sur les conséquences familiales, son écriture m'ont plu.

J'avais déjà lu « Je vous emmène » qui m'avait laissée sur ma faim, je voulais explorer d'autres romans d'elle. J'ai encore « Mudwoman » et « La fille du fossoyeur » qui m'attendent et plus si affinités…
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Ils étaient les Mulvaney.

Papa, l'entrepreneur grande gueule, Maman, la chineuse fantasque, les trois frangins -Mike, le costaud sportif, Patrick, le binoclard intello, Judd, le gamin joyeux et affectueux. Et puis la soeur, Marianne, la belle, la pure, l'adulée, la populaire. La prunelle de leurs yeux à tous.

Ils étaient les Mulvaney, dans leur ferme aux volets lavande, perchée sur la colline, pleine de chats, de chiens, de chevaux. Dans leur bulle familiale, leur paradis campagnard, avec leurs codes - la bonne humeur comme règle de vie, l'humour comme esquive, la supériorité comme référence tacite, les surnoms comme totems tribaux, la foi comme étendard, l'excellence comme limite.

Ils étaient les Mulvaney.

Et puis voilà tout à coup, un soir de bal, Marianne qui revient la robe et l'âme déchirées, le corps et le coeur meurtris. Un viol. Un accroc dans le tissage au petit point de leur vie familiale. Un ver dans le fruit de leur béatitude. Une pierre dans leur jardin d'Eden.

Ne pas en parler. Ne pas nommer. Ne pas voir. Retrouver l'innocence, le bonheur, l'insouciance originelles. Entre l'envie de vengeance et la soif de respectabilité, les Mulvaney se déchirent.

Mais Marianne est là, muette, désolée, culpabilisée, amaigrie, rejetée.

Ne plus la voir.

Marianne est bannie. Ne pouvant venger la victime, on l'éloigne.

Commence alors la lente, l'inexorable destruction de leur arche modèle : les garçons, un à un, s'en vont. le père se détruit à coup d'alcool, de rixes, de dettes. Corinne, la mère, continue de tenir à bout de bras ce qui lui semble subsister du paradis désormais perdu. Mais ses gestes sont plus fous, ses paupières plus flétries, ses cheveux plus gris.

Les animaux sont vendus, puis les terres, puis la maison perchée de High Point Farm.

Marianne a fui ; elle mène désormais une existence « en patchwork » : acharnée au travail, s'attirant sympathie et affection - et s'arrachant sans un mot d'explication dès qu'elle sent qu'on la remarque, qu'on lui accorde quelque prix. Accrochée à son chat Muffin – le seul être qui lui reste de High Point Farm. Si peu sûre d'elle. Si désireuse de se voir autorisée à revenir auprès des siens qu'elle ne trouve de paix nulle part.

Joyce Carol Oates mène son récit avec une extrême finesse, traquant toutes les failles de ce paradis des Mulvaney, si fragile malgré ses allures de forteresse, pénétrant toutes les ramifications subtiles des attachements familiaux, faits de tendresse et d'exaspération mélangées, bordés de rituels naïfs et contraignants, tissés de non-dits et de peurs.

On suit avec effroi la désagrégation inexorable du clan, celle de ses membres, jusqu'à toucher la pierre angulaire de toute cette folie, de toute cette torture. Après quatorze années, enfin, les Mulvaney retrouvent une sorte de paix, une sorte de clan, élargi, modifié, mûri. Rien ne sera plus comme avant. Et c'est sans doute mieux comme cela.

Une réussite : un livre dense et attachant, cruel et tendre avec ses personnages. On voyage dans les années Carter de cette grande Amérique puritaine et rurale avec une espèce de fascination horrifiée.

Ils étaient les Mulvaney. Tout cela n'est pas si loin.



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Louis Aragon a écrit un poème : Il n'y a pas d'amour heureux. Chez Joyce Carol Oates, on serait tenté de dire qu'il n'y a pas de famille heureuse.
Qu'on évoque celle des: Chutes avec les Burnaby ou celle qu'elle nous conte dans : Nous étions Les Mulvaney.
On peut établir d'étranges parallèles entre ces deux familles, les deux pères sombrent dans la déchéance avec l'alcool et les mères étouffent dans une religion qui ne leur accorde pas l'assistance voulue.
Et, les enfants, me direz-vous ?
Dans une, ils sont trois, dans l'autre quatre, ils vont se débattre dans ce magma familial et leurs identités sont confuses à définir pour chacun.
Nous étions les Mulvaney nous raconte au départ l'histoire d'une famille heureuse vivant à la campagne une vie idyllique entre nature et animaux.
J'ai eu dès le début beaucoup de mal à y croire d'autant que très vite, Oates nous fait comprendre qu'un drame va scinder ces vies qui voleront en éclat.
C'est, en fait, avec la fille de la famille que le drame naît, elle se fait violer suite à un bal où elle a l'imprudence de boire une vodka qui lui fera dire qu'elle est autant responsable que son violeur.Elle ne veut pas que des poursuites soient exercées à son encontre.
Un point de vue qui dérange en fait un peu, elle est tout de même une réelle victime et toute sa vie et celle des siens est anéantie à partir de ce viol.
Joyce Carol Oates décrit avec minutie les rouages d'une petite ville, les qu'en dira-t-on ( plusieurs fois écrit : elle l'a bien cherché), le coupable protégé parce qu'il est issu d'une famille de notables possédants.
Commence alors une longue descente aux enfers pour la famille Mulvaney et laisse apparaître toutes les failles de chaque membre de la famille.
Celle du père est centrale, sa fille étant sa préférée, elle "lui a volé son coeur", il la bannit de son regard et la contraint à vivre éloignée de sa famille.Lui même a été rejeté par son père qui l'a chassé de chez lui.
Une répétition étrange, inévitable ?
Chacun des enfants va suivre une route difficile dont ce drame est le noeud central de cette famille.

