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Michelle Charrier (Traducteur)
EAN : 9782207254455
352 pages
Denoël (23/09/2004)
3.72/5   76 notes
Résumé :

Par-delà le Vortex s'étend l'Archipel du Rêve, une zone de neutralité épargnée par la guerre qui ravage les continents austral et septentrional. On rêve d'y séjourner et, une fois prisonnier de ses langueurs tropicales, on ne peut que succomber à une autre forme de guerre, celle que se livrent les êtres de désir et de pouvoir qui peuplent les différentes îles de cette géographie hors du temps, singulière en diable. Chef-d'œuvre de la littérature érotique, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Je dois d'abord préciser que l'édition que j'ai eu le plaisir de lire est la plus récente.
Elle contient 8 nouvelles au total, distribuées dans cet ordre :
- L'instant équatorial, 1999
- La Négation, 1978 : que j'avais déjà pu lire dans le livre d'or de la SF
- Les Putains, 1978
- Vestige, 2008 : il s'agit d'une nouvelle ajoutée spécialement pour cette ultime édition, et qui prend tout son sens quand on la (re)lit dans Les Insulaires
- La Cavité miraculeuse, 1980
- La Crémation, 1978
- le Regard, 1978 : également dans l'anthologie du Livre d'or de la SF
- La Libération, 2000

Alors, très clairement les nouvelles qui ont, à mes yeux, le plus d'intérêt, que ce soit dans l'intrigue, dans la réflexion comme dans la place qu'elles prennent au sein du cycle de l'Archipel du Rêve, sont toutes celles qui datent de l'époque où Christopher Priest a justement commencé à construire ce monde imaginaire, avec ce qu'il a désigné lui-même comme le pilier absolu de son univers : La fontaine pétrifiante (The Affirmation en VO) publié en 1981.

L'auteur propose comme thème principal, rythmant l'ensemble des histoires, l'omniprésence de la guerre entre les deux principales puissances de la planète, en nous contant, sans jamais toutefois entrer dans des détails sordides et lourds, son lot d'horreurs et d'atrocités, et cela afin de nous montrer toute l'absurdité d'un tel conflit qui s'éternise au fil des siècles.
Priest n'a de cesse de nous faire comprendre qu'on ne peut échapper à son destin qu'au prix de très coûteux efforts, et que, finalement on y échappe jamais vraiment complètement. Il demeure éternellement des forces, des règles, des coutumes, des préjugés qui se rappellent à nous, et qui nous rappellent d'où on vient et où est censée être notre place.
L'auteur met en constante opposition le libre arbitre ainsi que la liberté de l'esprit propre à l'expression de l'art, avec la censure propre aux régimes autoritaires et dictatoriaux.

Certains messages véhiculés par ces diverses nouvelles sont certes assez classiques, toutefois tout prend un visage tellement différent à travers la plume de Monsieur Priest. Il mise autant sur le décor et sur une atmosphère souvent emprunte d'une douce et délicieuse poésie, que sur des métaphores parfois délicates à déchiffrer.

