Selon moi ce qui caractérise le mieux l'écriture de London c'est la simplicité. C'est cette simplicité qui fait la force et la beauté des écrits de ce grand auteur. London ne s'encombre jamais de fioritures, il ne verse jamais dans le maniérisme, il ne se regarde pas écrire. Il raconte. Tout simplement. Et ses récits sont à chaque fois d'une intensité rare et marquent durablement le lecteur.
La nouvelle «
le mexicain » vient confirmer cette impression. En une nouvelle de 50 pages, London livre une oeuvre forte et subtile à la fois.
Ceux qui suivent mes avis auront sans doute remarqué, au détour de quelques-uns de mes billets, que j'ai une sensibilité politique très à gauche. Et c'est aussi pour ça que l'oeuvre de London me bouleverse tant. «
Le mexicain» prend comme contexte la révolution mexicaine mais prend place aux Etats-Unis où des sympathisants, qui rappellent les wobblies, soutiennent la cause. Rivera, un jeune mexicain, rejoint le groupe et, grâce à ses poings, rapporte de l'agent au mouvement.
Le personnage de Rivera est magnifique. Taciturne, habité d'une sourde colère, c'est toute la rage des miséreux qui brûle en lui. Il est animé d'une volonté immense, porté par la foi en la révolution qui lui apportera la vengeance et un monde meilleur. Pour ça, il est prêt à encaisser, à s'en prendre plein la gueule, à prendre des coups et à en donner. le genre de personnage qui, même s'il est empli de rancoeur et même de haine, force l'admiration et redonne un peu de foi en l'humanité et en sa capacité à se lever contre l'injustice du monde.
La préface de
Philippe Mortimer, traducteur de la nouvelle, vient éclairer le texte de London de façon très intéressante. Il évoque les éléments historiques servant de référence à l'auteur.
Le préfacier revient également sur l'évolution de la position de London concernant la révolution mexicaine, sujet assez douloureux pour les admirateurs du grand Jack. En effet, après avoir apporté son soutien à la cause, dans une série d'articles publiés en 1914 il prend fait et cause pour l'intervention américaine à Vera Cruz. Revirement honteux et incompréhensible… Même sa fille, 25 ans après, s'étonnait toujours de cette trahison morale, se demandant même si c'était bien son père le véritable auteur de ces articles. Quelle que soit la réalité, qu'il soit ou non l'auteur de ces horribles articles, prenons le droit, nous admirateurs du grand écrivain, de faire le tri, de choisir de mettre de côté ces errements de fin de vie. Pour moi, le vrai
Jack London, il est dans des textes comme «
le mexicain », subtil, profond, humaniste, socialiste.