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EAN : 9782072849213
304 pages
Gallimard (04/02/2021)
3.52/5   32 notes
Résumé :

Arvid Jansen est un écrivain à la dérive. Il erre dans Oslo, revisite des lieux familiers, fait la tournée des bars, se lance dans des conquêtes sans lendemains, roule au hasard dans sa voiture, où il dort parfois quand le lit devient un endroit insupportable. Cela fait un an que son épouse Turid l'a quitté, emmenant avec elle leurs trois filles. L'absence de Vigdis, l'aînée, lui pèse tout particulièrement. Il est également hanté par la perte de ses parents ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Dans le dernier livre du grand auteur norvégien Per Petterson , on retrouve son fameux personnage Arvid Jansen, écrivain à la dérive ( " Dans le Sillage", "Maudit soit le fleuve du temps"), qui n'est pas son alter ego d'après ses propres mots, mais son cascadeur qui fait tout ce qu'il fait, mais de manière plus excessive et en plus condensée. On le rencontre à Oslo en 1992, il a trente huit ans. Après quinze ans de vie commune, il y a un an, sa femme est partie avec ses trois filles. Il est seul et traverse une profonde crise existentielle, agrémentée d'une panne d'inspiration. de nuit il la noie dans l'alcool et dans les bras d'inconnues rencontrées dans les bars, de jour il traine en ville ou en voiture dans la campagne.

A travers les états d'âme et les souvenirs d'Arvid, le temps d'un livre on va se ballader à travers Oslo et ses environs , allant jusqu'à 140 km à Arvika, la ville de frontière suédoise, où il va pour "lire". A pied en ville, ou dans sa vieille Mazda, où il passe souvent la nuit, à travers forêts et lacs des environs, retournant dans son quartier d'enfance Veitved, un quartier ouvrier, il essaie de tuer son spleen, que le contact avec la nature semble alléger. Un homme trés seul, dont la seule attache semble sa fille aînée de douze ans, Vigdis, plus adulte que lui, et que suite à une faute grave de sa part il va en être séparé pour un temps, ainsi que de ses deux cadettes.

Quelqu'un d'autre aurait écrit ce livre, où il n'y pas vraiment de trame, et le sujet de prime abord est assez sombre, je l'aurais évité. Mais Petterson est un écrivain de talent. Il parle magnifiquement sans pathos des hommes et des sentiments , décrit avec grande subtilité les rêves et les déceptions, esquisse merveilleusement bien la nature et met les femmes norvégiennes à l'honneur. Des épisodes exquises avec ces dernières jalonnent le texte. On visualise nettement tout ses personnages, même ceux, mineurs, à travers des descriptions simples et concises . S'y ajoutent de nombreux détails autobiographiques parsemés dans le texte, permettant de garder un contact permanent avec l'auteur, comme l'incendie du ferry où moururent ses parents et ses deux frères, sa fascination pour Beauvoir dont il a emprunté à dix sept ans un premier livre à la bibliothèque et ne l'a jamais rendu, sa relation à la religion......
J'aime énormément Per Petterson, tout lu de lui, et que je vous recommande fortement d'aborder si non déjà fait, avec ce livre ou un autre. Ils sont tous, sans exception, excellents !

"-Tu peux regarder en arrière....tu peux te faire tout un cinema dans ta tête, tu peux avoir la nostalgie du passé, mais tu ne peux pas y revenir."
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La photo de couverture vous donne un aperçu de l'ambiance : on y voit un homme seul sous un lampadaire, sa silhouette éclairée par une lumière blafarde se confond parfaitement avec l'ambiance de la nuit dans les rues désertes d'Oslo. Cet homme c'est Arvid Jansen, une brume maussade recouvre sa vie depuis qu'il a perdu tout ce qui faisait partie de sa vie.