Quoiqu'il en soit, j'ai, une fois de plus, énormément apprécié me laisser porter par la force de narration, le talent de conteur de cet écrivain que je trouve de plus en plus génial, et cela au sens propre du terme.
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Les habitués de Christopher PRIEST ont probablement déjà visité partiellement l'Archipel du Rêve en lisant La fontaine pétrifiante. Il y a appris que l'archipel en question est une zone géographique relativement vaste, enclavée entre deux continents qui se livrent à une guerre si ancienne qu'on en a oublié les fondements. Il y a appris aussi que l'esprit de Peter Sinclair s'y est perdu, alors même qu'il cherchait à s'y reconstruire…
Il est vrai que l'Archipel du Rêve est un univers hors du temps et de tout espace clairement défini. Chaque île le composant est dotée de caractéristiques géographiques, géologiques et climatiques bien à elle, de même que les populations autochtones qui les peuplent ont chacune leurs propres spécificités. Mais le propos de Christopher PRIEST n'est pas à rechercher à ce niveau, les huit nouvelles composant le recueil L'Archipel du Rêve étant chacune dédiée à une tranche de vie quelque part au coeur de l'Archipel, ou à sa frontière.
L'instant équatorial (The Equatorial Moment, 1999) est une courte introduction présentant au lecteur l'Archipel du Rêve par le biais d'un voyage aérien. La négation (The Negation, 1978) est en quelque sorte une réponse contradictoire à La fontaine pétrifiante (The Affirmation). Dans Les putains (Whores, 1978), un soldat en permission visite une île où toutes les femmes ont été contraintes par la guerre à vendre leur corps. Dans Vestige (The Trace of Him, 2009), c'est une femme qui se souvient de la nuit qu'elle a passé de nombreuses années auparavant avec un écrivain qui vient de décéder. La cavité miraculeuse (The Miraculous Cairn, 1980) est un retour aux origines quand il s'agit de faire le tri dans les affaires du dernier de ses ascendants. La crémation (The Cremation, 1978) met également en scène un décès, mais cette fois-ci du strict point de vue de la cérémonie qu'il implique et des usages à respecter par chacun. le regard (The Watched, 1978) est quand à elle dédiée à la fascination d'un homme pour les moeurs sexuels d'une communauté autochtone. La libération (The Discharge, 2000) met enfin en scène un soldat qui déserte et se met en quête d'inspiration, à travers les îles de l'archipel, pour parfaire l'art pictural auquel il se destine.
Toutes ces nouvelles ont au moins quatre points communs. Outre leur cadre, c'est leur caractère intimiste ; c'est également le mystère qui les imprègne à des degrés plus ou moins forts ; c'est enfin l'érotisme des situations, qu'il soit suggéré ou réel. Bien sûr on y retrouve aussi l'appétence de Christopher PRIEST pour les réalités alternatives qui se brouillent l'une l'autre, ainsi que les questionnements infinis auxquels aucune réponse définitive n'est jamais apportée. Rappelons aussi que PRIEST est doté d'une plume d'une exceptionnelle fluidité qui parvient à immerger le lecteur dans n'importe quel récit, aussi complexe soit-il.
A tous ces titres L'Archipel du Rêve est un recueil d'une qualité exceptionnelle. Et si cela est vrai des huit nouvelles qui le composent, on offrira tout de même une mention spéciale à La cavité miraculeuse, qui est un véritable tour de force de la part de l'auteur, et de la traductrice.
Enfin, une fois n'est pas coutume, on préférera se procurer le format poche de ce recueil plutôt que le grand format (Denoël, collection Lunes d'Encre), le premier étant doté d'une nouvelle supplémentaire par rapport au second (Vestige) ; l'ordre des nouvelles y a également été revu par l'auteur lui-même. En contrepartie on perd la bibliographie incluse dans l'édition Denoël.
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J'ai découvert l'oeuvre de Christopher Priest avec « L'Inclinaison », qui pour moi a vraiment été un choc de lecture. Il me tardait de lire autre chose de cet auteur.

J'ai choisi cet Archipel du Rêve, en espérant une sorte de concordance avec « L'Inclinaison » qui se passait en grande partie dans cette vaste océanie imaginaire. Je n'ai pas retrouvé exactement son ton unique, en dépit de quelques ressemblances (deux continents en guerre, l'un au sud et l'autre au nord de cet archipel infini, qui est une zone neutre). Mais j'ai été tout aussi impressionné, voire plus, par cette suite de nouvelles et de courts romans. Ces textes relèvent du domaine du Fantastique teinté de SF, avec quelques incursions dans l'Horreur.

Je ne souhaite pas résumer chaque histoire en particulier, le plaisir de lecture de quiconque s'y plongerait s'en trouverait peut-être atténué car toutes recèlent des renversements, à des degrés divers.

