Merci à Babelio et aux éditions Omnibus grâce à qui, et grâce à Masse Critique, j'ai pu recevoir cette édition de la trilogie de romans que
Kim Stanley Robinson a consacré à Mars...ou plutôt à sa conquête et à sa terraformation par l'humanité.
L'inconvénient est que l'humanité y a importé, en même temps que sa technologie et sa fantastique capacité d'apprentissage et d'adaptation, ses défauts, sa violence, ses dissensions et tous ses vilains petits travers. Ce n'est pas tellement contre les difficultés techniques que les personnages se battent ici: ce sont les factions qui s'opposent, les parties politiques qui se déchirent, les conceptions du monde qui s'entredéchirent.
Alors, la Trilogie de Mars, passionnant ou pas? Et bien, en ce qui me concerne, oui, malgré quelques défauts, j'ai énormément apprécié cette lecture, mais je suis prête à reconnaître que cela ne conviendra pas à tout le monde.
J'avais déjà lu
Mars la rouge, dont j'avais pensé ceci:
Étrangement, ce n'est pas du tout ce à quoi je m'attendais ce qui ne m'a pas empêché d'aimer, quoique moins que prévu.
Mars la Rouge m'a rappelé quelque chose qui m'avait frappé dans le très excellent, quoique moins connu et c'est dommage,
Station Solaire d'
Andreas Eschbach, c'est que quelque soit le progrès technique qu'on nous dépeint dans des univers de science-fiction se voulant réalistes, l'humain finit par y être le point d'achoppement, l'humain et ses débats, ses fanatismes et ses défauts, mais aussi l'humain et sa volonté d'aller toujours plus loin.
Roman couvrant plusieurs décennies,
Mars la Rouge commence par le départ de la terre de l'Ares, vaisseau contenant les cent premiers colons. Pas le premier vol habité vers Mars, mais le premier qui n'est pas censé comporter un retour. Seulement, sur cent personnes, et plusieurs nationalités, il y a évidemment moult courants sur ce qui doit être fait une fois sur place. Simplement étudier la planète? La terraformer pour créer une planète plus propice à la survie humaine hors d'habitats souterrains, alors que la Terre est presque exsangue de pollution et de surpopulation? Et bientôt, d'autres colons arrivent, trop disent certains...
Il y a là dedans bien plus de sociologie et de politique que je m'y attendais pour être honnête, j'ai presque envie de dire trop car j'ai entamé cette lecture avec l'envie d'un peu SF modèle hard science.
Je vais être franche: j'ai trouvé que cela souffrait de longueurs et le style, volontairement technique, est parfois plutôt aride. Puisqu'on parle de ce qui m'a fait tiquer, citons aussi Maya Toitovna, un personnage féminin que j'ai trouvé terriblement cliché. Il n'en reste pas moins que voir peu à peu se développer les thèmes du roman est complètement fascinant, que si ça reste lourdement américano-centré comme souvent la SF américaine, cela l'est bien moins que souvent, avec par exemple le développement des colonies suisses et arabes. C'est réellement de la SF pour amateurs du genre: si le genre vous rebute dès qu'il se fait technique, ce n'est pas par celui là qu'il faut commencer!
C'est une belle fresque malgré ses défauts, un livre qui moi m'a fait rêver.
Maintenant que j'ai terminé les deux romans suivants, je suis plus appréciative. Peut-être que j'avais moins d'idées préconçues, ayant déjà pu me confronter au style de
Mars la rouge ?
Après la très violente fin du roman précédent,
Mars la verte commence plusieurs années après et nous fait suivre certains survivants des Cent Premiers mais aussi une partie de leurs enfants et petits-enfants. C'est difficile d'en offrir un résumé sans spoiler le précédent... disons que Mars développe deux faces, l'officiel et l'underground, et que le roman se partage entre progrès de la terraformation et merveilles techniques et mouvements sociaux et politiques tandis que de nombreux groupes se forment, se délitent et se reforment, personne d'accord avec personne: les indigènes, les métanationales qui veulent garder la main, l'Autorité transitoire, et surtout, ce que je juge le plus intéressant, les Verts et les Rouges, qui défendent, parfois dans la violence, souvent même dans la violence, deux visions radicalement différentes de l'avenir de Mars, très bien décrits pas leurs appellations respectives. C'est parfois technique, parfois étrangement religieux, voire bizarre, quand Hiroko se prend pour la mère nourricière de la planète, cela souffre comme le premier tome de quelques longueurs, liées entre autre au soin du détail de l'auteur, mais c'est impressionnant et prenant.Et cela n'oublie pas la terre, qui s'enfonce encore plus, si, si, c'est possible, dans le chaos; suite à une catastrophe dont je ne révélerai pas la teneur vu que je ne m'y attendais pas, et que je veux vous laisser la primeur de la surprise!
Le dernier tome enfin se révèle aussi riche et complexe, avec les mêmes défauts et qualités, des longueurs à supporter mais aussi l'immensité de ce qu'il décrit, encore plus grandiose dans son échelle. On y assiste pour la première fois à un Martien posant le pied sur Mars, mais aussi à d'autres conquêtes que la planète rouge.
C'est aussi l'occasion d'explorer les conséquences du traitement de longévité qui est un point essentiel du scénario, puisqu'il permet à des personnages de survivre du tome 1 au 3 ! J'avoue qu'au début, ça m'avait déplu, je trouvais cela un peu facile, mais je dois reconnaître que la façon dont ces conséquences sont abordées m'a fait changer d'avis!
Cette trilogie s'est révélée fort intéressante, complexe et surtout très riche. On pardonne bien volontiers ses quelques défauts quand on se laisse entraîner, et on effectue alors un des plus extraordinaires voyages de la SF moderne, très nettement dans la catégorie Hard SF.