Premier tome d'une trilogie, "
La Terre des mensonges" a pour point de départ la mort d'Anna Neshov, matriarche d'une famille plus que désunie et au final pas très heureuse, les trois fils qui la composent n'entretenant plus guère de rapports entre eux, sans que l'on sache au début pourquoi.
Tor, le fils aîné, est éleveur de porcs à la ferme familiale, où il vivait surtout avec sa mère et le moins possible avec son père. Méprisant ce dernier, qui est il faut le reconnaître d'une transparence remarquable (et aux bornes de la simplicité d'esprit parfois), mais ayant une admiration sans bornes pour sa mère, une force de la nature qui s'occupait de l'intendance de la maison sans jamais s'arrêter, il ne verra pas qu'elle décline depuis plusieurs jours, la menant à l'hôpital beaucoup trop tard…
Margido, le second fils, dirige quant à lui une entreprise de pompes funèbres. Célibataire endurci même si cette vie solitaire semble lui peser, sans qu'il arrive à s'en défaire, il mène une vie terne, sans fantaisie aucune.
Erlend enfin, le fils cadet, a coupé les ponts avec sa famille en quittant la ferme depuis vingt ans, pour s'installer à Copenhague. Décorateur de vitrines, en couple depuis une dizaine d'années avec un homme, il semble le plus épanoui des trois, comme il aime à se le répéter au début du livre, même si au final il traîne son lot de névroses.
Le seul personnage un peu solaire est celui de Torunn, la fille de Tor que celui-ci n'a pas élevée. Même si elle a renoué avec lui il y a quelques années, ils ne se connaissent pas très bien car ils ne se sont vus qu'une seule fois et ce, même s'ils échangent quelques nouvelles plusieurs fois par an au téléphone. Avertie par son père, elle décide de venir voir cette grand-mère qu'elle n'a jamais connue, poussée par la curiosité d'en savoir un peu plus sur cette famille dont elle ne porte pas le nom.
C'est d'ailleurs grâce à son rôle fédérateur que les trois frères vont peut-être aller sur le chemin du rassemblement et de la communication (affaire à suivre dans le second tome ?) : à la suite du décès de la mère, Torunn décide de s'installer à la ferme jusqu'à l'enterrement, entraînant dans son sillage Erlend, avec lequel elle a tissé des liens très rapidement. C'est à l'occasion de la célébration de Noël qu'un secret familial sera dévoilé, bouleversant un peu plus les membres de cette famille…
En quelques mots,
Anne B. Ragde réussit à implanter un décor, une atmosphère, et à insuffler vie à une galerie de personnages qui ne laissent pas indifférent, qu'ils soient à priori assez antipathiques (Anna Neshov), ou attachants (Erlend, pas si superficiel qu'il veut le laisser croire, ou Krumme, son compagnon, l'homme idéal).
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La Terre des mensonges" est donc un ouvrage dans lequel on entre immédiatement avec délices (comme d'habitude avec les romans d'Anne B.
Ragde), et dont la fin arrive toujours trop vite. Mais attention, cet ouvrage n'est pas seulement qu'un divertissement, il pose également des questions sur la filiation et les liens familiaux plutôt judicieuses.