Je dois dire que ce roman se lit facilement, on est pris dans l'engrenage des jours où cette famille se débat.
Néanmoins, beaucoup de descriptions inutiles notamment celles sur les animaux, les lieux ,qui lasse par moments le lecteur.
J'imagine, je ne sais pas si c'est déjà le cas que ce roman s'adapte très bien en une adaptation cinématographique.
Si c'était le cas, je ne gâcherais pas mon plaisir et j'irais le voir.
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Chez les Mulvaney, on forme une famille unie, soudée, aimante, une joyeuse tribu composée du père Michaël, chef d'entreprise, des quatre enfants, Michaël Junior, Patrick, Marianne, Judd, le narrateur et de Corinne la mère, un rayon de soleil dynamique et débordante de charité Chrétienne.
Bien qu'un drame couve, on le pressent dès le début du roman, pendant des années, rien ne perturbe ce paradis familial.
Mais un jour, par une belle soirée de fête du collège, Marianne est violée.
La famille sombre dans la sordide réalité de l'Amérique rurale.
Désirs de vengeance, peurs, chacun à son tour quitte la maison.
Seule Marianne garde la nostalgie du passé.
Récit d'une tragédie annoncée, « Nous étions les Mulvaney » m'a tenue en haleine jusqu'à la dernière page. Les sentiments confus, contradictoires, tantôt violents, tantôt lumineux, toujours bouleversants, que génèrent les liens familiaux, sont disséqués avec une psychologie d'une justesse saisissante.
Subjuguée par la plume de Joyce Carol Oates qui tisse les mots avec le talent d'une orfèvre, je me demande si un jour les jurés de Nobel auront l'idée de récompenser son oeuvre exceptionnelle.

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Un album d'une famille un peu loufoque, les Mulvaney, qui habite une ferme aux États-Unis dans les années 70 et où le bonheur semble parfait. Et puis survient le drame familial qui va faire basculer cette famille unie.
L'Amérique puritaine est décrite avec subtilité par Joyce Carol Oates qui sait nous dépeindre avec justesse chaque personnage.
Malgré des longueurs, les 695 pages sont de lecture agréable. La fin est sans doute un peu optimiste, cependant elle fait du bien après la noirceur des chapitres précédents.
Belle découverte.
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J'avais un peu peur de me frotter à Joyce Carol Oates tant on m'en avait dit du bien. Autant que du mal. On m'avait dit que sa prose était d'une densité rare et parfois indigeste, que ses romans étaient longs, très longs. Et verbieux. Qu'ils étaient durs, qu'ils mettaient mal à l'aise.
Cela dit, c'est aussi ce qu'on m'avait dit de Toni Morrison et je l'aime tellement! Et puis le malaise et la douleur ne m'ont jamais fait peur en littérature. Bien au contraire.
"Nous étions les Mulvaney" qui parle d'une famille apparemment idéale m'a semblée une porte d'entrée intéressante dans l'oeuvre de la romancière et c'est un choix que je ne regrette pas.
Oui la langue est dense, foisonnante, riche; oui il y a parfois des longueurs qui viennent ponctuer la lecture.
Mais quel souffle! Quelle intrigue! Quel malaise, oui, mais de ce malaise qui fait les grandes oeuvres, qui bouscule, qui malmène: tout ce que j'aime!

