La plus belle histoire des plantes est aussi la nôtre, c’est l’histoire de notre arbre généalogique, de nos racines.
« Le tronc de l’arbre de vie s’est scindé en deux branches principales : celle des animaux … dont nous sommes la dernière pousse. Et celle des plantes… »
Jean-Marie Pelt , botaniste, interrogé par le journaliste Jacques Girardon, nous raconte cette odyssée.
De catastrophes en catastrophes, notre terre a subi des modifications, la vie s’est adaptée, s’est améliorée, a opéré des sélections, des essais. L’homme est la dernière de ces catastrophes pour le monde animal et végétal. Il vit dans ce jardin qu’est la vie sur terre, il est l’un de ses enfants. Il s’en nourrit. Il a su le domestiquer, s’en servir à sa guise, le manipuler.
De cueilleur, chasseur, nomade, il est devenu agriculteur, sédentaire, comme nous le raconte Marcel Mayozer, ingénieur agronome. Au début il ne prend que ce dont il a besoin, il est l’acteur de la diversité et de la propagation des plantes sur toute la planète. Les plantes et les hommes vivent en harmonie.
Puis, l’homme devient un dangereux manipulateur de la nature. Il ne la respecte plus. Il pense égoïstement, profit, production, au lieu de penser bien-être, environnement, solidarité et partage. Nous pourrions nourrir la planète entière si nous le décidions.
Enfin, Théodore Monod, scientifique naturaliste, nous raconte les dangers de la déforestation, de la désertification. Les plantes ont des ressources insoupçonnées, elles savent s’adapter et survivre.
Mais jusqu’à quand ? Si l’homme, ce primate violent et arrogant ne réagit pas assez vite et ne se met pas activement à penser en homme qu’il devrait être, en "roseau pensant", à utiliser son savoir, ses atouts, avec sagesse, il risque de saccager le jardin, la Terre, l'oasis de l’univers et… lui-même. Les plantes et les hommes sont « UN ».
Le jardin est unique et exceptionnel, il est le fruit d'une longue évolution. Il serait temps de se rendre compte de sa valeur, de le préserver, de le respecter, de le partager. Pour l’instant, et avant longtemps, nous n’avons pas d’autre oasis dans l’univers…
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Superbe odyssée traversant plus de deux milliard d'années d'évolution. Et l'orientation portée sur les plantes est vraiment passionnante. J'ai également été impressionné par la présentation du grand brassage que notre humanité a produit sur les céréales et les plantes et comment les variétés présentes dans notre région d'Europe se sont enrichies et diversifiées ces dernières centaines d'années. Un livre foisonnant d'informations fascinantes qui a élargi ma vision de l'évolution.
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- Qu’est-ce que le blé noir, avec lequel les Bretons font des crêpes,
- Rien à voir avec le blé. C’est une céréale domestiquée en Asie centrale, quelque part entre l’Afghanistan et la Mongolie. On l’appelle aussi sarrasin, peut-être parce que ce sont les Arabes qui nous l’ont apportée. Cette plante a longtemps été importante : elle poussait là où le blé ne donnait rien, ni l’orge, ni même le seigle. On semait du sarrasin sur les pentes, dans les hauts de champs, moins fertiles.
Tous les chasseurs-cueilleurs du monde connaissent les plantes à la perfection. Seuls quelques savants peuvent être meilleurs botanistes qu'eux ! Ils comprennent parfaitement que, lorsqu'on sème une graine, une plante pousse. Et quand l'agriculture est née, les hommes de la fin du paléolithique savaient déjà cela depuis des millénaires. Nomades, ils retrouvaient d'année en année les débris de ce qu'ils avaient laissé à leur passage précédent. Les graines qui étaient tombées à côté du foyer avaient germé... Ces gens récoltaient des centaines de plantes qui avaient toutes un usage, soit médicinal, soit alimentaire. Ils les connaissaient si bien qu'ils en cueillaient des vénéneuses, comme le manioc amer, et ils savaient leur faire subir, avant de les manger, les traitements nécessaires pour éliminer les substances toxiques. Dans certains cas, ils étaient même capables d'en extraire des poisons qu'ils utilisaient pour la chasse. Depuis des centaines de milliers d'années, ces gens vivaient au contact des végétaux, en les observant avec une attention d'autant plus grande que leur survie était en jeu.
- Peut-être l’industrie alimentaire trouvera-t-elle un jour le sorgho intéressant…
- Bien-sûr, en cherchant à diversifier, à offrir des produits nouveaux. Il y a une autre raison de s’occuper de ses plantes oubliées : chacun s’accorde aujourd’hui sur le fait qu’il est urgent d’améliorer la situation des paysans pauvres. Il va falloir faire un véritable effort pour qu’ils soient payés correctement quand ils vendent leurs produits sur le marché mondial. C’est la seule façon d’enrayer l’exode rural qui grossit des villes invivables, qui n’offrent ni emploi, ni logement. La misère paysanne se transforme en misère urbaine. Actuellement, on bidonvillise le monde en abandonnant les gens des campagnes qui ont faim. Il faut comprendre que les plantes orphelines, ce sont des hommes orphelins. L’histoire des plantes, c’est l’histoire des hommes.
Heidegger avait une jolie formule : « Les origines se cachent sous les commencements. » Cela signifie que, pour saisir un phénomène, il faut qu’il existe déjà. On ne peut donc jamais affirmer avec certitude que le plus ancien fossile découvert est celui de la créature originelle. Personne ne trouvera jamais l’empreinte de la première cellule qui fixa la chlorophylle.
- La méfiance du public face à ces plantes dont on a manipulé le patrimoine génétique n’est-elle pas un peu irrationnelle ?
- Marcel Mazoyer : Lorsqu’ils s’inquiètent de voir des scientifiques essayer de reconstruire les formes de la vie à leur idée, les gens, qu’ils croient en Dieu ou non, réagissent par respect de la création, par considération pour ce que 3 milliards d’années d’évolution ont produit depuis les algues bleues. Pourquoi ont-ils confiance dans cet héritage ? Parce qu’il est le produit de multiples essais, de multiples erreurs, d’une fantastique sélection, et que ça marche. Ils savent bien qu’il y a eu des ratés, des maladies génétiques, etc. Mais le public n’est pas convaincu que les manipulateurs pressés vont trouver mieux. Cette espèce de foi dans la nature que moquent certains du haut de leurs certitudes arrogantes, ce n’est que du bon sens : le respect de la vie.
Rencontre avec Jean-Marie Pelt à l'occasion de la sortie de son livre "L"évolution vue par un botaniste".