Pour les babies-challenge, je devais lire uniquement
Bérénice, toutefois, j'adore Racine depuis que j'ai travaillé sur
Britannicus. En voyant que cette pièce se retrouvait en compagnie de deux autres, je me suis convaincue de lire les trois. C'est un beau livre, parce que ces trois pièces sont belles et agréables à la lecture.
Bérénice : une très belle pièce, je l'avais lu il y a des années pour compléter mon travail sur Racine en première et j'avais bien aimé cette pièce. En la relisant, je l'apprécie toujours autant, voire même plus. Elle est très touchante.
L'histoire nous présente dans un cadre intimiste un triangle amoureux, une passion romanesque et un débat politique. Titus est empereur de Rome, il aime
Bérénice, reine de Palestine. Cette dernière est également aimée d'Antiochus, roi de Comagène.
Bérénice aime Titus, mais celui-ci se voit déchirer entre passion et devoir, entre la femme qu'il aime et son empire. Comme il s'agit d'une tragédie, il ne faut pas s'attendre à un dénouement heureux, pourtant, Racine parvient quand même à nous faire espérer jusqu'au dernier moment une fin plus heureuse pour nos protagonistes. L'histoire, la manière dont elle fut menée par le dramaturge ainsi que ses thèmes forts m'ont emportée dans la pièce. Je l'ai lu en quelques heures tant je fus transportée dedans, c'est une belle histoire.
Le style est typique de Racine, une langue maîtrisée, un français irréprochable, de l'art dans les vers, du génie dans les émotions. Il parvient à composer un texte de très haute qualité, compréhensible et vibrant avec des mots à la fois soignés et simples. Évidemment, le style ne plaira pas à tout le monde, ici, Racine offre une pièce qui reprend ce qu'il sait faire de mieux.
Quant aux personnages, je me suis prise de passion pour ce trio important.
Bérénice est une femme forte et sensible, elle est perspicace et intelligente, voir sa longue chute et la voir se déchirer est bien cruel pour le lecteur. J'ai adoré suivre ses pensées. J'ai également de l'affection pour les deux hommes de huis clos, Antiochus fou amoureux de
Bérénice, tentant de se taire sur sa passion et Titus perdu entre son devoir et son amour. Ils sont aussi différents que proches et l'on ressent à travers leurs répliques le grand respect qu'ils ont pour
Bérénice.
Phèdre : j'ai sincèrement adoré cette histoire, c'est une très belle pièce, une de mes préférées de Racine. Je n'en gardais pas de souvenirs, ou alors des bribes, mais elle ne m'avait pas marquée à l'époque. Aujourd'hui, en la relisant, je l'ai redécouverte et elle est très intéressante.
Le style de Racine reste identique. Nous retrouvons les vers typiques du théâtre de l'époque, le français maîtrisé dans un mélange incroyable de fluidité et de force dans les sentiments. le texte est de bonne qualité, même si je préfère celui de
Bérénice, néanmoins, je retrouve avec plaisir une plume efficace et soignée. Je ne me force pas à comprendre la langue ou les tournures de phrases, tout m'est compréhensible de suite. Bien sûr, tout le monde n'apprécie pas, moi-même j'avais du mal avec cette forme de théâtre, mais Racine sait transporter les lecteurs.
Pas seulement avec le style, mais aussi grâce à l'histoire. Je l'ai préférée à
Bérénice, parce qu'il y a tellement de choses à dire. L'amour, la confiance. Ce sont les deux thèmes forts de ce récit. L'amour, parce que tous ces personnages en sont animés et en souffrent ; l'amour dans son côté positif aussi bien que négatif.
Phèdre est mariée à Thésée, ce dernier a eu un fils avec une amazone, Hippolyte.
Phèdre aime donc ce beau-fils qu'elle haïe, lui est amoureux d'une princesse athénienne. L'amour laisse donc sa place à la haine et la jalousie. D'où l'arrivée de la confiance. Thésée avait confiance en sa femme et son fils,
Phèdre avait confiance en sa suivante. Cette dernière la poussée à commettre d'horribles actes qui n'auront comme unique conséquence : la mort. C'est une histoire forte, riche en émotions, c'est une pure tragédie, donc n'attendez pas de happy end. C'est d'ailleurs très violent, j'avais au moins espéré une fin plus heureuse, mais je l'accepte telle quelle, elle n'en est que plus poignante.