Des hommes dans ma situation c'est la mise à nu de la désolation d'un homme incapable de gérer le chagrin qui occupe toute sa vie. Loin de vouloir nous raconter comment on se relève, et encore moins de disséquer le coeur ou de sonder les sentiments, Per Petterson décrit l'univers fragile de cet homme constamment à la frontière entre l'abandon et l'auto-préservation. Avec des dispositifs romanesques discrets, une narration transparente, sans éclat, sans esbroufe, il colle au plus près du sentiment d'inanité qui prend toute la place. Même si Arvid s'est créé des petites routines pour faire barrage au désarroi, elles ne font qu'accentuer les arrangements auxquels il a dû se résoudre comme les défaites qu'il a dû subir.
C'est un récit à l'ambiance bien grise, la vie d'Arvid est si je peux oser une métaphore à la manière d'un bout de bois dans l'eau, il se laisse porter par le courant, s'il échoue quelque part, ça lui ira, et si le courant l'entraîne jusqu'à la mer et qu'il erre toute sa vie, ça lui ira aussi.
Ce livre ne délivre donc aucun réconfort mais il retient l'attention peut-être parce qu'il capture quelque chose d'indicible, il apparaît presque plus authentique que la réalité dans la manière qu'a Arvid d'assumer le vide de sa vie. Avec une sincérité désarmante.
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« Des hommes dans ma situation » est un roman étrange, immobile malgré un narrateur constamment en mouvement, au goût doux amer d'une vie qui nous glisse entre le doigts. le héros Arvid Jansen, écrivain en panne d'inspiration, accumule. Il a perdu ses parents et deux de ses frères dans l'épouvantable incendie qui a frappé le Scandinavian Star, ferry qui venait de quitter Oslo. Et un an plus tôt, c'est son épouse Turid, l'amour de toute une vie, qui l'a quitté en emmenant avec elle leurs trois filles.

Arvid traverse ce qui lui reste de vie dans un état d'hébétude quasi-permanent. En multipliant les allers-retours temporels, en entremêlant les nuits mouvementées, les journées en voiture dans d'interminables déambulations autour d'Oslo et les rêves tourmentés de son héros, Per Petterson parvient à décontenancer son lecteur et à lui faire partager ce sentiment de stupéfaction incrédule qui a envahi le malheureux Arvid Jansen.

Le narrateur est perdu dans l'immensité de non-sens qu'est devenue sa vie. Il évolue dans un monde devenu flou, où les rêves semblent parfois plus réels que la réalité. Il ne sait plus où en sont ses sentiments pour Turid, n'a pas surmonté la terrible disparition de sa famille dans les flammes du Scandinavian Star, et seule la présence de ses trois filles le raccroche le temps d'un week-end sur deux à une vie à l'équilibre précaire.

Notre héros entretient un rapport presque charnel avec sa vieille Mazda, dans laquelle il lui arrive de dormir, malgré la rigueur de l'hiver norvégien. Il passe des heures à conduire sans but, et tourne en boucle autour d'Oslo, s'arrêtant tantôt au cimetière où repose sa famille, tantôt dans un café où il écrivait jeune homme, tantôt dans le quartier de son enfance. « Des hommes dans ma situation » est ainsi un « road-trip » immobile, dont le héros tourne en rond, revenant sans cesse sur les lieux de son passé, constatant la mutation d'un pays qui a tourné le dos à l'industrie et remplace peu à peu ses usines par des centres commerciaux.

Si le narrateur évolue sur un fil, il ne sombre jamais véritablement dans la folie qui semble parfois toute proche. le soir, il se rend en ville et fréquente les bars où il boit plus que de raison et multiplie les conquêtes sans lendemain avec une facilité déconcertante. Au coeur de la nuit enfumée et alcoolisée d'Oslo toutes les femmes sont belles et il est rare que l'une d'entre elles ne soit pas attendrie par le curieux mélange de tristesse et de perplexité qui émane d'Arvid.

« Des hommes dans ma situation » est un roman touchant, souvent déconcertant, parfois bouleversant. Il s'attache à nous faire partager l'amertume qui envahit son narrateur, son impossible travail de deuil, son amour inconditionnel pour ses trois filles, la dernière lueur qui éclaire encore son quotidien. Si Per Petterson ne retrouve pas dans son dernier livre la magie qui habitait son chef d'oeuvre « Pas facile de voler des chevaux », il réussit le tour de force de rester sur la ligne de crête qui sépare la dignité de la souffrance de la veulerie de l'apitoiement. Jour après jour, Arvid s'égare, accumule les erreurs, frôle une forme de folie mais il fait face. La poésie introspective exempte de pathos du roman fait entrer ce personnage magnétique au panthéon des perdants magnifiques.
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Je poursuis la découverte de l'oeuvre de cet auteur norvégien talentueux qu'est Per Petterson.