Le style de Priest, ses trouvailles formelles et thématiques, ses obscurités parfois me paraissent être loin au-dessus du tout-venant, quel que soit le genre. Ce qui me semble primordial c'est la grande cohérence de l'univers de cet écrivain, même s'il n'y a (apparemment) pas de personnages récurrents dans les deux livres que j'ai lus. Je vais continuer à piocher dans sa bibliographie, un peu au hasard car il a une longue oeuvre derrière lui et franchement ça m'étonnerait de tomber sur du médiocre, voire du mauvais.
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Il y a longtemps que je suis (!) Christopher Priest, avec ce recueil, j'ai eu comme une révélation.
Priest écrit des rêves !
Je pense qu'il a recherché, travaillé, acquis la maitrise pour écrire (consciemment!) des rêves.
Toutes les composantes sont dominées, de la même manière qu'un musicien acquiert la maitrise du tempo, de la mélodie, de la nuance, de l'architecture, du sens…
Pour lui écrire, c'est fabriquer et transcrire un rêve, annihiler le temps linéaire, aller aux racines de la mémoire où le souvenir jaillit et s'incarne dans d'infinis avatars énigmatiques.
On est fasciné par la virtuosité qu'il a acquise :
Rendu de sensations étranges et raffinées, hallucinations, synesthésies, impressions physiques intimes, angoisses révélées dans la peur et l'érotisme, fulgurances et incohérences, fausse logique signifiante, intensité des effrois et phobies dérangeantes, insupportables ou inexplicables émotions, immersion visuelle par un rendu des lieux virtuose, maestria sur le thème des doubles qu'on ne repère pas toujours, donc dissimulation, Ombre de la mort, prémonition pendant la narration, inéluctabilité…
Priest ne croie ni au temps, ni à la mémoire, ni à la vérité, tous faussés, artificiels. Peut-être croit-il au rêve ?
Cela ferait de Priest un écrivain bien singulier, je ne vois pas beaucoup d'auteurs qui aurait recherché consciemment à écrire comme on rêve : Quelques poètes... Poe? Rimbaud? Hugo?

Un peu fasciné? Alors aller donc rêver dans l'archipel !! Mais attention, cela peut être dérangeant, très dérangeant...


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J'ai découvert Christopher Priest lors de la parution en France de son roman "Le Monde Inverti", c'était dans me milieu des années soixante-dix. Je finissais mes études supérieures scientifiques et je lisais pas mal de science-fiction et de fantastique. Ce roman m'avait fait un choc par l'habileté avec laquelle le jeune romancier avait mené son vaisseau littéraire jusqu'à un dénouement proprement saisissant. J'étais alors devenu un inconditionnel de Christopher Priest, et je le suis (presque) encore, bien que ses derniers ouvrages soient à mes yeux moins percutants. Je pense en particulier aux "Insulaires" ou "L'inclinaison" qui se situent dans un univers que l'auteur affectionne tout particulièrement : l'archipel du rêve, titre d'un recueil de nouvelles parues à la fin des années soixante-dix et que j'ai lu dans la foulée du Monde inverti. Ce recueil m'a profondément marqué au point de m'inspirer à mon tour divers textes dont les six îles oniriques que j'ai placées dans mon roman "Belle île amère" : Lagmur, Namdir, Torkane, Malidor, Bayang et Sandheur sans compter l'intrigue principale qui se situe dans une septième île : Sun-Yam.
L'archipel du rêve quant à lui rassemble cinq nouvelles qui parlent de rencontres féminines dans des univers insulaires improbables, associant trouble, sensualité, mystère, fantastique… Je serai tenté de faire le rapprochement avec d'autres ouvrages de l'époque écrits par Jacques Sternberg : "Toi ma nuit" et "Le coeur froid".
Chirstopher Priest n'aura jamais vraiment quitté son archipel du rêve auquel il consacrera aussi "La fontaine pétrifiante" ainsi que les romans plus récents que j'ai cités précédemment, et je le comprends… Quelle chance d'être ainsi le chroniqueur unique d'un monde kaléidoscopique composé d'innombrables îles et îlots, autant du moins que son imagination le lui permet.
Pas étonnant, tout bien réfléchi, que Christopher Priest soit britannique…

*** Addendum ***

Je viens de terminer la relecture de ce livre, une trentaine d'années plus tard. A la différence de "Toi ma nuit" de Jacques Sternberg auquel j'ai fait subir le même traitement, celui-ci conserve toute sa puissance et sa force évocatrice, du moins pour ce qui me concerne. L'archipel du rêve est un univers riche, dépaysant, à la fois enchanteur et inquiétant, sensuel et menaçant, chatoyant et troublant. Un univers déphasé, mais pas tant, presque une réalité adjacente (pour reprendre un autre titre de Christopher Priest) un peu dans le même esprit que les mondes de Haruki Murakami. Les trois textes centraux, les plus longs, sont à mes yeux les plus puissants : "La cavité miraculeuse", "La crémation", et "Le regard". Les autres sont des petits coups de scalpel qui en ont toute l'efficacité, sauf peut-être la dernière que je trouve un peu en dessous. Enfin bref, comme dirait un guide touristique bien connu, allez vous balader sur l'archipel du rêve, cela vaut le détour...
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
L’instant équatorial