Les Mulvaney, c'est la parfaite famille américaine et bien que la narration prenne corps dans les années 70, je n'ai pu m'empêcher en lisant de penser aux films américains des années 90, aux séries aussi (oui, "Sept à la maison", c'est à toi que je pense!), ils s'aiment, ils sont beaux, brillants, gentils.
Le père est séduisant, drôle, très apprécié dans la petite ville de Mont-Ephraim où il fait pousser les siens. C'est un self made man comme les aiment les Etats-Unis et à la force de son travail, il a su se faire accepter par la bonne société de la bourgade. Sa femme est solaire, généreuse, brocanteuse à ses heures et grâce à elle, il y a un Eden à Mont-Ephraim, une ferme parée d'un jardin immense et sauvage, une maison où l'on entend les rires des enfants, les aboiements du chien. Une maison qui sent bon les cookies en automne et les barbecues en été, une maison nantie d'une pelouse sur laquelle la famille dispute de tonitruantes parties de base ball. le paradis bientôt, c'est High Farm et le couple y élève des enfants magnifiques, des fils bruyants et attachants, et Marianne, douce et pieuse enfant prodige.
C'était le paradis, c'était idyllique jusqu'à cette nuit de bal, obscure, de 1976 qui changera à jamais la vie des Mulvaney qui dès lors n'auront de cesse de se répéter, comme un mantra, cette phrase ô combien glaçante: "heureux les affligés car ils seront consolés".
On comprend vite, en effet, que le bal du lycée n'a rien eu de féérique pour la tendre Marianne qui y a vécu un drame absolu dont toute la communauté lui fera se sentir coupable, un drame qui éclaboussera de honte toute sa famille.
A dater de cette nuit, l'implosion, la catabase, la culpabilité, le surgissement de la désunion et des non-dits.
Que Marianne soit innocente ne change par ailleurs rien à l'affaire; elle avait bu, elle ne sait plus...
S'en remettre à Dieu, s'en remettre à la grâce de Jésus...
"Bénissez ceux qui vous insultent, priez pour ceux qui vous persécutent".

Face à l'arbitraire du viol, Joyce Carol Oates dissèque l'éclatement d'une famille et dénonce toutes les hypocrisies du puritanisme et de la bonne société américaine. Peu à peu, de manière feutrée, oppression, elle dénonce la fausse bienveillance, les jeux de masques, tout ce qui fait la société américaine qui se délite quand le vernis se craquèle.
C'est virtuose, lourd et étouffant, nourri de points de vue éclatés et de digressions dont on ne saisit les clefs que bien après les avoir lues.
C'est grandiose, puissant. Vénéneux.
J'ai adoré.
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Une famille de quatre enfants dans une petite ville d'Amérique. le père a créé une entreprise en bonne santé, il a enfin été élu au Country Club, la mère prend soin de la maison et des nombreux animaux qui vivent dans cette sorte de ferme un peu à l'écart. L'aîné est un crac en football, le second a un QI de 151, la troisième est si belle et si populaire, seul le dernier, devenu le narrateur une fois adulte, semble « quelconque ». Toute cette famille s'entend à merveille, sous l'oeil bienveillant de Dieu, omniprésent.
Et puis soudain un drame, il arrive malheur à l'un des enfants de cette famille si bien à l'abri qu'elle n'a pas cru nécessaire d'avertir les enfants que le monde n'est pas tout rose. Et là silence, on n'en parle qu'en cachette. de même qu'on ne porte pas plainte sous couvert de ne pas risquer de faux témoignage, alors que les faits sont avérés. Drôle de famille parfaite qui s'effrite au premier problème. C'est du moins mon sentiment.
Je me suis demandé si la lecture de ce livre est la même en France ou en Europe de l'ouest en général et aux États-Unis. Sans doute pas. La religion est omniprésente et la façon d'exprimer sa foi me semble différente, avec chez la mère de famille quoiqu'elle en dise, un coté « peuple élu » ou plutôt « famille élue » qu'on ne trouverait pas ici.
Il reste que s'il m'était impossible de m'identifier à la mère de famille, si le père s'inspirait presque du mépris, c'est un superbe livre sur les conséquences d'une meurtrissure tant pour l'individu victime que pour son entourage. Et sur les faux semblants des relations sociales, la jalousie sous-jacente au sein d'une communauté.
Joyce Carol Oates, un auteur que je retrouverais dans quelques mois, c'est sûr.


Critique faite dans le cadre du Challenge ABC 2014-2015
Et dans le cadre du Challenge Pavés.
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Gros pavé à l'écriture dense et pour moi heureuse découverte, de cet écrivain.
L'histoire est racontée par le plus jeune fils de la famille, Judd; vie insouciante et heureuse d'une famille unie dans une petite ville de l'état de New York .
Le père a une entreprise florissante et accéde enfin à une certaine notoriété en temps que membre du Club local...
La mère, Corinne, fantasque, s'occupant de la ferme et antiquaire du dimanche .
Les 3 fils et la fille Mariane sont epanouis,entourés de chiens, chats et chevaux ...
Toute cette harmonie éclate après le premier bal de Mariane qui finit en drame. Et plutot que de faire front, la famille se disloque, le père ne supporte pas le deshonneur de sa fille, celle ci bien qu'étant victime se comporte en coupable et l'opprobe d'une société de province fait le reste, trop contente de voir s'effondrer l'orgueil du "clan Mulvaney".
Chaque membre de la famille va finalement se battre seul chacun à sa façon, et en particulier Mariane la préférée du père qu'il rejette et renie ,declenchant de ce fait la chute inexorable de la famille,c'est sans doute cela qui m'a le plus marqué, le poids du regard des autres et des prejugés dans cette société si puritaine, tout éclate et c'est terrible. cela ne peut finir qu'avec la mort du père ...
C'est intense, bien écrit, les personnages sont attachants et on ne lache le bouquin qu'à regret.
La fin peut paraitre un peu à l'eau de rose, mais on peut aussi en conclure qu' on peut finalement se reconstruire , recréer les liens familiaux et croire au bonheur.

Lien : http://lejournaldelouloune.o..
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