Dans « des hommes dans ma situation », le personnage principal, Arvid Jansen, vient d'être quitté par Turid, la femme qu'il a aimée et qui lui a donné trois filles : Vigdis, l'aînée, puis Tone et Tine. Ils se sont aimés, ont milité au même parti, Arvid est devenu écrivain, mais peu à peu Turid s'est éloignée, s'est mise à fréquenter d'autres personnes, « avec des tenues bigarrées » - on comprend en creux qu'il s'agit d'une autre classe sociale, de gens plus jeunes, plus « dans le vent » - et Arvid en a été profondément blessé.

Le livre s'ouvre lorsque la rupture est consommée et qu'Arvid erre de bar et bar à Oslo, passant souvent la frontière pour aller en Suède, où il y croise quelques femmes célibataires ou divorcées – peu importe, puisque ce sont des aventures sans lendemain.

Ce qui fait le plus souffrir Astrid, c'est aussi la distance qui s'instaure avec ses filles, notamment avec Vigdis, dont il se sent le plus proche. Mais un incident malheureux, que l'auteur nous conte comme un mauvais enchaînement de circonstances, va précipiter les choses : désormais les filles ne viendront plus chez lui, il n'ira plus les chercher chez Turid, avec « un plan » pour le week-end, et Astrid en est profondément meurtri.


Bookycooky a raison : Per Petterson est bien un grand écrivain d'aujourd'hui. Ce « Des hommes dans ma situation » est particulièrement sombre et sans espoir : l'auteur y décrit un personnage principal complètement seul, à la dérive, en peine d'inspiration, et noyant son mal être dans l'alcool ou sombrant dans sa voiture pour dormir un peu.

Je pense que tous les amis masculins Babeliotes devraient plonger dans cet univers : il décrit à merveille les tourments intérieurs et l'amertume d'un homme délaissé par sa femme qu'il a aimé, puis par ses filles, sans sombrer totalement dans un sentiment de pitié qu'on pourrait éprouver pour cet homme en peine : malgré tous ces déboires, il conserve un fond de dignité et de cohérence qui force le respect, c'est très fort.

Bien sûr toutes mes amies Babeliotes peuvent aussi découvrir ces « hommes dans ma situation » La fin donnera une lueur d'espoir : la relation qui unie le narrateur et sa fille Vigdis, va être le point d'orgue de ce récit profond et mélancolique : du grand art littéraire quoi qu'il en soit.

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« Je n'aimais pas cet endroit désolé et venteux, je n'aimais pas ce cimetière au milieu de nulle part, je n'aimais pas cette laideur insultante. Et je n'y étais pas venu depuis l'enterrement. Ou les enterrements, pour être exact. C'était il y a plus de deux ans. Rien ne m'incitait à fréquenter ce lieu, à imiter les endeuillés de cinéma qui tombent à genoux devant la sépulture de l'être cher, qui pleurent le mort et qui lui parlent. »

C'est sur les conseils de Florence (fbalestas) que j'ai découvert ce beau et triste roman, d'un auteur que je ne connaissais pas encore. Et je la remercie car la prose de Per Petterson a bien des qualités…

Arvid Jansen est un auteur en panne. Sa femme s'est éloignée de lui puis l'a quitté, emmenant avec elle leurs trois filles. Il a subi quelques années plus tôt toute une série de deuils, desquels il n‘est pas encore remis, si tant est qu'on puisse se remettre de tant de pertes.

Pour l'heure (la fin des années 1980), il est en roue libre : il parcourt inlassablement la région d'Oslo dans sa vieille Mazda, dans laquelle il dort parfois malgré le froid. Il boit beaucoup trop, multiplie les rencontres sans lendemain, d'autant plus que sa virilité est elle aussi défaillante. Trouvera-t-il une issue à cette « situation » ?

Le ton de ce roman n'incite pas à un optimisme béat : amateurs de Feelgood passez votre chemin !