«Loin au-dessus de la mer et des iles, voguant en plein ciel sur un air juste assez dense pour porter ces énormes avions mais trop ténu pour ses poumons, l’homme s’imaginait parfois capable de comprendre enfin comment fonctionnait le temps. »

La négation

«Son lui plus jeune s’étira du passé et le toucha brièvement, lui rappelant sa sensibilité d’autrefois, sa manière perdue d’être et de sentir.»

Les putains

«Alors que j’allais lui emboiter le pas, j’ai remarqué le numéro peint sur le bois : 14. Mon attention s’est éveillée, car depuis le début de ma maladie, les nombres étaient pour moi associés aux couleurs. Le 14 me paraissait lié synesthésiquement au bleu pale, mais celui qui s’étalait devant mes yeux était blanc, donc déconcertant. Le numéro m’a semblé passer du blanc au bleu avant de revenir au blanc : une autre crise s’annonçait.»

Vestige

«Elle en eut le souffle coupé. Panique et adoration l’empoignèrent. »

La cavité miraculeuse

«Il ne viendra pas ici a-t-elle répété. Pas à la tour. Aucun d’eux n’y vient jamais. Ils disent que le mal y est chez lui, ce qui signifie que nous, on y est en sécurité.»

La crémation

« Que se passe-t-il? demanda-t-il.
- Comment cela?
- Pourquoi me regardez-vous de cette manière?
- Vous savez ce qu’il y a par terre près de vous?
Il baissa aussitôt les yeux mais ne remarqua rien de particulier.
- Qu’est que vous racontez? »

The cremation

She twisted her head and smiled up at him. The angle of her face made her mouth look as if it had distorted into an unpleasant rictus. There was something so odd and perverse about her posture that a tremor of fear ran through him.
She held the expression.
He said, “What is it?”
“What is what?”
“Why are you looking at me like that?”
“Do you know what is on the ground beside you?”
Instantly he looked down, but could see nothing. “What are you talking about?”

Le regard

«A mi-hauteur du mur, avant les dernières marches consolidées, se trouvait la minuscule cellule secrète ménagée à l’intérieur de la muraille.»

La libération

«Lorsque j’ai quitté le musée après ma première vision adulte de l’œuvre de Acizzone, l’expérience m’avait brisé. Les scènes érotiques crées par les tableaux m’obsédaient toujours, mais j’étais comme aveuglé par la douleur, l’égarement et une terreur inexplicable.»
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« Elle expliquait que l’acte de lecture était aussi important et créatif que celui d’écriture. Par certains côtés, la réaction du lecteur constituait la seule mesure réellement fiable d’un livre. Ce que le lecteur faisait du texte en devenait la véritable estimation, quelles qu’eussent été les intentions de l’auteur. » (p.48)
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La permission que j'attendais depuis le début de l'année m'avait enfin été accordée. Laissant la guerre derrière moi, j'ai gagné un port de la côte sud tempérée. Cinquante jours de congé maladie... La poche de mon pantalon pesait sur ma fesse, gonflée par les gros billets de mes arrérages. ç'aurait dû être une période de convalescence après le long traitement douloureux subi à l'hôpital militaire, mais, malgré les semaines écoulées, je sortais trop tôt, l'esprit toujours affecté par les gaz synesthésiques ennemis. Mes perceptions demeuraient profondément perturbées.
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Il se mit à sautiller et à faire de petits pas maladroits sur le chemin en se frappant les mollets et les chevilles , tremblant d'horreur.le répugnant corps mou pressé contre lui,les épaisses pattes noires s'activant sur sa peau, les mandibules s'y plantant, les larves dégoûtantes se mêlant au flux de son sang ..;C'était si facile à imaginer.
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