Les personnages sont vraiment humains.
Bérénice est une femme amoureuse qui aura mal placé sa confiance, elle aura préféré la facilité à la vérité, même si l'on peut comprendre que la vérité aurait été cruelle pour son époux. Thésée apparaît à la fin, je ne l'ai pas aimé, je n'appréciais pas sa facilité de jugement. Il en fut bien puni. Aricie est une jeune femme que j'aurais aimé voir plus souvent, parce qu'elle est juste et sympathique. Hippolyte est un jeune homme fort, j'ai adoré son personnage dès le début, il est franc, droit, et je suis bien triste pour lui. le protagoniste que j'ai le plus détesté c'est certainement Oenone. Elle sait qu'elle a la confiance de sa maîtresse,
Phèdre. J'ai beau savoir qu'elle lui a insufflé toutes ces idées pour la sauver, pour l'aider, malheureusement, ces manigances sont terribles. Et le pire, c'est qu'elle ne s'arrêtait pas. Elle représente la domestique prête à tout pour venir en aide, quitte à s'engouffre dans la mauvaise pente.
Athalie : la pièce que j'ai le moins appréciée. Elle reste sympathique, mais son histoire m'a moins emballée et ses personnages m'ont laissée indifférente.
L'intrigue nous change des deux autres histoires, nous sommes à Jérusalem. C'est une histoire plus religieuse, dans ce sens, Racine respecte le vocabulaire et la piété requise à ce genre de récit. L'ambiance est plus sombre,
Athalie n'est pas une reine appréciée, elle semble cruelle et sans scrupules. S'oppose à elle des protagonistes liés au temple, pieux et voulant faire d'un petit garçon le roi juste qu'ils attendent. J'ai bien aimé l'histoire, mais sans plus, il me manque un petit truc, ce truc qui m'aura plût dans les deux autres pièces. Peut-être est-ce parce que le sujet ne m'a pas touchée. Pourtant l'intrigue autour d'
Athalie est intéressante, c'est même le personnage que j'ai trouvé le plus passionnant en dépit de sa personnalité abominable.
La plume de Racine se reconnaît, mais il y a quelques changements. Une plus grande souplesse dans les vers, qui ne m'a pas déplût, mais j'ai énormément adoré la présence des Choeurs. Ces derniers sont pensés comme des chansons, et ils devaient certainement être en musique lors des représentations. le style reste soigné, le français demeure impeccable, les émotions répondent présentes, c'est fluide et cela se laisse lire ; même si de nombreuses références bibliques sont là et pourront interpeller ceux et celles qui n'y sont pas familiers.
Les personnages sont bien. Je les ai trouvés moins captivants que ceux des deux pièces précédentes. Seule
Athalie sort du lot, en raison de sa personnalité trouble, cruelle, manipulatrice et perfide. Les autres sont sympathiques, mais je les aie vu rester en retrait, affable. Joad, le grand-prêtre est humain et l'on s'attache un peu à lui, malheureusement, il n'est pas très combatif, il attend. Seule Josabet semble vouloir bousculer les événements, tout en restant humble et digne, elle est la femme de Joad et je l'ai vraiment appréciée. Un autre personnage qui parvient à sortir son épingle du jeu, c'est Abner, ses interventions sont toujours intéressantes et son protagoniste, quoique peu vu, me paraît sympathique.
En conclusion, des trois pièces, les deux premières ont ma préférence et il me serait bien difficile d'en choisir une. La plume de Racine est belle, soignée et juste, les émotions sont très bien retranscrites à travers ses vers. Les pièces se lisent en quelques heures, on en apprécie les histoires où se mêlent complots, intrigues, amours, trahisons, famille et beaucoup de thèmes forts et passionnants. J'ai pris plaisir à relire ces pièces, elles sont très belles, même
Athalie (où j'ai été moins transportée).
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