Je ne connais pas Oslo mais après avoir terminé ce livre j'ai l'impression d'y être allé, tant le sens de l'espace est présent dans la narration (à la manière d'un Modiano, beaucoup de noms de lieux sont cités). Comme pour chacun d'entre nous, lieux et époques de la vie, sont étroitement noués. Et ce roman prend alors une belle hauteur, il touche à l'universel…
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critiques presse (3)
LeSoir
31 mai 2021
Le billet d’humeur de Jean-Claude Vantroyen.
Lire la critique sur le site : LeSoir
FocusLeVif
13 avril 2021
Dans une chronique douce-amère tamisant passé et présent, le Norvégien Per Petterson excelle dans l'éphéméride des liens défaits.
Lire la critique sur le site : FocusLeVif
LeFigaro
25 février 2021
Le roman de Per Pettereson possède une force, une poésie, une profondeur qui pousseraient les plus neurasthéniques à s’envoler pour la Scandinavie.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Ma vie s’en allait à vau-l’eau, tout disparaissait, je n’en retenais rien, les choses se détachaient de moi les unes après les autres et flottaient dans l’air.....Comme dans le poème de Yeats, où le faucon n’entend plus l’appel du fauconnier, s’envole au-dessus des collines pierreuses et disparait quelque part entre les montagnes de Mongolie.
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J’ai souvent pensé à ce rêve ; il était si précis, si vivant. Et je n’ai jamais trouvé regrettable ou déprimant ou absurde que la main qui avait tenu si fermement la mienne ne soit pas celle de Turid. Turid ne faisait pas partie du monde des rêves, elle n’avait pas été conçue pour ça. A l’état de veille, c’était différent : elle envahissait mon espace, elle remplissait mes journées du matin au soi, elle occupait l’univers tout entier. Elle m’engloutissait, mais elle se tarissait lentement ; elle s’asséchait et disparaissait, avalée par ses amis bigarrés.
J’y ai beaucoup réfléchi : qu’avaient-ils de plus que moi ? A part leurs couleurs, bien sûr. J’ai mis longtemps à comprendre. C’était pourtant simple : ils avaient Turid. Moi je ne l’avais pas.
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Pendant le long trajet du retour, j’ai conduit prudemment. Presque trop. Pas moments, on s’est mis à klaxonner derrière nous, mais j’ai stoïquement continué à rouler à moins de soixante jusqu’au rond-point de Sinsen.
(…) Puis nous nous sommes engagés dans Trondheimsveien et nous avons tourné à gauche. Tout le monde se taisait, dans la voiture on n’entendait que le léger crissement de l’aile contre le pneu avant. Nous avons fait semblant de ne nous apercevoir de rien ; tant que les choses n’empiraient pas, je ne voulais pas m’arrêter pour essayer de la rafistoler. A Sandaker elle s’est décrochée, il y a eu un choc violent contre l’asphalte ; Tone a pleuré, Tine a pleuré, Vigdis n’a pas pleuré.
De toute façon, je n’allais pas m’arrêter pour si peu.
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Une fois dans la rue, je n’avais aucune idée de l’endroit où je me trouvais. Il faisait encore nuit, mais le jour n’allait pas tarder à se lever. L’asphalte était humide, il tombait une pluie fine et l’air sentait l’automne ; les trottoirs étaient glissants et les feuilles mortes jonchaient le sol dans le petit jardin d’en face. Il n’y avait pas un bruit, seulement ma respiration saccadée. Et puis la rue luisante et le réverbère devant la fenêtre du troisième étage, éclairaient obliquement celle qui dormait peut-être déjà, qui avait oublié mon existence et ne s’en souviendrait plus jamais. Oui qui m’observait, cachée derrière les rideaux, en se demandant ce qui se passait dans ma tête. Moi non plus je ne le comprenais pas. Tout le bas de mon corps était engourdi ; j’étais prisonnier du silence, tiraillé entre la pudeur et l’obscénité. Cela durait depuis un moment, je ne voyais aucune issue, j’étais incapable de réfléchir, insensible aux caresses. Si elle avait été disposée à m’offrir quelque chose, je n’aurais pas su l’accepter.
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Je n’aimais pas ce cimetière désolé et venteux, je n’aimais pas ce cimetière au milieu de nulle part, je n’aimais pas cette laideur insultante. (...) Rien ne m’incitait à fréquenter ce lieu, à imiter les endeuillés de cinéma qui tombent à genoux devant la sépulture de l’être cher, qui pleurent le mort et qui lui parlent. Ou leur parlent. Et confessent en larme l’amour qu’ils éprouvent à leur égard, cet amour qu’il n’ont pas su leur montrer de leur vivant.
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Video de Per Petterson (2) Voir plusAjouter une vidéo

[Per Petterson : Dans le sillage]
A la Fondation Cartier pour l'Art Contemporain, Olivier BARROT présente l'ouvrage de Per PETTERSON : "Dans le sillage".
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